14 Avr

Vigilance autour de la bactérie xylella fastidiosa: « les services de l’Etat sont en alerte »

En Aquitaine et à Bordeaux, la menace que fait peser la bactérie « xylella fastidiosa » sur le vignoble est prise au sérieux. Celle-ci est arrivée en France, elle vient de faire son apparition au marché de Rungis: un plant de caféier infecté a été saisi, vient d’annoncer le Ministère de l’Agriculture. La maladie est surtout très présente dans la région des Pouilles, à l’extrême sud de l’Italie. Alors que les Corses sont depuis plusieurs semaines déjà effrayés par une éventuelle contagion avec la zone infectée en Italie du Sud pour leurs oliviers et autres plantations, la vigilance de tous est requise partout.

Denis Thiéry, directeur de recherches à l'Inra Bordeaux © JPS

Denis Thiéry, directeur de recherches à l’Inra Bordeaux © Jean-Pierre Stahl

Pas d’affolement, ce n’est pas l’hystérie, ni la psychose qui doit l’emporter mais bel et bien une information de tous pour être en mesure de détecter rapidement les symptômes.

L’actualité vient une fois de plus de nous rattraper avec dernier événement en date: l’interception à temps d’un plant de caféier infecté en provenance d’Amérique Centrale. C’est le Ministère de l’Agriculture qui l’a annoncé ce mercredi 15 avril. Ces plants ont été saisis à Rungis chez un revendeur du premier marché de gros européen. « Ils ont été introduits dans l’Union européenne via les Pays-Bas » et proviendraient « d’Amérique centrale ». (Lire le Monde.fr)

A l’Inra Bordeaux Aquitaine, situé à Villenave d’Ornon, on est conscient du danger potentiel: « l’enjeu est important, il faut une information très rapide des acteurs de la filière: les symptômes sont un dessèchement, un jaunissement des feuilles, des feuilles qui tombent et le pied qui peut mourir; il peut y avoir des cas de rétablissement… » précise Julien Chuche, du laboratoire Save « Santé et Agro écologie du Vignoble ». L’Inra travaille sur les insectes vecteurs des bactérioses en laboratoire, mais tient à préciser d’emblée qu’il n’est pas habilité à travailler dessus pour le moment car ce sont des maladies de quarantaine. Il faudrait une dérogation.

Denis Thiéry, directeur de recherches à l’Inra, précise face à cette bactérie: « Oui c’est quelque chose d’inquiétant, mais non nous ne sommes pas envahis en France actuellement. Pour l’instant elle est en Italie, depuis quelques années. On ne la trouve pas encore en vignoble en Europe. Elle est inquiétante parce qu’on la retrouve sous un autre vocable: maladie de Pierce en Californie… »

 

Et d’ajouter: « Ce qui se passe en Italie, c’est qu’un certain nombre de cultures sont maintenant attaquées par cette maladie: les cultures d’oliviers en particulier, sous le feu des projecteurs, il y a de très gros dégâts sur les oliviers, on a trouvé aussi des dégâts sur les amandiers mais cela est plus anecdotique. Le risque est aussi lié au fait qu’en Italie, les cultures d’olives sont très souvent contigues avec les cultures de vigne, donc l’inquiétude est majeure d’un passage de cette bactérie des plantation d’olives au vignoble, mais pour l’instant il n’y a pas de cas avéré encore.. Mais on est sous surveillance et inquiétude majeure car ça provoque de très gros dégâts et ça pourrait être catastrophique si ça passait à la viticulture. »

Joint par téléphone, François Hervieu, chef du service alimentation à la direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt confirme que, suite à l’Arrêté Ministériel du 3 avril interdisant l’importation en France de végétaux sensibles à Xyllela fastidiosa et provenant de zones touchées par la bactérie:

Le dispositif est en train de se déployer, le service est placé en alerte. Nous prenons très au sérieux cette affaire », François Hervieu chef de service de l’alimentation Draaf Aquitaine

D’emblée l’arrêté ministériel demandait   « chacun doit prendre une part active à la prévention, une communication spécifique à destination des acteurs concernés (professionnels des filières végétales, collectivités) et du grand public sera mise en oeuvre pour accompagner la surveillance renforcée.

François Hervieu précise: « nous sommes en train d’écrire un courrier à l’ensemble des professionnels du secteur viticole ainsi qu’aux pépiniéristes de l’ensemble des secteurs. Nous appelons à la coopération et à la vigilance de tous, pour nous signaler tout végétal qui présenterait ces symptômes pour intervenir d’urgence. » Aujourd’hui le Draf est sur le pont mais aussi la Fredon (Fédération Régionale de Défense contre les Organismes Nuisibles. Et de préciser tout signalement doit être fait à la Draf ou à la Fredon.

Au Marché d’Intérêt National de Brienne, Arnaud Desage, grossiste en végétaux et créateur de jardins, se veut rassurant. Ses beaux oliviers centenaires viennent d’Espagne, toutefois, il a certaines plantes importées d’Italie: « mon importateur est à Pistoï, à 1000 km de la région des Pouilles, et tout est contrôlé là-bas, il y a quand même de gros moyens qui sont mis en place: toute la région a été isolée (un cordon sanitaire a été établi sur 20 km de large dans la région des Pouilles), les plantes ont été détruites, c’est testé régulièrement, toutes les semaines. Apparemment le problème est quand même écarté. » Il nous montre le courrier de son fournisseur italien en gage de garantie qui stipule « notre région la Toscane est reconnue indemne de xylella fastidiosa et l’interdiction concerne les végétaux sensibles à cette bactérie seulement s’ils sont originaires ou en provenance des zones infectées. »

Bernard Farges le président du Civb © JPS

Bernard Farges le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux © JPS

Bernard Farges, Président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux commente les mesures gouvernementales prises: « le ministère de l’Agriculture a pris des dispositions eu égard à ce qui se passe en Italie, Stéphane Le Foll a manisfesté son inquiétude début auprès de la Commission Européenne pour que des mesures soient prises pour faire face à cette nouvelle problèmatique sanitaire, circonscrite pour l’instant en Italie. Il y a des protocoles qui sont en place. L’Italie a activé ce protocole-là sans doute un peu lentement. Et aujourd’hui la France a pris des mesures d’interdiction à l’importation d’un certain nombre de produits. »

« Pour ce qui est de la commercialisation des filières organisées et tout-à-fait légales de commercialisation de plants d’oliviers et de plants de vigne, tout cela a été organisé assez vite. Evidemment, on peut être assez inquiets sur les flux de touristes qui pourraient ramener de jeunes plants d’olivier (en souvenir), là c’est une problématique qu’on n’arrive pas bien à identifier. Il y a des mesures d’alerte auprès de ces consommateurs touristes. Après les frontières ne sont pas étanches, nous le savons, donc il y a une vraie vigilance en France pour bien observer ce qu’il peut se passer dans nos vignobles et dans les vergers pour nos collègues arboriculteurs. »

« Nous professionnels, nous avons les circuits d’information internes hedomadaires, donc ces informations ont été passées. Mais ces symptômes on en peut les voir que quand la vigne pousse, donc dans quelques semaines. Aujourd’hui et l’an passé en 2014, il n’y a pas de présence avérée sur le sol français de cette maladie, donc il ne faut pas s’alerter, il faut être extrêmement vigilant, nous sommes en lien direct avec les services régionaux du ministère de l’agriculture, aujourd’hui nous sommes vigilants mais il n’y pas lieu s’inquiéter outre mesure ».

