20 Fév

« Et si le parrain était une femme », un récit où Arnaud Ardoin enquête sur Hélène Martini…

« Et si le parrain était une femme » est le troisième livre d’Arnaud Ardoin, paru au Seuil, dans la collection Récit / Document.

Hélène Martini s’est éteinte le 5 août 2017 à Paris. Personnalité qui eut la haute main sur une trentaine de cabarets parisiens, dont les Folies Bergère et le théâtre Mogador, elle dirigeait aussi des lieux plus ambigüs, cabarets, boites de nuit et bars tels que le Pigall’s, le Shéhérazade, le Sphinx, la Nouvelle Athènes, les Folies Pigalle… Jamais elle ne fut inquiétée par les autorités ni menacée d’une fermeture administrative…

D’elle, on ne sait rien, ou si peu. Née Polonaise, fille d’un propriétaire terrien polonais, rescapée des Camps, prisonnière des russes, elle débarque à Paris en 1945 à vingt et un ans, « riche de ses yeux bleus » et parvient à être embauchée comme « mannequin nu » aux Folies Bergère.

Gagnante à la loterie, trois millions de francs de l’époque, elle fait partie des rares  qui, au lieu de dilapider leurs gains comme 99% des gagnants, les place dans des cabarets… En 1955, elle épouse Nachat Martini, un avocat d’origine Syrienne, et ils poursuivent leur politique d’acquisitions de cabarets… Après le décès de son mari en 1960, elle dirige son petit empire d’une main de fer, se lève tous les jours vers une heure de l’après-midi et à 19 heures entame sa tournée. Elle termine à l’aube au Raspoutine, à la table n° 18, où elle sirote une tisane.

Personnalité intraitable, cultivant le secret, quitte à terroriser son entourage, ou ses rivaux, à la tête d’une fortune assez considérable, il fallait toute la hardiesse et la délicatesse d’Arnaud Ardoin, journaliste d’origine Orléanaise, pour se pencher sur son destin et tenter d’éclairer l’ombre épaisse qui entoure sa vie.

Il s’agit du troisième livre de l’auteur, qui s’était déjà fait remarquer avec un ouvrage sur le président Jacques Chirac, personnalité – pour d’autres raisons – tout aussi discrète, il se penche ici sur sa la vie de cette femme exceptionnelle, et s’interroge : fut-elle vraiment rescapée des camps ? D’où vient sa fortune ? Circonstances de la mort de son mari en 1960 ? Nature de ses proches ? Finança-t-elle le Front National ? Toutes questions que pose l’auteur et auxquelles il tente de répondre, ponctuant son récit de savoureuses descriptions de cette personnalité hautement excentrique et fascinante.

Une enquête sur ce qu’on a coutume d’appeler les « nuits parisiennes » où l’initié côtoie les secrets de nombre de personnalités, expliquant la grande tranquillité des autorités à son égard, une vie de splendeur et de cabinets obscurs comme toutes les époques en raffolent…

Bernard Henninger

© photo : Arnaud Ardoin dans l’émission Dimanche en Politique (Centre Val de Loire, le 9 février 2020)

23 Jan

Livre de science-fiction : « Les Oubliés d’Ushtâr », un « Planet Opera » d’Émilie Querbalec

Avec les Oubliés d’UshtârÉmilie Querbalec signe un premier roman plein d’énergie, une opposition entre deux civilisations et une histoire qui se dévore…

À la tête d’un vaisseau d’Albâr, Joon One, un Nadjam (moine-soldat) mène la prise d’un vaisseau Ushtârien, empli de pèlerins. Étonné de la facilité avec laquelle il a rempli sa mission, Joon One s’enfonce seul dans les entrailles du vaisseau. Dans une salle aménagée à l’instar d’une chapelle, gisent les restes d’un prêtre. Sur son front, une gemme brille de sombres feux. Quand Joon One s’en empare, la gemme lui parle : pleine de mordant, elle se moque de sa rigidité, des phrases toutes faites que Joon One annône pour se protéger de son intrusion ainsi que de sa soumission aveugle : la rigidité du commandement et la soumission font de l’armée Albârienne une machine de guerre impressionnante… sauf pour cette gemme.

