29 Août

Côtes de Bourg : le Ministre de l’Agriculture interpelé par des vignerons victimes de la crise

Julien Denormandie est venu au chevet de la vigne et de ses vignerons. Le ministre de l’Agriculture a été reçu par un petit comité d’accueil qui vit actuellement très difficilement de son travail. Des vignerons exaspérés qui s’estiment au bord du gouffre, « la corde au cou », comme ils disent. Ils ont eu une oreille attentive du ministre qui souhaite des vignerons indépendants qui puissent vivre dignement de leur travail. Il a visité le château Grand Launay en biodynamie, à l’occasion des vendanges.

Un échange sans langue de bois entre Damien Labiche, vigneron, et Julien Denormandie, ministre de l’agriculture © Jean-Pierre Stahl

« On ne fait plus de salons, les marchés et le négoce sont totalement à l’arrêt, on veut interpeller notre ministre pour dire quel futur pour nos enfants…? », explique Damien Labiche, vigneron du château Tour Birol.

D’emblée, la dizaine de vignerons, plus ou moins jeunes, mais tous en grandes difficultés, est venue faire passer un message clair : « no future ». Ils ne peuvent plus ni garantir pour eux ni pour leurs enfants de pouvoir vivre dignement de leur exploitation viticole. Avant la venue du ministre, ils ont posé avec une corde au cou…

Moi, ça va faire deux ans que je ne me verse plus de salaire, j’ai deux enfants en bas âge, si ça continue comme cela, je mets la clé sous la porte… Dans notre entourage , on a tous un copain qui s’est foutu en l’air… » Damien Labiche vigneron.

« Donc moi je vous promets une chose : de faire tout ce que je peux, j’ai la même passion que vous, de faire mon possible, pour que demain vous arrêtiez d’avoir cela sur vos machines », commentait en réponse le ministre Julien Denormandie, ingénieur agronome à la base.

A Bourg, le ministre est arrivé un peu plus tôt, à 13 heures, à l’invitation de la députée Véronique Hammerer, pour échanger librement avec tous les acteurs de la filière viticole de Gironde, 3 semaines après le plan d’aide du gouvernant à hauteur de 250 millions d’euros, finançant en partie la distillation de crise.

Julien Denormandie, accompagné de la Préfète de Nouvelle-Aquitaine, lors du tour de table avec Bernard Farges du CIVB, Nicolas Carreau de Blaye et Stéphane Donze des Côtes de Bourg © JPS

250 millions d’euros pour l’ensemble de la filière française, cela reste faible, d’autant que la moitié étaient des fonds européens déjà prévus. Les conséquences du covid, nous allons les voir durant plusieurs mois, la commercialisation est très ralentie donc nous avons besoin de soutien comme d’autres filières », Bernard Farges président du CIVB.

Concernant ces aides, qui ne sont pas encore toutes débloquées, Julien Denormandie a précisé qu’au cours de cet été:

 J’ai décidé que dans l’aide des 250 millions d’€, on booste le stockage plutôt que la distillation, car ça me fait mal aux tripes comme vous, notre belle production d’en faire de la distillation, je préfère qu’on la stocke, » Julien Denormandie Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation.

 

Au château Grand Launay à Teuillac, cette période de vendange est propice pour parler transformation du vignoble avec les labels HVE haute valeur environnemental de niveau 3, le bio ou la biodynamie.

Julien Denormandie et Pierre-Henri Cozyns, propriétaire du château Grand Launay © JPS

Le vignoble français, c’est une part de notre identité d’hier, d’aujourd’hui mais aussi de demain grâce justement à cette volonté d’innovation, à cette capacité à déterminer quelles seront les bonnes pratiques de demain, Julien Denormandie, Ministre de l’Agriculture. »

Ici les 30 hectares sont valorisés par la famille Cozyns en agriculture biologique et certifié depuis 2018 en biodynamie. « Oui le bio à Bordeaux, ça peut fonctionner, cela demande beaucoup de technicité de formation et d’investissement, mais ça marche, cette année en 2020, on va faire des rendement supérieurs aux rendements autorisés par l’appellation », Pierre-Henri Cozyns, du château Grand Launay.

D’autres aides pour la filière pourraient être annoncées la semaine prochaine par le président Macron avec le plan de relance de l’économie dans le volet qui touche la viticulture, 2e balance excédentaire commerciale, qui représente 12 milliards d’euros et près de 600  000 emplois.