Delphine Bouges, pépinièriste de plants de vignes à Camiran © JPS

Delphine Bouges, pépinièriste de plants de vignes à Camiran © JPS

Les pépinières viticoles sont aussi informées. Ces 50 pépinières que comptent la Gironde ont été et sont toujours en pointe dans la lutte contre le phyloxéra qui avait ravagé tout le vignoble à la fin du XIXe siècle. Depuis, elles réalisent pour les viticulteurs des pieds hybrides en faisant des greffons qui résistent au phyloxéra

Ainsi à Camiran, dans les pépinières Bouges, on réalise 800 000 pieds greffés à l’année. Dans cette pépinière crée par son arrière grand-père, Delphine Bougès nous reçoit pour nous montrer ce travail minutieux où des poiçoinage omega sont réalisés pour adapter ces greffons, ces cépages sur des portegreffes, propres à résister au phyloxéra.

Cependant, ce type de plant ne résiste pas à la bactérie. Les chercheurs en Italie n’ont trouvé aucune parade pour l’heure. Delphine Bougès précise: « cette bactérie est transportée par un vecteur, un petit papillon qui pique d’autres plantes et c’est comme cela que la maladie est transmise ». La seule manière d’héradiquer cette bactérie serait de s’attaquer au vecteur de transmission et bien sûr d’avoir un cordon sanitaire efficace.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl et Didier Bonnet

07 Avr

Alerte à la bactérie tueuse…la xylella fastidiosa

C’est une épidémie dans le talon de l’Italie, la bactérie xylella fastidiosa a ravagé des milliers d’hectares d’oliviers. Le région est déclarée sinistrée. Un cordon sanitaire a été établi pour éviter une propagation au reste du pays et à l’Europe. Réactions  du monde viticole à Bordeaux qui prend cette alerte au sérieux.

La bactérie «Xylella fastidiosa», qui assèche les oliviers, des ravages dans le Salento, berceau de plantations centenaires.  © Tribune de Genève photo: EPPO

La bactérie «Xylella fastidiosa», qui assèche les oliviers, des ravages dans le Salento, berceau de plantations centenaires. © Tribune de Genève photo: EPPO

Joint par téléphone ce matin, Xavier Planty, le président des Sauternes, par ailleurs défenseur du bio, se dit « très très inquiet ». « Le problème est simple, on l’a eu sur l’arbre fruitier le poirier avec le feu bactérien », il l’a complétement décimé…Quant à traiter avec des antibiotiques, il est hors de question de balancer des antibiotiques dans la nature. »

« J’espère que l’Inra s’est penché sur la question. C’est un peu le même sentiment pour ce nouveau parsite que l’on a eu pour la drosophila suzukii, cette bestiolke capable de percer la peau des raisins. Ca peut remettreplein de choses en cause. Est-ce qu’on est à la veille d’une crise comme le phylloxéra ou le mildiou ? »

« La lutte contre le phylloxéra ou l’oidium avait été un foutoir monstre. Sur le mildiou, le traitement avait été trouvé très vite avec la bouillie bordelaise. Sur l’oidium, ça a mis du temps à trouver. »

Xavier Planty,  président des Sauternes. © Jean-Pierre Stahl

Xavier Planty, président des Sauternes. © Jean-Pierre Stahl

Pour l’Inra que nous avons contacté, on reconnaît qu’il y a un vrai risque sur d’autres espèces arboricoles que l’olivier. Une veille presse et les chercheurs de deux laboratoires planchent sur la question avec notamment le laboratoire Santé et Agroécologie du Vignoble. Denis Thiéry, absent de Bordeaux pour des raison personnelles, nous recontactera prochainement: « il a un projet de recherche dans lequel est intégré cette maladie comme d’autres qui peuvent ravager la vigne ».

Le Président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux, Bernard Farges reconnaît que « même si on peut être inquiet », les « Italiens ont plutôt réagi tranquillement. On a eu une présentation par France Agrimer du plan d’action national. « Le ministre de l’agriculture a annoncé ce week-end son plan d’action « , qui dispose: « Un arrêté a été signé ce jour (le 3 avril) et sera publié demain afin d’interdire l’importation en France de végétaux sensibles à Xyllela fastidiosa et provenant de zones touchées par la bactérie. Cette interdiction concerne les échanges intra-européens depuis la région des Pouilles et les importations issues des zones infectées des pays tiers concernés. Elle sera assortie du renforcement du plan de contrôle et de surveillance sur l’ensemble du territoire national ».

« Toutefois, il faut être prudent, être vigilent quant à l’alerte que l’on diffuse ! Pour tout ce qui est filère d’importation, on peut les contrôler, maIs c’est plus compliqué quand des particuliers reviennent avec de jeunes oliviers, on peut là s’inquiéter. »

Bernard Farges à gauche, le président du CIVB © JPS

Bernard Farges à gauche, le président du CIVB © JPS

Et de préciser: « en Italie, il ont fait un sas de décontamination pour arracher le vignoble et éviter que la maladie ne se propage. » « Chaque semaine en France les viticulteurs remplissent le BSEV le bulletin de santé du végétal ». Il est envoyé chaque semaine aux viticulteurs où on a toute une appréciation de l’épidémiologie. Mais il n’y a pas de foyer répertorié en France. »

Pour Arnaud Desage, pépiniériste au Marché d’Intérêt National de Bordeaux, importateur d’oliviers et autres plantes méditéranéennes: « si cette bactérie est sur les oliviers, elle sera sur d’autres plantes forcément. Avec la mondialisation, il y a des plantes sur lesquelles on ne pourra pas voir. Il y a beaucoup de bactéries, d’insectes ces derniers temps. Au Japon, ils ont pris des mesures plus sévères en karcherisant les plantes importées. Moi mes oliviers viennent essentiellemnt d’Easpagne mais j’ai des lauriers qui viennent d’Italie. Je vais me renseigner pour savoir comment ça évolue là-bas…Je vous rappelle… »

Dans les Pouilles en Italie, où Xylella fastidiosa est apparue pour la première fois en 2013, la situation est catastrophique. Selon le commissaire européen à la Santé, Vytenis Andriukaitis, 10% des 11 millions d’oliviers de la province de Lecce sont touchés par cette bactérie.  La solution est l’arrachage et la destruction des arbres malades. Il n’y a pas de remède pour l’heure; l’Italie a mis en place une zone de confinement de 241.000 hectares dans les Pouilles. 

