La Fédération des Grands Vins de Bordeaux exprime sa réprobation face à la nouvelle réglementation du gouvernement qui souhaite doubler le pictogramme sur les étiquettes, en place depuis 2006 : « la viticulture girondine dit stop ! » et le fait savoir haut et fort. Entretien d’Hervé Grandeau, le président de la FGVB, et réaction de Mathilde Bogdanoff de l’ANPAA Bordeaux, par Côté Châteaux.
Pour Hervé Grandeau, le Président de la Fédération des Grands Vins de Bordeaux : « L’idée du gouvernement de faire doubler de volume ce pictogramme pour l’amener à 1 centimètre de diamètre, c’est encore une couche supplémentaire dans la réglementation. Nous allons tenir cette conférence de presse pour exprimer notre ras-le-bol qu’on nous change sans arrêt cette réglementation. Il y a d’autres choses à faire en matière de prévention sur la santé que de se cacher constamment derrière ces avertissements ».
Cette mesure, annoncée lors du Comité interministériel du handicap du 2 décembre 2016, prévoit en effet le grossissement du pictogramme représentant une femme enceinte avec un verre à la main, barrée d’un trait rouge.
Pour Bernard Farges, Président de la Confédération Nationale des AOC (CNAOC) et des AOC Bordeaux et Bordeaux Supérieur : « cette mesure prise sans aucune concertation est une insulte à l’intelligence des femmes. Qui peut croire qu’un simple logo aura, quelle que soit sa taille, une action préventive efficace sur la consommation ? D’autant que l’efficacité réelle de ce pictogramme n’a jamais été évaluée depuis sa mise en place il y a plus de dix ans ! »
Et Hervé Grandeau de penser la même chose : « c’est un manque de respect vis-à-vis des femmes. Bien sûr, on est contre tout ce qui peut infecter le foetus dans le ventre de la maman, mais comment penser qu’en augmentant de volume ce pictogramme, les femmes, déjà averties, vont cesser toute consommation, c’est les prendre pour des … que de mettre un logo encore plus grand. »
« A l’étranger, on fait bien rire certains pays avec notre logo. Cela va avoir bien sûr comme conséquences qu’il va falloir revoir toutes nos contre-étiquettes, et puis la prochaine fois, on va nous demander cela en deux ou trois couleurs, et ce n’est pas le même prix… »
Et d’ajouter que la filière viticole, par la voix de Vin et Société, a toujours défendu le principe d’abstention de consommation pour les femmes enceintes.
« Nous en avons assez de l’inflation des normes, il y a aujourd’hui jusqu’à huit mentions obligatoires sur l’étiquetage (degré d’alcool, dénomination du produit, centilisation, allergènes, ….) Nos étiquettes n’ont pas vocation à véhiculer des avertissements médicaux, elles doivent rester des supports d’information. Nous produisons, vendons, exportons et l’inflation normative constitue une charge croissante pour nos exploitations, tout cela finit par peser sur notre compétitivité » ajoute le Président des AOC
girondines.
« Je pense que des gens au ministère de la Santé ont en travers le fait d’avoir réussi à assouplir la loi Evin, et qu’à la première occasion, ils veulent nous en remettre une couche. »
LA POSITION FAVORABLE DE L’ANPAA
Jointe ce vendredi matin, l’Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA) de Bordeaux tient à préciser : « c’est nécessaire d’informer les gens sur les risques liés à l’alcool, notamment durant la grossesse. C’est une prévention qui reste nécessaire : plus c’est visuel pour la population, mieux, c’est, » me précise Mathilde Bogdanoff chef de service à l’ANPAA, avec Nathalie Papet médecin coordonnateur.
« On sait qu’il y a une augmentation de la consommation d’alcool chez des femmes cadres, chez les jeunes aussi, ceci dit cette prévention est nécessaire : elle concerne non seulement les femmes durant leur grossesse, mais aussi le cercle familial qui peut les inciter à consommer. C’est aussi l’occasion d’en discuter au sein des familles. »
LES VITICULTEURS DEMANDENT AU 1ER MINISTRE DE SURSOIR A CETTE MISE EN OEUVRE
La viticulture girondine considère que le grossissement du logo existant figurant sur l’étiquetage depuis 2006 n’est pas la réponse adéquate à cette problématique de santé, qui mériterait la mise en oeuvre d’une politique de prévention ciblée. Elle demande instamment au premier ministre de surseoir à sa mise en oeuvre.
Regardez le reportage de Gilles Coulon et Patricia Mondon, montage Alain Guinchard :