Prise d’assaut, la planète Ushtâr s’effondre à son tour après de brèves batailles. Le récit expose avec un bon sens de l’épure l’opposition de ces civilisations. La rigidité militaire des Albâriens dépend d’une civilisation où les êtres, conçus par génie génétique, sont tous mâles, et hyper-patriarcale. Exemple d’une civilisation qui a gommé la femme qui n’y est au mieux qu’une esclave et quant au désir homosexuel dans une société de mâles, qui aurait pu être sa valeur dominante, il est ici une perversion…

À l’opposé, Ushtâr l’hétérosexuelle, tournée vers une vie méditative, « zen » semble démunie. Les élites arborent une gemme sur leur front, et leurs enfants fréquentent des écoles. Pourtant les Albâriens sont persuadés qu’ils cachent une arme au pouvoir fabuleux. Seule Gul-Yan parvient à s’échapper dans les bas-fonds miséreux… chez les Oubliés d’Ushtâr du titre, qui donnent soudain un point de vue critique sur la civilisation Ushtârienne : pas plus Albâr qu’Ushtâr n’incarneront ici un Bien quelconque.

L’originalité de ce Planet Opera (un sous-genre de science-fiction) tient dans la variété des points de vue : des puissants et de ceux dont nul n’attend rien. Les gens de pouvoir ne peuvent résister à la jouissance de s’éliminer : trahisons et ambitions gangrènent les mœurs. Dans ce désastre, c’est au plus humble qui reviendra le pouvoir… de donner le mouvement et un tempo… et je peux avouer que je trouve ce point de vue rafraîchissant.

Pour un premier roman, Émilie Querbalec nous offre un Planet Opera haletant. Le suspens est entier jusqu’au bout et, une fois la dernière page tournée, le lecteur pourra méditer la fragilité de nos civilisations…

Bernard Henninger

© : Portrait d’Émilie Querbalec, réunion annuelle de Présences d’Esprits, 2018, Bernard Henninger

07 Jan

Fleury-les-Aubrais : salon des auteurs régionaux le 11 janvier 2020

Samedi 11 janvier 2020, la médiathèque de Fleury les Aubrais organise le salon des auteurs régionaux de 14h à 18h, à la bibliothèque des Jacobins.

Le dynamisme des animateurs de la médiathèque de Fleury-les-Aubrais n’est plus à prouver, notamment avec ce salon des auteurs régionaux qui se tiendra samedi 11 janvier à la bibliothèque des Jacobins. Jean-Pierre Sueur, sénateur, ancien maire d’Orléans est l’invité d’honneur de cette édition pour son dernier ouvrage : « Victor Hugo au Sénat ».

Deux maisons d’édition seront présentes : les éditions Corsaire et les éditions du Jeu de l’Oie. Vingt-quatre auteurs seront  également présents  parmi lesquels la poétesse Marie-Rose Abomo-Maurin, Georges Joumas des éditions Corsaires, auteur des « Deux premiers fusillés pour l’exemple de 1917 » et « Alfred Dreyfus, citoyen », Virginie Magnier Pavé, et son polar « Le murmure de l’enfer », Aude Prieur, Cécile Richard, et Catherine Secq, autrice avec son héroïne la comissaire Bombardier seront également présents.

L’après-midi sera émaillée de lectures, d’animations musicales et d’interviews d’auteurs par radio Arc-en-ciel. Cette manifestation s’inscrit dans une continuité exemplaire, depuis des années, et les médiathèques restent un acteur fort pour faire lire et découvrir la littérature régionale.