On voit le problème de la xylella fastidiosa ne fait que commencer. Il faut que les Italiens prennent des mesures draconniennes tant pour la survie de leurs espèces dans le reste de la péninsule que pour l’ensemble de l’Europe. Il ne s’agit pas de donner des leçons à qui que ce soit, mais d’avoir  des pouvoirs publics à la hauteur des enjeux.

Le site du Ministère de l’Agriculture précise: « La bactérie Xylella Fastidiosa peut affecter plus de 200 espèces végétales appartenant à 50 familles botaniques différentes. Cet organisme nuisible aux végétaux est connu outre Atlantique comme agent de la maladie de Pierce, qui a fortement touché les vignobles californiens dans les années 1990, et est également responsable d’une maladie ayant fortement impacté les agrumes au Brésil à la fin des années 1980. Cette bactérie est transmise et dispersée par des insectes vecteurs. Elle est absente du territoire français. Après sa découverte pour la première fois en Europe, sur le territoire italien, fin 2013, la Commission européenne a adopté au cours de l’année 2014 des mesures européennes pour empêcher d’autres introductions ainsi que la propagation de la bactérie dans l’Union européenne. »

On a vu comment le problème du frelon asiatique dans un passé récent avait été traité en France où il a été importé dans des poteries chinoises en 2004 via le port de Bordeaux et dans le Lot-et-Garonne. Depuis tout le Sud-Ouest a été infesté, et même bien au delà, on en répertorie partout en France,  parfois dans le Nord de l’Europe et au Portugal récemment. Un préfet de la région Aquitaine avait pris comme arrêté de limiter l’intervention des sapeurs pompiers pour la destruction des nids car trop chères (ils en faisaient plus de 700, ce fut réduit à moins de 30 en 2008), en restreignant leurs opérations à des dangers immédiats pour l’homme. Seuls les associations étaient en pointe dans ce combat comme AAAFA33 et les apiculteurs qui ont vu leurs ruches décimées… (sans parler des personnes allergiques qui sont décédées, à la suite de piqûres de frelons asiatiques).

Le parallèle n’est pas osé, il s’agit juste de prendre les bonnes décisions, drastiques s’il le faut, plutôt qu’attendre. Ces mesures doivent être prises en Italie et en France au niveau cordon sanitaire et interdiction des importations. Il s’agit d’informer sans vent de panique mais de prendre conscience de ce risque majeur, comme ce fut le cas pour le phylloxéra.

Hommage à cette grande dame de la biodynamie: Anne-Claude Leflaive s’en est allée…

La Bourgogne est triste. La papesse de la biodynamie vient de décéder. Anne-Claude Lefaive vient de nous quitter à 59 ans. Elle était à la tête du Domaine Leflaive en AOP Puligny-Montrachet, un domaine qui remonte à 1717.

Anne-Clade Leflaive © La Presse.ca

Anne-Claude Leflaive © La Presse.ca

C’était un personnage. Comme il en est tant dans le monde du vin. Au début des années 90, Anne-Claude  Leflaive venait de reprendre le domaine familial et avait décidé de le cultiver en biodynamie. Une démarche qui vise à respecter non seulement la plante à réhabiliter, dynamiser et intensifier la vie organique dans le milieu où vit la vigne. Cette démarche consiste à intensifier les échanges entre la plante et son environnement (terre et air), de façon à obtenir de meilleurs raisins et donc de meilleurs vins. 

« La biodynamie développe toutes les espèces vivantes grâce à des préparas spécifiques, élaborés à partir d’achillée, de camomille, d’ortie,de pissenlit, de valériane, de compost et de silice, véritables catalyseurs d’énergie. C’est par l’intermédiaire de la plante que l’ensemble de l’organisme est vivifié, tant par l’enracinement profond que par les feuilles captatrices d’énergie solaire. Le vin, issu de cet accord, est le résultat de l’équilibre entre le terroir et l’environnement aérien » comme le souligne  François Bouchet, conseiller du Domaine Leflaive en agriculture biodynamique depuis 1989. 

Parmi les pépites produites par cette viticultrice hors pair: un Meursault Premier Cru les Pucelles d’Anne-Claude Leflaive, auquel bon nombre d’amateurs de blanc sec vouent un culte certain.

Cette démarche de cultiver le domaine en biodynamie avait marqué les esprits et fait des émules au point de consacrer Anne-Claude Leflaive comme la papesse de cette pratique culturale. Elle avait aussi acqui des domaines dans la Loire comme le souligne cet article de 2013 de la Presse.Ca: « une Bourguignonne dans la Loire » De nombreux grands noms du monde du vin et passionnés du monde entier lui rendent hommage aujourd’hui.

rolland

06 Avr

Patrick Bernard sur le 2014: « j’ai vraiment l’impression d’avoir dans mon verre des vins qui me rappellent 2009, 2010, 2005, un cran en dessous…Ils seront buvables plus tôt. »

Retour sur les primeurs 2014, avec une figure du négoce bordelais: Patrick Bernard, le PDG de Millésima, nous livre son avis sans concession sur le nouveau millésime. Il est l’invité de Parole d’expert dans Côté Châteaux.

Patrick Bernard, le Pdg de Millésima © Jean-Pierre Stahl

Patrick Bernard, le Pdg de Millésima © Jean-Pierre Stahl

Jean-Pierre Stahl: « Patrick Bernard, quelle impressions vous procurent ce nouveau millésime 2014 en rouge ?

Patrick Bernard: « Ca fait déjà pas mal de temps que je le déguste. Tout d’abord nous sommes propriétaires et nous avons déjà fait des assemblages et goûté 50 cuves pour une propriété. Donc en tant que propriétaires, nous avons déjà une idée très précise, mais en tant que négociant, j’ai aussi goûté beaucoup les vins de propriétés pour le 2014, des propriétés qui ont eu la gentillessse de me faire passer des échantillons un peu au préalable, de façon à ce que je puisse me faire une idée.

J’avoue que je suis ravi, parce que j’ai créé l’affaire de négoce de vins en 1983 car j’étais un consommateur passionné de vins:

Je retrouve un millésime comme je les adore: un millésime riche, dense, opulent mais qui est rafraîchissant, désaltérant parce que vous avez des degrés pas très élevés, on a perdu 1,5 degré par rapport aux millésimes extraordinaire de 2009 et 2010, » Patrick Bernard, Pdg de Millésima.

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Aujourd’hui, j’ai vraiment l’impression d’avoir dans mon verre des vins qui me rappellent 2009, 2010, 2005, un cran en dessous…Mais d’un autre côté, il n’y a pas ces critères très gros degré, très grosse puissance tanique ou de fruit qui font que ce sont des vins qui vont avoir besoin de 10, 15 ou 20 ans pour arriver au top niveau.

Là, on a un peu la même chose, mais ça sera buvable plus tôt. Au fond, je me dis en tant que consommateur: on va avoir les 2012 qui vont être agréables assez rapidement, après on va avoir les 2014 qui vont tenir de 10 ans à 25 ans, et puis on va avoir les 2009 et 2010 qui vont tenir 30 ans et plus…Il y a pas longtemps on buvait des 45, 47, des 28, des 29…c’est le même niveau de vin, c’est des vins qui ont une vie de chais, des vins qui ont besoin de temps pour se faire.

