26 Nov

Yoko Tsuno (« Anges et Faucons ») et Jérôme K Jérôme Bloche (« Contrefaçons ») en grand large…

   

Yoko Tsuno et Jérôme K Jérôme Bloche en grand large

En cet automne 2019, les nouveaux albums de Yoko Tsuno et Jérôme K Jérôme Bloche présentent un format inhabituel, avec respectivement 62 et 70 planches. Une singularité supplémentaire pour deux personnages qui ne le sont pas moins.

Si l’on y regarde de plus près, Roger Leloup et Alain Dodier ont beaucoup en commun. Auteurs complets (scénario et dessins), ils mènent tous les deux une série au long cours, avec respectivement 29 albums pour Yoko Tsuno et 27 pour Jérôme K Jérôme Bloche. Et chacun de ces deux personnages porte en lui une part singulière d’humanité.

Pour Yoko Tsuno, électronicienne aventurière mais aussi mère adoptive, le respect de la vie passe avant tout (« la mort d’un homme est un échec », dit-elle dans en 1984 dans Le Feu de Wotan). L’humanité de Jérôme K Jérôme Bloche passe quant à elle souvent par de malicieux contrepieds à la mythologie du détective privé. Imagine-t-on un Philip Marlowe souffrant du mal des transports, ayant horreur des armes à feu, se faire tancer plus souvent qu’à son tour par sa compagne ou se faisant arrêter par la police en sautant un tourniquet dans le métro ?

Avec Anges et Faucons, Roger Leloup retrouve un format en 62 planches qu’il n’avait pas connu… depuis Tintin, Vol 714 pour Sydney et son départ du Studio Hergé fin 1969. Ce 29e album de Yoko Tsuno rassemble deux récits d’une trentaine de page chacune. Dans l’une, il s’agit de traverser le temps pour sauver deux jeunes enfants (deux « anges », en quelque sorte). Dans l’autre, de convoyer d’inquiétantes momies, avec un faucon comme ange gardien. Cette double histoire fait aussi la part belle aux engins volants, souvent récurrents dans la saga dessinée de l’électronicienne japonaise. Le tout toujours mené avec un sens du détail qui force l’admiration, car Roger Leloup, qui vient de fêter ses 86 ans, travaille sans le moindre assistant !

Une démarche en solitaire qui est aussi celle d’Alain Dodier. Dans Contrefaçons, il présente une enquête qui porte son titre à merveille, dans une histoire d’enlèvement où rien ne semble authentique… Sauf le détective, qui finit par dénouer les fils d’une intrigue menée au rythme des réflexions du personnage principal, entre initiatives et fausses pistes. Georges Simenon n’est pas loin… Notamment avec le personnage de Babette, lointaine héritière de l’épouse du commissaire Maigret, auxiliaire parfois précieuse tout en étant jeune femme de son époque. Un constat qui vaut également pour les différents personnages de l’intrigue, tous présentés à hauteur d’homme par le dessinateur-scénariste, qui sait camper une personnalité en une scène, voire une réplique.

En somme, deux albums qui permettent de retrouver deux des personnages les plus attachants du journal de Spirou : une héroïne qui « n’est pas la femme d’une nuit mais la femme d’une vie », et un détective privé, « improbable croisement de Humphrey Bogart et de M. Hulot ».

©Jean-Philippe Doret

Yoko Tsuno T29 « Anges et Faucons »

Scénario et dessins : Roger Leloup

64 pages

Jérôme K Jérôme Bloche T27 « Contrefaçons »

Scénario et dessins : Alain Dodier

72 pages

Dupuis