20 Mar

Boréal par Sonja Delzongle

Présentation de l’éditeur:

Janvier 2017, au Groenland. Là, dans le sol gelé, un œil énorme, globuleux, fixe le ciel. On peut y lire une peur intense. C’est ainsi que huit scientifiques partis en mission de reconnaissance découvrent avec stupeur un bœuf musqué pris dans la glace. Puis un autre, et encore un autre. Autour d’eux, aussi loin que portent leurs lampes frontales, des centaines de cadavres sont prisonniers du permafrost devenu un immense cimetière. Pour comprendre l’origine de cette hécatombe, le chef de la mission fait appel à Luv Svendsen, spécialiste de ces phénomènes. Empêtrée dans une vie privée compliquée, et assez soulagée de pouvoir s’immerger dans le travail, Luv s’envole vers le Groenland. Ils sont maintenant neuf hommes et femmes, isolés dans la nuit polaire. Le lendemain a lieu la première disparition.

Notre avis:

Je ressors pensive et émue de ma lecture. Je dis souvent que les romans noirs ne sont pas « que » des enquêtes de police, qu’ils sont souvent le vecteur de tant d’autres messages, « BORÉAL » ne déroge pas à ce constat, au contraire.

« BORÉAL » est certes un thriller, glaçant au sens propre comme au figuré, l’intrigue est passionnante et largement documentée, mais « BORÉAL » est tellement plus qu’un thriller.

Au travers de ses mots et de l’histoire de ses personnages, Sonja a su évoquer des sujets puissants, parfois douloureux, avec une empathie incroyable sans jamais tomber dans le  pathos.

Elle y évoque avec pudeur mais de manière si juste le « désir d’enfant », désir ou non d’ailleurs, le sacro-saint instinct maternel que nous devrions toutes ressentir dès l’annonce d’une grossesse, quand tant de femmes culpabilisent, à tord, parce que ce n’est pas leur cas ; les relations mères-enfants quelques soient la forme de cette maternité: enfant naturel, enfant adopté, enfant désiré ou non…

« Pour qui les parents le font-il vraiment? Pour eux ou pour lui? Mon enfant, mon miroir, mon autre, ma chair. La seule idée de toutes les épreuves et les souffrances auxquels il sera confronté devrait en faire renoncer plus d’un. Mais ce n’est pas à ça que l’on pense lorsqu’on caresse ce doux projet. Non, quand ce n’est pas un accident, une erreur, on ne pense qu’à cet être fragile issu de soi, que l’on a conçu à deux ou bien fabriqué seul pour satisfaire son propre besoin de donner, transmettre, besoin d’immortalité, pour lutter contre le vide qui attend chacun. »

Elle nous parle aussi de la complexité des relations familiales dans leur ensemble mais également la beauté que peut revêtir ce lien du sang.

Elle partage avec nous ses réflexions sur le deuil et la mort. Que nous reste-t-il quand l’ un de nos proches disparaît:

« Que subsiste-t-il de quelqu’un après sa mort? Mais aussi que reste-t-il aux vivants? Le chagrin, les larmes. La résignation ou la colère. »

D’ailleurs la vie et la mort se font échos tout au long de l’histoire, se livrant une bataille dans la nuit polaire du Groenland. Cette nuit qui nous envahit et ne nous quitte pas tout au long de la lecture.

Débordée plusieurs fois par les émotions que l’auteur a su transmettre, j’ai pleuré, j’ai eu froid, j’ai eu peur, et en terminant ton roman mille et une questions demeurent:

– que serais-je prête à faire pour ne pas mourir et voir grandir mon fils?

– quel impact nos comportements ont-ils réellement sur notre éco-système?

Et tant d’autres…

Sonja m’a emportée avec elle sur l’inlandsis, au cœur de cette nuit sans fin, dans des descriptions à couper le souffle. Un tableau à l’aquarelle, une nature faite de noir et de blanc comme un ying et un yang, comme cette éternelle opposition entre la vie et la mort.

Sonja Delzongle nous offre « Boréal » comme un cadeau, on y sent l’émotion dans son écriture, un truc en plus, en filigrane, que je n’avais pas ressenti ailleurs…

N’hésitez pas, « Boréal » est glaçant de vérités. Un thriller angoissant, rythmé, dépaysant mais tellement plus… Un roman que vous n’êtes pas prêt d’oublier!

Boréal, paru le 08 mars 2008 aux éditions Denoël, collection « sueurs froides », 448 pages.

© Ophélie Cohen