24 Jan

Après sa condamnation en justice, Loïc Pasquet s’explique dans Côté Châteaux. S’estimant victime, le créateur de Liber Pater fait appel du jugement.

Côté Châteaux revient sur la condamnation devant le tribunal correctionnel de Bordeaux de Loïc Pasquet, avec l’interview du créateur de Liber Pater, ce vin de Bordeaux très prisé en Amérique du Nord, au Brésil, en Asie et en Europe. Il s’explique sans détour et compte rétablir sa ou la vérité devant la Cour d’Appel.

© Loïc Pasquet, le créateur de Liber Pater

© Loïc Pasquet, le créateur de Liber Pater

Jean-Pierre Stahl : « Loïc Pasquet, vous avez été condamné la semaine dernière par le tribunal correctionnel à 12 mois de prison avec sursis et 30.000 euros d’amende. Le tribunal a jugé que vous avez  établi une fausse comptabilité pour percevoir de FranceAgrimer (organisme public des produits de l’agriculture et de la mer)  environ 600.000 euros de subventions pour faire la promotion de vos vins hors de l’Union européenne, quelle est aujourd’hui votre réaction ? Allez vous faire appel ? » 
 
Loïc Pasquet : « Je reste avant tout béat sur une procédure de non-sens. Je suis une victime d’une escroquerie d’un partenaire et de la négligence d’un cabinet comptable, et c’est moi qui suis condamné ! Comprenez ma surprise ! Mais, quand on est honnête et confiant dans ses valeurs, on reste debout et on garde les éléments pour la justice. C’est d’ailleurs, tout le sens de mon appel et de ma défense à venir. On change de braquet pour rétablir la vérité ! »
 
JPS : « Que ressentez-vous, ayant comparu pour escroquerie, alors même que vos vins sont encensés comme de très grands vins ? »
 
Loïc Pasquet : « Je ressens une blessure pour ma famille et mes proches, mais heureusement et justement, les vrais connaisseurs du vin ne changent leur avis sur la qualité et l’originalité véritable du Liber Pater. Donc, ce n’est qu’un épiphénomène monté de toute pièce qui ne touche aucunement à la qualité de vin connu mondialement, mais qui semble déranger certains. »
 
JPS : « Selon le ministère public, vous avez produit des factures par l’intermédiaire d’un partenaire financier en Chine, EuropAsia, « en sachant qu’elles ne correspondaient pas aux prestations réalisées » et a ainsi « sciemment trompé FranceAgrimer », qu’en est-il selon vous ? »
 
Loïc Pasquet : « Permettez- moi de vous dire que je reviens de Chine, et que des éléments probants viendront confirmer que je suis une victime et non un complice ou acteur d’une tromperie. Mais je réserve ces éléments à la justice. Je ne comprends pas qui a eu intérêt à demander une telle procédure à France Agrimer à qui j’avais expliqué en détail le dossier et que j’avais remboursé la première partie de l’aide car je considérai que cet organisme n’avait pas à subir les conséquences d’une escroquerie dont j’étais la victime. »
 
JPS : « Quant à l’audience on évoque votre démarche de  produire un vin « au goût oublié » provenant « de vieux cépages pré-phylloxériques ». Or on vous rétorque que les Liber Pater produits depuis 2004 sont un assemblage des cépages traditionnels du bordelais, Merlot et Cabernet, qu’avez-vous répondu à vos détracteurs ? »
 
Loïc Pasquet : « Permettez- moi de ne pas répondre à de telles abberations ! Ceux qui me connaissent et qui connaissent mes vignes sont bouche-bée devant de telles allégations. Imaginez ces sommeliers, ces oenoloques qui connaissent mes vins, ils seraient des incapables et incompétents qui n’auraient pas découvert que le Liber Pater n’était qu’un assemblage de cabernet et de merlot ! Plus c’est grotesque, plus ce serait crédible ! Les cépages traditionels autochtones rentrent majoritairement en production cette année et les amateurs vont découvrir pour la première fois depuis 150 ans le goût pre-phyloxerique d’un vin de Bordeaux. »
 
JPS : « Qu’est-ce qui justifie le prix de vos bouteilles, de plusieurs milliers d’euros parfois, par rapport aux autres vins de Graves par exemples qui se vendent très peu chers ? »
 
Loïc Pasquet : « Là-aussi faut-il se justifier ? Dois-je faire un cours sur l’offre et la demande ? Quand vous concevez grace à la nature, grace  à ce qu’ont réalisé nos ancêtres il y a deux siècles, un vin qui trouve ses racines dans l’origine du Bordeaux et qui ne ressemble à aucun autre, et qu’en plus, il plait aux connaisseurs. C’est la demande qui crée le prix. Etes-vous choqué quand des toiles ou des œuvres d’un artiste sont achetées 100 fois ou mille fois plus cher que celles de ses confrères ? »
 
JPS : « Vous revenez de l’étranger, où vos vins se vendent essentiellement, votre renommée a t-elle pâti de cette affaire ou est-elle intacte ? »

Loïc Pasquet : « Là-aussi, il faut séparer le fond de la forme. La renommée du vin est intacte et se voit même renforcée par celles et ceux qui connaissent le Liber Pater, il est vrai que s’attaquer au paysan vigneron peut questionner. Peut-être qu’un paysan à Bordeaux, cela interpelle ! »
 
JPS : « Avez-vous aujourd’hui le sentiment de jalousie, de cabale, quelle est la réaction du monde du vin bordelais aujourd’hui vis-à-vis de vous ? »

Loïc Pasquet : « Je ne veux citer aucun nom ici, mais je puis vous dire que les témoignages de confiance sont nombreux ici même dans le Bordelais, car certains vignerons savent que je suis dans le vrai et que n’ai jamais dénigré telle ou telle appellation que je respecte. Quand on ne fait pas comme les autres, qu’on choisit la différence, qu’on croit à certains vieux cépages abandonnés, on suscite sûrement la jalousie, on se fait affubler de mille mots « le diable opposé à Parker », on se fait dégrader ses vignes, son véhicule, empoisonné l’eau… Je rassure mes faux amis, je tiens debout et ne suis pas prêt d’arrêter ma passion et mon travail. »