En ces temps de crise de l’élevage, de l’agriculture et même de certains commerces artisanaux, il faut se souvenir du Limoges d’avant la grande distribution (le premier supermarché installé aux Casseaux étant Euromarché, au milieu des années 1970). Sur cette photographie (J.M. Bourdelas), un couple de bouchers de la rue Raspail, Mme et M. Baurianne, et leur fils Roger. A droite l’étal (non réfrigéré), à gauche la chambre froide, dans la cour, le laboratoire. Les habitants du quartier se souviennent encore de cette habitude de réaliser des vitrines très décorées à l’occasion de Noël à laquelle ils participaient. Il y avait une tradition, chez les petits commerçants de ces années-là, qui consistait à préparer de magnifiques vitrines « animées ». Ainsi de René Juge, coiffeur rue Aristide Briand, dont l’attaque d’un château-fort réjouissait les garçons sortant de l’école de la Monnaie (alors non mixte, nous y reviendrons). Donc, à cette époque, les bouchers s’approvisionnaient directement auprès de l’éleveur dont ils connaissaient les bêtes… Le consommateur savait précisément d’où venait la viande qui, certes, était plus chère qu’à l’hyper, mais bien meilleure (d’ailleurs, on n’en mangeait pas à chaque repas).
Un temps, au débouché de la rue du Grand Treuil sur la rue Aristide Briand, au milieu d’autres petits commerces de proximité, il y avait deux boucheries et charcuteries. Mais ces boutiques disparurent après l’implantation des supermarchés…
Et les bouchers qui furent très puissants au Moyen Âge dans la ville du Château, ont progressivement quitté la rue qui leur devait son nom. On peut toujours y visiter la maison traditionnelle de la boucherie, et surtout la chapelle Saint Aurélien où le petit Jésus mangerait, selon la tradition, un rognon… ou même déguster une bonne pièce de viande aux Petits Ventres, dont le nom est inspiré d’une recette de panse farcie aux pieds de mouton. Et se souvenir que les bouchers habitaient dans leurs maisons médiévales, préparaient la viande et la vendaient au rez-de-chaussée, faisaient sécher les peaux sous les combles et abattaient les animaux place de la Barreyrette, aujourd’hui magnifiquement restaurée mais où s’écoulèrent jadis des litres et des litres de sang. Demeure de ces anciens bouchers le vert et le blanc de leur corporation, devenues les couleurs du C.S.P., le club de basket.
(c) Photothèque Paul Colmar
n° 48, rue de la Boucherie: boucherie Plainemaison (avec les fameux girauds, boudins de veau et de mouton); n° 46, triperie Tramont (vers 1950-60)
On note que les « normes » étaient moins rigoureuses qu’aujourd’hui…