Tempête dans un verre d’eau… ou de rouge. Après l’agitation de fin d’année, les fêtes étant passées par là, la digestion en ce début janvier s’opère, les esprits se calment en attendant des éclaircissements de l’Etat, de l’INAO et de la loi Egalim… Côté châteaux a interrogé David Arnaud, vice-président des Côtes de Bourg, et Dominique Techer de la Confédération Paysanne qui salue le fait que « la raison revienne »…
Lundi soir, les Côtes de Bourg tenaient un conseil d’administration « pour clarifier la situation,remettre un peu d’ordre, d’une décision qui partait dans tous les sens… », selon David Arnaud, vice-président du syndicat viticole, mais aussi vigneron certifié bio et HVE (haute valeur environnementale) avec son château la Tour des Graves.
David Arnaud, rappelle simplement le contexte à Côté Châteaux : « c’est un dossier très technique, réglementaire et à rebondissement… Sans arrêt, l’Etat fait évoluer la doctrine, l’INAO aussi et la vérité d’il y a 2 ans n’est plus la même…Il va falloir réadapter nos décisions par rapport à l’actualité… »
Car « la décision prise par l’assemblée générale (le 6 février 2020, la valeur HVE3 a l’horizon 2025 a été validée à 82%), cette obligation HVE pour tout le monde à Bourg, c’était la demande de l’Etat… »
« L’Etat nous demandait d’être HVE en 2030, et notre tort c’est d’avoir été plus rapide, nous on a dit en 2025. Mais entre temps, l’Etat fait évoluer sa doctrine, la loi Egalim dit HVE ou bio…Bref tout est en train d’évoluer. «
Alors que la loi Egalim du 01/11/2018 imposait à l’horizon 2030 d’inscrire dans le cahier des charges des appellations une et une seule certification, qu’ un guide de certification environnementale HVE approuvé par le Ministère de l’Agriculture et l’INAO était adressé aux ODG le 07/08/2019. Les Côtes de Bourg ont voulu être de bons élèves en étant les premiers en mettant en place ce label HVE pour tous d’ici 2025. Mais comme le souligne le conseil d’administration de ce lundi : « début 2021, l’INAO modifie la doctrine environnementale avec l’introduction d’une ou plusieurs certifications possibles ce qui nous est officiellement confirmé mi-décembre 2021. Donc,près de 2 ans après le vote de l’ODG… Les règles ayant changé, l’INAO demande alors à notre ODG de représenter sa demande le moment venu, lorsque les directives gouvernementales seront actées et confirmées,c’est à dire dans les années à venir. A ce jour, la certification HVE ne peut être intégrée dans le cahier des charges de l’ODG. »
Autrement dit, comme le commente ce matin David Arnaud :
Tant que rien n’est gravé dans le marbre, on met le dossier dans un tiroir au chaud, on va attendre que l’Etat et l’INAO revoient cela, cela partait d’un bon sentiment, on a voulu être plus vertueux, et on nous le reproche aujourd’hui », David Arnaud, vice-président des Côtes de Bourg.
La Confédération Paysanne qui était monté au créneau dans son communiqué en titrant « la Confédération Paysanne appelle le syndicat des Côtes de Bourg à renoncer au pass HVE » se réjouit de cette nouvelle position:
Je me réjouis que la raison l’emporte et qu’on évite des querelles stupides et qu’on se déchire en Côtes de Bourg, » Dominique Techer Porte-Parole de la Confédération Paysanne.
Et Dominique Techer d’ajouter : « ce qui me stupéfie, c’est le fait de baser ta communication sur un label planté dès le départ, alors qu’il y a un développement de la conversion bio (300 propriétés en Gironde) plus crédible, la Cour des Comptes l’a souligné, et ce ne sont pas des babas cool écolos à la Cour des Comptes. Quand tu regardes les cours du tonneau à largement moins de 1000€ et que pour le tonneau de bio, ils sont à 2000€… »
Didier Gontier, directeur des Côtes de Bourg, rappelle qu’aujourd’hui 90% des viticulteurs étaient à ce jour engagés dans une démarche environnementale, entre HVE et bio, 34% étant passés en bio ou en conversion bio. Même si comme le reconnaît David Arnaud: « HVE ce n’est pas au même niveau d’exigence que le bio, il y a par exemple la question du retraitement des effluents, c’est une avancée, c’est positif; mais j’entends tout à fait le reproche d’utilisation en HVE de certains produits de traitements, il faudrait que HVE aille dans ce sens là. Au lieu de critiquer ou de tuer ce label, il faut l’améliorer. Est-ce un pas en avant oui, suffisant non, va-t-il devenir plus vertueux oui… Laissons le temps à cette certification de prendre ses lettres de noblesse, c’est un premier pas. On encourage les viticulteurs à aller plus loin, selon leurs moyens et leur capacité à le faire. On ne peut pas obliger tout le monde à être bio demain. Les cahiers des charges sont différents, plutôt complémentaires qu’opposés. »
« En tout cas, l’INAO nous dit si vous voulez l’introduire dans le cahier des charges pour 2022, ce sera pour tous les vignerons, mais on ne se voit pas aujourd’hui leur dire vous avez 6 mois pour être HVE, ce serait un non sens ».
« Donc cette question là, on la met de côté, jusqu’à ce que tout soit clarifié au niveau INAO, Etat et loi Egalim, c’est un dossier qu’on met en pause et dans un tiroir, on y reviendra à l’horizon 2030″... Et David Arnaud de conclure : « pour résumer, il y a eu beaucoup de bruit, pour pas grand chose. Plus d’un tiers de nos vignerons sont bios, on représente tout le monde dans le syndicat et on salue aussi cet engagement de ceux qui sont devenus vignerons bio. »
Dans leur communiqué, les Côtes de Bourg disent « respecter les choix de chaque viticulteur en matière de certification environnementale »