Bernard Henninger

© photo de Catherine Secq : Bernard Henninger

Note : Bibliothèque des Jacobins42 rue du Onze Novembre  45400 Fleury-les-Aubrais (tél : 02 38 83 31 20)

02 Jan

« Lire au Centre » vous souhaite pour 2020 de belles lectures

Lire au Centre ouvre sa troisième année de chroniques, de romans, de témoignages et de livres d’histoire et je voulais remercier les auteurs et les éditeurs de la confiance qu’ils ont bien voulu me témoigner… et si une magicienne me donnait le pouvoir de faire trois vœux, je dirais : lisez plus, lisez mieux, lisez comme un fleuve emporte une crue !

Meilleurs vœux 2020 aux auteurs, aux éditeurs, aux lecteurs et à tous les autres.

« Les livres ouvrent des voies pour mieux comprendre le monde… » Souvent l’information nous surcharge de nouvelles, où l’accumulation et la répétition finissent par nous étouffer sous une masses de faits mis bout à bout sans discernement. Trop d’informations et aucune de pertinente, souvent.

Mieux qu’un maître-à-penser, la fiction — et l’imaginaire plus que tout autre — nous propose, quand elle est réussie, une piste de réflexion singulière, et à un certain point de lecture, nous nous disons : « Tiens ! Cet auteur me parle de… » sans que cela soit explicite, ni surchargé ou cadenassé par une sur-interprétation : quelques pas légers où la distraction arrive à nous prendre au sérieux et nous glisse que l’essentiel est souvent ailleurs… Là où l’information est débordée par une communication qui s’essaie à noyer les poissons — c’est-à-dire-nous —, le roman est une distraction qui ouvre des pistes sur le monde… C’est dire si nous avons besoin de littérature.

Bernard Henninger

21 Déc

Ma vie de femme de garde-chasse, un témoignage émouvant

Les éditions LA BOUINOTTE publient un témoignage étonnant, un court opuscule intitulé : « Ma vie de femme de garde-chasse »

Issu d’une rencontre entre l’anthropologue Geneviève Bédoucha et l’autrice, Bernadette Aucuy, son récit ressemble à une idée saisie au vol, et Geneviève Bédoucha avoue sa surprise le jour où Bernadette Aucuy lui donna à lire son cahier… Nous sommes ici devant un témoignage, dont la vigueur sans détour nous touche : la vie dans une maison au milieu des bois, loin du village, où la maladie d’un enfant est un problème complexe, quitter la maison, marcher plusieurs kilomètres pour trouver un téléphone et revenir, l’angoisse au ventre, la pudeur aussi…

Si l’autrice professe une tendresse pour les chevreuils qui sont comme des voisins quand ils viennent brouter l’herbe dans la prairie attenante, les élevages de faisans dont s’occupe son mari, elle raconte son peu de goût pour les chasses, et surtout son quotidien, l’eau à puiser au puits, l’effort à fournir pour remonter un litre d’eau, et ce qu’il fallait pour une lessive… Comment leur premier propriétaire, monsieur le Comte, leur amena l’eau courante.

Et aussi les différents propriétaires qu’elle a subis…

Le style de l’autrice n’a visiblement pas été retouché, et c’est une qualité, car une langue « gourmée » aurait affadi le propos, nous lisons ce que B. Aucuy a écrit, avec sa ponctuation, sa syntaxe… un style directement inspiré d’une parole retranscrite : la franchise sans détour du propos donne de la profondeur à son expression, nous lisons aussi ce qu’elle ne dit pas et on s’émerveille de la fraîcheur du ton, racontant sans détour sa solitude, l’ennui, et sa timidité.

Un témoignage précieux sur les grands domaines solognots et sur une époque où une épouse sans métier ne recevait guère de considération. Très touchant, et à recommander avec chaleur pour une soirée d’hiver !

Bernard Henninger

06 Déc

Romans pour adolescents : « Rester vivant », une devise pour une collection !

Les éditions Le Muscadier publient dans leur collection « Rester vivant » des romans à destination du public adolescent, avec une histoire ancrée dans le quotidien, pour des adolescents, dans le but assumé de leur proposer questions et réflexions sur le quotidien et la société.

