Des viticulteurs girondins ont exprimé vendredi leur inquiétude pour sortir du glyphosate en 2022 et ont demandé un délai, lors d’une rencontre dans les vignes avec Pierre-Etienne Bisch, coordinateur interministériel du plan de sortie du glyphosate.
Chargé de coordonner au sein d’une « task force » tous les acteurs publics et privés afin de réduire l’usage des pesticides, il a écouté des représentants de la filière et notamment des viticulteurs de l’Entre-deux mers à Ladaux (Gironde), nouvelle étape de son tour de France des régions qui se termine fin octobre.
A l’issue de cette tournée, « on va voir émerger des choses communes et en particulier jusqu’où et dans quelles conditions la réduction des phytosanitaires est possible ou pas techniquement », a-t-il déclaré à l’AFP, soulignant que ces « impasses » pouvaient également être économiques.
« Il y a les surcoûts de l’emploi de main d’oeuvre, un manque de main d’oeuvre formée, des vignes en pente où on ne peut pas intervenir avec un tracteur… », a précisé le préfet honoraire, venu « stimuler la mise en route » du plan Ecophyto, surtout que les ventes de glyphosate ont augmenté de 19% entre 2008 et 2017.
Sur une parcelle des Vignobles Ducourt, des cépages résistants ont été plantés, réduisant le nombre de traitements phytosanitaires d’environ 80%. Le travail mécanique y a remplacé depuis cinq ans l’utilisation d’herbicide à base de glyphosate, le plus utilisé, sous le rang de vignes, laissant l’herbe pousser entre les rangs.
Philippe Ducourt avec son fils Jérémy, qui exploitent 450 hectares dont 25 ha sans glyphosate, estiment cependant impossible de se passer complètement de cet herbicide en raison « d’impasses techniques pour les grandes surfaces » agricoles. Il doit embaucher un tractoriste supplémentaire et utiliser un autre tracteur tous les 20 ha environ. « Il manque 4 à 5000 emplois en tractoristes en Gironde, on est déjà en pénurie. Il faut sept à huit passages en plus, ce qui implique une plus grande consommation de gasoil, un tassement des sols et une perturbation de la biodiversité avec tous ces passages de tracteur », a expliqué Philippe Ducourt. « Il y a un mixte à trouver entre le désherbage du sol et le traitement du sol », a-t-il conclu.
Selon la chambre d’agriculture de la Gironde, le passage du désherbage chimique au mécanique sous le rang engendre en moyenne un surcoût de 500 euros par hectare (six à sept heures de travail supplémentaires, achat de matériel, consommation de gasoil) et représente plus de 17% du coût de revient des vins en vrac.
Des solutions ont été évoquées par les différents acteurs de la filière comme des aides à la formation, un enherbement total sous le rang, la robotisation ou
encore s’inspirer des innovations dans la viticulture bio. Les Etats membres de l’Union européenne (UE) ont autorisé le glyphosate en novembre 2017 pour seulement cinq ans.
AFP