Hier mercredi après-midi jusque tard dans la nuit, on discutait des langues régionales à l’Assemblée Nationale. Une proposition très tardive de certains députés socialistes et apparentés, portée par la député PS Annie Le Houérou. C’était la 6ème tentative lors de cette législature qui prendra fin dans 90 jours. Et C’est bien là le problème ! Mercredi, la Proposition de Loi d’Annie Le Houérou n’a pas pu être votée dans son intégralité mais seulement 4 des 7 articles. La séance à été levée à 1H du matin passé. Déjà que le timing était serré, cette proposition de loi a peu de chances d’entrer en vigueur faute de volonté gouvernementale et de majorité au Sénat.
Photo : site Assemblée Nationale
Le débat du 30 novembre 2016
Les optimistes y verront une avancée au moins symbolique, les pessimistes un éternel bégaiement insupportable de l’Etat français incapable de faire une place à une autre langue que le français. Dans le premier camp, on relèvera un hémicycle plus rempli que d’habitude sur le sujet des langues régionales, de bonnes interventions documentées et pertinentes, à droite comme à gauche. Dans le second camp, on relèvera à juste titre que les 2 Ministres concernées (Culture et Education) ont brillé par leur absence, que cette proposition de loi n’a pas été déposée au nom du groupe socialiste mais seulement signée par 143 députés PS et apparentés. Sans oublier les éternels épouvantails brandis par les opposants : l’enseignement des langues régionales qui pénaliserait celui du français, contribuerait à l’illettrisme, etc… Sans oublier ceux qui pensent que les langues régionales sont suffisamment enseignées, utilisées et protégées sans avoir à leur donner un statut juridique.
Pour le reste, on aura vu la gauche reprocher de manière véhémente le rejet du texte permettant la ratification de la charte européenne par la droite sénatoriale en octobre 2015. Cette même droite se gaussant avec un certain talent dans la bouche de Marc Le Fur les tergiversations et manœuvres politiciennes de la gauche qui attend la fin de la législature pour proposer un texte qui n’aura pas le temps de terminer son parcours législatif.
Le texte examiné par l’Assemblée Nationale
La proposition d’Annie Le Houérou comprend 7 articles qui concernent 3 domaines : l’enseignement, la signalétique et la visibilité des langues régionales et enfin les médias. Sur l’enseignement, il s’agit de généraliser ce qui se passe en Corse, c’est à dire la proposition systématique d’un enseignement des langues régionales là où ces langues sont présentes, un enseignement facultatif évidemment. Il s’agit aussi d’officialiser cet enseignement à l’université. En revanche, rien n’est inscrit dans ce texte par rapport à l’enseignement immersif toujours sujet à débats.
Sur la signalétique, le texte insiste sur le rôle quasi exclusif que peuvent jouer les régions en la matière. Il s’agit d’encourager la signalétique bilingue et la place des langues régionales dans l’espace public.
Enfin le troisième secteur, celui des médias, avec 2 axes :
-que les publications en langues régionales puissent bénéficier des mêmes aides que celles en français
-attribuer un rôle majeur au CSA, notamment dans l’octroi des fréquences pour les radios en langues régionales.
Ce dernier point étant celui qui a soulevé le plus d’opposition.
A une heure du matin, la séance a été suspendue. Les 4 premiers articles ont bien été adoptés et la plupart des amendements (une bonne soixantaine) rejetés. Il reste encore 3 articles à voter, ce qui va rendre le parcours du texte encore plus sinueux. La date de l’examen du reste de la proposition de loi n’a pas encore été fixé.
1H10 du matin : la séance est suspendue !
Un texte voué à rester à quai
Soyons clairs : l’arrivée très tardive de ce texte rend son adoption quasi impossible. Le débat d’hier à donné quelques éclairages plutôt sombres. Non, le gouvernement ne reprendra pas le texte à son compte pour en faire un projet de loi. Ce qui permettrait de gagner du temps et d’imposer un tempo au sénat. On sait que la Ministre de l’Education et certainement celle de la Culture sont très frileuses sur ce texte. A défaut de le reprendre, le gouvernement pourrait aussi demander une procédure accélérée. Au vu du débat d’hier, rien n’indique que ce sera le cas.
Reste le Sénat. Plusieurs interventions de députés Les Républicains laissent entendre que ce texte n’est pas prioritaire pour le Sénat et que, même s’il était mis à l’ordre du jour, la droite n’aurait pas spécialement envie de faire un cadeau à la gauche.
Impasse sur la ratification des langues régionales, voie sans issue pour tout texte donnant un statut juridique aux langues régionales, une fois de plus certains politiques font la démonstration qu’ils sont à contre-courant des aspirations d’un nombre de citoyen de plus en plus important.
Lo Benaset @Benoit1Roux
Vous pouvez visionner les débats sur le site de l’assemblée
http://videos.assemblee-nationale.fr/
Reportage complet dans le JT OC de France 3 samedi