02 Avr

Primeurs et prix: il faut savoir raison garder… »ça passe ou ça casse ! »

2013 a été un séisme à Bordeaux, 2014 devra recoller les morceaux ! Toutes les analyses de bon sens plaident pour une sortie de prix raisonnable sinon « le système se brisera » selon plusieurs experts.

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La semaine des Primeurs des vins de Bordeaux, est une semaine décisive, un rendez-vous unique dans le monde viticole. Elle permet aux professionnels de jauger la qualité du millésime 2014 avant même de passer leurs ordres d’achat. Initialement le système était ainsi fait que le client payait une bouteille deux ans avant sa livraison en échange d’une ristourne.

Les clients étaient contents, ils pouvaient toucher le vin 15 à 20 % moins cher. C’était la raison d’être de ce rendez-vous vieux de 40 ans. Un système qui permettait au châteaux d’avoir également de la trésorerie.

La partition était bien écrite avec dans l’orchestre des importateurs, des cavistes, la grande distribution, négociants, des courtiers et en guise de premiers violons de nombreux journalistes et critiques du vin qui attribuent notes et commentaires. Il y avait même à une époque un Robert Parker, 1er violon ou même chef d’orchestre selon les années qui « donnait le la », la tendance du marché.

Ainsi les 250 plus grands châteaux de Bordeaux pouvaient écouler de 70 à 90% de leur production via le marché des primeurs. Car à la fin du mois de mai ou en juin souvent les années où Vinexpo se tenait. Les propriétaires de ces prestigieux châteaux fixaient alors leur prix aux négociants, chargés alors d’écouler les bouteilles aux quatre coins du monde. Pour certains, tout pouvait être écouler en quelques jours.

Mais ça, c’était avant. Avant que le marché ne s’emballe ! Car avec les millésimes 2009 et 2010, ce fut une pure folie. Les prix ont monté en flèche. Les Chinois étaient là et ils en redemandaient. Les fidèles Américains essayaient de suivre cette partie de poker, mais l’euro était trop cher, quant aux anglais cela faisait déjà quelque temps qu’ils avaient été charmé par les Australiens et d’autres, ils revenaient également se disant que c’était le coup à ne pas rater. La bourse n’était plus juteuse, tous pensaient se faire des fortunes avec le vin (et notamment en Chine où de nombreux asiatiques se sont improvisés experts en vin, vendant des Bordeaux Sup à 100 euros la bouteille…). Les Bordelais ne regardaient plus qu’à l’est là où le soleil se lève, comme le mirage d’un napoléon en or (les Chinois adorent en plus Napoléon). But all that glitters is not gold ! Plus dure fut la chute.

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Après avoir vendu à ces champions du commerce leurs jolis flacons, ces messieurs-dames se flattaient d’être les meilleurs au monde. Et puis les Chinois ont pris des mesures pour en finir avec les cadeaux ostentatoires de grands vins, contre la corruption, et ont pris conscience aussi qu’ils avaient trop acheté, et acheté trop cher aussi. Les millésimes suivants allaient en pâtir… Sans parler de leur ouverture sur d’autres marchés australiens, espagnols, argentins et chiliens. En 2013, la chute de 22% puis 19 % en 2014 allaient se faire sentir à Bordeaux. Bordeaux a malgré tout a limité la casse avec -8% en 2014 en ventes globales.

Une fois ce contexte posé, cet histoire ressassée, il faut en tirer des conclusions. Les stocks de 2011, 2012 et 2013 sont encore importants (malgré un 2013 très faible en volume). 2014 s’il est largement supérieur ne doit pas signifier une nouvelle flambée des prix car le marché ne l’assimilerait pas. Nombre de négociants en 2013 ont été fragilisés par ces méventes, il ne faudrait pas enfoncer le clou.Car pour qu’une campagne primeurs fonctionne, il faut que tout le monde y trouve un intérêt financier. La propriété, qui récolte des liquidités lui permettant de financer la prochaine récolte, mais aussi le négociant, le distributeur et le consommateur, qui peuvent se procurer un vinà un prix inférieur d’au moins 20% à celui qui sera appliqué lors de sa mise sur le marché, deux ans plus tard.

Un célèbre château voit aujourd’hui revenir de Chine des 2010 20 à 25 % moins chers que lors de la vente en primeurs. C’est dire les déconvenues.

Pour François Lévêque, président honoraire du syndicat des courtiers de la Gironde: « L’intérêt de tout le monde est la règle de base. Or, lors des mise en marché des millésimes 2010, 2011, 2012 et 2013, cette règle n’a pas été respectée. Et dans la majeure partie des cas, les prix des sorties primeurs ont été trop élevés et n’ont pas permis de dégager la marge qu’était en droit d’attendre l’acheteur quand il pré-finance l’achat d’un vin« .

Le marché attend de la cohérence sur les prix, ce que l’on n’a pas eu depuis des années, et sans cela le système se brisera. Cette année, ça passe ou ça casse. On peut se poser la question de savoir si les primeurs continueront ou pas, » François Lévêque, président honoraire du syndicat des courtiers de la Gironde

Georges Haushalter, le vice-président du syndicat des négociants de la Gironde et ancien président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux réfute cette prédictionmisant cette année sur « un millésime de qualité » succédant à une récolte 2013 qui a déçu et tiré les prix vers le bas. « 

Comme le prix du 2013 servira de base pour le 2014, il y a un parfum de bonne affaire », Georges Haushalter vice-président des négociants de la Gironde.