Avec les 2014, on a tout ce qu’il faut pour revenir en grâce auprès du consommateur », Patrick Bernard.

C’est vrai qu’avec les millésimes 11,12,13 on avait des qualités moyennes, pas extraordinaires mais pas catastrophiques non plus mais on avait des prix qui étaient ridicules ! Des prix beaucoup trop élevés. Il y avait des raisons, mais il n’empêche pour le consommateur les prix étaient beaucoup trop forts.

Aujourd’hui, on a la chance d’avoir un millésime de très belle qualité, avec des volumes, donc la propriété a toutes les cartes en mains, si elle veut reprendre le marché elle peut le faire.

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Jean-Pierre Stahl: « C’est-à-dire, il va falloir que ce 2014 ne se vende pas trop cher ? »

Patrick Bernard: « Le problème, c’est que chaque château a son marché. Donc pas trop cher ne veut pas dire la même chose pour X ou pour Y. Il y en a certains qui sont allés à des prix à des niveaux tels que la consommation ne peut plus s’y intéresser.

Chez Millésima, nous avons 90 000 clients dans 120 pays, donc on a vraiment une vision mondiale, on a une filiale aux Etats-Unis qui représente 10% de notre chiffre d’affaire, on a des sites à Hong-Kong et Singapour donc on a des pieds non seulement en Europe mais aussi dans tous les marchés. Et on voit très bien qu’il y a certains niveaux de prix qui font que certains vins ont des marchés de plus en plus restreints, et ceux-là il va vraiment falloir qu’ils fassent un effort, qu’ils réfléchissent, qu’ils regardent…le prix des millésimes anciens pour faire leurs nouveaux prix. Parcontre des vins qui sont retés à des niveaux de consommation, on ne peut pas leur demander de baisser très fortement.

C’est un marché où il va falloir refermer l’accordéon ! L’accordéon s’était beaucoup ouvert avec les grands millésimes, là il va falloir recentrer les choses. »

02 Avr

Charles Berling s’empare des clés de châteaux et promet un futur grandiose aux primeurs 2014

Au château la Dominique à Saint-Emilion, l’acteur Charles Berling a fait le show, en compagnie de la famille Rolland et de Jean-Claude Fayat, président du groupe Fayat (propriétaire du château). L’acteur qui a succédé à Adriana Karembeu pour cet événement signé les Clés de Châteaux, a dégusté quelques vins en primeurs et a trouvé l’ensemble de « très bonne qualité ».

Michel Rolland, Stépanie Dany, et Marie from the Rolland family et Charles Berling © Jean-Pierre Stahl

Michel Rolland, Stéphanie, Dany, et Marie from the Rolland family et Charles Berling © Jean-Pierre Stahl

Il était attendu telle une star et pourtant il ne se la joue pas. Plutôt décontracté l’acteur du « prénom » (2012)… Il s’est même fait aujourd’hui un nom dans le monde du vin à Saint-Emilion. Pour la présentation du millésime 2014, Charles Berling rivalisait de sourire, de sympathie et de décontraction avec son guide Michel Rolland, connu pour sa bonhomie.

Commençant le petit tour d’horizon des 240 vins que Michel Rolland conseille dans le monde, Charles Berling s’arrêtait tout d’abord sur un petit vin qui porte ce joli prénom « Dominique ». Et même s’il connait la chanson (dominique…non, de roland, non plus), peut-être parce qu’il est chanteur aussi, il s’est prêté à ce sport du lever de coude et du commentaire: « le fruit est très présent, avec le temps, c’est des vins qui prennent de l’ampleur… »  Jean-Claude Fayat, le propriétaire de la Dominique, d’expliquer: « un vin comme cela avant, à Bordeaux il fallait attendre 10 ans avant de le boire, maintenant on peut le boire plus jeune. » Et Michel Rolland de se congratuler: « c’est très bien la Dominique 2014 » Charles: « tu contribues à le faire… » « Non, c’est l’équipe qui le fait ! » répond avec simplicité le célèbre oenologue entouré de ses fidèles collaborateurs, Bruno Lacoste oenologue, et Jean-Philippe Fort qui conseille Valandraud et Troplong Mondot.

Michel Rolland, Charles Berling, Stéphanie Rolland et Jean-Claude Fayat © JPS

Michel Rolland, Charles Berling, Jean-Claude Fayat et Stéphanie Rolland © JPS

Dans « cet endroit magique » qu’est la Dominique (selon Marie Rolland), le petit cortège se faufile cahin-caha parmi les autres dégustateurs professionnels, avec quelques photographes venus pour l’occasion. « On n’est pas très lourd en alcool cette année, par rapport aux années chaudes comme 2009 », précise Michel Rolland à Charles Berling qui continue de goûter ici et là ces verres qu’on lui propose: « on boit, on boit, et puis bing la vitre… » me dit-il en riant, « mais vous ne buvez pas vous ? » Pour une fois, non…Avec l’âge, Côté Châteaux devient plus sage.

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Au détour d’une n..ième dégustation, Charles Berling me confie qu’il n’a pas l’habitude de l’exercice des primeurs, même si ce n’est pas la première fois, il « préfère boire des vins plus vieux ». Toutefois, ils peut déjà dire que certains ont un futur grandiose, tout est de très bonne qualité, il n’y a pas de mauvaise surprise

Au passage une petite explication sur le château Rolland Maillet: « on avait les propriétés familiales qui était sur 3 appellations entre Pomerol, Saint-Emilion et Lalande de Pomerol », avec le Bon Pasteur et Bertineau. Mais depuis mai 2013, les deux derniers ont été vendu au groupe chinois Golding: « Mr Pan est un fou de vin », explique Dany Rolland, tout en précisant que « nous avons gardé l’exclusivité de la commercialisation de Rolland-Maillet. »

La remise de la fameuse clé: un tire-bouchon est caché à l'intérieur de cette grosse clé en laiton © JPS

La remise de la fameuse clé: un tire-bouchon est caché à l’intérieur de cette grosse clé en laiton © JPS

Charles, qui sait qu’il va recevoir les clés de châteaux, il y va de son nouveau compliment: « ça va me permettre d’aller visiter ces châteaux, ces gens dont certains sont encore de vrais paysans, très sympathiques et qui ont fait des progrès énormes. La vigne est extraordinaire, elle souffre un peu pour aller chercher tous ces arômes ».

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Le périple continue jusqu’aux communales de Margaux, Pauillac et Saint-Estèphe, avant de se faire remettre les clés devant cette immense baie vitrée de la Dominique avec vue directe sur la vigne.