Reportage de Jean-Pierre Stahl, Dominique Mazères, Xavier Granger (Intervenants : Damien Labiche vigneron, Julien Denormandie Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Bernard Farges président du CIVB et Pierre Henri Cozyns propriétaire du château Grand Launay)

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26 Août

Au château Montrose, 84 saisonniers espagnols ont pris leurs quartiers d’été pour les vendanges avec un protocole sanitaire très respecté

Fidèles au poste depuis plus de 50 ans ! Ce sont 84 Espagnols tous originaires du même village Pruna  en Andalousie qui viennent faire les vendanges au château Montrose à Saint-Estèphe. Cette année, ils sont venus avec 14 jours d’avance, histoire de leur faire respecter une quatorzaine pour prévenir tout risque. Des prises de températures sont régulières et des mesures d’hygiène et de distanciation sont prises avec le plus grand sérieux.

Une troupe de 84 vendangeurs espagnols arrivés le 15 août au château © JPS

Des vendanges et effeuillages particuliers avec les mesures de distanciation nécessaires dans le contexte de prévention du coronavirus…Leur chef Antonio veille au bon respect des consignes de distanciation :

 Ils gardent les distances de sécurité, il y a une personne intercalée avec un rang pour garder de la distance et comme cela ils peuvent travailler et ils ne sont pas côte à côte », explique Antonio Vera Sanchez chef d’équipe

Au lieu d’un ravitaillement collectif en eau en jerrican, c’est une distribution cette année de bouteilles individuelles dans les rangs de vigne et un port du masque pour chacun…« C’est difficile de travailler avec le masque, surtout quand il fait chaud » commente Francisco Manuel 23 ans qui vient pour la 2e fois.

Le château Montrose à Saint Estèphe © JPS

A  quelques mètres du château, leur logement collectif est nettoyé en permanence, matin, midi et soir. Partout, des panneaux en espagnol, des bornes de gel hydroalcoolique , un sens de circulation et des chambres qui ont été réaménagées :

« Ce dortoir à l’origine était prévu pour 8 personnes, là vous voyez qu’il n’y a que 5 lits, on a aménagé des espaces minimuns de 1,5 mètres entre chaque lit et pour d’autres chambres on a aménagé des chambres pour des couples », précise Hélène Brochet directrice de la communication du château Montrose.

 Au réfectoire, finies les grandes tablées, désormais des tables par famille ou pour 3 saisonniers…les distances sociales sont ainsi respectées.

« A leur départ ils ont certifié n’avoir aucune symptôme du covid-19, on a pris leur température au départ du bus, pendant le voyage ils ont été isolés, ils ne sont descendus dans aucune halte et aucune brasserie, leur température a également été prise à l’arrivée, on a constaté qu’il n’y avait aucun problème et qu’ils étaient entre 35-36°.

Régulièrement dans la journée plusieurs fois par jour, il y a des prises de température pendant cette quatorzaine, pour s’assurer qu’à l’issue de cette période on a une équipe parfaitement saine, qui n’est pas porteuse du virus et qui peut être mise en contact aussi avec nos propres équipes », Hélène Brochet directrice communication château Montrose.

Des mesures de sécurité sanitaires quelque peu contraignantes, mais nécessaires, qui n’empêchent ces Espagnols de garder les bonne humeur qui n’oublient pas de fêter les anniversaires au sein de la troupe.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Jean-Michel Litvine, Stéphanie Plessis et Christian Arliguié: 

25 Août

Au château Bertinerie, les saisonniers effectuent les premiers tests Covid avant de faire les vendanges

C’est une première dans un château viticole du bordelais. On doit cette initiative à Eric Bantegnies, propriétaire du château Bertinerie, pour qui le bon sens réclamait la mise en place de tests covid-19 avant le début des vendanges ce jeudi. Après un rapide échange de mails, l’ARS a répondu banco avec la Chambre d’Agriculture, MSA et le CIVB qui proposent à d’autres domaines de se faire connaître pour effectuer des tests in-situ. 14 000 saisonniers pourraient être intéressés…

Dépistage ce matin au château Bertinerie © JPS

C’est une première réalisée ce matin à Cubnezais en Gironde. Des tests au beau milieu des vignes.

Ils sont ainsi arrivés par groupe de 20, pour un premier rendez-vous à 8h30 au château Bertinerie, puis 3 autres à 9h30, 10h30, 11h30. Tous sont saisonniers et volontaires pour passer ces tests souhaités ardemment par Eric Bantegnies, le propriétaire, avant le début des vendanges en blancs prévues ici jeudi 27 août. Une mesure de bon sens, encore fallait-il y penser, et de précaution, plutôt bien perçue par les saisonniers…

Je trouve ça super, moi j’ai des petits enfants et je veux savoir avec qui je travaille, il faut bien se protéger », Anne-Marie saisonnière