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Et d’ajouter: « Si rien n’a été vendu pour le 2013, c’est qu’il était de 30% en moyenne plus cher qu’un 2008, équivalent en terme de qualité », lui rétorque un expert en grands crus de la place bordelaise. Selon lui « 2014 est une occasion unique de revenir à la raison, il faut que les propriétaires soient très vigilants sur les prix ».

L’ensemble de la filière s’accorde sur la qualité du millésime 2014, qui sans être exceptionnel au regard des trois derniers grands qu’a connus Bordeaux (2005, 2009 et 2010), satisfait les observateurs.

Les vins blancs secs et liquoreux sont excellents, les rouges plutôt réussis » Pr Denis Dubourdieu, directeur de l’Institut de la science de la vigne et du vin.

« Les blancs secs sont fruités, denses, soutenus par une acidité inaccoutumée à Bordeaux. Les grands vins liquoreux sontégalement de grande qualité mais faible quantité. Les rouges sont incontestablement meilleurs que ceux de 2013 et le millésime est porté par les cabernets, tant francs que sauvignon, qui ont pleinement profité de l’arrière-saison », écrit-il.

L’horizon, s’il s’est éclairci outre atlantique avec une croissance aux USA et un dollar revenu à une quasi parité avec l’euro. On peut se réjouir de la bonne santé économique des grands marchés de Bordeaux à l’export, notamment les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Allemagne. Des marchés traditionnels de Bordeaux qui devraient être salutaires. Alors que Bordeaux les avait regardé un peu de haut du temps de l’appel d’air chinois.

JPS avec AFP

01 Avr

L’absence commentée de Robert Parker aux primeurs de Bordeaux: « un seul être vous manque… »

Pour la 1ère fois depuis plus de 30 ans, Robert Parker est absent de la dégustation des primeurs à Bordeaux. Côté Châteaux a interrogé d’autres grosses pointures du monde du vin: Michel Rolland, Jean-Luc Thunevin, Alain Raynaud et Jacques Dupont, 3 amis de « Bob » et 1 autre grand critique. Tous réagissent à ce grand vide dans un dialogue que Côté Châteaux a assemblé et qui nous comble.

Michel Rolland, 30 ans de carrière en parallèle et d'amitié avec Robert Parker © Jean-Pierre Stahl

Michel Rolland, 30 ans de carrière en parallèle et d’amitié avec Robert Parker © Jean-Pierre Stahl

Depuis le château la Dominique à Saint-Emilion, Michel Rolland (sortant un mouchoir): « Ne m’en parlez pas ! (puis rires). Bien sûr, c’est un changement après 30 ans de visites régulières et puis surtout il avait une qualité énorme: il avait un impact…Il n’y a pas énormément de critiques du vin qui ont un impact, lui avait un impact mondial ! » 

Jean-Luc Thunevin, le chouchou de Parker © JPS

Jean-Luc Thunevin, le chouchou de Parker © JPS

Non loin dans le garage de Jean-Luc Thunevin: « C’est vrai que je suis un enfant de Parker, un chouchou ! Mais son arrêt était prévisible, vu son âge, il est né en 47, je l’avais vu, il était un peu fatigué, il avait mal au dos. Donc le fait qu’il ne vienne pas est embêtant pour ses chouchoux, donc peut-être pour moi. Mais, en fait il ne manque pas car le Wine Advocate existe toujours, même si ce sont des Singapouriens qui le possèdent, et il a envoyé Neil Martin,son collaborateur qui goûte et note les Bordeaux, toutefois ses notes seront moins importantes par rapport au boss. »

Michel Rolland:« Les acteurs sérieux dans le vin aujourd’hui le regrettent mais la terre va continuer de tourner. Les négociants de Bordeaux vont reprendre leurs responsabilités, c’est à dire qu’ils vont acheter ce qu’ils aiment. Vous savez, on a débuté il y a un peu plus de 30 ans aujourd’hui…Il n’était pas le Bob Parker d’aujourd’hui et je n’étais pas ce Michel Rolland, quand vous démarrez vous ne savez pas si vous allez réussir. Est-ce que  son impact était bien ou mal: oui c’était bien car ça a aidé Bordeaux et il adorait les Bordeaux. Mal ? Oui aussi, car quand il n’aimait pas trop les vins ou qu’il ne mettait pas de trop bonnes notes, ça donnait au marché une raison de ne pas acheter le vin. C’était la meilleure et la pire des choses. »

Pour Alain Raynaud, le Président du Grand Cercle des Vins de Bordeaux depuis le château d’Agassac à Ludon-Médoc: « un seul être vous manque et tout est dépeuplé… » puis « un seul être vous manque et tout est repeuplé ! On a fait deux jours de dégustation avec la presse, on a beaucoup échangé avec des journalistes qui ont tous l’envie de devenir un jour Robert Parker et pourtant je pense que personne ne le deviendra ! »

Jacques Dupont, journaliste du Point, dégustant les crus artisans © JPS

Jacques Dupont, journaliste du Point, dégustant les crus artisans © JPS

Perdu au fin fond du médoc en pleine dégustation des crus artisans au château la Peyre, Jacques Dupont, journaliste et auteur du Guide Jacques Dupont sur les primeurs à paraître dans le Point en mai: « Avant je m’étais dit, si Parker ne peut pas venir, le négoce va être perdu ! Qu’est-ce que faisait Robert Parker, il donnait une indication, en donnant une note de 95/100 par exemple. Et tout le monde se précipitait sur cette note de 95/100. Alors peut-être que le marché aujourd’hui qui s’est ouvert sur le monde est devenu un peu moins bébête. Les achats Parker, c’était à la note et sans goûter, les gens sont devenus plus intelligents… »