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Et Dany Rolland de lui faire connaître aussi son dernier né: ce vin avec étiquette de film et le visage d’un oenologue connu qui fait l’objet d’une collection intitulée la « winemaker collection »: « Philippe Raoux donne chaque année carte blanche à un oenologue pour réaliser une cuvée de 30 000 bouteilles, il peut choisir les parcelles… », cette 9e collection sera faite par Dany l’élégante: « moi je suis plutôt merlot; mais cette année les cabernets sauvignons étaient tellement beaux que j’ai fait un vin avec 60% cabernet et 40% merlot. »

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Un joli scénario encore qui pourrait inspirer Charles Berling. Depuis ses rôles marquants dans « Ridicule » (1996 de Patrice Leconte), dans « Je reste ! » (Diane Kurys -2003) avec Sophie Marceau, il est passé par la case téléfilm sur France 2 avec Jean Moulin et est devenu réalisateur en ce printemps 2015: il débutera le tournage de son premier long métrage, adapté de son livre Aujourd’hui, maman est morte, avec au casting François Damiens, Ludivine Sagnier, Emmanuelle Riva et le grand Charles…Berling, qui a tapé trois coups ce jour dans le grand théâtre de Saint-Emilion !.

01 Avr

L’absence commentée de Robert Parker aux primeurs de Bordeaux: « un seul être vous manque… »

Pour la 1ère fois depuis plus de 30 ans, Robert Parker est absent de la dégustation des primeurs à Bordeaux. Côté Châteaux a interrogé d’autres grosses pointures du monde du vin: Michel Rolland, Jean-Luc Thunevin, Alain Raynaud et Jacques Dupont, 3 amis de « Bob » et 1 autre grand critique. Tous réagissent à ce grand vide dans un dialogue que Côté Châteaux a assemblé et qui nous comble.

Michel Rolland, 30 ans de carrière en parallèle et d'amitié avec Robert Parker © Jean-Pierre Stahl

Michel Rolland, 30 ans de carrière en parallèle et d’amitié avec Robert Parker © Jean-Pierre Stahl

Depuis le château la Dominique à Saint-Emilion, Michel Rolland (sortant un mouchoir): « Ne m’en parlez pas ! (puis rires). Bien sûr, c’est un changement après 30 ans de visites régulières et puis surtout il avait une qualité énorme: il avait un impact…Il n’y a pas énormément de critiques du vin qui ont un impact, lui avait un impact mondial ! » 

Jean-Luc Thunevin, le chouchou de Parker © JPS

Jean-Luc Thunevin, le chouchou de Parker © JPS

Non loin dans le garage de Jean-Luc Thunevin: « C’est vrai que je suis un enfant de Parker, un chouchou ! Mais son arrêt était prévisible, vu son âge, il est né en 47, je l’avais vu, il était un peu fatigué, il avait mal au dos. Donc le fait qu’il ne vienne pas est embêtant pour ses chouchoux, donc peut-être pour moi. Mais, en fait il ne manque pas car le Wine Advocate existe toujours, même si ce sont des Singapouriens qui le possèdent, et il a envoyé Neil Martin,son collaborateur qui goûte et note les Bordeaux, toutefois ses notes seront moins importantes par rapport au boss. »

Michel Rolland:« Les acteurs sérieux dans le vin aujourd’hui le regrettent mais la terre va continuer de tourner. Les négociants de Bordeaux vont reprendre leurs responsabilités, c’est à dire qu’ils vont acheter ce qu’ils aiment. Vous savez, on a débuté il y a un peu plus de 30 ans aujourd’hui…Il n’était pas le Bob Parker d’aujourd’hui et je n’étais pas ce Michel Rolland, quand vous démarrez vous ne savez pas si vous allez réussir. Est-ce que  son impact était bien ou mal: oui c’était bien car ça a aidé Bordeaux et il adorait les Bordeaux. Mal ? Oui aussi, car quand il n’aimait pas trop les vins ou qu’il ne mettait pas de trop bonnes notes, ça donnait au marché une raison de ne pas acheter le vin. C’était la meilleure et la pire des choses. »

Pour Alain Raynaud, le Président du Grand Cercle des Vins de Bordeaux depuis le château d’Agassac à Ludon-Médoc: « un seul être vous manque et tout est dépeuplé… » puis « un seul être vous manque et tout est repeuplé ! On a fait deux jours de dégustation avec la presse, on a beaucoup échangé avec des journalistes qui ont tous l’envie de devenir un jour Robert Parker et pourtant je pense que personne ne le deviendra ! »

Jacques Dupont, journaliste du Point, dégustant les crus artisans © JPS

Jacques Dupont, journaliste du Point, dégustant les crus artisans © JPS

Perdu au fin fond du médoc en pleine dégustation des crus artisans au château la Peyre, Jacques Dupont, journaliste et auteur du Guide Jacques Dupont sur les primeurs à paraître dans le Point en mai: « Avant je m’étais dit, si Parker ne peut pas venir, le négoce va être perdu ! Qu’est-ce que faisait Robert Parker, il donnait une indication, en donnant une note de 95/100 par exemple. Et tout le monde se précipitait sur cette note de 95/100. Alors peut-être que le marché aujourd’hui qui s’est ouvert sur le monde est devenu un peu moins bébête. Les achats Parker, c’était à la note et sans goûter, les gens sont devenus plus intelligents… »

Dany et Michel Rolland © JPS

Dany et Michel Rolland © JPS

Pour Michel Rolland, Robert Parker n’était pas forcément le seul à avoir un palais unique, « il était surtout increvable, il pouvait déguster 250 échantillons et il était toujours fiable. Le vrai talent, c’est 18 heures de travail par jour… »

Jacques Dupont a ce regard plus en retrait: « On ne peut pas dire, tout est blanc tout est noir :Parker a été un formidable ouvreur de pistes aux Etats-Unis, il a permis à Bordeaux de s’installer et de vendre du vin là-bas, mais à un moment donné ça devenait un peu caricatural, tout le monde faisait du vin pour faire plaisir à Robert Parker… »

Alain Raynaud en contrepoids: « d’abord le goût n’a jamais été uniforme; il a surtout été à l’origine d’un mouvement qualitatif remarquable. Dans les années 80, Bordeaux était loin d’avoir le leadership mondial; ce que Bordeaux est devenu aujourd’hui, il y a contribué peut-être en mettant l’accent sur des vins avec une structuration tanique importante…Il a mis l’accent sur l’investissement au long court dans les vins de garde ! »

30 Mar

Le bal des primeurs est ouvert : 2014 sera un millésime de garde

Après 3 années difficiles, le millésime 2014 va sauver la mise à Bordeaux. Un millésime de garde, excellent pour plusieurs propriétés, qui va relancer les affaires. Petit tour d’horizon aujourd’hui à la dégustation des Vins de Pessac-Léognan et parmi le Grand Cercle des Vins de Bordeaux.