Jusqu’à midi et demi, ils sont ainsi 80 à être pris en charge par une infirmière d’ADN Santé Bordeaux et par les volontaires de la Sécurité Civile. Ce dépistage, réalisé à côté de la grande salle de réception, sur une terrasse qui surplombe les vignes, est une première. Il a été réclamé par Eric Bantegnies qui a envoyé une série de mails à la Mutualité Sociale Agricole, aux Vignerons Indépendants auxquels il adhère et à l’ARS, soulignant le fait que « nous allons accueillir environ 70 vendangeurs tous les jours pendant 4 semaines, …, sauf que la promiscuité dès que l’on dépasse les 20 ou 25 vendangeurs sera INEVITABLE…et demandant qu »attendez-vous pour nous proposer des tests de dépistages gratuits avant l’embauche… »

Eric Bantegnies, co-propriétaire du château Bertinerie © JPS

Si demain vous avez un ou deux individus asymptomatiques, au milieu d’une équipe de 72 personnes, et qu’au bout 15 jours votre équipe est en quarantaine, que vos vendanges sont arrêtés, que moi même je suis contaminé, et qui risque de contaminer l’équipe du chai, cela veut dire que les vendanges s’arrêtent les vinifications s’arrêtent et j’ai 72 personnes qui n’ont rien demandé qui se retrouvent en quarantaine« , Eric Bantegnies vigneron.

Il a ainsi eu un écho rapidement favorable auprès du nouveau directeur de l’ARS Olivier Serre, qui  déjà fin juin avait eu une démarche similaire avec un prestataire de service

Olivier Serre, directeur de la Serre © JPS

On est vraiment sur une dynamique de travail collaboratif avec le seul objectif, d’une part traquer le virus, et d’autre part de casser la chaîne de contamination » Olivier Serre directeur de l’Agence Régionale de Santé

« La chance que l’on a nous c’est de travailler avec les employeurs qui ont une capacité de conviction que l’on n’aurait pas si on restait sur le domaine de la proposition comme on a pu le faire précédemment », poursuit le directeur de l’ARS

Si certains châteaux ont déjà démarré les vendanges avec les règles édictées par la MSA et l’ARS, « le gros des chantiers va débuter là maintenant, donc on a encore un peu de temps, on recueille par un formulaire en ligne toutes les infos nécessaires document auquel l’ARS a accès , en pratiquant des tests au plus près du besoin », commente Fabien Bova le directeur du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux.

Dans le courant du mois de septembre, il y a 14000 salariés de plus que les salariés habituels, donc ça fait de gros volumes, le pari qu’on a fait avec l’ARS est d’être le plus réactif possible, d’être au plus prêt du terrain, on essaiera de répondre à toutes les demandes », Fabien Bova directeur du CIVB.

Sur le terrain, dès jeudi, le château Bertinerie procédera à la distribution de flacons individuels de gel hydroalcoolique, le port du masque sera obligatoire en dehors des rangs de vigne, vue la promiscuité habituelle des vendangeurs.

Pour les châteaux qui souhaitent aussi faire dépister leurs saisonniers ou salariés : c’est ici le formulaire à remplir

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Ludovic Cagnato et Xavier Granger : 

24 Août

Vendanges au château Carbonnieux : une année particulière marquée par la précocité et des mesures sanitaires

C’est l’une des 4 vendanges les plus précoces pour le château Carbonnieux depuis 1997. Ce matin une troupe d’une quarantaine de coupeurs et porteurs a embauché dès 7h pour ramasser « à la fraîche » les raisins sur différentes parcelles de ce château de Léognan. Reportage en immersion avec la famille Perrin. A voir dans le prochain Côté Châteaux sur France 3 NoA.

Les deux symboles de ce millésime 2020, une belle grappe de sauvignon, tenue par Eric Perrin, dans le contexte de crise sanitaire © JPS

7h, le jour vient tout juste de se lever. Philibert et Eric Perrin, les propriétaires du château Carbonnieux retrouvent leurs vendangeurs : « la température est idéale ce matin », se réjouit Philibert avec un petit 14°C qui tranche de ces matinées de canicule, qui ne descendaient pas en dessous de 20°, et même souvent entre 22 et 24° ces derniers jours…« Pour la conservation des arômes, c’est formidable » « Cette année, c’est exceptionnellement précoce, c’est incroyable », renchérit Eric Perrin son frère aîné, sachant qu’ils ont débuté les premières parcelles mercredi dernier. Là le véritable coup d’envoi est donné.

« Les raisins sont mûrs, il y a un bon équilibre, on renforce ce matin, l’équipe de 15 personnes supplémentaires, fin de semaine on devrait avoir fini les sauvignons, donc tout s’annonce bien, poursuit Philibert.« 

De mémoire de vigneron et de coupeurs ici à Carbonnieux, 2020 fait partie des années les plus précoces, Marie-Josée Denjean qui fait les vendanges depuis 1983 peut en témoigner, elle qui a connu le grand-père ou le père d’Eric et Philibert.

