08 Mai

L’histoire des bouchers du Château de Limoges présentée à la chapelle Saint-Aurélien à Limoges

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Laurent Bourdelas publie l’Histoire des bouchers du Château de Limoges chez La Geste – Signature exceptionnelle à la chapelle Saint-Aurélien, rue de la Boucherie à Limoges, samedi 11 juin de 15 à 18 h – Les lecteurs du blog « Ici c’est Limoges » sont les bienvenus!

 

Voilà plus de trente ans, depuis Jean Hévras, qu’un ouvrage d’importance n’était pas paru à propos des bouchers de Limoges. L’écrivain et historien Laurent Bourdelas, médiéviste de formation, spécialiste de l’histoire de Limoges mais également de la culture et de la littérature des 19e et 20e siècles, a décidé d’y travailler de la manière la plus complète possible. Il a été aidé en cela par la Confrérie Saint-Aurélien, qui a mis à sa disposition des archives inédites – c’est d’ailleurs le 1er syndic, Pierre Lamige, qui signe la préface. Un livre bienvenue après l’incendie qui a durement atteint la rue de la Boucherie et montré combien les Limougeauds y étaient attachés et plus largement tous ceux qui chaque année assistent à la Frairie des Petits-Ventres.

L’auteur raconte l’histoire des bouchers depuis l’Antiquité jusqu’à leur départ de la rue. C’est à la fois l’histoire d’une corporation artisanale, celle d’une confrérie religieuse, une histoire sociologique, architecturale et politique, mais aussi une histoire littéraire et artistique. En effet, l’historien publie une anthologie de textes d’écrivains régionaux et nationaux s’étant inspirés des lieux, de même qu’il évoque les artistes (peintres et photographes) ayant fait de même. De nombreux encadrés ponctuent l’ouvrage, comme ceux consacrés aux surnoms des bouchers, à leur accueil des chefs d’Etat, à leurs tombes au cimetière de Louyat, etc. L’ensemble est accompagné par une iconographie exceptionnelle.

 

Avant-Propos

Du côté de ma famille maternelle, un grand-oncle boucher à Gennevilliers, dans les Hauts-de-Seine. Il nous reste quelques photographies en noir et blanc, des années 1930 ; belle boutique, homme à moustache décidé, avec son tablier taché de sang. Mythologie de grand saigneur. Et puis mes grands-parents, Rose et Marcel, arrivés du Nord à Limoges au moment de l’Exode de 1940, cavistes place des Bancs, à deux pas de la rue de la Boucherie où la viande était encore pendue aux crochets de fer. Ma mère Françoise, toute petite alors, s’en souvient encore. Plus tard, elle m’amena à la Frairie des Petits Ventres renaissante.

Du côté paternel, cette petite feuille quadrillée, calligraphiée à l’encre par mon père, enfant, rapportant une tradition colportée par sa grand-mère Jeanne : « Histoire de Limoges – La porte de l’église Saint Aurélien fut sculptée par Monsieur Delage, un des aïeux de Jean Bourdelas vers le XVIIIe siècle. » Malheureusement, nous n’en savons pas plus – le mystère n’en est que plus fécond. Enfin, en 1984, Jean Hévras, auteur du beau-livre Les bouchers de Limoges (Lucien Souny), m’écrivait cette dédicace : « Avec tous les bons souvenirs de jeunesse passés avec feu mon ami Bourdelas dans le vieux quartier du Pont Saint-Martial, « lou poun San Marceau » comme avait l’habitude de le dire les Ponticauds, Jean Hévras a l’espoir que son petit-fils Laurent Bourdelas apprendra à mieux connaître une communauté de six familles de bouchers qui ont, pendant des siècles, animé et senti avec foi et ardeur notre vieille cité limougeaude, si chère à tous ses habitants… » Je l’ai entendu puisque, à l’invitation de Pierre Lamige, son 1er syndic, j’ai rejoint la Confrérie Saint-Aurélien et me suis intéressé à mon tour à l’histoire des bouchers et de leur rue.

Depuis plusieurs années, les historiens travaillent sur ce qui a constitué l’identité du Limousin  et j’ai moi-même apporté ma pierre à l’édifice. Il me semble que l’histoire des bouchers de Limoges, de leur rue et de leur chapelle, a très largement contribué à l’identité de la ville, du Moyen Âge à nos jours. Comme j’essaie de le montrer en utilisant et en citant diverses sources (dont de nombreuses oubliées ou inédites), elle est à la croisée de la sociologie, de l’artisanat et du corporatisme, de la politique, de la religion et du goût des Limousins pour les ostensions, de l’architecture, de la gastronomie ; elle est au cœur du « sentiment d’appartenance » – celui des bouchers et de leurs familles d’abord, mais aussi des Limougeauds qui prennent plaisir à participer rituellement par milliers à la Frairie des Petits Ventres et se sont sentis affligés lorsqu’un incendie d’ampleur détruisit des immeubles de la rue. Celle-ci est aussi devenue, depuis les années 1970, l’une des « vitrines » touristiques de Limoges, l’un des endroits par lesquels elle se donne à voir. Le mythe a d’ailleurs nourri une abondante littérature spécifique dont je donne ici un aperçu fourni. De même qu’il a inspiré peintres et photographes. Face à l’abandon du quartier par les commerces de boucherie, au recul de la pratique religieuse, face aux revendications des « vegans », dont certains ont même voulu débaptiser la rue, face au sentiment diffus de se perdre dans une région trop grande et parfois même dans la mondialisation et la course en avant technologique, la construction et les efforts pour faire perdurer l’identité de ce quartier et donc de la ville, constituent un recours à l’échelle humaine.

