C’est une saison quelque peu avancée. D’habitude, on l’appréhende en été. Mais ce printemps décidément n’est pas de tout repos, après le gel fin mars-début avril, ce sont deux gros épisodes d’orages, notamment d’orages de grêle qui ont eu lieu le 17 avril et ce samedi 9 mai… Hier des dégâts dus à la grêle ont été enregistrés sur Pujols, Budos, et en partie sur le Médoc en Gironde. Tour d’horizon avec Côté Châteaux
LE SECTEUR LE PLUS TOUCHE A PUJOLS-SUR-CIRON
Jean-Jacques Dubourdieu témoigne d’emblée en cette fin de matinée : « c’est pas la joie, on a pris la grêle sur le Clos Floridène…
On a pris une bonne dérouillée au Clos Floridène à Pujols-sur-Ciron, la moitié de la propriété très touchée. J’habite là et donc j’étais aux premières loges pour voir ce bel orage de grêle, à 20h-20h10 c’est comme si la nuit tombait d’un coup, cela reste triste » Jean-Jacques Dubourdieu.
« C’est un bel orage de grêle qui a démarré à sec entre 20h30 et 21h, au début on a eu du vent avec des rafales assez fortes et ensuite de gros grêlons, puis cela s’est déplacé sur Barsac mais avec davantage d’eau. Les secteurs touchés, Pujols, Budos, un petit peu Barsac. On a une parcelle sur Illats qui n’a pas été concernée, comme disaient les anciens c’est bien de ne pas avoir tout d’un bloc. Nos autres châteaux Reynon, Doisy -Daëne et Cantegril ne sont pas concernés. Pujols, c’est une commune d’habitude pas concernée par le couloir de grêle, on n’en n’avait pas eu depuis 1987-88. Heureusement, on était assuré, mais cela ne remplace pas, et on sortait de deux belles années 2018 et 2019, qui permettront d’amortir le choc. Mais on ne devrait avoir que la moitié de la récolte vraissemblablement. »
Loïc Pasquet, vigneron de Liber Pater, m’alertait dès hier soir sur l’intensité « c’était tendu toute la nuit ! », avec par endroits de gros grêlons, et faisait un tour dans ses vignes et sur le secteur de Landiras et dans les Graves :
Cela me donnait l’impression d’orage de montagne, sur Pujols et Budos cela a grêlé, un petit peu à Landiras et des torrents d’eau dans Landiras », Loïc Pasquet, vigneron Liber Pater
Dominique Guignard, le président du syndicat viticole des Graves est sur le pont aussi en ce dimanche matin : « je suis au milieu des vignes, je fais le tour…
On a eu beaucoup d’eau 40 millimètres dans la nuit et autant aujourd’hui et demain. D’ici demain soir on devrait avoir 100 à 150 millimètres de pluie » Dominique Guignard syndicat des Graves
« On a eu de la grêle sur le sud, sur Roaillan entre Langon et Bazas… », continue Dominique Guignard. « Après à Saint-Pierre de Mons, Langon, pas d’impact, Saucats il y a eu de la grêle mais là il n’y a pas beaucoup de vigne, surtout des céréales et du maïs. Je suis sur le pont et continue mon tour; il y a eu aussi beaucoup de vent et beaucoup de casse à cause du vent, notamment sur de jeunes pousses…
« Et après avoir sillonné toute la matinée son secteur des Graves, il se révèle que peu d’endroits touchés, excepté un secteur très durement impacté :
Le secteur le plus touché se situe entre Budos et Barsac sur la commune de Pujols-sur-Ciron, avec des parcelles touchées entre 80 et 100% », Dominique Guignard président du syndicat des Graves
Un déluge de #grêle s’est abattu sur le sud de l’Aquitaine, entre #Orthez et #Dax en fin de journée. En Gironde, de nombreux #vignobles ont été sérieusement endommagés par la grêle dans le #Médoc. Source : https://t.co/lYBJlCAqqG pic.twitter.com/tCwqVF1PSJ
— La Chaîne Météo (@lachainemeteo) May 9, 2020