Le premier gros spot de dégustation le château Smith Haut Lafitte accueillait ce lundi les Pessac-Léognan © Jean-Pierre Stahl

Le premier gros spot de dégustation le château Smith Haut Lafitte accueillait ce lundi les Pessac-Léognan © Jean-Pierre Stahl

Le carnet de bal indiquait: ouverture du bal le 30 mars, 9h30, au château Smith Haut Laffite à Martillac. Alors que Florence et Daniel Cathiard avaient convié plus de 70 propriétaires de Pessac-Léognan, les danseuses se laissaient désirer . Mais comme toute fête, l’ambiance a parfois du mal à s’installer. Pourtant le sol de tomettes bien glissant permettait quelques pas de valse autrichienne ou de tango argentin, bal des primeurs oblige. Mais comme chacun sait, avant d’être invité à danser, souvent on se regarde en chien de faïence…bref après 3 millésimes délicats dont un 2013 très en dessous des attentes, il fallait réchauffer l’ambiance à Bordeaux. Les choses sérieuses allaient ainsi commencer passé 10 heures…le quart d’heure bordelais étant sérieusement dépassé, les professionnels français et étrangers, très en retard pour ce grand rendez-vous, allaient pouvoir se laisser envoûter par ce nouveau nez !

Magnus Ericsson et Adrien Bernard du Domaine de Chevalier © JPS

Magnus Ericsson et Adrien Bernard du Domaine de Chevalier © JPS

Après quelques gorgées (recrachées) de blanc, les commentaires allaient bon train, à l’instar de cet importateur Suèdois Magnus Ericsson « C’est très frais, on a beaucoup d’acidité, il est très bon ! » Arrêté dans son élan sur le stand du Domaine de Chevalier, Adrien Bernard lui expliquait: « c’est un été très frais que l’on a eu. Ce mois d’août était plutôt nuageux, on aime ça sur les blancs car cela va donner de l’acidité. On a mis deux semaines à vendanger 7 ha, du 10 au 26 septembre…On a fait des tris successifs, on est passé 2 à 3 fois dans les rangs de vigne ». Une autre danse, celle des vendangeurs de septembre…

Bruno Lemoine fier de son blanc en 2014 à comparer au 2007 © jps

Bruno Lemoine fier de son blanc en 2014 à comparer au 2007 © jps

Les blancs ont su tirer profit de ce temps en dent de scie, un été frais avec septembre chaud pour consacrer le tout: « c’est de l’éclat des 2007, on a de l’acidité et de la concentration, vraiment c’est un très grand millésime », pour Bruno Lemoine du château Larrivet Haut Brion.

Florence Cathiard, propriétaire du château Smith Haut-Lafitte est heureuse du 2014 et de retrouver les Américains © JPS

Florence Cathiard, propriétaire du château Smith Haut-Lafitte est heureuse du 2014 et de retrouver les Américains © JPS

Devant une salle quasi-comble, passé 11 heures, Florence Cathiard, propriétaire du château Smith Haut Lafitte, avait retrouvé le sourire après avoir vu, comme elle nous le soulignait, les prix de ses 2011, 2012 et 2013 chuter de moitié par rapport aux fabuleux 2010 et 2009, la voici rassurée: « on a eu la descente aux enfers, mais la on a un très beau vin. On a eu des cabernets de folie. Les Américains sont de retour avec un dollar fort et les chinois également, vous allez les apercevoir cette semaine, on est heureux. »

Arnaud de Butler et ses amis devant le château d'Agassac © JPS

Arnaud de Butler du château Crabitey, et ses amis Pascal Guignard de Roquetaillade la Grange, et Arnaud Lesgourgues du château Haut Selve devant Agassac © JPS

Au château d’Agassac, il y avait de quoi s’agasser (pour jouer sur leur ancien slogan Agassac, le château Agassant) car la foule de visiteurs se faisait aussi attendre, sans doute occupés sur d’autres spots de dégustation (à Smith Haut Laffite notamment), car durant cette folle semaine? qui démarre le jeudi pour la presse spécialisée et s’étale jusqu’au jeudi suivant, on compte environ une cinquantaine de rendez-vous de dégustation. Sans nul doute, ils seront là mardi et mercredi.

Francis Boutemy et Alain Raynaud © JPS

Francis Boutemy du château Haut-Lagrange et Alain Raynaud, président du Grand Cercle des Vins de Bordeaux © JPS

Et pourtant de grands noms de châteaux étaient présentés par le Grand Cercle des Vins de Bordeaux présidé par Alain Raynaud: parmi ces 193 châteaux, on pouvait retrouver avec plaisir Francis Boutemy du château Haut-Lagrange, Marie-Laure Lurton du château Villegeorge et de la Tour de Bessan, mais aussi Arnaud de Butler du château Crabitey dans les Graves…et déguster ici un Balthus, là des Cerisiers du château de Francs en Côtes de Bordeaux, tous deux de bonne facture.

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Petit instant de dégustation sur le comptoir de Jean-Luc Zell, le directeur général d’Agassac avec cet importateur Allemand de Koblenz Max Schwarz de la Société Vin et Vie, qui est aussi importateur des vins de la Passion des Terroirs: « certains 2014 sont extraordinaires, vraiment c’est très très bon. »

Max Scharz et Jean-Luc Zell © JPS

Max Scharz et Jean-Luc Zell © JPS

Jean-Luc Zell, qui ne souhaitait pas s’aventurer à comparer 2014 à certains millésimes des 10 dernières années, confirme que « c’est un millésime de garde ». Ce 2014 a pleinement profité de l’été indien avec septembre et octobre ensoleillés et chauds. Il y a la quantité mais aussi la qualité et ça se sait car de nombreux étrangers ont fait le déplacement pour les goûter.

Laurent Cisnéros du château de Rouillac et Laurent Moujon auteur de guides sur Bordeaux © JPS

Laurent Cisnéros du château de Rouillac et Laurent Moujon auteur de guides sur Bordeaux © JPS

Et comme me le confiait Patrick Bernard, PDG  de la maison de négoce Millésima: « C’est un millésime riche, dense, opulent, qui est rafraîchissant, désaltérant. C’est un petit peu en dessous des 2009 et 2010, mais vous avez un degré par trop élevé avec 1,5° d’alcool en moins par rapport aux 2009 et 2010.Bref on a tout ce qu’il faut pour revenir en grâce auprès du consommateur. »

Patrick Bernard de la Maison de Négoce Millésima © JPS

Patrick Bernard PDG de la Maison de Négoce Millésima © JPS

Encore faut-il que les propriétés restent raisonnables au niveau des prix…à moins de retomber dans les travers de la flambée des 2009 et 2010. Une spéculation que les Chinois et autres étrangers ont fait payer par la suite à Bordeaux.

27 Mar

Michel Rolland sur le 2014 à Bordeaux: « je pense que c’est le millésime qui viendra immédiatement derrière les grands 2009 et 2010. Ce sera un excellent millésime ! »

A l’aube de la grande semaine des primeurs, les grands oenologues consultants y vont de leur analyse. Côté Châteaux reprend ici la primeur du commentaire que Michel Rolland, le plus connu mondialement des consultants bordelais, a laissé sur le site « les Clés de Châteaux ». Une parole d’expert.

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« Le Millésime 2014…

Le 2014, c’est un millésime qui était un petit peu difficile au départ, dans sa gestation on va dire, parce que le temps ne lui a pas été favorable. On est arrivé fin août avec beaucoup d’inquiétudes.

