C’était hier la plus grosse réunion publique organisée à la salle des fêtes du Pian-sur-Garonne. 300 vignerons y étaient présents pour un échange avec le collectif sur les aides et avancées au niveau du gouvernement et de l’Europe, insuffisantes selon eux. Toujours une distillation de crise et un arrachage ciblé avec des fonds européens pour de la reconversion et un arrachage sanitaire, le collectif veut un arrachage primé, définitif de 15 000 hectares à raison de 10 000 euros à l’hectare. Ils ont aussi posé les bases de l’organisation d’Etats Généraux de la viticulture.
Vigneron passionné depuis l’âge de ses 15 ans, Frédéric Salagnac est arrivé à l’aube de la retraite à 64 ans à ne plus pouvoir vivre dignement de son travail et de sa vigne, 75 hectares à Sauveterre-de-Guyenne dans l’Entre-deux-Mers.
Beaucoup d’amertume ! Vue la conjoncture, on n’arrive pas à dégager de l’argent pour vivre tout simplement… L’an dernier j’ai vendu un bâtiment pour tenir le coup et cette année j’ai licencié mes deux filles, qui travillaient avec moi, elles étaient présumées pour prendre la suite de l’exploitation… » Frédéric Salagnac vigneron du château du Girons.
Comme lui, ils sont 300 vignerons de Bordeaux venus à la réunion Publique du collectif viti 33…
Notre mobilisation est intacte, debout, prête à poursuivre le combat, un combat juste, un combat raisonné, celui de l’arrachage », Didier Cousiney porte-parole du collectif des viticulteurs de Gironde.
Depuis 12 campagnes de commercialisation étudiées sur les AOC Bordeaux rouge, Bordeaux Blanc, les Côtes, Sainte-Croix du Mont, les Graves, Médoc et Haut-Médoc, « la perte moyenne est de 47 millions d’euros par an pour la filière vrac », commente Olivier Metzinger du collectif, estimant qu’ « à Bordeaux il y a 40 000 hectares sur les 110 000 qui ne fonctionnent pas, qui ont un problème de rentabilité chronique » « Vous voyez que chroniquement, tout ce qui est fait en vrac, c’est des pertes énormes à l’hectare », continue-t-il en montrant ses tableaux et soulignant aussi le manque de rendement ces dernières années, faisant tomber celui-ci à 40 hectos à l’hectare sur Bordeaux ou parfois à 30 hectos pour les exploitations en bio.
« Aujourd’hui, le voisin qui tombe, et bien c’est nous le prochain… », commente un vigneron au micro. « C’est ça une crise, c’est quand un système est effondré et qu’un nouveau n’est pas arrivé, et donc là on est au bout d’un système et les instances elles n’ont pas le choix, elles sont obligées de l’entendre… », commente Renaud Jean vigneron à Roquebrune.
« Ne dites pas qu’il va y avoir de l’arrachage privé, vu que c’est interdit… », lance un autre vigneron. « Si dans le cadre sanitaire c’est autorisé », répond Christophe Chateau du CIVB. Des échanges parfois vifs ont eu lieu hier soir avec l’interprofession. Bernard Farges était représenté par Christophe Chateau, responsable de la communication, car Bernard Farges est à Paris toujours pour négocier les aides et mesures plus précises que le gouvernement va mettre en place. Il a eu une rencontre avec avec d’autres acteurs du monde viticole français avec le président Macron samedi et doit revoir le Ministre de l’Agriculture Marc Fesneau. « Bernard se bat tous les jours, toutes les heures pour avancer, pour avoir dans les jours qui viennent des solutions à vous présenter… », commente Christophe Chateau. Par ailleurs, questionné, voire interpelé sur les actions du CIVB, Christophe Chateau a rappelé les actions (Bordeaux Fête le Vin, les dégustations Cabanes en Fête, la Tournée des Vins de Bordeaux (la semaine prochaine auprès de la grande distribution, de restaurants, et cavistes…) et le budget de 15 millions d’euros investis sur des actions de promotions des vins de Bordeaux sur les 7 principaux marchés de Bordeaux: la France, les USA (où les Bordeaux sont partis dernièrement), le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Belgique, la Chine et le Japon…
Sur la table, 160 millions d’euros ont été annoncés par Marc Fesneau pour la distillation de crise, une aide en deux temps là au printemps et à l’automne, mais aussi on parle de fonds européens pour de l’arrachage sanitaire concernant les vignes en friche pour éviter que ne se propagent des maladies comme la cicadelle dorée, et également des fonds pour de la reconversion », ce qui laisse dubitatif Olivier Teicher porte-parole de la Confédération Paysane : « Déjà toutes les productions sont en crise et on demande à des gens dont ce n’est pas la spécialité de rajouter cela … en ne connaissant pas bien techniquement le métier et en plus en dehors de filière en place…On va envoyer les gens au casse-pipe, là aujourd’hui…Ce n’est d’envoyer les gens se réendetter, une couche de plus, pour aller faire un truc qu’ils ne connaissent pas bien. »
Ce sont des pansements sur une jambe de bois, nous on prône toujours notre arrachage primé définitif à 10 000 euros l’hectare, il n’y a que cela qui sauvera la viticulture et les viticulteurs », Didier Cousiney porte-parole du collectif des viticulteurs 33
« Nous ne lâcherons rien, vive Bordeaux, vive la vigne, vive le vin », selon Didier Cousiney. Aujourd’hui le collectif reste mobilisé etr réclame d’urgence des états généraux de la viticulture, pour une meilleure répartition des revenus et des richesses que celle-ci peut produire, avec notamment le négoce bordelais… « Tant qu’il n’y aura pas d’équité, on ne va pas produire sur ces hectares, où on perd de l’argent c’est n’importe quoi. Il faut remettre à plat tout cela grâce à des Etats Généraux de la viticulture et avoir un partage des risques et de la valeur… », commente Thomas Fonteyreaux vigneron indépendant du domaine Tich et Grava en bio à Verdelais.
Nous voulons par ces états généraux de la viticulture renverser la table, remettre tout à plat, revoir les adaptations du produit au goût du client et faire en sorte que nous arrêtions d’avoir des boucliers, des freins qui nous empêchent d’avancer… », Bastien Mercier, collectif des viticulteurs 33
Ces vignerons espèrent de nouvelles mesures, sinon ils promettent de se mobiliser à nouveau… dans la rue cette fois.