Curieusement, les deux livres que j’ai reçus, sont truffés également de références classiques. « Je voulais juste être libre » de Claire GRATIAS, évoque la disparition de Manon L., une adolescente étouffée par une mère dont l’éducation vise à l’isoler du monde, en lui imposant un cadre de vie sans issue et sans amis… Mais quand on est jeune, on vit surtout avec ses amis et notre âme est celle d’une chèvre, désirant l’amour.
Manon L. est en quelque sorte l’incarnation moderne de sa jumelle célèbre, Manon Lescaut, étouffée elle aussi par l’aristocratie du XVIIIme siècle qui cloîtrait les jeunes filles avant de leur imposer — à la sortie du couvent —, un mari. Comme deux particules intriquées, les itinéraires de Manon L. et Manon Lescaut se répondent en ce sens que l’amour est un torrent inévitable, et qu’il projette ces jeunes dont un monde auquel leur éducation n’a ni voulu ni su les préparer.

La référence Shakespearienne de « Juliette et Roméo » est un faux ami. L’auteur, Yves-Marie Clément, bâtit son récit autour d’une passion amoureuse de deux êtres séparés par une barrière infranchissable, celle du bagne de Cayenne, en 1916. Comment Juliette, la fille de l’administrateur, tombe amoureuse du beau Roméo ? Pourquoi ce prisonnier, au tempérament impétueux, multiplie-t-il les incidents qui le conduisent vers une descente aux enfers ? De la punition aux privations, jusquà la mise au cachot…
On est loin de l’idée de justice et de peine graduée. Comment la France put-elle laisser se développer des prisons où ne règnaient qu’arbitraire et violence, tout en prétendant défendre les Droits de l’homme ?

Le livre ouvre avec une citation d’Albert LONDRES, dont le livre Au Bagne, fit scandale en 1924 :

« Le bagne n’est pas une machine à châtiment bien définie, réglée, invariable. C’est une usine à malheur qui travaille sans plan ni matrice. On y chercherait vainement le gabarit qui sert à façonner le forçat. Elle les broie, c’est tout, et les morceaux vont où ils peuvent. »

Et bien que les dénonciations d’Albert Londres aient conduit à la fermeture de Cayenne, il n’est pas interdit de songer à l’état de délabrement de notre système pénitentiaire et de se demander si le système pénitentionnaire s’est réformé et jusqu’où.

Donc profitez de vos loisirs pour découvrir les nombreuses nouveautés de cette maison d’édition Le Muscadier et de son intérêt pour les adolescents

Bernard Henninger

Référence : Actualitté : les éditions Muscadier pour une édition jeunesse engagée.

Livre d’Histoire : « Alfred Dreyfus, citoyen »

Le temps est un animal véloce… et il arrive que des ouvrages qu’on a bien voulu me confier ne reçoivent nul regard, nulle considération, faute de temps, faute parfois d’avoir pris ce temps. En cette fin d’année, où les urgences sorties de leur contexte prennent un ton pastel… je souhaite en présenter ici quelques uns.

Commençons avec ce livre d’Histoire, qui, constatant la désaffection, voire le dédain que lui manifestèrent les « importants » de l’époque :

Clémenceau : « inférieur à l’affaire Dreyfus, de je ne sais combien d’abimes.  »

Léon Blum : « peut-être même, s’il n’avait été Dreyfus, antidreyfusard. »

Depuis quelques années, les historiens se penchent sur le destin de celui qui fut la tâche aveugle de la plus grande affaire judiciaire française, mettant à jour une fracture politique qui ne s’est jamais réparée, d’un antisémtisme français dont nous savons qu’il ne cesse de renaître, jusqu’à bafouer la mémoire d’une victime…

Que sais-je… Monsieur Alfred Dreyfus

Spécialiste de la IIIe république, Georges Joumas avait déjà porté son regard sur cet officier singulier et exemplaire (Alfred Dreyfus officier en 14-18. Souvenirs, lettres et carnets de guerre).

