En 10 éditions, le Marché des Producteurs est devenu « the place to be » à Bordeaux ou plutôt Bouliac. C’est La sortie du dimanche pour les amateurs girondins de bons produits, le rendez-vous convivial à chaque début de saison, qui mixte ambiance de marché et ambiance déjantée.
Côté châteaux a suivi l’initiative dès le début et ne s’est pas trompé, comme d’ailleurs ses initiateurs car il faut bien rendre à César…ce qui appartient à Nicolas.
Nicolas le Magie…cien d’Oz, n’en finit pas de nous épater. Avec Marie et Anthony Torkington (l’ancien directeur du St James, parti diriger la structure des Relais et châteaux), ils s’étaient dit qu’il fallait mettre à l’honneur les petits producteurs avec lesquels le restaurant étoilé le Saint-James à Bouliac travaille au quotidien.
On veut mettre en avant les petits producteurs, car sans eux on n’est rien. L’idée était de faire un marché de producteurs et de recréer vraiment l’ambiance d’un marché municipal », Nicolas Magie, chef du Saint-James.
Ce marché a vu le jour il y a 2 ans et demi, avec juste un peu de communication sur les réseaux sociaux et le bouche à oreilles, et on a eu 800 personnes sur le premier marché ! On avait dit à nos producteurs avec qui on travaille, vous venez expliquez comment vous produisez, vous apporter quelques produits mais à 10h30, ils n’avaient plus rien à vendre…
D’emblée le succès a été au rendez-vous, ce qui en fait aujourd’hui l’un des événements incontournables de la place de Bordeaux. Imaginez plutôt plus de 1200 personnes en une matinée, avec un pic de fréquentation de 11h à 12h.
Ce qui est bien pensé, c’est la diversité des producteurs présents, depuis le maraîcher jusqu’à l’ostréiculteur, en passant par le charcutier-salaisonnier et le fromager.
Jacques Burliga, vigneron du château Paulin, un Bordeaux Supérieur, 50 hectares de vignes à Beychac-et-Caillau est là depuis le début : « c’est la 10e fois que je participe, mais il y a un monde fou aujourd’hui ». Il produit dans toutes les couleurs et même en crémant. Des petits Bordeaux sympas entre ses 2 marques château Paulin et château La Lande de Taleyran. Son stand est, comme d’autres, pris d’assaut; Josette son épouse me confie « c’est sympa, convivial, le lieu est tellement magique avec cette vue sur Bordeaux, on est très content de revenir à chaque fois et là vous voyez c’est l’heure de l’apéro… » C’est qu’elle ne ménage pas ses efforts en s’obligeant à servir dans de vrais verres, qu’elle lave et essuie tout au long de la matinée car comme elle dit « le vin mérite d’être servi dans un verre. » Quant à leur production : 400000 bouteilles, « et comme on ne peut pas tout boire, on est obligé d’en vendre », complète Jacques un brin taquin.
Julia et Jean-Clément Linder découvrent eux ce marché atypique : « c’est la 1ère fois qu’on vient, c’est un ami Jeremy qui nous en a parlé car sa compagne travaille au Saint-James. » Il faut dire qu’on y fait de belles rencontres, comme Cédric Béchade chef à l’Auberge Basque qui s’est associé à l’initiative de Nicolas Magie en faisant partager ses belles adresses de producteurs, ou encore Jean-Clément jeune chef-cuisinier pour Dulou traiteur à Bordeaux. Venu de Strasbourg, ce-dernier vient de s’implanter dans la région: « je découvre ici le milieu du vin, même si je le connais bien en Alsace où on a de très grands vins blancs, d’ailleurs les vendanges ont commencé fin août et c’est un millésime le 2018 qu’il va falloir acheter… » Comme tout bon Alsacien (je parle en connaissance de cause), il a la fibre entreprenariale et a quelques idées pour l’avenir comme « ouvrir une boutique, un endroit de très vivant et pourquoi pas que cela devienne une institution, il faut trouver le concept… »
Et alors que c’est la queue pour s’arracher une boîte de Muxus chez Paries, célèbre pâtissier de Saint-Jean-de-Luz, on peut ici picorer un bon petit foie gras mi-cuit chez Biraben, un producteur de Beuste à côté de Nay près de Pau. « Cela fait presque 3 ans qu’on vient, on n’était pas là à la 1ère mais après on s’est bougé pour venir », me confie (de foie gras) Cyrille Biraben. « On travaille uniquement avec des producteurs de canards de 13 semaines, gavés uniquement au maïs grain entier ». Il propose aussi sa terrine d’Odixar : « foie gras, confit, piquillos marinés à l’huile d’olive, aïl et vinaigre balsamique »; « on l’a goûté avec des copains lors d’une chasse à la palombière et ils m’ont dit tu devrais la commercialiser, du coup on l’a appelé Odixar du lieu-dit où on se trouvait à la chasse… »
Il y a aussi Christophe Meynard, producteur de truffes de Gironde dont l’entreprise « les Pépites Noires » marche bien « on travaille avec pas mal de chefs maintenant, j’exporte jusqu’à Arcachon et au Pays-Basque… » Mais pour l’heure ses truffières n’ont pas encore donné, « on manque d’eau, si on n’arrose pas on n’aura pas de truffes », il propose ce matin des truffes de Bourgogne de Nuits Saint-Georges (qui se ramassent à l’état sauvage), mais aussi de la Truffe blanche d’Alba super parfumée et qui s’arrache à prix d’or, de l’huile de truffe et quelques Girolles et Chantelles des Vosges.
Le marché des producteurs a aussi évolué, avec à l’entrée ses chataîgnes grillées et son bourru du jardin en guise de bienvenue, mais aussi les tapas depuis la 4e édition et son brasero histoire de poursuivre et se restaurer quelque peu.
Et puis il y a en prime l’ambiance « allumez le feu », une ambiance de folie aux environs de midi, apportée par le groupe Santa Machette : une banda déjantée avec musicos et chanteuse aux masques de catcheurs, hallucinant et tellement délirant, bref décalé, drôle et bon. De la magie, je vous dis.