Et comme toujours quand Dame Nature décide que cela se passerait bien, on a eu un très beau mois de septembre, un été indien quasi parfait et moralité on fait un très bon millésime !

2014, c’était le millésime parfait pour les oenologues, parce que c’est un millésime de difficulté », Michel Rolland.

Rien n’est écrit d’avance, il faut savoir quel raisin on a entre les mains, ce que l’on peut en faire, comment on va les vinifier pour les optimiser.

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Ce sera un millésime un petit peu hétérogène. Mais c’est un millésime de qualité. Ca ressemble à 2008, parce que c’est un millésime qui s’est fait tardivement », Michel Rolland

La maturité s’est plutôt faite sur octobre que sur septembre comme se font les millésimes précoces.

En fait le temps, c’est notre allié ou notre ennemi. C’est vrai que l’été a été plutôt froid, on a eu des périodes pluvieuses.

Malgré tout, c’est un millésime de fruit, un millésime de fraîcheur et un millésime d’acidité. Il y a une tension, il y a de vrais tanins. Par rapport à 2008, il y a un petit peu plus de précision, parce que les propriétés travaillent de mieux en mieux.

Donc on a de jolis arômes, des jolis tanins, on a une jolie définition de vin avec beaucoup de fraîcheur et beaucoup de plaisir, ça sera ça 2014. Il faudra goûter parce que tout n’est pas comme cela. Mais c’est un millésime que l’on peut placer avec 2008, voire supérieur.

Et- je pense que c’est le millésime qui viendra immédiatement derrière les grands 2009 et 2010. Ce sera un excellent millésime ! »

Retrouvez l’interview de Michel Rolland sur le site des Clés de Châteaux

26 Mar

C’est à Buzet ! Ils s’engagent autrement…Les Vignerons de Buzet concilient depuis 10 ans viticulture et environnement

Les Vignerons de Buzet ont fait leur révolution. Depuis 10 ans, leur coopérative s’est engagée dans une viticulture « plus propre », alliant technologie de pointe, respect des hommes et de l’environnement. 198 irréductibles vignerons se font entendre en prônant le développement durable et la réduction des pesticides.

Vincent Leyre, Serge Lhérisson et David Bidegaray des Vignerons de Buzet © Jean-Pierre Stahl

Vincent Leyre, Serge Lhérisson et David Bidegaray des Vignerons de Buzet © Jean-Pierre Stahl

Quand on les rencontre, on est sous le charme de leur accent chantant du Lot-et-Garonne…Mais au fait Buzet, c’est où ? « Entre Bordeaux et Toulouse », répond systématiquement Pierre Philippe le directeur de la Cave coopérative à ses interlocuteurs qui lui posent cette sempiternelle question.

D'irréductibles vignerons à Buzet: ils sont devenus bee friendly ! © JPS

D’irréductibles vignerons à Buzet: ils sont devenus bee friendly et accueillent aussi les faucons ! © JPS

Ils ont en eux la fibre Uderzo: leur Buzet ressemble à un vignoble d’irréductibles Gaulois… En effet, avec leur petit nom face à l’ogre Bordeaux, ils continuent de jouer des coudes dans le marché mondial du vin, présents encore la semaine dernière à ProWein à Düsseldorf. Ils se réclament du Sud-Ouest tout en refusant toute alliance, notamment avec Bergerac et Duras. La liberté n’a pas de prix.

Avec 198 adhérents, exploitants 1870 ha en AOP Buzet, ces vignerons ont changé de braquet en 2005. Bien qu’ayant des domaines vallonés, pas question de s’endormir sur leur lauriers. Avec Pierre Philippe à leur tête, ils ont fait le choix de s' »engager autrement » dans la biodiversité et dans l’agriculture raisonnée.

On pourrait les prendre pour des farfelus, devieux écolos ou d’anciens soixante-huitards, mais pas du tout ! C’est une démarche honorable qui vise à respecter davantage la nature et les hommes. Depuis 10 ans, ils réduisent ainsi les intrants: ils se sont ainsi engagés à n’utiliser aucun engrais chimique sur leur vignoble : 0 engrais chimique mais de l’engrais organique. 0 acaricide également et 0 anti-botrytis.

El Gringo, il est bon mon engrais © JPS

El Gringo, il est bon mon engrais © JPS

On a interdit les herbicides résiduaires, on a interdit les engrais chimiques, tout ce qui était anti-botrytis que l’on retrouvait dans les vins, connus pour être l’assurance tous risques, ça a été un choc des cultures chez nos adhérents », Vincent Leyre des Vignerons de Buzet

Les Vignerons de Buzet sont fiers de nous emmener sur Gueyze, une partie en pointe dans les choix qu’ils expérimentent constamment: « sur ce vignoble, nous pratiquons la bio-diversité. Par exemple, on protège la tulipe agenaise…Avec la Sepanlog, on a transféré des tulipes qu’on a trouvé au bord d’un fossé pour les planter dans nos vignes, ça démontre que nos terrains sont assez riches et pas asphyxiés par certains désherbants. » « On a aussi replanté des haies, ça protège les auxiliaires, ça sert aussi de corridor, c’est important que les animaux puissent communiquer », explique Serge Lhérisson.

« On a mis des nichoirs en place aussi pour la chouette chevêche d’Athéna, un nichoir à faucon sur la partie la plus haute devenu l’emblème du vignoble. Tous les vignerons mettent ces nichoirs fabriqués à partir d’une caisse en bois de 6 bouteilles et ils en sont fiers. On protège aussi la chauve-souris qui mange beaucoup d’insectes(on a beaucoup de parasite comme la flavescence dorée, et elle en consomme beaucoup). »

Les vignerons de Buzet ont malgré tout quelques racines bordelaises, avec aussi les mêmes cépages qu'à Bordeaux © JPS

Les vignerons de Buzet ont malgré tout quelques racines bordelaises, avec aussi les mêmes cépages qu’à Bordeaux © JPS

Buzet, c’est aussi cette appellation qui a été relancée depuis 1953, sous l’impulsion d’un bordelais, Jean Mermillod, l’ancien maître de chai du château Lafite-Rothschild, appelé à devenir le directeur de cette cave coopérative… Pas étonnant dès lors de retrouver ces cépages du bordelais qu’il a souhaité replanter: 50% merlot, 25% cabernet sauvignon et 25 % cabernet franc. Et pour les blancs: sauvignon et sémillon.

Aujourd’hui leur directeur actuel, Pierre Philippe, originaire des Pyrénées-Atlantiques, a aussi marqué de son empreinte le vignoble avec ce virage sur la viticulture raisonnée et la bio-diversité. Aujourd’hui, ce vignoble de Gueyze (AOP Buzet) est le 1er vignoble à être labellisé « bee friendly », validé en janvier 2015; preuve supplémentaire de la limitation des traitements et du respect des abeilles.

Depuis 2005, on a axé sur le développement durable. C’est ancré dans les gênes de l’entreprise. C’est des gens qui ont envie de travailler au contact de la nature, ils ont une vraie sensibilité au côté environnemental », Pierre Philippe, directeur des Vignerons de Buzet.