Ici, enrichissant son approche, avec la découverte de sa correspondance avec la marquise Arconati-Vicsonti (correspondance par ailleurs éditée chez Grasset), Joumas met à jour ce que l’affaire a dissimulé de son étonnante personnalité, car, pour surmonter les épreuves qui ont été les siennes, il ne fait guère de doute pour qui a connu la difficulté, que cela n’aurait pas été possible sans une force morale somme toute peu commune.

Fin connaisseur du politique, observateur lucide de son époque, concerné, Alfred Dreyfus dut sa vie durant affronter le mépris et la haine de ceux qui ne voulaient pas admettre la vérité et le fait : la justice avait pleinement innocenté et réhabilité Dreyfus. Bien souvent, la condamnation fautive, même absoute, ne lève pas la suspicion et la haine de ceux qui n’admettent jamais que la justice soit le miroir de la société…

Il était bien conscient que cette affaire, qui avait incendié sa vie, dépassait sa simple personne. Fort des découvertes récentes, l’historien Georges Joumas brosse un portrait précis et documenté, tentant d’évoquer la réalité d’un homme.

Si les Fêtes de fin d’année était l’occasion de mieux se renseigner sur cette Histoire qui est la nôtre, et si elle pouvait nous aider à mieux comprendre les injustices d’aujourd’hui…

Bernard Henninger

 

24 Nov

Roman : « Ada Lovelace ou la beauté des nombres » par Catherine Dufour

Évoquer le destin d’Ada Lovelace est un exercice funambulesque, où l’autrice pilote son récit entre une réalité crue, parfois violente et un climat où le fantastique devient une réalité tangible.

Avec cette biographie atypique, l’autrice, Catherine Dufour tente de comprendre le fonctionnement de la noblesse anglaise à l’aube du XIXme siècle, entre fantastique, comportements violents, destructeurs, oisifs, et d’étonnantes percées : une éducation où les mathématiques sont enseignées avec rigueur et précision, de manière à faire apprécier la beauté des nombres…

À examiner le milieu dont est issue Ada Lovelace, le lecteur pourrait douter de la capacité d’un tel milieu à produire du génie. Or, cette jeune femme a inventé ce qui est devenu le premier programme informatique, et, en particulier, la toute première « boucle logique » en se basant seulement sur sa capacité à penser la machine de Babbage, qui n’exista jamais qu’à l’état de projet sur le papier.

… La question est de parvenir à la rédaction de cette « note G » qui fait d’Ada Lovelace l’inventrice de l’informatique avec Charles Babbage, et la créatrice du tout premier programme informatique. Toute la difficulté consiste à établir un tableau, à la manière d’un tableau de Turner, aussi précis que celui-ci et capable de décrire l’impalpable, les nuées belles et chargées de tempêtes : ce qu’était la noblesse anglaise au début du dix-neuvième siècle. Un noble est doté d’une fortune, que nous peinons à nous représenter, mais, l’oisiveté étant son expression la plus notable, elle ouvre la porte aux comportements les plus extrêmes et, parfois les plus violents.

Ada est la fille d’Anna Milbanke, qui avait reçu une solide éducation et qui garda pour les mathématiques une inclination sa vie durant, et de Lord Byron, qui au moment de sa naissance, et parce que cela mettait sa femme au supplice, s’ingénia pendant son accouchement à tirer au pistolet sur le mobilier. Toutefois, de son père, contraint à l’exil du fait de son homosexualité, elle ne garda que le nom et la réputation sulfureuse.

Comment, dans un milieu aussi hostile, où les femmes n’ont pour d’autre fonction que d’être des mères, ou de briller en société par leurs toilettes et leur beauté, une jeune femme s’est-elle prise de passion pour les mathématiques ?

Comment a-t-elle fréquenté un inventeur illuminé, Charles Babbage, projetant de construire une machine qui ne vit jamais le jour ? Comment ces deux personnalités si instables et fragiles en vinrent à s’associer un temps fort bref, où Ada, dans un éclair de génie qui nous sidère encore, décrivit très précisément les possibilités immenses de cette machine imaginaire ?

