C’est passé cette nuit à l’Assemblée Nationale, les députés persistent et signent à une large majorité un assouplissement de la loi Evin. L’article visant à distinguer la publicité sur les boissons alcooliques et l’information oenologique a été voté par 102 voix contre 29.
Une large majorité de députés ont persisté et signé mardi soir pour maintenir l’assouplissement de la loi Evin dans le projet de loi sur la santé, au grand dam de la ministre de la Santé Marisol Touraine et d’une poignée d’élus socialistes.
Introduit au Sénat et conservé en commission à l’Assemblée, l’article visant à distinguer la publicité sur les boissons alcooliques et l’information oenologique a été voté par 102 voix, contre 29, après plus d’une heure de débats dominés par des orateurs venus en nombre en faire la défense et illustration.
A l’inverse, un amendement de la présidente de la commission des Affaires sociales, Catherine Lemorton (PS), soutenu par la ministre et à titre personnel par le rapporteur Gérard Sebaoun (PS), pour supprimer cet article contesté notamment par des addictologues a été repoussé par 102 voix, contre 32.
Même sort pour un amendement de M. Sebaoun, visant à préciser dans l’article que les supports de communication ne devaient pas délivrer de message ou de mise en scène incitant à la consommation d’une boisson alcoolique.
De gauche comme de droite, des députés quasiment tous de régions vinicoles, ont mis en avant leur souci d’une « clarification » de la loi Evin visant à ne plus « laisser les magistrats interpréter les textes contrairement à l’action du législateur », à « sécuriser le travail journalistique » et promouvoir des zones de production.
La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a réaffirmé son hostilité à un article qui « ne se contente pas de clarifier », mais « déverrouille la publicité », ce qui entraîne « une modification profonde de l’équilibre » de la loi Evin.
« Arrêtons de nous tirer une balle dans le pied », a lancé le député-maire de Reims, Arnaud Robinet (LR). « Il n’est nullement question de mettre à mal la loi Evin et la lutte contre l’alcoolisme », s’est défendu la socialiste Catherine Quéré (PS), viticultrice de profession.
Selon certains députés, il aurait été impossible sans cet article de diffuser à l’avenir à la télévision la messe, vu la formule « Prenez et buvez en tous » pour le vin figurant le sang du Christ (Paul Giacobbi, PRG), ou James Bond, parce qu’il boit du champagne d’une maison célèbre (Charles de Courson, UDI).
Dans les voix discordantes, outre les socialistes Monique Orphé et Jean-Louis Touraine qui ont pointé la mortalité et la hausse de cancers liés à l’alcool et la Front de Gauche Jacqueline Fraysse, la cancérologue Michèle Delaunay, « bordelaise, particulièrement fière de (s)on territoire » aux « routes sillonnées d’oenotouristes heureux », a lancé que « ce serait un très mauvais signe donné au Parlement de détricoter un texte fondateur de la santé publique » dans une loi sur la santé.
Jugeant cela « plus que regrettable, triste même » et regrettant le « peu d’expressions sur l’enjeu majeur de l’alcoolisme (…) 48.000 morts par an », la ministre a aussi répété que rien dans la loi Evin n’interdit routes des vins ou publicités encadrées, y compris pour des territoires.
« Ouvrir un coin dans la loi Evin ne va pas profiter aux territoires, mais aux alcooliers d’alcool fort qui utilisent les vecteurs de publicité », a lancé Mme Lemorton. Mais, comme l’ont rappelé plusieurs députés, l’exécutif était pour cette modification de la loi Evin. Le Parlement avait voté cet été une mesure similaire dans la loi Macron, mais elle avait été retoquée par le Conseil constitutionnel.
Avec AFP