Philibert et Eric Perrin dans leurs rangs de vigne ce matin © JPS

« Quand j’étais enfant, on avait la rentrée scolaire qui était après le 15 septembre et donc on était souvent frustré de ne pas venir goûter à la cuve les premiers jus de raisins », commente Eric Perrin « et puis, dans les années 90 on a commencé à voir les dates de vendange s’avancer, est-ce du au travail de la vigne ou au réchauffement, et on avait les premières vendanges qui se passaient sur les 1ères quinzaines du mois de septembre, là j’ai vécu ce phénomène 4 fois entre 1997, 2003, 2011 et 2020, on a des vendanges qui se situent juste après le 15 août. »

   Cette année est aussi marqué par un autre invité, non désiré celui-là le coronavirus ou tu du moins la menace qu’il fait planer sur les exploitations. Partout sur les tracteurs ou enjambeurs, avec leur bennes, des panneaux récapitulent les gestes barrières et bonnes pratiques que rappelle volontiers Philibert Perrin : « oui c’est une année particulière en organisation, avec plus de temps, de réflexion, des gestes supplémentaires, moins de discussions sur le chantier, le côté convivial face à face pour se raconter ses vacances on essaie de respecter des distances et puis un peu d’inquiétudes des uns et des autres car on voit bien que le virus prend de l’ampleur dans notre région. Tout le monde est très conscient, respectueux pour éviter tout problème. Ils ont aussi installé un camion plateau avec une cuve d’eau claire et des distributeurs de savons et d’eau, donc à chaque fois qu’ils arrivent en bout de rang ils se lavent les mains, et les chefs d’équipe ont des sprays pour leur mettre du gel hydroalcoolique. »

Et alors que les coupeurs ne ménagent pas leur peine, avec ou sans masque, mais en gardant des distances de sécurité, les porteurs eux s’affairent avec leurs casque et ceux qui s’occupent du tri au chai doivent obligatoirement porter un masque…

Andrea Perrin, le fils d’Eric, oenologue au château commente les difficultés pour conserver les arômes des raisins blancs: « en général, les journées comme cela assez longues d’été, on aime bien commencer assez tôt pour pouvoir faire jusqu’à midi les 3/4 de ce que l’on va récolter dans la journée. Cela permet d’approvisionner le pressoir en raisins très frais et au moment du pressurage on va conserver beaucoup plus d’arômes et surtout on va avoir des jus beaucoup plus facile à travailler grâce à la température…ce qui va nous faciliter le process tout au long de la vinification. » 

La nouvelle génération de Perrin au chai avec Andrea et Marc © JPS

Quant à cette précocité dans la maturité : « les équilibres sont là, les acidités, l’alcool, la vigne n’a jamais stressé elle a toujours bien poussé, bien mûri. Mais c’est vrai que l’année dernière on a ramassé le 29 août et là le 18, c’est un phénomène exceptionnel du à l’année. »

Une année qui rappelle aussi un millésime solaire, le 2003, que les 4 Perrin aiment redécouvrir et déguster dans leur grand chai de blancs, à cette occasion de vendanges précoces :  « on retrouve la couleur bien dorée du sémillon mais avec une belle évolution… » selon Philibert. « On avait peur à l’époque d’avoir des combustions d’arômes voire des chutes d’acidité, et là on ne les retrouve pas, renchérit Eric ». « On a une pointe d’acidité et en bouge on a vraiment le sémillon mûr, riche, onctueux, c’est une bonne surprise… », complète Philibert.

Eric, Andrea, Philibert et Marc Perrin, dégustant ce fameux 2003© JPS

Pour Andréa, « oui c’est quand même agréable de pouvoir voir que dans des conditions extrêmes on peut faire des vins qui vieillissent. » Et Marc de conclure : « on voit aussi l’évolution de style, avec la trame commune et les vins d’aujourd’hui, mais avec plus de précision avec la manière avec laquelle on travaille. Et là, c’est un grand vin à associer avec une belle gastronomie, une belle viande blanche et des champignons… »

Comme quoi ces années précoces peuvent être synonymes aussi de grands millésimes, déjà pour les blancs. A confirmer aussi pour les rouges, les merlots sont déjà bien partis, avec une vendange prévue ici à partir du 7 septembre.

20 Août

Bordeaux : c’est parti pour les vendanges des cépages blancs

Cette semaine marque le coup d’envoi des premiers coups de sécateurs dans différents domaines de Pessac-Léognan et du Bordelais sur les parcelles les plus précoces et sur de jeunes plants. Le gros des vendanges sera pour la semaine prochaine. Cette année est l’une des 3 plus précoces de mémoire de vigneron bordelais.

