Stéphane Toutoundji est-il un sorcier, un faiseur de miracle ? Il pourrait vu son talent mais pas tout-à-fait. Un faiseur de châteaux oui. Ce désormais célébre oenologue de Libourne envisage le 2013 avec confiance même s’il est « très inégal, un peu viril avec beaucoup d’acidité ». Quant au 2012 qui sera en bouteilles au printemps, c’est au final « une belle surprise ! »
Originaire de Metz en Lorraine, Stéphane Toutoundji, 47 ans, est un oenologue incontournable de la place de Bordeaux. Diplômé de l’Institut Oenologique de Bordeaux, il a travaillé en Australie et a participé à la fin des années 90 et au début des années 2000 à l’essor des vins autraliens.
« J’ai vu pourquoi l’Australie a pris à la France des parts de marchés au Royaume-Uni et aux Etats-Unis avec des stratégies de marques et du marketing ». Mais pas seulement, il reste modeste car la patte de l’oenologue n’y est sans doute pas étrangère…
Fin 2012, il a créé Oenoteam associé à deux autres oenologues, Thomas Duclos et Julien Belle. Ils comptent près de 400 clients (pour des analyses d’échantillons et les assemblages).
Mais ils conseillent tout au long de l’année 150 propriétés: « on les accompagne non seulement durant les vendanges, on leur donne un appui technique bi-hebdomadaire, mais on a aussi un oeil sur l’aspect viticole: on a une stratégie transversale ! On va voir avec elles comment elles peuvent adapter leur vignoble en fonction des marchés en face… »
Véritable empêcheur de tourner en rond, Stéphane Toutoundji a créé avec ses amis vignerons et son « réseau » « In a bottle » en juin 2013. 16 propriétés, représentant 21 châteaux, se sont regroupées pour une avoir une synergie et une visibilité notamment sur internet: « c’est une mise en lumière de ces châteaux, un club de vignerons. »
Depuis la mi-janvier, s’est ouverte la période d’assemblage des lots de 2012, qui auront été élevés entre 12 et 15 mois en fûts de chêne.
Ce 2012, c’est une belle surprise. Il y a du fruit, des tanins, il est soyeux, surprenant, très délicieux, pour la clientèle c’est vraiment une belle surprise après l’élevage en barriques. Il y a un bon équilibre entre le fruit et le bois. Le boisé est bien fondu, c’est plaisant, agréable, l’élevage a fait du bien !
Et pourtant, ce millésime 2012 avait été décrié, critiqué par une partie de la presse spécialisée lors des primeurs 2013.
Quant au 2013 ? « C’est très inégal« (cf la citation d’Olivier Bernard, Président de l’Union des Grands Crus, lire « Les grands vins c’est des grands fruits ! Tout le reste c’est du blabla…« ). « A Bordeaux, on a eu 2009 et 2010 extraordinaires, et puis d’autres millésimes pour lesquels la clientèle a pu s’y retrouver. Il va falloir réduire la part de grands vins, faire davantage de seconds vins. Il y a de la couleur, les tanins sont là. Il y a pas mal d’acidité, ça fait des vins un peu virils. »
Dans ma clientèle, je n’ai pas eu de catastrophe. C’est un millésime où le fruit va ressortir. C’est un millésime de vigneron et de travail en cave. C’est en tout cas hétérogène. Ce n’est pas un millésime à proscrire et à jeter au feu comme certains l’ont fait.
Et de savoir si l’oenologue peut faire de miracles ? « Non, ça ne sert à rien, à partir du moment où dans la vigne ça ne s’est pas bien passé. On peut toujours essayer de rattraper… »
« Dans les années 90, l’oenologue, c’était le médecin du vin, aujourd’hui avec tout le travail en amont, on n’a plus besoin de ce conseil curatif. »
Et de conclure: « 2013, ce n’est pas un grand millésime, c’est certain. On a eu 1992,1993, 2002 un peu comme celà. Il y aura malgré tout une clientèle pour le 2013. Ce n’est pas la catastrophe annoncée par certains ! » (cf le « Bordeaux bashing »)
Il est vrai que la place de Bordeaux a quelque peu tremblé en apprenant que château Malescasse en cru Bourgeois ne sortira pas de 2013 et le vendrait en vrac au négoce. Lire article du Figaro.fr