Doucement mais sûrement, le millésime 2015 continue à faire parler de lui dans les chais du bordelais. Entre les pressurages de marc, les soutirages et les entonnages, les vignerons sont sur un petit nuage. Les odeurs de fruits envahissent leurs chais et déjà certains parlent d’un millésime de légende.
Habitué à faire de grands vins, le comte Stephan von Neipperg, propriétaire de Canon La Gaffelière, 19 hectares en 1er cru classé de Saint-Emilion, a rarement vu pareil millésime en 30 ans de carrière :
« c ‘est un millésime grandiose, ça fait 30 ans que je suis ici, que je m’occupe de Canon-La Gaffelière, et c’est très certainement un millésime fantastique ! Il a plu quand il fallait pleuvoir, il n’y a pas eu de stress hydrique important, on a récolté des raisins géniaux. »
« On a des vins qui sont concentrés à la fois mais qui sont intégrés, et je crois aussi que notre façon de voir nos sols, d’être certifiés bio (depuis 2014, mais une phylosophie bio de plus de 10 ans), ça joue pleinement cette année. Finalement, on va faire un très grand vin sans que les alcools soient extraordinaires, à Canon La Gaffelière dans l’assemblage on ne sera pas à plus de 14°, ce qui cette année n’était pas facile ; je pense que ça pourrait pour nous être un 2009, peut-être plus concentré et plus fruité, mais ce n’est pas un 2005 ni un 2010. »
A Saint-Emilion, comme dans tout le bordelais, la chaleur de juillet a apporté la concentration, les pluies d’août et les températures tempérés de septembre de la faîcheur, ce qui a permis aux vignerons d’attendre à loisir pour les vendanges.
C’est un millésime parfait, qui va être jugé exceptionnel, intéressant car il permettait à chacun d’aller où il voulait » Stéphane Derenoncourt consultant en vins
Et Stéphane Derenoncourt de poursuivre : « comme on n’a eu aucune pression avec du botrytis ou une dégradation des raisins, sur un aspect créatif, on pouvait vendanger tôt ou tard, faire ce qu’on voulait, donc stylistiquement ça va être un millésime intéressant. »
A l’heure du presurage du marc, Sandrine Philippe, 4ème génération de vignerons a sorti son vieux presoir des années 50. Au Clos Saint-Emilion Philippe (en AOC Saint-Emilion et Saint-Emilion Grand Cru), elle n’en revient toujours pas de cette belle couleur obtenue et de ces odeurs qui envahissent son cuvier: « en rentrant dans mon chai, je me suis dit j’ai des odeurs différentes, et même lors des écoulages, ce sont des odeurs de fruits frais, de faises que je n’ai jamais eues…Les couleurs sont venues très vite et là je me suis dit c’est obligatoirement un grand millésime ! »
Son consultant, Olivier Dauga, « le Faiseur de Vin », confirme : « on se retrouve avec des tanins et une puissance assez impressionnants mais avec beaucoup de douceur et de suavité. C’est un millésime assez exceptionnel. On se retrouve devant des vins puissants mais toute en délicatesse et en finesse aussi. »
Je n’ai pas vu cela depuis les années 90, c’est différent de 2010 et 2005, c’est un millésime exceptionnel. On ne doit voir cela qu’une ou deux fois dans sa vie. C’est un millésime qui va marquer l’histoire« , Olivier Dauga le Faiseur de Vin
Passée la période des assemblages en janvier et février prochains, ces vignerons, consultants et négociants vont attendre les critiques de la presse spécialisée avec impatience. Ils risquent d’utiliser quelques superlatifs permettant à Bordeaux d’avoir un sacré écho à l’international. Il se peut que l’on parle d’un millésime de légende.
Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Dider Bonnet et Christophe Varone