Une benne déjà bien remplie de sauvignons au © château Carbonnieux ce matin

Parmi les tout premiers à avoir commencé, le château de Rouillac à Canéjan en Gironde a démarré mardi. Pour Laurent Cisnéros, ancien footballeur et propriétaire du domaine, c’est une mise en jambes : « on fait cette semaine une ou deux matinées de vendanges, on a démarré mardi à 9 avec 2 de mes filles et ce matin également, c’est un rituel familial… On commence toujours par vendanger les sauvignons gris en haut de la propriété, on récolte les jeunes plants de sauvignon gris, qui sont à bonne maturité, il y a une bonne acidité et c’est plutôt bien. On n’a pas pris énormément de choses mais ce qui était mûr à notre sens. A partir de lundi ou en milieu de semaine prochaine, on sera très mobilisé, ce sera le grand rush où on sera à 100% opérationnel… »

La rentrée de la vendange au chai de © Carbonnieux

Au château Carbonnieux à Léognan, c’est parti depuis hier mercredi. « Aujourd’hui, j’ai 60 personnes recrutées avec le GFA de Léognan, puis 80 à partir de lundi. On a débuté encore ce matin à 7heures et on va tourner jusqu’à 15 heures, car après il fait trop chaud« , précise Eric Perrin co-propriétaire. Eh oui, encore un petit 36° attendu à Bordeaux cet après-midi, la région la plus chaude de France.

Ces vendanges précoces et par ces fortes températures n’effraient pas pour le moment car les domaines s’adaptent en commençant relativement tôt dans la matinée et même pour certains dès 5h du matin comme le château de Sours ce jeudi. Et comme le précise Eric Perrin du château Carbonnieux:

Même si on a vu une évolution du climat, au niveau du travail à la vigne et au chai, on travaille avec beaucoup plus de précision », Eric Perrin du château Carbonnieux:

« Il y a 30 ans, sur une décennie, on avait 2 grands millésimes, 7 moyens et un mauvais, mais là on a quand même plus de régularité. Le dernier en date a été le 2013 où on a eu un début d’été très pluvieux, mais là on est plutôt sécure…On a passé tous les risques gel, grêle (attention ce n’est pas fini), mildiou et on rentre un raisin propre et sain. »

Au château Smith Haut-Lafitte à Martillac, non loin, « c’est parti depuis ce matin pour l’équipe de 30 vendangeurs, 35 avec les chauffeurs, on a commencé par les jeunes sauvignons blancs à 8h », commente Fabien Teitgen le directeur du château.

Port du masque pour tous comme le montre Fabien Teitgen © au château Smith Haut Lafitte

Mais c’est une année particulière pour tous ces domaines avec le coronavirus qui poursuit son histoire en France et dans le monde, il a fallu s’adapter : « on a commencé par distribuer les masques à tous et on a expliqué les règles de fonctionnement; on a revu tous nos protocoles pour faire en sorte que tout le monde reste en bonne santé avec distanciation et port du masque, car tout le monde revient de vacances et on ne sait pas qui ils ont croisé…donc on sécurise.

 Au château Smith Haut-Lafitte, « c’est la 4e vendange la plus précoce après 2003 où on a commencé le 13 août, » poursuit Fabien Teitgen.Il y a eu également « 1997 et 2011 où c’était un 18 août. Et donc 2020, le 20 », année du vin bien sûr.

 Elle est précoce mais n’a pas un caractère solaire, les raisins ne sont pas trop mûris ou flapis, ce qu’on ramasse fait 12,4° et 3,05 de PH, c’est tendu, c’est joli, il y a un bel équilibre et une belle vivacité, on n’est pas sur un profil chaud » Fabien Teitgen du château Smith Haut Lafitte

Grappe de sauvignon arrivée à bonne maturité au © château Smith Haut Lafitte

« La on fait un pressoir ce matin, peut-être demain aussi et on réattaque lundi ». Ces vendanges des blancs vont continuer dans la précocité des vendanges pour 2 à 3 semaines, « du 31 au 4 septembre ce sera les sémillions, et le 7 septembre on va commencer les rouges », poursuit Fabien Teitgen. Eric Perrin confirme aussi la précocité de l’ordre de 10 à 15 jours :« on va commencer les merlots vers le 7 ou 10 septembre ». Une précocité qui s’est malgré tout atténué car au printemps la vigne avait bien 3 semaines d’avance, mais les températures relativement fraîches du mois de juin ont fait en sorte de marquer le pas. Bon courage à tous et aux petites mains de la vigne bien sûr.

19 Août

Beaujolais : des vendanges qui vont débuter de manière très précoce

Le Beaujolais s’apprête à lancer ses vendanges, le 20 août pour les Beaujolais rouges et rosés et à partir du 22 août pour les Beaujolais blancs, en fonction du choix du vigneron bien sûr et de l’apogée de maturité. C’est le 2e millésime le plus précoce en Beaujolais après le 2003.