Dany et Michel Rolland © JPS

Dany et Michel Rolland © JPS

Pour Michel Rolland, Robert Parker n’était pas forcément le seul à avoir un palais unique, « il était surtout increvable, il pouvait déguster 250 échantillons et il était toujours fiable. Le vrai talent, c’est 18 heures de travail par jour… »

Jacques Dupont a ce regard plus en retrait: « On ne peut pas dire, tout est blanc tout est noir :Parker a été un formidable ouvreur de pistes aux Etats-Unis, il a permis à Bordeaux de s’installer et de vendre du vin là-bas, mais à un moment donné ça devenait un peu caricatural, tout le monde faisait du vin pour faire plaisir à Robert Parker… »

Alain Raynaud en contrepoids: « d’abord le goût n’a jamais été uniforme; il a surtout été à l’origine d’un mouvement qualitatif remarquable. Dans les années 80, Bordeaux était loin d’avoir le leadership mondial; ce que Bordeaux est devenu aujourd’hui, il y a contribué peut-être en mettant l’accent sur des vins avec une structuration tanique importante…Il a mis l’accent sur l’investissement au long court dans les vins de garde ! »

31 Mar

En marge des primeurs, ça douelle pas mal à Saint-Emilion !

Ca balance pas mal à Paris, ça balance ici…A Saint-Emilion, ça douelle pas mal avec le Dowell, ce fauteuil à base de barriques, testé par Michel Rolland. Les réalisations de Rémi Denjean font le buzz dans deux spots de dégustations très courus: au château la Dominique et chez Thunevin…

Michel Rolland, "the boss" under "the seat" ! © Jean-Pierre sTAHL

Michel Rolland, « the boss » opte pour « the seat » ! © Jean-Pierre sTAHL

Qui mieux que Michel Rolland, le célèbre oenologue qui conseille 240 châteaux dans le monde et notamment dans 14 pays, pour s’assoir sur cette réalisation made in Bordeaux et mabe by Denjean: le Dowell, cet énorme fauteuil design réalisé à base de deux barriques bordelaises de 225 litres, dont les douelles portent encore la trace du vin et sont reliées entre elles par une lame d’acier noire.

Marylin Jonnhson photographiant Michel Rolland et Dany son épouse © JPS

Marilyn Johnson photographiant Michel Rolland et Dany son épouse © JPS

Rémi Denjean a trouvé enfin une oreille attentive auprès de grands oenologue et négociants de Saint-Emilion et Bordeaux. Ainsi il expose au château la Dominique pour le rendez-vous des Clés de Châteaux et chez Jean-Luc Thunevin qui accueille également plus de 50 châteaux et propriétaires pour faire déguster leurs vins.

Si Charles Berling annoncé à la Dominique décide d’y faire une petite sieste après déjeuner ce jeudi, ce sera la consécration pour Rémi Denjean.

30 Mar

Le bal des primeurs est ouvert : 2014 sera un millésime de garde

Après 3 années difficiles, le millésime 2014 va sauver la mise à Bordeaux. Un millésime de garde, excellent pour plusieurs propriétés, qui va relancer les affaires. Petit tour d’horizon aujourd’hui à la dégustation des Vins de Pessac-Léognan et parmi le Grand Cercle des Vins de Bordeaux.

Le premier gros spot de dégustation le château Smith Haut Lafitte accueillait ce lundi les Pessac-Léognan © Jean-Pierre Stahl

Le premier gros spot de dégustation le château Smith Haut Lafitte accueillait ce lundi les Pessac-Léognan © Jean-Pierre Stahl

Le carnet de bal indiquait: ouverture du bal le 30 mars, 9h30, au château Smith Haut Laffite à Martillac. Alors que Florence et Daniel Cathiard avaient convié plus de 70 propriétaires de Pessac-Léognan, les danseuses se laissaient désirer . Mais comme toute fête, l’ambiance a parfois du mal à s’installer. Pourtant le sol de tomettes bien glissant permettait quelques pas de valse autrichienne ou de tango argentin, bal des primeurs oblige. Mais comme chacun sait, avant d’être invité à danser, souvent on se regarde en chien de faïence…bref après 3 millésimes délicats dont un 2013 très en dessous des attentes, il fallait réchauffer l’ambiance à Bordeaux. Les choses sérieuses allaient ainsi commencer passé 10 heures…le quart d’heure bordelais étant sérieusement dépassé, les professionnels français et étrangers, très en retard pour ce grand rendez-vous, allaient pouvoir se laisser envoûter par ce nouveau nez !

Magnus Ericsson et Adrien Bernard du Domaine de Chevalier © JPS

Magnus Ericsson et Adrien Bernard du Domaine de Chevalier © JPS

Après quelques gorgées (recrachées) de blanc, les commentaires allaient bon train, à l’instar de cet importateur Suèdois Magnus Ericsson « C’est très frais, on a beaucoup d’acidité, il est très bon ! » Arrêté dans son élan sur le stand du Domaine de Chevalier, Adrien Bernard lui expliquait: « c’est un été très frais que l’on a eu. Ce mois d’août était plutôt nuageux, on aime ça sur les blancs car cela va donner de l’acidité. On a mis deux semaines à vendanger 7 ha, du 10 au 26 septembre…On a fait des tris successifs, on est passé 2 à 3 fois dans les rangs de vigne ». Une autre danse, celle des vendangeurs de septembre…

Bruno Lemoine fier de son blanc en 2014 à comparer au 2007 © jps

Bruno Lemoine fier de son blanc en 2014 à comparer au 2007 © jps

Les blancs ont su tirer profit de ce temps en dent de scie, un été frais avec septembre chaud pour consacrer le tout: « c’est de l’éclat des 2007, on a de l’acidité et de la concentration, vraiment c’est un très grand millésime », pour Bruno Lemoine du château Larrivet Haut Brion.

