Les ventes de vins de Bordeaux devraient être en partie impacté du fait du mouvement des « gilets jaunes », alors qu’elles diminuaient déjà en septembre, selon le CIVB. Surtout touchés ces derniers temps restaurateurs et commerce de proximité. Réactions recueillies auprès du monde du vin par Côté Châteaux.
« Cette période de fêtes est habituellement très active pour la filière, elle est cette année exceptionnellement impactée par la crise sociale que nous traversons. Nous n’aurons pas le coup de fouet de fin d’année », a déclaré Allan Sichel, président du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB) lors de son assemblée générale cet après-midi.
« L’indice de consommation est en forte baisse et le vin n’est pas un produit de première nécessité. On s’attend à ce qu’il soit plus impacté que le reste », a-t-il précisé.
DES BAISSES DE VENTES CHEZ LES CAVISTES
Confirmation auprès de Christophe Château, directeur de la communication du CIVB: « c’est surtout le commerce de proximité restaurateurs et cavistes qui souffrira, ça c’est une évidence », tout comme on a vu ces dernières semaines les autres commerçants de détail être impactés à des degrés divers ainsi que les grandes surfaces. « Cela ne va pas aider à la dynamisation des ventes de fin d’année », continue Christophe Chateau, alors que la période est généralement propice à de fortes ventes. Il n’y a pour autant pas eu d’effet très direct, mais ce ressenti et les dégâts collatéraux vont avoir forcément une traduction en chiffres prochainement.
Guillaume Cottin de la Vinothèque, grand caviste à Bordeaux centre, témoigne : « on a été impacté samedi, obligé de fermer à 18h. Mais déjà avant il n’y avait plus un client, à partir du moment où les tramways ont été coupés, c’était fortement ralenti. On a fait 73 clients ce samedi au lieu de 220 l’an dernier (soit un tiers seulement de la clientèle habituellement). Par contre, un bon vendredi, un dimanche normal et lundi pas mauvais ». Et de se réjouir qu’Alain Juppé ait annoncé hier la gratuité du parking pour le week-end prochain sur la place des Quinconces, histoire de rattraper ce retard.
Pour Paul Tesson de l’entreprise Dartess, spécialisée dans les livraisons de vin : « oui, on a été impacté, mais de manière disparate: si la plupart des sites ont poursuivi leur activité, nous avons eu 2 entrepôts pour lesquels il y a eu pas mal de complication à Lormont et Saint-André-de-Cubzac. Entre les activités de transport, plus l’accès, on a accumulé un retard dans les ordres d’enlèvement et les commandes, certaines qu’on n’a pas pu satisfaire, mais à l’heure actuelle tout est rentré dans l’ordre. »
Confirmation auprès de Benoît-Manuel Trocard à la tête de Wine Ressource : « Nous avons enregistré pour les régions Paca, Nord et Somme 15 jours à 3 semaines de retard. En prime les gens commandent de plus en plus tard à Noël. »
Philippe Tapie négociant de HMS reconnaît qu’en sa qualité de négociant qui vend 90% à l’export, il n’a « pas été impacté en direct, mais le problème a été une question de retard dans les livraisons et retard avec l’enlèvement avec nos prestataires. » Concernant les mesures avancées par le Président Macron, et notamment une prime de 1000 € exonérée de toute charge, il se dit favorable à la mesure.
UNE FAIBLE RECOLTE EN 2017 QUI SE FAIT RESSENTIR
Cela s’ajoute aux baisses ressenties précédemment : en septembre, par rapport au même mois de l’an dernier, la vente des vins de Bordeaux étaient déjà en baisse de 9%. « La commercialisation des vins de Bordeaux a été directement impactée par cette faible récolte de 2017. Le marché actuel est donc peu animé », a souligné M. Sichel.
L’export connaît donc une baisse de 7% des exportations bordelaises sur les douze derniers mois, mais une augmentation en valeur de 6% par rapport à septembre 2017. Cette baisse des ventes est due à l’étranger au ralentissement de l’économie chinoise et « la montée en puissance de nos concurrents australiens et chiliens, avantagés par des accords de libre-échange », et en France au manque de performance de la grande distribution, selon le CIVB.
La grande distribution, qui représente la moitié du marché français, a accusé fin août une baisse de 5% des ventes sur un an. Des pertes liées à une baisse de la promotion de l’offre en magasin », a précisé M. Sichel.
Yann Schyler commente pour Côté Châteaux : « le marché des vins de Bordeaux a dévissé. Depuis l’été les transactions, les exportations ont marqué le pas, la Chine est en chute cette année et il y a aussi une baisse de 5% de la grande distribution. Ca plus ça plus le Brexit, cela crée une mauvaise ambiance, de la morosité, les gens n’ont pas envie de consommer…Cela crée une psychose et les gens n’y vont pas… »
Mais pour le président du CIVB : la situation pourrait se débloquer en avril avec « l’arrivée du nouveau millésime qui s’accompagnera certainement d’un ajustement de prix », a-t-il ajouté.
Le millésime 2017, victime d’un gel historique, accusait une chute en volume de 39% sur 2016, à 3,5 millions d’hectolitres. La récolte 2018, avec « une qualité exceptionnelle » selon l’interprofession, devrait être proche de la moyenne décennale, c’est-à-dire 5,1 millions d’hectolitres.
Avec AFP