Les vendanges 2020 seront les deuxièmes plus précoces de l’histoire, après 2003 © France tv

Les premiers coups de sécateurs sont sur le point d’être donnés, en cette fin de semaine, sur les terroirs les plus précoces du Beaujolais. C’est le 2e millésime le plus précoce depuis 2003, depuis la mise en place du réseau maturation 1992.

Pour les rouges et rosés, la date minimum a été fixée au 20 août et pour les blancs au 22 août. Bien évidemment, ce n’est pas une obligation, chaque viticulteur aura le choix de lancer la récolte en fonction de la maturité optimale, par des matinées fraîches ou très tôt le matin pour ne pas perdre les arômes.

L’état sanitaire du vignoble affiche une très bonne santé, « exceptionnel » même, avec une un été très ensoleillé, chaud et sec, qui a favorisé les concentrations des raisins;  en poids les baies sont relativement plus petites et donc les grappes relativement faibles cette année, néanmoins l’interprofession évalue la récolte 2020 dans la moyenne de ces 5 dernières années, avec une quantité hétérogène d’une parcelle à l’autre, fonction de la résistance à la sécheresse notamment.

Ce sont donc 25 000 vendangeurs qui vont démarrer bientôt dans ces rangs de gamay et de chardonnay, les deux cépages emblématiques en Beaujolais. Un vignoble comme la champagne où les vendanges manuelles restent majoritaires. Des vendanges dans une ambiance particulière cette année du fait du Covid, aussi l’interprofessionnel et la MSA ont élaboré un guide vendanges spécial Covid. Plus de 15000 sacoches, gobelets et 55000 masques vont être distribués aux saisonniers par les viticulteurs pour permettre ces vendanges dans de bonnes conditions.

07 Août

Bientôt les vendanges pour les blancs : la température dans les différentes appellations de Bordeaux

Avec ce réchauffement climatique, tout s’accélère. Certains envisagent à Bordeaux de lancer les vendanges à partir du 17 août, notamment en Pessac-Léognan, pour d’autres ce sera à partir du 24 août. En tout cas les vendanges cette année devraient être un peu plus précoces que l’an dernier.

D’habitude le coup d’envoi des vendanges en blancs se profile début septembre dans l’Entre-Deux-Mers. Mais là, « cela devrait commencer entre le 20 et le 26 août », selon Bruno Baylet président du syndicat viticole. « Les blancs sont en fin de véraison, le gros des vendanges devrait être pour le 24 août, mais pour les situations les plus précoces ce sera la semaine d’avant. Tout dépend du profil aromatique que l’on recherche, mais avant la fin août beaucoup auront commencé à récolter. »

On sent que le réchauffement climatique est là, déjà il a permis la sortie des bourgeons très tôt dans la saison avec 15 jours à 3 semaines d’avance, parfois 4, preuve que le printemps a été très chaud, hormis les 3 épisodes de faible gel enregistrés en mars et avril. « Si la chaleur se confirme, on risque de jongler et du coup de ramasser la nuit et pas le jour pour garder la fraîcheur, » complète Bruno Baylet.

Pour les terroirs les plus chauds dans les Graves et notamment en Pessac-Léognan, les châteaux qui habituellement lancent la récolte les premiers comme Haut-Brion à Pessac ou Smitrh-Haut-Lafitte à Martillac seront fidèles à leurs habitudes pour lancer parmi les premiers les premières parcelles à ramasser. De même pour château Carbonnieux : « je pense qu’on devrait être en vendanges aux alentours du 17 août. On rentre des niveaux d’acidité et des potentiels aromatiques qu’on avait l’an dernier 10 jours plus tard », m’explique Eric Perrin le co-propriétaire de château Carbonnieux . On est en train de constituer une équipe, on va essayer de mobiliser 40 personnes et de lancer la récolte à ce moment-là. L’année a été assez compliquée comme cela, c’est la saison qui a voulu cela ».

En côtes de Bourg, Didier Gontier, le directeur du syndicat, estime un « début de vendanges fin août-début septembre » et les premières parcelles de rouges plus tôt également. Des prélèvements auront lieu le 24 août et même avant et une réunion avant vendanges devrait se tenir. « Certaines choses sont très en avance, d’autres un peu moins. »

Isabelle Chety, vigneronne en Blaye Côtes de Bordeaux et en Côtes de Bourg (suelement 30 ha de blancs, répartis entre 20 vignerons,  sur 3700 ha en Côtes de Bourg) tempère cette précocité et course aux vendanges : « c’est très du à dire, cela a de l’avance c’est sûr, mais avec la sécheresse il peut y avoir des blocages… On commencera à faire des prélè vements sur les blancs vers le 20 août, pour les rouges et les rosés aussi qui ne doivent pas monter trop haut en degrés d’alcools ».

