Une « cellule de crise » sera ouverte la semaine prochaine en Gironde pour venir en aide à la filière viticole, dont plusieurs centaines d’acteurs ont défilé mardi à Bordeaux pour dénoncer leur « misère » face à une crise de surproduction.
La manifestation, qui a rassemblé 700 personnes selon la police, plus d’un millier selon les organisateurs, visait à obtenir un « plan social » sous la forme d’une prime à l’arrachage de vignes.
« Ce n’est pas possible », a-t-on répondu en préfecture, où une délégation a été reçue. Celle-ci a obtenu, en revanche, l’ouverture d’une cellule de crise qui mettra autour de la table, dès la semaine prochaine, services de l’Etat, Région, Département, collectif de vignerons, interprofession et organisme de gestion des vins de Bordeaux, Chambre d’agriculture et Mutualité sociale agricole (MSA).
« C’est une véritable avancée », s’est félicité un porte-parole des viticulteursau sortir de la réunion. « On a pris en considération notre souffrance, la Chambre d’agriculture va recenser toutes les exploitations en difficulté et trouver des solutions au cas par cas », a-t-il ajouté en invitant ses collègues à se signaler.
La manifestation, une première depuis 2004, s’est déroulée dans le calme. « Viticulture abandonnée, misère dans le Bordelais », « 1.000 viticulteurs en moins = 10.000 chômeurs en plus », « Boire un canon, c’est sauver un vigneron », pouvait-on lire sur les pancartes des manifestants, accompagnés de nombreux élus et parlementaires locaux, dont ceux de la majorité.
Le plus grand vignoble AOC de France, avec ses 110.000 hectares cultivés dont 85% en rouge, est en plein marasme, exception faite des grands crus qui échappent à la crise.
Ce sont les appellations Bordeaux et Bordeaux supérieur, les plus importantes en volume pour le rouge, qui souffrent le plus de l’effondrement des prix, en particulier pour le vin vendu en vrac, et de la surproduction évaluée à un million d’hectolitres.
Une minute de silence a été observée devant le CIVB, l’interprofession locale, où un mannequin « Stop au suicide » a été pendu à un arbre. Les producteurs en difficulté reprochent à l’organisme d’avoir tardé à réagir face à la crise.
Le collectif « Viti 33 » voudrait arracher au moins 15.000 hectares de vignes, avec une prime de 10.000 euros/hectare. « On demande un plan social car le Bordelais n’arrive plus à vendre son vin », a déclaré à l’AFP son président, Didier Cousiney.
« La législation européenne ne le permet pas », a-t-on expliqué en préfecture, mais « d’autres pistes vont être étudiées » pour venir en aide à la filière, comme l’utilisation des fonds d’aide européens à la ruralité (Feader).
Dans le cortège, la chute de l’export vers la Chine, les taxes américaines, la baisse de la consommation en France, la hausse des coûts de production et la mauvaise réputation des vins de Bordeaux étaient mises en avant pour expliquer la crise actuelle.
Alors qu’un vigneron sur deux approche des 60 ans, la question de la retraite et de la transmission préoccupe nombre d’entre eux, comme Frédéric Salagnac, qui exploite 73 hectares à Sauveterre-de-Guyenne (73 hectares) avec ses deux filles. « C’était prévu qu’elles reprennent mais on ne va pas leur mettre un boulet au pied, aujourd’hui on ne vit plus de nos vignes », déplore-t-il. « Depuis trois ans, c’est l’enfer, on est au bout du rouleau. »
AFP