Marc Médeville qui possède 50 hectares dans les Graves compte 8 hectares bien touchés : « on a 10 hectares avec le château Peyreblanque, cela a effectivement bien grêlé sur Budos et Pujols, en revanche pas de grêle et de dégâts en Bordeaux et Bordeaux Supérieur. Il y a eu 2 orages de grêle, le premier est arrivé de Balizac, des Grands Chais de France de l’ouest de Landiras et a balayé ce secteur là de manièce violente : nos vignes sont cramées, il n’y a plus rien, c’est très jaloux, il y a la moitié de la propriété à Budos massacrée et l’autre qui n’a rien; et l’autre orage de grêle sur Rouaillan, Langon vers Saint-Maixant. Des orages très violents et très localisés. »
Au niveau du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux, Christophe Chateau recueille également des remontées d’informations sur les secteurs de Gironde les plus touchés : « les Graves, le secteur de Pujols sur Ciron avec des vignes bien gâchées, le sud de la rive droite et sud Gironde, du côté de Cadillac et un petit peu vers le Sauternais et un peu le Médoc… »
A Sauternes, Xavier Planty au château Guiraud, commente sur son secteur : « non, très peu de grêlons sur Sauternes, davantage sur Landiras, Illats, il semblerait qu’il y ait des dégâts, cela s’est passé vers 21h30 hier » Et Luc Planty de confirmer « des trombes d’eau et beaucoup de grêle sur Pujols, on a un copain sur Coimers dans les Graves qui a été touché, quelques feuilles hachées, mais rien de significatif, en tout cas pas de dégât sur Sauternes. »
Dans le Médoc, Cédric Coubris du château la Mouline n’a pas été touché mais a partagé sur les réseaux sociaux une photo impressionnante d’un amas de grêle tapissant le sol : « on n’a pas de vignerons touchés sur mon secteur, il y a eu de gros grêlons sur Sainte-Hélène, Saint-Laurent, Carcans, Lacanau, cela tapissait le sol, à croire que c’est resté du côté forêt, car la vigne a été épargnée à Listrac, Moulis, Margaux. On croise les doigts car on ne peut pas faire grand chose, mis à part des canons à grêle, mais en ce moment les orages de grêle c’est tous les 10 jours… »
DANS LE MEDOC DE LA GRELE MAIS LA VIGNE S’EN TIRE A BON COMPTE
Au château d’Arsac, Philippe Raoux tient à me rassurer : « non, je n’ai rien eu, on est passé au travers jusqu’à maintenant. Mais on a été complètement grêlé en 2017 donc ça va quoi…Cela va être un métier compliqué pour ce type de cru, car on ne vend pas si facilement que cela et si tous les 3 ans on a une catastrophe… Depuis 2010, on s’est équipé d’un canon à grêle, car en 2008-2009 on avait grêlé et perdu 30%, depuis on n’a jamais été grêlé. Cela a un coût mais il faut vraiment s’équiper. Hier le canon n’a même pas tonné… »
Claude Gaudin, le président de l’ODG Médoc, Haut-Médoc et Listrac confirme : « à l’heure qu’il est, pas d’informations avec des dégâts, sur Salaunes et Saint-Hélène il y a eu effectivement des dégâts sur des véhicules et des chaussées blanchies, les secteurs qui semblaient les plus compliqués au niveau viticole Saint-Laurent et Saint-Sauveur, il y a eu beaucoup d’eau, mais pas de dégât a priori les canons à eau ont bien joué leur rôle. »
Sophie Aribaud, conseillère viticole, commente que sur son secteur du libournais et de Saint-Emilion, elle n’a pas eu de retour de ses clients sur d’éventuels dégâts. « En revanche, il ne fait que pleuvoir et c’est embêtant. On risque d’avoir de la coulure et du millerandage, beaucoup de parcelles sont saturées en eau, inondées, surtout pour les merlots il n’aiment pas cela, la floraison a commencé pour les Malbec, les cabernet et maintenant les merlots avec 3 semaines d’avance. Et de trouver dans cette climatologie particulière une note plutôt indienne : « on a une saison des pluies puis une saison sèche sur les derniers millésimes, en général cela se présente bien en fin de saison pour la grappe… »