Mais ils ne sont pas que de doux rêveurs, amis de la nature et des petits oiseaux…ce sont de grands producteurs qui ont derrière eux plus de 60 ans d’expérience et de mise en commun de leur production et de leurs moyens de vinification. Chaque année ce sont 12 millions de bouteilles qui sont produites.

Avec une cinquantaine de commerciaux dans l’hexagone, Buzet s’est implanté dans toutes les enseignes de la grande distribution; 80% de la production est commercialisée en France avec également les HCR et chez les cavistes, 20% à l’export (Europe, Etats-Unis et Asie). Mais ils ne dorment pas et misent sur de nouveaux outils comme ce filtre tangentiel et cette électrodialyse (digne des hôpitaux), ils comptent aussi augmenter leur production en BIB: ils commercialisent 720 000 bags in box à l’année, un marché en constante augmentation…

Fort de ces arguments, ils sont partis à ProWein pour essayer de trouver de nouveaux horizons pour leurs vins, avec des Allemands toujours très soucieux d’environnement. Leur principale force, c’est aussi le bon rapport qualité prix de leurs vins et une fidélité de leurs clients qui s’arrêtent parfois avec des bus entiers se ressourcer à Buzet…

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl,Didier Bonnet, Eric Delwarde et Boris Chague 

Ecoutez également la chronique « Vigne & Vin » avec Frédéric Lot : 

20 Mar

La Cité des Civilisations du Vin sera « un phare pour l’oenotourisme » à Bordeaux !

Alain Juppé a trouvé une nouvelle métaphore pour la Cité des Civilisations du Vin. En plus de la carafe, ce sera le phare, le point de départ des visites dans les vignobles autour de Bordeaux. Une mer de touristes va déferler à Bordeaux dès 2016. Visite de la Cité avec ses mécènes à tout juste un an de sa livraison.

Bernard Farges, président du CIVB, Philippe Massol, directeur de la Fondation,  Sylvie Cazes, présidente de la Fondation et Alain Juppé, maire de Bordeaux © Jean-Pierre Stahl

Bernard Farges, président du CIVB, Philippe Massol, directeur de la Fondation, Sylvie Cazes, présidente de la Fondation et Alain Juppé, maire de Bordeaux devant la Cité bien avancée © Jean-Pierre Stahl

C’était cet après-midi, à 16h30, l’événement pour les mécènes de la Cité des Civilisations du Vin. Ils étaient 70, représentant 40 entreprises sur les 65 mécènes, à faire, pour la deuxième fois en moins d’un an, la visite du gigantesque chantier de la Cité des Civilisations du Vin.

Un geste architectural qui va s'ajouter au patrimoine de Bordeaux © JPS

Un geste architectural qui va s’ajouter au patrimoine de Bordeaux © JPS

Parmi les maîtres de cérémonie, Philippe Massol, le directeur de la fondation qui va gérer au quotidien la Cité des Civilisations du Vin: après avoir montré rapidement le rez-de-chaussée dont le patio impressionne par sa hauteur, le voici au 1er étage pour expliquer à ses invités qu’ils se trouvent dans l’espace d’exposition temporaire, avec des ateliers de dégustation, et le futur salon de lecture , également un salon de réception qui pourra être privatif, il y aura aussi la future école des arômes qui y trouvera sa place, sans parler de l‘auditorium Thomas Jefferson (auditorium dont Sylvie Cazes a souligné la générosité des donateurs américains qui lors sd’une soirée aux Nations-Unies en ce début d’année ont largement participé au financement).

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Philippe Massol expliquant le parcours permanent aux mécènes © JPS

Au deuxième étage, ce sera le parcours permanent: « ce sera une séquence consacré à l’art de vivre: on y évoquera la gastronomie française, l’évolution du service du vin et la convivialité et le partage du vin », précise Philippe Massol à Alain Juppé et aux mécènes de son groupe. Et d’ajouter que: Pierre Arditi ambassadeur de la Cité sera de la partie, ainsi que Joël Robuchon…ça mijote déjà…

Notre Cité sera un magnfique objet architectural qui va enrichir le patrimoine de Bordeaux », Alain Juppé maire de Bordeaux

La Cité - phare de l'oenotourisme à Bordeaux © Jean-Pierre Stahl

La Cité – phare de l’oenotourisme à Bordeaux © Jean-Pierre Stahl

Et d’ajouter: « ce sera un phare pour l’oenotourisme, ce sera un point de départ pour aller sur la route des vins. J’ai inauguré le nouveau ponton Thomas Jefferson la semaine dernière: les bateaux vont aller jusqu’à Pauillac, ils remonteront aussi la Garonne jusqu’à Cadillac ou navigueront sur la Dordogne jusqu’à Libourne. »

Alain Juppé en chef des travaux © JPS

Alain Juppé en chef des travaux, avec en amorce Bernard Farges président du CIVB et Philippe Massol, directeur de la Fondation © JPS

A ce stade des travaux, le gros oeuvre est terminé depuis la fin de l’années 2014, les baies vitrées sont posées sur les parties inférieures, les plaques d’aluminium et de verre vont bientôt recouvrir la charpente

Fin de la pose de la charpente sur la tour en juin 2015, et à la fin de l’année la couverture sera terminée. » Philippe Massol, directeur de la Fondation de la Cité des Civilisations du Vin

Au 7e étage on y trouvera le restaurant (le « septième ciel » ? me-confie-t-on sous forme de boutade), juste au dessus au 8e ce sera le Belvédère: « on dégustera tous les crus du monde et on pourra faire le tour à 360° » explique Sylvie Cazes la présidente qui n’a pas ménagé son talent et son temps pour trouver ces mécènes. Elle a notamment trouvé ceux du nouveau monde the « Friends of Cité » qui se retrouveront le 30 avril au cours d’un nouveau repas à New-York avec Alain Juppé pour continuer de participer au financement de la Cité, un concept unique au monde où l’on retrouvera 66 pays qui mettront la main au porte-feuille pour boucler le financement.

BB

Guillaume Halley et Olivier Cornuaille de la Cave de Caudéran-Sodobor des mécènes fiers de l’édifice © JPS

Les mécènes ont une certaine fierté de de participer au financement de ce bel ouvrage: ainsi Guillaume Halley, accompagné d’Olivier Cornouaille, pour la Cave de Caudéran-Sodibor précise « c’est vraiment un projet pour lequel on ne regrette pas de participer, la levée de fonds à l’étranger pour une construction en France, c’est assez unique… »

Le bout du tunnel n'est peut-être pas si loin © JPS

Le bout du tunnel n’est peut-être pas si loin © JPS

Une Cité qui sera livrée fin mars 2016 à l’aube de Bordeaux Fête le Vin. Une Cité que vont s’approprier progressivement les Bordelais, Girondins, et Français. Un nouveau spot du tourisme en Aquitaine. Un emblème, un phare qui va attirer les visiteurs du monde entier.

Et comme le disait encore tout-à-l’heure Alain Juppé: « Vive la Cité ! »