Florence Cathiard, propriétaire du château Smith Haut-Lafitte est heureuse du 2014 et de retrouver les Américains © JPS

Florence Cathiard, propriétaire du château Smith Haut-Lafitte est heureuse du 2014 et de retrouver les Américains © JPS

Devant une salle quasi-comble, passé 11 heures, Florence Cathiard, propriétaire du château Smith Haut Lafitte, avait retrouvé le sourire après avoir vu, comme elle nous le soulignait, les prix de ses 2011, 2012 et 2013 chuter de moitié par rapport aux fabuleux 2010 et 2009, la voici rassurée: « on a eu la descente aux enfers, mais la on a un très beau vin. On a eu des cabernets de folie. Les Américains sont de retour avec un dollar fort et les chinois également, vous allez les apercevoir cette semaine, on est heureux. »

Arnaud de Butler et ses amis devant le château d'Agassac © JPS

Arnaud de Butler du château Crabitey, et ses amis Pascal Guignard de Roquetaillade la Grange, et Arnaud Lesgourgues du château Haut Selve devant Agassac © JPS

Au château d’Agassac, il y avait de quoi s’agasser (pour jouer sur leur ancien slogan Agassac, le château Agassant) car la foule de visiteurs se faisait aussi attendre, sans doute occupés sur d’autres spots de dégustation (à Smith Haut Laffite notamment), car durant cette folle semaine? qui démarre le jeudi pour la presse spécialisée et s’étale jusqu’au jeudi suivant, on compte environ une cinquantaine de rendez-vous de dégustation. Sans nul doute, ils seront là mardi et mercredi.

Francis Boutemy et Alain Raynaud © JPS

Francis Boutemy du château Haut-Lagrange et Alain Raynaud, président du Grand Cercle des Vins de Bordeaux © JPS

Et pourtant de grands noms de châteaux étaient présentés par le Grand Cercle des Vins de Bordeaux présidé par Alain Raynaud: parmi ces 193 châteaux, on pouvait retrouver avec plaisir Francis Boutemy du château Haut-Lagrange, Marie-Laure Lurton du château Villegeorge et de la Tour de Bessan, mais aussi Arnaud de Butler du château Crabitey dans les Graves…et déguster ici un Balthus, là des Cerisiers du château de Francs en Côtes de Bordeaux, tous deux de bonne facture.

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Petit instant de dégustation sur le comptoir de Jean-Luc Zell, le directeur général d’Agassac avec cet importateur Allemand de Koblenz Max Schwarz de la Société Vin et Vie, qui est aussi importateur des vins de la Passion des Terroirs: « certains 2014 sont extraordinaires, vraiment c’est très très bon. »

Max Scharz et Jean-Luc Zell © JPS

Max Scharz et Jean-Luc Zell © JPS

Jean-Luc Zell, qui ne souhaitait pas s’aventurer à comparer 2014 à certains millésimes des 10 dernières années, confirme que « c’est un millésime de garde ». Ce 2014 a pleinement profité de l’été indien avec septembre et octobre ensoleillés et chauds. Il y a la quantité mais aussi la qualité et ça se sait car de nombreux étrangers ont fait le déplacement pour les goûter.

Laurent Cisnéros du château de Rouillac et Laurent Moujon auteur de guides sur Bordeaux © JPS

Laurent Cisnéros du château de Rouillac et Laurent Moujon auteur de guides sur Bordeaux © JPS

Et comme me le confiait Patrick Bernard, PDG  de la maison de négoce Millésima: « C’est un millésime riche, dense, opulent, qui est rafraîchissant, désaltérant. C’est un petit peu en dessous des 2009 et 2010, mais vous avez un degré par trop élevé avec 1,5° d’alcool en moins par rapport aux 2009 et 2010.Bref on a tout ce qu’il faut pour revenir en grâce auprès du consommateur. »

Patrick Bernard de la Maison de Négoce Millésima © JPS

Patrick Bernard PDG de la Maison de Négoce Millésima © JPS

Encore faut-il que les propriétés restent raisonnables au niveau des prix…à moins de retomber dans les travers de la flambée des 2009 et 2010. Une spéculation que les Chinois et autres étrangers ont fait payer par la suite à Bordeaux.

29 Mar

Château Carbonnieux, un savoir-faire porté par les frères Perrin

Depuis l’achat du château Carbonnieux en 1956 et leur retour d’Algérie, les Perrin ont retroussé leurs manches pour élever la propriété au rang de Cru Classé de Graves. Ils ont hissé partout dans le monde les couleurs (blanc et rouge) de ce grand vin. Un blanc à la typicité reconnue unanimement comme exceptionnelle.

Dans les rangs de vigne de Carbonnieux, près de 100 ha actuellement, Philibert et Eric Perrin © JPS

Dans les rangs de vigne de Carbonnieux, près de 100 ha actuellement, Philibert et Eric Perrin © JPS

Le château Carbonnieux est sans nul doute l’un des plus anciens du Bordelais. Il fut fondé par les Bénédictins de l’Abbaye Sainte-Croix de Bordeaux au XIIIe siècle. Acheté en 1956 par le grand-père d’Eric et Philibert (actuels managers), Marc Perrin avait hésité entre Rauzan-Ségla à Margaux, le Tuquet dans les Graves et ce domaine qui comptait à l’époque 60 ha de vignes plantées mais en mauvais état. C’est l’attrait pour les grands domaines comme en Algérie qui a emporté son choix.

