Trois oenologues ont décidé de limiter l’usage de SO2 depuis la vendange jusqu’à la bouteille…Résultat des courses un taux divisé par deux de sulfites dans la bouteille !
« C’est un progrès de taille » osent-ils car « le SO2 (anhydride sulfureux) était le compagnon préféré du vinificateur depuis que le vin est vin puisqu’il permet d’éviter que le jus de raisin ne devienne vinaigre ».
Thomas Duclos, oenologue chez Onenoteam, me confie: « sur une partie de nos clients, on ne met plus de SO2 à l’entrée de la vendange… » Avant, les viticulteurs sulfitaient dès l’entrée pour éviter le développement d’organismes microbiologiques et l’oxydation. « Aujourd’hui, on a trouvé des palliatifs grâce à des levures ou des bactéries présentes sur les raisins, » ajoute-t-il. Ce principe de bioprotection permet donc de ne pas utiliser de SO2 pendant la vinification tout en maîtrisant les risques de déviations.
La vinification se fait donc sans SO2. Plusieurs milliers d’hectolitres sont ainsi produits cette année chez leurs clients sans que la vendange ait reçu ce produit qui en tant qu’antiseptique est aussi un obstacle à la pureté organoleptique des produits.
Toutefois, « on sulfite à la fermentation malolactique« . A ce stade, ils n’ont pas encore trouvé de solution de remplacement.
Cette démarche s’inscrit dans un questionnement sanitaire concernant le vin, au même titre que les pesticides, car le SO2 est reconnu comme un allergène référencé.
« Plus ça va, plus c’est montré du doigt, à tort ou à raison. Déjà, il n’est pas impossible qu’il y ait une interaction entre le SO2 et des exhausteurs aromatiques; et après, il y a tout le problème sanitaire, aujourd’hui on crie gare à ce qui est sulfite. On a des outils de biotechologie qui nous permettent de nous en passer, au moins durant une partie de la vie du vin…On a une absence complète jusqu’à la fin des malos… » Et le résultat est là:
On a diminué de moitié la quantité de sulfites: 50-60 microgrammes par litre contre 100-120 auparavant de SO2 total » Thomas Duclos, oenologue.
Celà fait 3 ans que les oenologues d’Oenoteam -Thomas Duclos, Stéphane Toutounji et Julien Belle- travaillent à la limitation des doses de SO2 total dans les vins avec comme principale piste la vinification sans SO2.
Cette technique a été développée sur les vins rouges essentiellement pour ce millésime 2014, mais des process ont été expérimentés en blanc.
Dans certaines propriétés la Bioprotection a été appliquée à 100 % de la vendange en rouge par exemple : Château de Cérons (Graves), Château La Grave Figeac (Saint-Emilion Grand Cru), Château Haut Veyrac (Saint-Emilion Grand Cru), Château Grand Français (Bordeaux Supérieur), Domaine de Moulin Pouzy (Bergerac), Château de Payre (Côtes de Bordeaux), etc.
Dans d’autres propriétés, c’est une partie de la vendange qui a été ainsi traitée: Château Bélingard (Bergerac), Château du Bousquet (Côtes de Bourg), etc.
A cette échelle et sur une telle variété d’appellations, on est clairement précurseur de cette méthode. » Stéphane Toutounji, oenologue.
Certains propriétaires de château, Laurent et Caroline Clauzel, Château La Grave Figeac (Saint-Emilion Grand Cru BIO depuis 2012) se disent « très heureux » de cette avancée des oenologues.
Xavier Perromat, du Château de Cérons (Graves) : « Cette technique est très favorable au niveau de la douceur d’extraction : elle a permis d’allonger la phase hydraulique avant le lancement de la fermentation avec les levures saccharomyces, en générant de beaux arômes fruités. »
Des vignerons enjoués, des consommateurs bientôt rassurés, tout le monde y trouvera son compte. Et si c’était un progrès de taille ?