C’est un sale type, un sale type de maladie qui se répand actuellement dans le vignoble bordelais comme dans d’autres vignobles français. En cause, les orages et les précipitations cumulées entre juin et juillet. D’où ces sorties de mildiou. « Il faut qu’on produise du vin et pas du mildiou ! »
Il pourrait s’appeler Emile Diou, ou comme auraient dit les anciens eh mildiou ! D’une génération à l’autre, tous pourraient vous dire : il n’est pas fréquentable, le gars ! Et c’est même de mal en pis…« Ca fait maintenant des années qu’on prend, de la grêle, du gel et du mildiou », comme me le confie Philippe Carille, vigneron du château Poupille en Castillon, Côtes de Bordeaux, en bio certifié depuis 2008.
« Pour le moment c’est mitigé, ce n’est pas encore la catastrophe, mais c’est sorti vendredi sur grappe… Malgré qu’on n’ait pas eu de trou dans la raquette, on a réussi à passer après chaque pluie mais quand tu commences à avoir 60 mm puis 40 sur les 2 orages il y a deux semaines, et que ça continue toutes les semaines, cela devient compliqué. Cela a commencé à sortir sur grappe, et a continué ce week-end.
Ce n’est pas la catastrophe, mais ça devient compliqué. Il y en a qui diront que c’est une année de vigneron, c’est plutôt une année de chanceux… », Philippe Carille château Poupille.
« Chez certains viticulteurs, c’est pareil qu’en 2018, pour nous c’est moyen à part une parcelle qui est à 30% sur des porte-greffes »
Pour Jean-Jacques Dubourdieu, vigneron des châteaux Clos Floridène, Reynon ou encore Doisy Daëne : « c’est une grande, grande inquiétude, qui me fait penser à 2018, en pire, avec une fréquence de pluies importante. Cela touche surtout les cépages rouges comme le merlot qui est plus sensible. Et ce quelque soit le mode de culture, vertueux ou avec produits phytosanitaires avec un usage raisonné, on fait face à une grande pression. Il y a de la casse, on perd de la récolte tous les jours, 5 à 10%.
Traditionnellement au mois de juillet, on levait le pied au niveau des traitements mais là on est encore sous le feu » Jean-Jacques Dubourdieu de Clos Floridène et château Reynon.
« Le mildiou ? Pour tout le monde, il est là ! « , commente Nicolas Lesaint du château de Reignac à Saint-Loubès. « Mais chez nous ça va encore, c’est largement acceptable; il s’est surtout installé sur des vignes qui avaient gelé, avec une repousse plus tardive, on a plus une pression sur des feuilles, mais honnêtement je n’ai pas à me plaindre. On est en train de faire les effeuillages à la main, et le meilleur traitement c’est aussi le rognage sur les jeunes feuilles. »
Et Nicolas Lesaint de revenir sur l’amas d’eau qui est tombé depuis la fin de l’année dernière jusqu’à aujourd’hui:
DU 1er novembre à aujourd’hui, on a eu 1050 millimètres de pluies contre 560 à la même période un an plus tôt, « Nicolas Lesaint du château de Reignac.
« En Alsace, c’est la catastrophe car le phénomène est plus tardif, si on avait eu la même chose il y a 15 jours, ça n’aurait pas été la même mayonnaise. Mais globalement on va s’en sortir. »
Pour Philippe Carille, « l’heure devrait être au pragmatisme, je n’ai jamais vu un tel bilan carbone, par rapport aux produits qu’on utilise. Nous on en est à 12 passages, mais j’en connais qui en sont à 16 ou 17 déjà. Est-ce qu’on est bon ou pas cela reste assez compliqué. Il faut qu’on produise du vin et pas du mildiou. »
A partir de jeudi, le retour d’un temps sec et beau devrait assécher tout cela et redonner du baume au coeur à nos vignerons pas mal malmenés cette année entre le gel, le mildiou… et qui a parlé de grêle. N’en jetez plus. Ils en ont assez.