Philibert et Eric Perrin, les deux piliers du château Carbonnieux © Jean-Pierre Stahl

Philibert et Eric Perrin, les deux piliers du château Carbonnieux © Jean-Pierre Stahl

Lors de l’acquisition, le château n’avait pas encore la physionomie actuelle: « il avait été éventré durant la guerre, une partie était en ruine. Par endroits, il n’y avait plus de plancher » selon Philibert Perrin. « Au départ, il a fait des céréales, des olives, des artichauts et de la vigne. Il était en polyculture. »

« Quand on était enfant, Carbonnieux ressemblait à une grande ferme: on avait des poules, un âne, des chiens et un grand jardin potager » confiait Christine Perrin, la deuxième de la fratrie (soeur d’Eric et Philibert)(interrogée par Terre de Vin).

« Est-ce que c’était des réflexes dus aux périodes difficiles ? », explique Eric Perrin, qui s’empresse de me confier: « j’ai le souvenir d’un cochon, et on avait des pommes sur la propriété, alors on le bourrait de pommes… » On avait créé un potager, voulu par ma grand-mère. Elle voulait des fruits et des légumes de la ferme. Mais quand on produisit des haricots, ça avait ses avantages et ses inconvénients: on en avait à tous les repas… »

Dans le chai à barriques de blanc, dégustant le 2014 en plein élevage © Jean-Pierre Stahl

Dans le chai à barriques de blanc, dégustant le 2014 en plein élevage © Jean-Pierre Stahl

Eric et Philibert sont aujourd’hui les gardiens du temple. « On a toujours travaillé sur le domaine familial et sur nos propres exploitations, et c’est ce que l’on fait toujours aujourd’hui », explique Philibert.

On est les deux co-gérants. On travaille chacun de notre côté et sous le même toit. Nous sommes indépendants et complémentaires, même si pour certains dossiers, nous travaillons ensemble, » Eric et Philibert Perrin

Eric a 51 ans, il s’est formé au sein de la propriété: « j’ai eu de la chance d’arriver au moment où on a mis en place les techniques de Denis Dubourdieu et les méthodes bourguignonnes de la fermentation des blancs en barriques. » Mais Eric s’est aussi installé avec Marc Lurton à la tête du château Haut-Vigneau en 1987 car il fallait protéger les terroirs de l’appellation Pessac-Léognan avec la technopole ». « L’appellation faisait 800 ha dont 600 en rouge et 200 en blanc, aujourd’hui elle représente 1300 en rouge et 250 en blanc, les rouges ont plus que doublé et les blancs très peu progressé. »

 

Philibert, 45 ans, diplômé du lycée de viticulture et d’oenologie de Blanquefort, a commencé vers 1992 et s’est installé au château Lafont-Menaut: « notre père (Anthony) nous a aidé à nous installer comme jeunes agriculteurs. »

Le château Carbonnieux est très connu en France et dans le monde, surtout pour ses vins blancs. Les blancs représentent 45% du vignoble. Et chiffre impressionnant, Carbonnieux produit à lui tout seul 20 % des blancs de l’appellation Pessac-Léognan. Eric Perrin tient à préciser « Dans les années 60, Bordeaux produisait plus de blancs que de rouges. 60% de blancs, dans les années 70 ce fut le point d’équilibre et aujourd’hui Bordeaux produit 87% de rouges. »

La cave des vieux millésimes avec le portrait de Thomas Jefferson, reçu en 1787 au château avant d'accéder à la Présidence des Etats-Unis d'Amérique © JPS

La cave des vieux millésimes avec le portrait de Thomas Jefferson, reçu en 1787 au château avant d’accéder à la Présidence des Etats-Unis d’Amérique, il a même planté un arbre, toujours présent sur la propriété © JPS

Si Denis Dubourdieu suit le domaine depuis 28 ans, Eric et Philibert Perrin ont décidé depuis une quinzaine d’années d’axer sur davantage de recherche de qualité avec un travail précis à la vigne, un travail parcellaire. Un savoir-faire apprécié et reconnu du monde entier, avec une renommée très importante pour le Carbonnieux blanc.

 Ainsi pour le blanc, « on a pas moins de 30 parcelles différentes. 100% est fermenté en barriques de chêne, on a une rotation de remplacement par quart par des barriques neuves », explique Philibert.

Eric Perrin: « Cette année, on a évolué dans les techniques de vinification. Avant de presser, on nous conseillait de laisser baigner la peau du raisin pour faire des macérations pelliculaires, désormais en prime on essaie de lutter contre des oxydations prématurées de certains millésimes... » Et Philibert d’ajouter: « On a raccourci ainsi les tapis convoyeurs, le pressurage se fait sous gaz inerte. On a ainsi une évolution qualitative dans le transport des raisins jusqu’au pressoir. C’est un progrès ! »

Le château Carbonnieux travaille aussi « depuis 25 ans en agriculture raisonnée: « pas d’insecticide, pas d’acaricide, pas de désherbant et ce depuis très longtemps », précisent Philibert et Eric ensemble. On les sent engagés dans une démarche louable:

La lutte est raisonnée, on va un un peu plus loin en minimisant les traitements car on connait le cycle des maladies donc on traite au mon moment » Eric et Philibert Perrin du château Carbonnieux.