En tout cas, si certains vignerons sont actuellement en vacances ou s’apprêtent à l’être, d’autres continuent d’être sur le pont et le front de l’oenotourisme : « on fait une saison touristique pas si mauvaise que cela, on a un peu de monde au bar à vin (les vendredis soirs et samedis soirs), également à la boutique, même s’il manque les croisiéristes », commente Didier Gontier. Pour le château Carbonnieux, Eric Perrin confie également avoir pas mal de visites à la propriété et joue « la réactivité » avec de nombreuses livraisons de vin sur le Bassin d’Arcachon.

Quant à Bruno Baylet, il confirme que le blanc est de plus en plus apprécié : « on augmente les superficies tous les ans, des gens qui faisaient du Bordeaux blanc sont passés en appellation Entre-Deux-Mers, avec une identité géographique et de terroir, l’Entre-Deux-Mers est pas mal demandé, on est aujourd’hui entre 1700 et 1800 hectares de blancs. »

04 Août

Des vendanges précoces attendues à Bordeaux…

En ce début août, c’est l’occasion de faire un premier point des maturités des raisins au château Jouvente dans les Graves. Cette année 2020 qui avait démarré avec 3 à 4 semaines d’avance par endroits a ralenti au niveau précocité. Toutefois les vendanges en blancs débuteront fin août, parfois un peu avant, et en rouge à parti de la 2e quinzaine de septembre.

Un réchauffement climatique ressenti au printemps qui devrait aboutir à des vendanges précoces © JPS

A Illats en Gironde, au château Jouvente, Olivier Bernadet, directeur technique, et David Gutmann, le propriétaire, constatent ce matin la précocité de maturité de ces raisins blancs, ces sémillons qui déjà se goûtent bien. Le domaine en plein coeur de ce village du sud Gironde fait 8,5 hectares,dont 2 hectares en cépages blancs sémillon (50%, sauvignon blanc 30%, gris 7% et musacdelle 13%).

David Gutmann, propriétaire du château Jouvente, et Olivier Bernadet, directeur technique © JPS

Le gros des vendanges en blancs devrait débuter fin août dans les Graves, et en Entre-Deux-Mers, et peut-être avant en Pessac-Léognan…Au château Jouvente, ce sera début septembre.

« On avait 3-4 semaines d’avance début juin », précise Olivier Bernadet, le directeur technique; « il a fait relativement froid au mois de juin, cela s’est ralenti on a du perdre une quinzaine de jours et depuis qu’il ne pleut plus il y a quand même une stagnation. »

On est sur une année où on a eu très peu de froid, on a eu beaucoup d’humidité au printemps donc tout a été en avance pendant très longtemps; et du fait du mois de juin plus froid et de la sécheresse relative depuis quelques semaines, la maturité s’est un petit peu calmée » Olivier Bernadet, le directeur technique

Du côté des rouges (6,5 plantés en merlot, cabernet sauvignon et petit verdot,), ces merlots aujourd’hui sont sains. La véraison, le passage du vert au rouge de ces baies a bloqué les attaques de mildiou; une véraison quelque peu hétérogène…

Elle a démarré assez tôt, mais avec le temps qui a évolué, qui est devenu un peu plus sec, elle a ralenti, mais la véraison, pour l’instant se passe très bien. Et quand on goûte le raisin, on sent qu’on a un très grand potentiel, » David Gutmann, le propriétaire du château Jouvente.

Comme le veut la maxime, août fait le mou et le goût, cette année qui s’annonce chaude pourrait ressembler au millésime 2015 dégusté avec modération dans le chai…ou le 2019 aussi. « On est quand même bien parti, on a une belle récolte, malgré les accidents de mildiou qui ont impacté de ci de là en volume » précise l’oenologue du domaine Philippe Dulong.

En qualité, on va certainement s’orienter vers des millésimes tels que ceux qu’on a pu connaître l’année dernière, on est sur des schémas identiques, des vendanges chaudes, précoces, des maturités importantes…« Philippe Dulong, président de l’Union des Oenologues de France Bordeaux Sud-Ouest

Les vendanges en rouge devraient débuter à partir de la 2e quinzaine de septembre, avant aussi quelque peu d’avance sur le calendrier habituel, fin septembre ou début octobre pour les merlots.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Jean-Michel Litvine et Françoise Dupuis : 

28 Oct

Champagne : des vendanges 2019 de bon augure, malgré le réchauffement climatique

Alors qu’en Champagne, les vendanges se sont bien passées, le volume et la qualité sont au rendez-vous de cette récolte 2019; ce malgré le réchauffement climatique, avec des record de température fin juillet de près de 43°C.