Un génie comme Babbage passe surtout pour un excentrique, un fou, qui prétend bâtir une machine inspirée d’un métier à tisser ( !) avec laquelle il prétend rien moins que faire des calculs ! Transposez cette situation dans une Party, une après-midi, avec du thé, des gâteaux, une foule où les épigrammes fusent et où les affaires de cœur, les mariages arrangés et les aventures sexuelles sont les seules préoccupations et vous comprenez l’impossibilité qui en résulte.

 

Comment Ada a pu se former, résister à la pression de son milieu, jusqu’à trouver un « accomplissement » singulier dans l’exercice des mathématiques, tout en étant une épouse, une mère et en fréquentant ces inévitables salons ?

J’ai lu cette biographie avec curiosité et un mélange de passion, car l’autrice avec un art qui n’appartient qu’à elle évoque avec une précision d’entomologiste ces aristocrates anglais, violents, dépravés et dresse un portrait sensible d’une société dont on se demande comment elle a pu produire de telles lumières.

Je vous recommande cet OVNI littéraire, une biographie écrite dans un style capable de rendre palpable la crudité des mœurs aristocratiques, leur folie, et qui se lit comme on lit un roman fantastique de Mary Shelley, sauf que son Frankenstein n’est pas une machine à qui l’inventeur donne la vie par hasard, mais une femme intelligente et fragile qui donne à un Machin fait de rouages, de chiffres et de courroies vie, beauté et sensibilité.

Bernard Henninger

10 Nov

CARNETS DE SEL : nouvel acteur de l’édition à Chécy dans le Loiret

Saluons l’avènement d’un nouvel acteur littéraire en région Centre-Val-de-Loire, les éditions CARNETS DE SEL. Fondées début 2018, les éditeurs désirent se positionner sur une vision littéraire, et une approche « culturelle et émancipatrice ».

Les lignes de la politique éditoriale de cette jeune structure se définissent par un thème fort de littérature générale, l’édition d’essais et de documents, ainsi que des publications pour la Jeunesse.

La première production est un roman : « La lampe au chapeau » où Sandrine Leturcq, petite fille de mineure, évoque l’après-guerre, l’opposition entre Jean, de retour de Stalag, en 1945, qui ne songe qu’à reprendre sa vie là où elle s’est arrêtée huit ans plus tôt, il désire profondément redevenir mineur, et plonger dans l’univers de la mine, « la fosse ». À l’époque de la reconstruction, les mines étaient un des fers de lance de l’industrie renaissante. Jean rêve d’un métier à partir duquel bâtir une vie et une famille… À l’opposé, son neveu Alexandre, de retour de la guerre d’Algérie, révolté et plus instruit, développe une vison plus idéaliste…

Un premier roman, intéressant pour les questions philosophiques qu’il pose…

Les deux ouvrages suivants sont en période de pré-financement, la jeune maison d’édition s’appuie sur les techniques de financements participatifs, et l’espoir qu’elles changent les modes de production…

« La Danse du souffle » parution prévue pour 2020, développe la fascinante pratique du Qi Gong.

. « L’arbre aux mille senteurs » : Thelma est une petite fille qui s’est prise de passion pour les odeurs et qui entreprend de les conserver, à sa manière…

Longue vie à cette maison d’édition et à ses trois associés,

Bernard Henninger

03 Nov

Nantes : le palmarès des Utopiales 2019, festival international de science-fiction

Le festival international de science-fiction Utopiales se déroule à Nantes du 31 octobre au 4 novembre 2019.

Je mets ici le lien vers le palmarès des Utopiales 2019, tenu dans l’excellent blog d’Eric GUILLAUD consacré à la BD : PALMARÈS COMPLET DES UTOPIALES 2019… tout en sifflotant car, le grand prix, dit PRIX UTOPIALES est revenu à HELLSTRID, le magnifique récit de Christian LÉOURIER dont les plus attentifs des lecteurs de ce blog se souviennent que nous avions déja dit un peu du bien qu’il était possible d’en penser. Que cela soit un motif de plus pour vous pencher sur ce récit magnifique ou d’y songer pour un joli cadeau de Noël…

Bernard Henninger