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Et qui de mieux que les frères Perrin pour parler de leur savoir-faire: « autrefois, on confiait nos vins à la vente aux négociants, aujourd’hui on fait des tournées de 8 jours à tel ou tel endroit: ainsi entre la mi-janvier et le début mars, on a passé deux semaines aux USA, une en Europe et quinze jours en Asie… » explique Eric Perrin. Ils perpétuent ainsi la voie ouverte par leur père Antony qui fut l’un des pionniers de l’appellation à faire connaître Carbonnieux sur les marchés mondiaux et notamment aux Etats-Unis. Château Carbonnieux vend aujourd’hui 50 % de sa production en France et 50 % à l’étranger (Belgique, Allemagne, Suisse, Grande-Bretagne, USA, Japon, Chine…)

Cette semaine pour les primeurs les frères Perrin vont être sur le pont pour expliquer leur travail et celui de leur 45 personnes employées à plein temps (plus de la moitié des effectifs se consacre à la production). On va d’ailleurs les retrouver, dès ce lundi 9h30, pour la grande dégustation des Pessac-Léognan au château Smith Haut-Lafitte.

28 Mar

9e édition du salon du salon du vin de la Revue du Vin de France, les 5 et 6 juin à Paris

Rendez-vous avec l’élite du vignoble et les découvertes de la rédaction de la RVF, la plus vieille revue sur le vin (cf 1927); pour cette 9e édition, prenez la direction, les 5 et 6 juin prochains, du Palais Brongniart (l’ancienne bourse de Paris).

Un cadre magistral pour un rendez-vous inoubliable © RVF

Un cadre magistral pour un rendez-vous inoubliable © RVF

Les domaines

– 250 exposants sélectionnés par le comité de dégustation de La RVF.

– L’Inde sera cette année à l’honneur avec une sélection de domaines représentatifs de la production de ce pays.

Les Ateliers

– Six dégustations commentées par les journalistes de La RVF, de domaines deux et trois étoiles au Guide des Meilleurs vins de France 2015 : domaine Méo-Camuzet, château La Mission Haut-Brion, château Palmer, et une verticale exceptionnelle de la cuvée Cristal du champagne Louis Roederer.

– Mise en lumière de l’impact du verre dans la dégustation, en partenariat avec Chef & Sommelier. – Les dégustations Meetic : une autre façon d’apprendre et de se rencontrer autour de grands crus.

Nouveauté

Le vin des grands amateurs. Les visiteurs seront amenés à élire leur vin coup de cœur sur l’événement. Le domaine sera ensuite récompensé lors de la soirée des Hommes de l’Année de La Revue du vin de France en janvier 2016.

Retrouvez-les

– Le Concours de dégustation en partenariat avec les champagnes Duval-Leroy. Vingt équipes de lecteurs de La RVF et des Clubs d’œnologie des Grandes écoles s’affronteront lors d’une dégustation à l’aveugle de huit vins.

– L’espace gastronomique Cuisine et Vins de France, repensé pour cette nouvelle édition.

– Deux Food Truck seront présents devant le Palais Brongniart pour une pause gourmande : le célèbre Camion qui Fume et le Canard Huppé.

Pour plus d’infos : http://salon.larvf.com

27 Mar

Michel Rolland sur le 2014 à Bordeaux: « je pense que c’est le millésime qui viendra immédiatement derrière les grands 2009 et 2010. Ce sera un excellent millésime ! »

A l’aube de la grande semaine des primeurs, les grands oenologues consultants y vont de leur analyse. Côté Châteaux reprend ici la primeur du commentaire que Michel Rolland, le plus connu mondialement des consultants bordelais, a laissé sur le site « les Clés de Châteaux ». Une parole d’expert.

michelrolland

« Le Millésime 2014…

Le 2014, c’est un millésime qui était un petit peu difficile au départ, dans sa gestation on va dire, parce que le temps ne lui a pas été favorable. On est arrivé fin août avec beaucoup d’inquiétudes.

Et comme toujours quand Dame Nature décide que cela se passerait bien, on a eu un très beau mois de septembre, un été indien quasi parfait et moralité on fait un très bon millésime !

2014, c’était le millésime parfait pour les oenologues, parce que c’est un millésime de difficulté », Michel Rolland.

Rien n’est écrit d’avance, il faut savoir quel raisin on a entre les mains, ce que l’on peut en faire, comment on va les vinifier pour les optimiser.

michel

Ce sera un millésime un petit peu hétérogène. Mais c’est un millésime de qualité. Ca ressemble à 2008, parce que c’est un millésime qui s’est fait tardivement », Michel Rolland

La maturité s’est plutôt faite sur octobre que sur septembre comme se font les millésimes précoces.

En fait le temps, c’est notre allié ou notre ennemi. C’est vrai que l’été a été plutôt froid, on a eu des périodes pluvieuses.

Malgré tout, c’est un millésime de fruit, un millésime de fraîcheur et un millésime d’acidité. Il y a une tension, il y a de vrais tanins. Par rapport à 2008, il y a un petit peu plus de précision, parce que les propriétés travaillent de mieux en mieux.

Donc on a de jolis arômes, des jolis tanins, on a une jolie définition de vin avec beaucoup de fraîcheur et beaucoup de plaisir, ça sera ça 2014. Il faudra goûter parce que tout n’est pas comme cela. Mais c’est un millésime que l’on peut placer avec 2008, voire supérieur.

Et- je pense que c’est le millésime qui viendra immédiatement derrière les grands 2009 et 2010. Ce sera un excellent millésime ! »

Retrouvez l’interview de Michel Rolland sur le site des Clés de Châteaux

Bingo ! 4 500 euros de bourse offerts pour une étude sur l’œnotourisme par le réseau des Capitales de Grands Vignobles

Encourager la recherche sur l’œnotourisme, tel est l’objectif des bourses offertes depuis 8 ans par le réseau des Capitales de Grands Vignobles. A la clé pour l’étudiant lauréat : 4 500 euros en échange des résultats de son étude. Les dossiers peuvent être déposés jusqu’au 30 septembre 2015.

greatwine

Impulsée par le Réseau des Capitales de Grands Vignobles, la 8ème édition des bourses de recherche internationale sur l’œnotourisme vient d’être lancée. C’est l’opportunité pour les étudiants ou jeunes chercheurs des villes du Réseau de voir leur projet récompensé par la coquette somme de 4 500 euros. En encourageant la recherche sur l’œnotourisme, le réseau souhaite bénéficier de données et informations utiles au développement de cette activité.

