Les Vignerons de Buzet ont fait leur révolution. Depuis 10 ans, leur coopérative s’est engagée dans une viticulture « plus propre », alliant technologie de pointe, respect des hommes et de l’environnement. 198 irréductibles vignerons se font entendre en prônant le développement durable et la réduction des pesticides.
Quand on les rencontre, on est sous le charme de leur accent chantant du Lot-et-Garonne…Mais au fait Buzet, c’est où ? « Entre Bordeaux et Toulouse », répond systématiquement Pierre Philippe le directeur de la Cave coopérative à ses interlocuteurs qui lui posent cette sempiternelle question.
Ils ont en eux la fibre Uderzo: leur Buzet ressemble à un vignoble d’irréductibles Gaulois… En effet, avec leur petit nom face à l’ogre Bordeaux, ils continuent de jouer des coudes dans le marché mondial du vin, présents encore la semaine dernière à ProWein à Düsseldorf. Ils se réclament du Sud-Ouest tout en refusant toute alliance, notamment avec Bergerac et Duras. La liberté n’a pas de prix.
Avec 198 adhérents, exploitants 1870 ha en AOP Buzet, ces vignerons ont changé de braquet en 2005. Bien qu’ayant des domaines vallonés, pas question de s’endormir sur leur lauriers. Avec Pierre Philippe à leur tête, ils ont fait le choix de s' »engager autrement » dans la biodiversité et dans l’agriculture raisonnée.
On pourrait les prendre pour des farfelus, devieux écolos ou d’anciens soixante-huitards, mais pas du tout ! C’est une démarche honorable qui vise à respecter davantage la nature et les hommes. Depuis 10 ans, ils réduisent ainsi les intrants: ils se sont ainsi engagés à n’utiliser aucun engrais chimique sur leur vignoble : 0 engrais chimique mais de l’engrais organique. 0 acaricide également et 0 anti-botrytis.
On a interdit les herbicides résiduaires, on a interdit les engrais chimiques, tout ce qui était anti-botrytis que l’on retrouvait dans les vins, connus pour être l’assurance tous risques, ça a été un choc des cultures chez nos adhérents », Vincent Leyre des Vignerons de Buzet
Les Vignerons de Buzet sont fiers de nous emmener sur Gueyze, une partie en pointe dans les choix qu’ils expérimentent constamment: « sur ce vignoble, nous pratiquons la bio-diversité. Par exemple, on protège la tulipe agenaise…Avec la Sepanlog, on a transféré des tulipes qu’on a trouvé au bord d’un fossé pour les planter dans nos vignes, ça démontre que nos terrains sont assez riches et pas asphyxiés par certains désherbants. » « On a aussi replanté des haies, ça protège les auxiliaires, ça sert aussi de corridor, c’est important que les animaux puissent communiquer », explique Serge Lhérisson.
« On a mis des nichoirs en place aussi pour la chouette chevêche d’Athéna, un nichoir à faucon sur la partie la plus haute devenu l’emblème du vignoble. Tous les vignerons mettent ces nichoirs fabriqués à partir d’une caisse en bois de 6 bouteilles et ils en sont fiers. On protège aussi la chauve-souris qui mange beaucoup d’insectes(on a beaucoup de parasite comme la flavescence dorée, et elle en consomme beaucoup). »
Buzet, c’est aussi cette appellation qui a été relancée depuis 1953, sous l’impulsion d’un bordelais, Jean Mermillod, l’ancien maître de chai du château Lafite-Rothschild, appelé à devenir le directeur de cette cave coopérative… Pas étonnant dès lors de retrouver ces cépages du bordelais qu’il a souhaité replanter: 50% merlot, 25% cabernet sauvignon et 25 % cabernet franc. Et pour les blancs: sauvignon et sémillon.
Aujourd’hui leur directeur actuel, Pierre Philippe, originaire des Pyrénées-Atlantiques, a aussi marqué de son empreinte le vignoble avec ce virage sur la viticulture raisonnée et la bio-diversité. Aujourd’hui, ce vignoble de Gueyze (AOP Buzet) est le 1er vignoble à être labellisé « bee friendly », validé en janvier 2015; preuve supplémentaire de la limitation des traitements et du respect des abeilles.
Depuis 2005, on a axé sur le développement durable. C’est ancré dans les gênes de l’entreprise. C’est des gens qui ont envie de travailler au contact de la nature, ils ont une vraie sensibilité au côté environnemental », Pierre Philippe, directeur des Vignerons de Buzet.
Mais ils ne sont pas que de doux rêveurs, amis de la nature et des petits oiseaux…ce sont de grands producteurs qui ont derrière eux plus de 60 ans d’expérience et de mise en commun de leur production et de leurs moyens de vinification. Chaque année ce sont 12 millions de bouteilles qui sont produites.
Avec une cinquantaine de commerciaux dans l’hexagone, Buzet s’est implanté dans toutes les enseignes de la grande distribution; 80% de la production est commercialisée en France avec également les HCR et chez les cavistes, 20% à l’export (Europe, Etats-Unis et Asie). Mais ils ne dorment pas et misent sur de nouveaux outils comme ce filtre tangentiel et cette électrodialyse (digne des hôpitaux), ils comptent aussi augmenter leur production en BIB: ils commercialisent 720 000 bags in box à l’année, un marché en constante augmentation…
Fort de ces arguments, ils sont partis à ProWein pour essayer de trouver de nouveaux horizons pour leurs vins, avec des Allemands toujours très soucieux d’environnement. Leur principale force, c’est aussi le bon rapport qualité prix de leurs vins et une fidélité de leurs clients qui s’arrêtent parfois avec des bus entiers se ressourcer à Buzet…
Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl,Didier Bonnet, Eric Delwarde et Boris Chague
Ecoutez également la chronique « Vigne & Vin » avec Frédéric Lot :