30 Nov

Le Panthéon accueille Joséphine Baker, icône de la liberté

Quarante-six ans après sa mort en 1975, Joséphine Baker revient en pleine lumière mardi en entrant au Panthéon pour y rejoindre les grandes figures françaises grâce à sa vie « incroyable » d’artiste de music-hall, de résistante et de militante antiraciste.

« Me revoilà Paris »: l’une des plus célèbres chanson de la diva retentira à 17H30 pour lancer la cérémonie solennelle devant le grandiose édifice néo-classique, considéré comme « le temple laïc de la République ». Femme, noire, artiste de scène et née à l’étranger, Joséphine Baker ne sera que la sixième femme – sur 80 personnages illustres – à y entrer après Simone Veil en 2018.

« Ca va être mémorable » avec de « la joie et de l’excitation », espère Brian Bouillon-Baker, l’un des 12 enfants adoptés par Joséphine Baker, dont 11 sont toujours vivants. Avec eux, plusieurs centaines de personnes sont attendues, dont de nombreux jeunes, autour d’Emmanuel Macron qui prononcera un discours devant les portes du Panthéon.

L’intérêt est marqué également à l’international avec de nombreux journalistes de médias étrangers accrédités pour la cérémonie. A New York, l’emblématique gratte-ciel Empire State Building s’est allumé aux couleurs bleu blanc et rouge lundi soir pour honorer la diva née aux Etats-Unis.

Dans son discours, Emmanuel Macron rendra hommage à cette femme qui « a eu tous les courages et toutes les audaces« . « Elle est assez synthétique de ce qu’être française, elle qui était Américaine (…) Elle est impressionnante de modernité », a-t-il résumé dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux.

Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a également salué sur Europe 1 « un magnifique symbole »: « Joséphine Baker incarne l’amour de la France qui peut venir aussi de personnes qui n’y sont pas nées ».

A cinq mois de l’élection présidentielle, l’Elysée assure qu’il ne faut pas voir de message politique dans cette panthéonisation. « Il y a réellement un consensus très large » et « pas une voix ne s’est élevée » pour la contester, relève un conseiller, en présentant la cérémonie comme un moment « d’unité nationale ».

Dans l’opposition, Marine Le Pen s’est déclaré sur Sud Radio « très heureuse de l’entrée de Joséphine Baker au Panthéon ». « Elle disait « La France ce n’est pas mon pays d’adoption c’est mon pays tout court ». Elle a brillé dans sa défense de la France », a ajouté la candidate du RN. « Ma mère était une idéaliste qui voulait prouver que la fraternité universelle n’était pas une utopie », a résumé Brian Bouillon-Baker sur France Inter.

Née le 3 juin 1906 dans une famille pauvre de Saint-Louis (Missouri) d’une Amérindienne noire et d’un père d’origine espagnole, Joséphine Baker a rejoint Paris à 19 ans
pour tenter sa chance. Elle devient la vedette de « La Revue Nègre » au théâtre des Champs-Elysées en acceptant avec réticence d’apparaître seins nus.

« Si je veux devenir une star, je dois être scandaleuse », justifie-t-elle. « C’est la France qui m’a fait ce que je suis, je lui garderai une reconnaissance éternelle », affirme aussi celle qui se disait ravie d’être « devenue l’enfant chérie des Parisiens » et qui a obtenu la nationalité française le 30 novembre 1937.

« J’ai deux amours, Paris et mon pays », sa chanson la plus connue, sera d’ailleurs jouée par la Musique de l’armée de l’air à l’arrivée du cercueil au Panthéon. La dépouille de Joséphine  Baker ne sera pas dans le cercueil, puisque sa famille a décidé de la laisser reposer dans le cimetière marin de Monaco, aux côtés de son dernier mari et de l’un de ses enfants, non loin de la princesse Grace qui l’avait soutenue dans les dernières années de sa vie.

C’est donc un cénotaphe (tombeau ne contenant pas le corps) qui sera installé dans le caveau 13 de la crypte, où se trouve déjà l’écrivain Maurice Genevoix,
entré au Panthéon l’an dernier.

Symboliquement, ce cénotaphe a été rempli de poignées des quatre terres qui « étaient chères à Joséphine Baker »: sa ville natale de Saint-Louis, Paris où elle connut la gloire, le château des Milandes (Dordogne) où elle installa sa tribu « arc-en-ciel », et Monaco où elle termina sa vie.

AFP