Pour être admissible à la subvention internationale 2015-2016, les projets doivent aborder des thématiques liées au marketing du tourisme et du vin et être en rapport direct avec l’une des grandes régions du réseau. Un jury, composé d’experts et d’universitaires, attribuera une bourse d’un montant de 4 500 euros en 2015.

Une subvention supplémentaire de 1 000 euros sera décernée au boursier qui présentera en personne son projet à l’Assemblée Générale annuelle du Réseau des Capitales de Grands Vignobles. En 2015, la rencontre est programmée en novembre prochain à Bilbao (Espagne). La contribution supplémentaire est destinée à couvrir les frais de déplacement du lauréat et son hébergement. 

Tous les étudiants actuellement inscrits à un programme d’études dans une ville du réseau ou travaillant sur une thématique liée à une des régions viticoles concernées peuvent participer au concours. Ils ont jusqu’au 30 septembre 2015 pour télécharger et renvoyer leur dossier de candidature sur le site www.greatwinecapitals.com.

En 2014-2015, c’est Inès BINNINGER, de Mayence-Rheinhessen, qui a obtenu la bourse pour son projet « Development of a destination card system for Rheinhessen ». Toutes les études réalisées sont consultables sur le site internet du Réseau.

Créé en 1999 par la CCI de Bordeaux, le Réseau des Capitales de Grands Vignobles rassemble 8 grandes métropoles internationales : Bilbao/Rioja (Espagne), Bordeaux (France), Cape Town/Cape Winelands (Afrique du Sud), Mayence/Rheinhessen (Allemagne), Mendoza (Argentine), Porto (Portugal), San Francisco/Napa Valley (Etats-Unis) et Valparaiso/Casablanca Valley (Chili). Il a pour vocation de développer des programmes de coopération et de favoriser les échanges entre ses membres.

 Renseignements : CCI de Bordeaux/Secrétariat Réseau des Capitales de Grands Vignobles: 05 56 79 51 64 ou sur le site internet  www.greatwinecapitals.com

Le 2014: « un millésime harmonieux » pour Hubert de Boüard

Hubert de Boüard, oenologue, consultant et propriétaire du célèbre château Angélus donne ses premières impressions sur le millésime 2014. Les voici en primeur…

© Hubert de Boüard et son fils

© Hubert de Boüard et son fils Matthieu

« 2014 s’affirme comme un millésime où la climatologie a été un vrai challenge pour le vigneron, mais ces conditions climatologiques particulières et spécifiques à Bordeaux permettent d’obtenir équilibre et élégance. Une arrière saison simplement géniale qui a donné aux grands vins de Bordeaux ce grain, ces saveurs, cette harmonie unique.

7 semaines consécutives d’un temps parfait pour une maturité lente : températures fraiches la nuit et équilibrée le jour ; très peu de précipitations et un soleil de fin août, de septembre et d’octobre qui ne brûle pas, qui mûrit lentement, et qui permet à la vigne de finir en douceur, en donnant des raisins mûrs, plein de fruits de saveurs subtiles et de tanins délicats. »

Voici ces appréciations:

« Les yeux : les robes sont soutenues, allant du rouge carmin au noir foncé, brillantes, profondes, un peu bleutées. La couleur est bien nette, dense et précise.

Le nez : il passe du fruit noir mûr, (cerise, mûre) aux arômes de groseilles bien mûres, aériennes et fraîches, accompagnés de violette et d’épice.

C’est un fruit net, pur, bien mûr, qui domine sur ce millésime.

La bouche : elle est riche, ample, généreuse, suave, structurée avec un charme dans les tanins, opulent, délicat; il y a un bel équilibre dans la diversité des terroirs.

La finale est pleine d’appétence, fraiche, surtout quand les cabernets francs ou sauvignons bien récoltés, sont en quantité suffisante pour donner allonge, vivacité, et élégance. »

Pour aller plus loin: Hubert de Bouard Consulting

26 Mar

C’est à Buzet ! Ils s’engagent autrement…Les Vignerons de Buzet concilient depuis 10 ans viticulture et environnement

Les Vignerons de Buzet ont fait leur révolution. Depuis 10 ans, leur coopérative s’est engagée dans une viticulture « plus propre », alliant technologie de pointe, respect des hommes et de l’environnement. 198 irréductibles vignerons se font entendre en prônant le développement durable et la réduction des pesticides.

Vincent Leyre, Serge Lhérisson et David Bidegaray des Vignerons de Buzet © Jean-Pierre Stahl

Vincent Leyre, Serge Lhérisson et David Bidegaray des Vignerons de Buzet © Jean-Pierre Stahl

Quand on les rencontre, on est sous le charme de leur accent chantant du Lot-et-Garonne…Mais au fait Buzet, c’est où ? « Entre Bordeaux et Toulouse », répond systématiquement Pierre Philippe le directeur de la Cave coopérative à ses interlocuteurs qui lui posent cette sempiternelle question.

