Avec ce millésime 2014, la France devrait logiquement repasser en tête devant l’Italie. Avec 47 millions d’hectolitres attendus, elle profiterait ainsi de la faible production italienne. La roue tourne. Forza qui ? Forza Francia !
Selon les Echos, la France devrait regagner son titre de premier producteur mondial de vin en 2014: la production française devrait atteindre 47 millions d’hectolitres contre 41 millions d’hectolitres cette annéeen Italie, la pire récolte depuis 64 ans. L’Italie était passée en tête depuis 2010 en volume et non en valeur (7,8 milliards d’euros pour la France contre 4,7 pour l’Italie).
La production italienne avait dépassé la France en 2010, avant d’être à son tour doublée par l’Espagne en 2012, puis d’être à nouveau première en 2013. Les trois premiers producteurs européen produisent ensemble 45% des ventes de vin dans le monde.
Ce sont les fortes précipitations ont touché le pays cet été qui expliquent cette forte baisse, la plus importante depuis 1950. Rien qu’à elle seule, la Sicile devrait perdre près de 30% de sa production, et le Nord de la botte 10 à 15% alors que l’Ombrie et la Toscane enregistrerait une progressionde 5 à 10 %. La France, elle, a plutôt bénéficié d’une météo clémente, après un été pas terrible mais pas catastrophique, septembre est jusqu’ici fantastique avec cet été indien.
Chaque année, ce 2e grand cru classé de Saint-Estèphe entend parler « espagnol » dans ses rangs de vignes. Plus qu’une tradition, une fidélité et une loyauté réciproque.
Charo Vera Barroso a 30 ans. Depuis l’âge de 16 ans, elle vient au château Montrose (95 ha dont 89 en production) pour ces vendanges qu’elle ne louperait pour rien au monde. Cette année encore, elle est venue avec son père, Antonio Vera Sanchez c’est lui le chef de ce groupe d’Espagnols. Lui, est aussi venu la première fois il y a 42 ans…
Une troupe de 62 vendangeurs: 48 coupeurs, 12 porteurs et 2 chefs encadrants, arrivés depuis dimanche. Tous viennent du petit village de Pruna, au sud de l’Espagne, certains depuis plus de 40 ans. C’était ce lundi matin leurs premiers coups de sécateurs pour ramasser le millésime 2014.
Outre leur endurance physique (ils travaillent 9 heures par jour, 6 jour sur 7), ils supportent relativement bien la chaleur de cet été indien venant du sud de l’Espagne, mais c’est surtout pour leur savoir-faire manuel d’une grande précision qu’ils sont appréciés à la propriété.
« Ce sont des cueilleurs professionnels qui viennent pour les vendanges à Montrose. Avant de venir, ils ont fait la cueillette de fraises ou d’haricots verts en Espagne ou au Portugal, et après les vendanges à Montrose ils retournent au Portugal pour la cueillette d’olives pour faire de l’huile d’olives. »
Ils connaissent les parcelles par coeur. C’est très facile d’avoir un pilotage fin avec eux parce qu’ils ont un savoir-faire, une efficacité et une mobilité, je ne connais pas beaucoup d’égale (minutie) dans les propriétés à Bordeaux. » Hervé Berland, gérant de château Montrose.
Et d’ajouter: « c’est absolument du cousu-main et cela correspond au cousu-main que l’on fait à la propriété à toutes les étapes de la vendange.On va des fois découper les parcelles en deux ou en trois, pour ne ramasser que les parties mûres. »
Car ces vendanges en rouge sont les premières à Bordeaux. Ce sont les vendanges de jeunes plants de merlot, les complants, ces jeunes pieds qui ont remplacé ici ou là les pieds fatigués qu’il a fallu changer au fil des années. (durée de vie moyenne 50 ans pour un bon rendement). Et ces ceps, compris entre 3 et 5 ans, ont leurs grappes qui mûrissent plus rapidement que les pieds plus anciens.
Ces vendangeurs sont là pour 3 à 4 semaines, logés à la propriété et nourris aussi avec petit-déjeuners, repas et dîners copieux, élaborés par un traiteur durant ces 4 semaines. C’est une ambiance très bon enfant, hormis le fait que nos amis espagnols parlent un tantinet fort, il n’y a pas de chefs de rangs ou de porteurs qui hurlent paniers ou donnent de la voix pour les directives car ils se rangent quasiment de la même manière en bout de chaque rang, avancent à la même vitesse, brefs sont habitués au travail d’équipe dans la vigne et autre récolte.
José, 54 ans, vient ici depuis 12 ans, il est « content et trouve le travail intéressant et effectué en harmonie »; confirmation deux rangs plus loin de Charo « on se retrouve tous, l’ambiance est sympathique ».
D’autant plus sympa, qu’il y a des moments de détente le soir comme ces parties de football, mais aussi, et c’est la tradition, des parties sévèrement disputées de pétanque: un concours est même organisé à la fin de vendanges entre les équipes espagnoles et françaises du château avec une coupe à la clé. Ces vendangeurs ne rechignent pas à la tâche car non seulement ils sont humainement traités mais aussi leur salaire est assez intéressant: ils touchent ainsi 2200 euros, impôts prélevés, nets en fin de séjour. De quoi se dire, je reviendrai l’année prochaine…
Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl et Jean-Michel Litvine