Un joli dossier thématique que nous livre Martin Lavielle sur le graphisme sur les étiquettes et les bouteilles de vin : « elle est petite, collée à sa mère, observée et scrutée avant sa prise en main, tachée par les gouttes, fine et fragile : l’étiquette de vin. »
Il n’est jamais évident de bien choisir son vin parmi des milliers de références ; le visuel de l’étiquette, malgré une bonne connaissance, reste notre premier repère : elle doit nous attirer tout en nous rassurant. Pour moi elle est aussi le lien entre le monde du vin et celui des imprimeurs et graphistes. Le travail des vignerons rejoint l’attention portée à cet infime encart de papier qui recevra les soins du graphiste et de l’imprimeur. Le graphiste se devra de retranscrire la saveur du vin et son histoire, trouver les bons systèmes d’impression ou de gravure pour mieux suggérer la singularité du vin. Malgré sa petite taille, l’étiquette de vin n’a pas souffert de créativité mais plus de traditionalisme. Les grandes régions viticoles telles que la Bourgogne ou le Bordelais conservent cet état d’esprit et préservent l’image prestigieuse de leur terroir. Pas de chauvinisme ici, la créativité est plus à chercher dans les autres régions de france (particulièrement en Languedoc-Rousillon) mais surtout dans les pays du nouveau monde (l’Australie, l’Argentine, les États-Unis en Californie, l’Afrique du Sud) qui tendent à montrer une autre facette du vin. L’étiquette comporte beaucoup de contraintes, de réglementations et il n’est pas facile de s’aventurer hors des sentiers traditionnels. Elle véhicule une image qui est apprécié partout dans le monde (Hong-Kong et la Chine sont devenus les premiers importateurs des Bordeaux en 2011 [via], et possèdent déjà une trentaine de châteaux dans le Bordelais [via]), il faut donc rassurer le client afin qu’il achète une bouteille avec une étiquette bien française ! C’est peut-être dans cette nouvelle conjoncture d’un marché mondialisé et très concurrentiel que les propriétés réfléchiront à donner une autre dynamique face aux productions étrangères. L’Australie, l’Espagne et les Etats-Unis se détachent réellement des autres pays par une très grande créativité et de très grands studios.
en France
Dans une démarche avant-gardiste pour l’époque, le Château Mouton Rothschild (Pauillac), dès 1924, fait appel à différents artistes, illustrateurs ou affichistes pour habiller leurs étiquettes (Braque, Dali, Kandinsky, Warhol, Haring,…. ici pour la suite). Les artistes étaient payés en bouteilles ! Personnellement je trouve ça frustrant car ce n’est qu’un simple encart sur l’étiquette contrairement à un habillage de la bouteille comme celle de Jean Carlu (affichiste), par exemple. François des Ligneris (œnologue-vigneron, aubergiste et graphiste !) a su donner de la fraîcheur au milieu trop traditionnel du Bordelais avec ses étiquettes (avec l’aide de Pistolet Bleu) et ses différents visuels comme pour son restaurant « l’envers du décor » à St-Émilion. Dernièrement, il a collaboré avec l’illustrateur Michael Halbert (USA), en créant le visuel de l’ours et le toréador (déjà utilisé pour le vin Oso Loco, Marquès de Caceres- Rioja !). Beaucoup de choses à dire le concernant mais des « fans » s’en sont occupés bien avant moi ici ou là. Puis, avec beaucoup d’humour et d’audace, Benoît Cannaferina pour le vin La Levrette [ou là] (femelle du lévrier, n’en doutons pas !). Le Château a même fait une vidéo à voir ici. La réponse est efficace et drôle, surtout qu’on ne voit pas la subtilité du logo aux premiers abords. Bravo. ; On peut aussi observer la fraîcheur graphique de l’illustrateur Perceval Barrier pour les vins sur le fruit par exemple.
Par Martin Lavielle, mai 2013.
Et pour en savoir plus : http://sensgraphiques.wordpress.com/2013/05/04/le-graphisme-et-le-vin/