D'irréductibles vignerons à Buzet: ils sont devenus bee friendly ! © JPS

D’irréductibles vignerons à Buzet: ils sont devenus bee friendly et accueillent aussi les faucons ! © JPS

Ils ont en eux la fibre Uderzo: leur Buzet ressemble à un vignoble d’irréductibles Gaulois… En effet, avec leur petit nom face à l’ogre Bordeaux, ils continuent de jouer des coudes dans le marché mondial du vin, présents encore la semaine dernière à ProWein à Düsseldorf. Ils se réclament du Sud-Ouest tout en refusant toute alliance, notamment avec Bergerac et Duras. La liberté n’a pas de prix.

Avec 198 adhérents, exploitants 1870 ha en AOP Buzet, ces vignerons ont changé de braquet en 2005. Bien qu’ayant des domaines vallonés, pas question de s’endormir sur leur lauriers. Avec Pierre Philippe à leur tête, ils ont fait le choix de s' »engager autrement » dans la biodiversité et dans l’agriculture raisonnée.

On pourrait les prendre pour des farfelus, devieux écolos ou d’anciens soixante-huitards, mais pas du tout ! C’est une démarche honorable qui vise à respecter davantage la nature et les hommes. Depuis 10 ans, ils réduisent ainsi les intrants: ils se sont ainsi engagés à n’utiliser aucun engrais chimique sur leur vignoble : 0 engrais chimique mais de l’engrais organique. 0 acaricide également et 0 anti-botrytis.

El Gringo, il est bon mon engrais © JPS

El Gringo, il est bon mon engrais © JPS

On a interdit les herbicides résiduaires, on a interdit les engrais chimiques, tout ce qui était anti-botrytis que l’on retrouvait dans les vins, connus pour être l’assurance tous risques, ça a été un choc des cultures chez nos adhérents », Vincent Leyre des Vignerons de Buzet

Les Vignerons de Buzet sont fiers de nous emmener sur Gueyze, une partie en pointe dans les choix qu’ils expérimentent constamment: « sur ce vignoble, nous pratiquons la bio-diversité. Par exemple, on protège la tulipe agenaise…Avec la Sepanlog, on a transféré des tulipes qu’on a trouvé au bord d’un fossé pour les planter dans nos vignes, ça démontre que nos terrains sont assez riches et pas asphyxiés par certains désherbants. » « On a aussi replanté des haies, ça protège les auxiliaires, ça sert aussi de corridor, c’est important que les animaux puissent communiquer », explique Serge Lhérisson.

« On a mis des nichoirs en place aussi pour la chouette chevêche d’Athéna, un nichoir à faucon sur la partie la plus haute devenu l’emblème du vignoble. Tous les vignerons mettent ces nichoirs fabriqués à partir d’une caisse en bois de 6 bouteilles et ils en sont fiers. On protège aussi la chauve-souris qui mange beaucoup d’insectes(on a beaucoup de parasite comme la flavescence dorée, et elle en consomme beaucoup). »

Les vignerons de Buzet ont malgré tout quelques racines bordelaises, avec aussi les mêmes cépages qu'à Bordeaux © JPS

Les vignerons de Buzet ont malgré tout quelques racines bordelaises, avec aussi les mêmes cépages qu’à Bordeaux © JPS

Buzet, c’est aussi cette appellation qui a été relancée depuis 1953, sous l’impulsion d’un bordelais, Jean Mermillod, l’ancien maître de chai du château Lafite-Rothschild, appelé à devenir le directeur de cette cave coopérative… Pas étonnant dès lors de retrouver ces cépages du bordelais qu’il a souhaité replanter: 50% merlot, 25% cabernet sauvignon et 25 % cabernet franc. Et pour les blancs: sauvignon et sémillon.

Aujourd’hui leur directeur actuel, Pierre Philippe, originaire des Pyrénées-Atlantiques, a aussi marqué de son empreinte le vignoble avec ce virage sur la viticulture raisonnée et la bio-diversité. Aujourd’hui, ce vignoble de Gueyze (AOP Buzet) est le 1er vignoble à être labellisé « bee friendly », validé en janvier 2015; preuve supplémentaire de la limitation des traitements et du respect des abeilles.

Depuis 2005, on a axé sur le développement durable. C’est ancré dans les gênes de l’entreprise. C’est des gens qui ont envie de travailler au contact de la nature, ils ont une vraie sensibilité au côté environnemental », Pierre Philippe, directeur des Vignerons de Buzet.

Mais ils ne sont pas que de doux rêveurs, amis de la nature et des petits oiseaux…ce sont de grands producteurs qui ont derrière eux plus de 60 ans d’expérience et de mise en commun de leur production et de leurs moyens de vinification. Chaque année ce sont 12 millions de bouteilles qui sont produites.

Avec une cinquantaine de commerciaux dans l’hexagone, Buzet s’est implanté dans toutes les enseignes de la grande distribution; 80% de la production est commercialisée en France avec également les HCR et chez les cavistes, 20% à l’export (Europe, Etats-Unis et Asie). Mais ils ne dorment pas et misent sur de nouveaux outils comme ce filtre tangentiel et cette électrodialyse (digne des hôpitaux), ils comptent aussi augmenter leur production en BIB: ils commercialisent 720 000 bags in box à l’année, un marché en constante augmentation…

Fort de ces arguments, ils sont partis à ProWein pour essayer de trouver de nouveaux horizons pour leurs vins, avec des Allemands toujours très soucieux d’environnement. Leur principale force, c’est aussi le bon rapport qualité prix de leurs vins et une fidélité de leurs clients qui s’arrêtent parfois avec des bus entiers se ressourcer à Buzet…

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl,Didier Bonnet, Eric Delwarde et Boris Chague 

Ecoutez également la chronique « Vigne & Vin » avec Frédéric Lot : 

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