28 Fév

Bordeaux : les réactions au lendemain de l’émission « Cash Impact » sur les pesticides

Au lendemain de Cash, la température est plutôt froide à Bordeaux. Alors que les anti-pesticides nous montrent les analyses réalisées dans des habitations et des écoles du Médoc, les pouvoirs publics et le CIVB reconnaissent que des efforts ont été faits mais que « Cash Impact ne tient pas sa promesse : où est le bilan objectif 2 ans après Cash Investigation ? »

Corinne Despréaux habite juste en face d'une immense parcelle de vignes régulièrement traitées au printemps et en été © JPS

Corinne Despréaux habite juste en face d’une immense parcelle de vignes régulièrement traitées au printemps et en été © JPS

A Listac-Médoc, par -2°C, Corine Despréaux nous monte sa maison qui jouxte des vignes. Dès qu’elle ouvre sa baie vitrée, elle a une vue imprenable sur une immense parcelle de vignes, et lors des traitements, c’est la même chose, à ceci près c’est qu’elle est avertie désormais des jours de traitements…ou parfois le lendemain.

Le résultat est très mauvais, ça je m’y attendais, il y a énormément de pesticides dans ma maison même certains pesticides interdites depuis 2015″ Corinne Despréaux

IMG_4998Pour être tout à fait juste, elle fait partie de l’association Info Médoc Pesticides. Quand Marie-Lys Bibeyran lui a proposé de mesurer chez elle la présence ou non de pesticides dans son habitation, cela a été sans aucun problème.

IMG_5000C’est ainsi qu’en septembre, Corinne Despréaux a accepté de mettre dans le tuyau de son aspirateur un flacon permettant de recueillir les poussières de son logement. Une maison très bien tenue car elle est assistante maternelle et s’occupe d’enfants en bas âge.

Les résultats retrouvés chez Corinne Despréaux © JPS

Les résultats retrouvés chez Corinne Despréaux © JPS

Les résultats dont elle se doutait ont été à la hauteur de ses craintes : 18 pesticides retrouvés dont certains très dangereux …16 reprotoxiques, 8 mutagènes et 6 perturbateurs endocriniens. Dont du diuron interdit depuis 2008.

Stéphane Védrenne a perdu sa fille Eva d'un cancer. Depuis avec sa femme il a créé Eva pour la Vie et lutte contre ce qui pourrait provoquer des cancers chez les enfants © JPS

Stéphane Védrenne a perdu sa fille Eva d’un cancer. Depuis avec sa femme il a créé Eva pour la Vie et lutte contre ce qui pourrait provoquer des cancers chez les enfants © JPS

C’est ‘association « Eva pour la Vie » (association crée par les époux Védrenne suite au cancer et au décès de leur petite fille Eva) qui a financé ces analyses réalisées par le laboratoire Kudzu Science qui a recherché ces pesticides (insecticides, herbicides et fongicides) couramment utilisés en viticulture. Ces analyses confirment la présence importante de pesticides dans 8 habitations à Listrac, Cussac et Macau et dans une école primaire, celle de Listrac, pourtant éloignée de plus de 50 mètres des vignes.

Marie-Lys Bibeyran et Stéphane Védrenne à Listrac © JPS

Marie-Lys Bibeyran et Stéphane Védrenne à Listrac © JPS

Pour Marie-Lys Bibeyran présidente d’Info-Médoc Pesticides : « Il est non seulement intolérable d’utiliser encore ce genre de molécules, CMR cancérigènes mutagènes reprotoxiques, et encore plus intolérable, inaccepable, anormal de les retrouver dans une salle de classe où des enfants vont passer 7 heures par jour, 4 jours par semaine et encore une fois ça c’est au mois de septembre, qu’en est-il en mai ou juin en plein coeur de la saison ? »

Les chiffres parlent d’eux mêmes, on retrouve dans ces échantillons, dans ces prélèvements entre 11 et 21 pesticides dans des quantités qui sont 60 fois supérieures à la limite de quantification » Stéphane Védrenne co-fondateur d’Eva Pour la Vie

Le maire de Listrac et son 1er adjoint tous deux viticulteurs © JPS

Le maire de Listrac et son 1er adjoint tous deux viticulteurs © JPS

Pour le maire de Listrac, Alain Capdevielle, viticulteur lui-même, on ne va pas pouvoir changer de suite toutes ces pratiques, cela risquerait de mettre en péril certaines exploitations, mais on est en bonne voie.

Pour nous je pense qu’il y a des efforts qui sont faits, au niveau communal on en fait énormément on entraîne dans une démarche de biodiversité pas mal de châteaux.Il y en a une bonne dizaine qui nous suivent pour revenir à des travaux de vignes à l’ancienne » Alain Capdeville maire de Listrac

Allan Sichel et Christophe Chateau du CIVB ont participé à Cash Impact, ils regrettent quelques nuances ou oublis dans le reportage © JPS

Allan Sichel et Christophe Chateau du CIVB ont participé à Cash Impact, ils regrettent quelques nuances ou oublis dans le reportage © JPS

Le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux dénonce des conclusions un peu rapides… en faisant ce matin un communiqué de presse reprenant de nombreux oublis dans l’émission « Cash ne tient pas sa promesse : où est le bilan objectif 2 ans après Cash Investigation ? »

Pour lui, Cash Impact « laisse croire, sans peuves, que les viticulteurs fraudent en achetant à l’étranger des produits interdits en France », par ailleurs « Cash impact aurait pu dire que des molécules de produits interdits peuvent encore laisser des traces dans l’environnement aujourd’hui, que le diuron interdit depuis 10 ans en agriculure est autorisé pour d’autres usages notamment le bâtiment… » Toutefois des mesures devraient être prises très prochainement pour continuer à diminuer l’usage des pesticides, une réunion est prévue le 9 mars prochain.

Les actions à court terme, c’est très rapidement sortir des produits les plus toxiques, les plus dangereux qui sont les CMR, après on veut aller vers les produits les moins toxiques les produits bio, mais aussi diminuer et sortir complètement des pesticides », Allan Sichel président du CIVB.

Allan Sichel interviewé par Elise Lucet dans Cash Impact © JPS

Allan Sichel interviewé par Elise Lucet dans Cash Impact © JPS

Pour le CIVB enfin, Cash Impact aurait pu souligner la « diminution par deux les ventes des pesticides classées CMR en Gironde entre 2014 et 2016 passant de 1800 tonnes à 850 en 2016 soit 55% de moins en trois ans ». Sans oublier « une baisse de 35% des ventes d’herbicides en Gironde entre 2014 et 2016 ».

Si vous voulez revoir Cash Impact c’est par ici