Qui mieux qu’Hervé Berland, ancien directeur général de Baron Philippe de Rothschild, 35 ans de bons et loyaux services auprès du Baron et de Philippine, pouvait dresser le portrait de cette Grande Dame du Médoc dont les obsèques ont été célébrées lundi à Pauillac. Hervé Berland nous raconte ses souvenirs avec Philippine de Rothschild et le leg de Madame la Baronne à ses héritiers, employés et au monde du vin. Il est l’invité de Parole d’Expert dans Côté Châteaux.
Jean-Pierre Stahl: « Quel souvenir garderez vous de Philippine de Rothschild ? »
Hervé Berland: « C’est une personnalité très complète, qui avait beaucoup de facettes. C’est quelqu’un de très attachant, quelqu’un pour qui j’ai eu énormément d’affection, d’amitié ! »
J’ai travaillé très longtemps puisque je suis rentré dans la société de son père à l’époque en 1977. J’ai accompagné et fait toute ma carrière dans cette société jusqu’en 2012 où j’ai quitté la société en prenant ma retraite. j’ai bien connu son père au départ, le Baron Philippe, et puis l’arrivée de Philippine de Rothschild en 1988, qui était peu préparée à prendre la succession de ce monstre sacré qu’était son père.
Elle a su devenir quelqu’un de tout-à-fait exceptionnel. Se faire un nom, se faire un prénom, dans une famille où c’était compliqué car rien ne l’avait préparé à prendre cette succession difficile. Elle a fait appel à tous les gens qui travailaient dans cette société pour l’aider et faire en sorte que ce soit un succès.
Le succès est là, l’entreprise n’a fait que grandir, croître en importance; aujourd’hui c’est un empire commercial incontestable. Philippine a su monter au plus haut les couleurs de Mouton qui rayonne dans le monde entier. » Hervé Berland, ancien directeur général de Baron Philippe SA.
JPS: « Que pèse aujourd’hui son empire commercial ? »
HB: « Cet empire est représenté par les propriétés au premier rang desquelles on trouve château Mouton Rothschild, 1er grand cru, mais également d’autres crus à Pauillac château d’Armailhaic, Clerc Milon; également des propriétés à l’étranger Opus One en Californie, Almaviva au Chili, domaine de Baron’Arques en Languedoc, bref une palette de propriété très diverses, de forte notoriété aujourd’hui, largement distribuées dans le monde et qui connaissent un immense succès. »
JPS: « Quels traits de carctère vous garderez d’elle ? »
HB: « Ce qui me vient a l’idée, c’est l’énergie que Philippine de Rothschild avait, la volonté d’avancer, de réussir, et l’énergie qu’elle mettait dans tout ce qu’elle entreprenait, ça c’était vraiment extraordinaire, complété par un sens de la perfection qu’elle tenait aussi de son père car son père était un perfectionniste. »
Philippine de Rotschild était une perfectionniste, elle était très exigente sur tous les moindres détails, mais finalement je crois que c’est elle qui avait raison, car c’est une bonne école. » Hervé Berland
« C’est une bonne école que de se remettre en cause, et elle savait se remettre en cause… Alors, elle n’était pas la plus facile des personnes, parce qu’elle avait beaucoup de caractère. Mais finalement, elle a fait énormément de choses, de bien, elle pouvait être capable de beaucoup de générosité: localement, elle était toujours très ouverte à toutes les sollicitations des associations locales, des associations sportives, elle était un peu la marraine d’un tas d’associations. C’était un trait de caractère très sympathique, ce côté ouvert sur tout ce qui se passait. Bien sûr elle habitait Paris, mais son monde à elle c’était celui de Mouton, celui de Pauillac ! »
JPS: « Qu’est-ce qu’elle laisse comme trace pour ses héritiers ? »
HB: « Elle laisse une société en très bon état. Un 1er cru classé, château Mouton Rothschild qui est au zénith. Elle laisse une empreinte de sa personnalité dans cette entreprise, dans ce château très forte. Elle y a fait récemment des travaux de rénovation très importants (photo du nouveau chai à Mouton). Des travaux majeurs exceptionnellement réussis. C’est magnifique ! Elle a perpétué en développant encore plus ce qu’avait initié son père au niveau du travail entre l’art et le vin. Cette idée de base 1945, elle l’a monté à son paroxysme. aujourd’hui, c’est une oeuvre mondiale. Cette association entre l’art et le vin, elle a su la faire de main de maître ! »
Hervé Berland siègeait également au directoire de Baron Philippe de Rothschild. Il est aujourd’hui gérant de château Montrose, cru classé de Saint-Estèphe, propriété de Martin Bouygues.
Regardez l’interview réalisée par Jean-Pierre Stahl et Didier Bonnet