Après la manifestation du 6 décembre qui a réuni 1200 vignerons à Bordeaux, une cellule de crise a été mise en place par la préfecture et depuis la chambre d’agriculture recense les viticulteurs en difficulté et leurs attentes jusqu’au 15 janvier. Sur le terrain la situation est toujours tendue, reportage avec le collectif des vignerons à Pujols.
Des centaines d’hectares à l’abandon… L’image de vignes en friches est saisissante. C’est un peu le symbole de cette crise viticole qui frappe durement les vignerons de Bordeaux… Car les fermages ne sont plus loués, car abandonnés et plus rentables, les cours du tonneau de 900 litres se sont effondrés (de l’ordre de 650 € actuellement), et même il n’y a plus de cotation. Bref le collectif des vignerons réclame plus que jamais l’arrachage primé de 15 000 hectares de vignes à Bordeaux...
J’ai des jeunes de 35-38 ans qui sont au bord du gouffre, les banques leur disent on ne peut plus rien pour vous, et « démerdez-vous… » Ils n’ont plus rien, ils sont au fond du sac, c’est un cri de détresse, la seule solution ce sera l’arrachage… » Didier Cousiney porte-parole collectif des vignerons
A Pujols, ils sont plusieurs vignerons à continuer tant bien que mal d’exploiter…A quasiment 65 ans, Frédéric Arino vit seulement avec un peu plus de 10000€ de revenu fiscal à l’année… Il voudrait arrêter, mais ne voit pas de repreneur et ne voit que l’arrachage de ses 19 hectares primés pour s’en sortir. Il vient de remplir le document sur internet envoyé par la chambre d’agriculture recensant les viticulteurs en difficulté et leur volonté, mais sans trop y croire…
« Je ne peux pas prendre la retraite dans la mesure où je n’ai pas de repreneur et trop de surface en vigne qui me reste pour pouvoir demander mes droits à la retraite », commente Frédéric Arino vigneron coopérateur à Pujols. « A partir de là, je suis devant un statu quo, je ne peux plus ni avancer, ni reculer, je ne peux que subir… »
La présidente de la cave coopérative de Sainte-Radegonde, Martine Vacher, est aussi dans la même situation où à 61 ans et à la tête de 12 hectares de vigne elle cherche un repreneur ou à louer ses vignes en fermage… Mais c’est difficile… Pas le choix, il faut continuer…
« C’est quand même un dilemne, ou alors il faut qu’on continue, mais si les cours du vin continuent à baisser, on ne va pas couvrir les frais… »
L’arrachage est déjà pratiqué à Bordeaux…Des retraités comme un voisin de Frédéric Arino, âgé de 75 ans, l’a fait juste avant les vendanges cette année mais à ses frais pour continuer à toucher sa retraite… Son fermier a abandonné les vignes… « il avait même proposé un fermage à zéro mais personne n’en voulait… »
« De voir cela, c’est horrible, c’est détruire son capital qui avait de la valeur et qui ne vaut plus rien maintenant… », selon Frédéric Arino
Le collectif espère une aide de l’Europe ou du gouvernement pour un arrachage primé… L’estimation est d’environ 150 millions d’euros pour Bordeaux… Il y a urgence… L’année 2023 s’annonce déjà très dure…