 Photo d’illustration  © JPS

Pour le Syndicat Général des Vignerons de la Champagne (SGV), la vendange 2019 est de « bon augure » : « malgré une forte hétérogénéité, la Champagne devrait dépasser en moyenne les 10.000 kg à l’hectare, volume proche du rendement économique nécessaire pour alimenter le marché ».

La vigne a connu à l’approche de la vendange « une dynamique de maturation exceptionnelle offrant des moûts dont l’équilibre entre acidité et taux de sucre ainsi que la concentration aromatique sont de très bon augure pour les futures cuvées ». Par ailleurs, la « Champagne a connu cette année son record absolu de température avec 42,9° enregistrés le 25 juillet. Ce réchauffement est jusqu’alors bénéfique pour la qualité de nos vins ».

AFP

23 Sep

Saint-Julien : les 100e vendanges de la famille Cordier au château Talbot

 Alors que c’est aujourd’hui un coup d’envoi des vendanges en rouges un peu partout dans le bordelais, Nancy Bignon-Cordier et son époux Jean-Paul Bignon célèbrent les 100 ans des vendanges à château Talbot. C’est l’arrière grand-père, Désiré Cordier, viticulteur originaire de Toul en Lorraine, qui avait acheté le domaine en 1918, après avoir acquis 3 autres châteaux du bordelais. 

Une troupe de 55 vendangeurs fidèles depuis des années qui viennent du Portugal © JPS

C’est un moment historique et d’émotion pour Nancy Bignon-Cordier car c’est aujourd’hui le coup d’envoi des 100e vendanges de sa famille au château Talbot, 4e cru classé 1855, à Saint-Julien-Beychevelle.

Son arrière-grand-père Désiré-Nicolas Cordier, que la famille appelait « papa Dé », était venu de Lorraine, de Toul très exactement où il était viticulteur et producteur de gris de Toul, juste avant la 1ère guerre mondiale. Il avait installé sa famille en Gironde, sans doute par crainte d’une nouvelle guerre, après la triste guerre de 1870-71 qui avait marqué de nombreux Lorrains.

Nabcy Bignon Cordier, arrière-petite-fille de Désiré Cordier et son époux Jean-Paul Bignon, ancien avocat qui travaille à ses côtés © JPS

Un centenaire qui procure « beaucoup de fierté, et une grand joie et on espère continuer encore et encore », me précise Nancy Bignon-Cordier, la propriétaire de château Talbot, château qui doit son nom au célèbre Anglais John Talbot, qui malheureusement pour lui a été vaincu lors de la bataille de Castillon en 1453.

« En arrivant, je pense qu’il connaissait cette région, car en tant que viticulteur en Lorraine, il avait du se promener un peu partout en France, il est devenu amoureux de la région et c’est comme cela qu’il acquis plusieurs propriétés », continue Nancy Bignon-Cordier.

Château Talbot, un 4e cru classé à Sain-Julien © JPS

Avant château Talbot, Désiré Cordier avait acheté 3 châteaux dont Lafaurie-Peyraguey (1er cru classé de Sauternes), Fanning Lafontaine dans les Graves et Gruaud-Larose (2e cru classé). Il avait un savoir faire qu’il a su transmettre.

« On recherche un certain équilibre, avec certes des tanins, mais beaucoup d’acidité », m’explique Jean-Michel Laporte directeur à la table de tri. « On recherche l’équilibre et la longueur en bouche, plutôt que la puissance. C’est un vin un peu d’esthète, un peu d’amateur éclairé, et Talbot traverse les siècles, c’est vraiment cela, cette idée de la famille, d’un terroir que je veux aujourd’hui préserver avec Mr et Mme Bignon »

Désiré Cordier s’était aussi aperçu d’une longévité exceptionnelle des habitants du Médoc qui dépassaient allègrement les 80 ans, à tel point qu’il avait fait venir ici Albert Lebrun en 1934…

Jean-Paul Bignon et son épouse Nancy Bignon-Cordier dans le grand chai de château Talbot  © JPS

« C’est pour cela qu’il avait fait venir le président de la République de l’époque, pour justement fêter la longévité des gens du Médoc », commente Nancy. Et Jean Paul Bignon de compléter : « il avait, avant tout le monde, inventé le « french paradox », c’est à dire : boire du vin avec modération avait plutôt tendance à faire que les gens vieillissaient mieux et plus longtemps et il l’avait constaté dans le Médoc. »

Cordier, un grand nom qu’il a laissé aussi à une célèbre maison de négoce bordelaise. Une histoire qui se perpétue aujourd’hui.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Pascal Lécuyer et Charles Rabréaud