 

En conclusion

J’aime assez cette phrase de Paul Claudel : « Une rue, c’est ce qui va quelque part. Ça marche de chaque côté de nous comme une procession. » Ensemble, avec cet ouvrage, nous avons processionné rue de la Boucherie, avec le souvenir de ceux qui l’ont habitée depuis des siècles, de ceux qui y ont travaillé, vécu, prié. Le souvenir, aussi, des animaux qu’on y a abattu pour nourrir les hommes, des chiens qui la gardaient, près des reliques d’un saint vénéré. Nous avons marché dans cette rue en compagnie d’historiens et d’écrivains qui en ont fait plus qu’une simple rue. Aujourd’hui, les anciennes familles, les anciens bouchers sont ailleurs, mais leur mémoire est demeurée vive, réveillée chaque année à l’automne par une fête qui fait vibrer les pierres et les cœurs. L’âme de la rue, on la perçoit dès que l’on pénètre dans la belle chapelle que la confrérie séculaire fait toujours resplendir. On la devine aussi, lors des ostensions, lorsque les cocardes, les bannières, les châsses sont sorties avec fierté.

La rue est restée la même dans les mémoires – c’est pourquoi elle attire autant de touristes – mais elle est aussi devenue autre au fil du temps, avec de nouvelles boutiques, des restaurants, un bar qui attire du monde sur sa terrasse face à la pietà… La rue de la Boucherie est bien vivante, c’est l’une des artères primordiales, où se confondent passé et présent pour irriguer la ville.

 

Table des matières

Préface de Pierre Lamige, 1er syndic de la Confrérie Saint-Aurélien

Avant-Propos

La boucherie au temps des Gaulois et des Romains

La boucherie gauloise

La boucherie dans la Gaule et le Limousin romains

Etymologie

Moyen Âge

Les bouchers de la Cité

Les bouchers de la ville du Château

Le consulat et la corporation des bouchers

La naissance de la confrérie Saint-Aurélien

La chapelle Saint-Aurélien, du Moyen Âge à nos jours

La chapelle Saint-Aurélien vue par Albert de Laborderie en 1882

Des Temps modernes au XIXème siècle

Transaction entre les bouchers de Limoges et les consuls (1535)

L’accueil d’Henri IV par les bouchers

Henri IV visite Limoges

Des halles et une rue

Une corporation rétive aux taxes

Le cadre de vie des bouchers

Dans la tourmente révolutionnaire

Les fêtes religieuses des bouchers

Noms et surnoms de bouchers

Dix-neuvième siècle et début du vingtième

Etre « de la rue »

L’évolution religieuse : une confrérie active face à l’anticléricalisme municipal

La Confrérie de Saint-Aurélien en 1923

1930, les fêtes du Millénaire

Spécialités culinaires de la rue de la Boucherie

Le Cercle Saint-Aurélien, entre corporatisme, religion et loisirs, de 1887 aux années 1960

L’inauguration du Cercle, dans l’esprit corporatiste

Le Cercle, siège du Syndicat de la boucherie

La charte coopérative du métier de boucher sous le régime de l’Etat Français de Philippe Pétain

Un local bien entretenu et un lieu de distraction

Mentions d’activités religieuses et charitables dans les archives du Cercle

Le pavillon frigorifique du Verdurier

L’abattoir de Roger Gonthier

Au cimetière de Louyat

La Confrérie Saint-Aurélien et la rue de la Boucherie des années 1960 aux années 2020

1973 : Sauver le quartier – le passage d’une rue de bouchers à une artère touristique

La tradition « immémoriale » de l’accueil des chefs d’Etat

1982 : La visite de François Mitterrand, président de la République

La destruction de la pietà

1ers syndics de la Confrérie de Saint-Aurélien

L’incendie du 17 février 2017

Une « figure obligée » : écrire sur les bouchers et leur rue

Un portrait à charge dans le Contribuable du 18 avril 1832, par Léon Dubois

Jules Clarétie, Journées de vacances, 1886

Un extrait de lettre d’Henri Alexandre Flour de Saint-Genis, écrite en août 1856

Un article de Victorine Vallat, 1899

La Rue de la Boucherie par Louis Bouty, 1901

Le Boucher, par Edouard Michaud, 1901

Extrait de Le Limousin par André Thérive, 1927

La Frairie des Petits Ventres par Bernard Cubertafond, 1987

Nicolas Bouchard, La Ville noire, 2006

Peindre et photographier la Boucherie et les ostensions

En conclusion

Références

Remerciements