SCALA !? Non, ce n’est pas la célèbre scène parisienne ou l’opéra de Milan. Alors qu’est-ce qui se cache derrière cet acronyme ?
SCALA signifie : Salles de Cinéma Associatives de Loire-Atlantique
C’est une mission qui émane du conseil départemental de Loire-Atlantique. Confiée à l’association du Cinématographe de Nantes depuis 2006, elle concerne les 35 salles de cinéma associatives du département.
C’est un maillage assez unique, qui regroupe un nombre considérable de cinémas, très différents en terme de territoire, de taille, de public, mais ils fonctionnent tous en association.
Le but de cette mission est de mettre à disposition des salles de cinéma des outils de formation et de programmation, pour les aider et les soutenir.
Rencontre avec Simon Hindié, salarié du Cinématographe et coordinateur du réseau SCALA :
Comment fonctionne SCALA ?
Tout d’abord, ce n’est pas un réseau d’adhérents, les 35 salles associatives de Loire-Atlantique n’ont pas adhéré à Scala. C’est le fait d’être un cinéma associatif et d’être présent sur ce territoire qui fait que ces cinémas sont concernés.
Ils sont donc complètement indépendants par rapport à nos propositions.
C’est un réseau très disparate. Un cinéma comme L’Atlantique à Préfailles – petite structure, un seul écran, situé en bord de mer – n’a pas le même fonctionnement que L’Eden 3 à Ancenis – 3 salles, en zone plus urbaine – . Il y a des disparités de structure, de territoire, de réalité, et d’enjeux. C’est la difficulté et la richesse du réseau !
Notre rôle est de leur proposer des actions, principalement de programmation et de formation pour les bénévoles et les salariés. Le champ d’intervention va de la technique, à la comptabilité en passant par la programmation, l’éducation à l’image, le projet associatif,… On couvre vraiment tout ce qui concerne la vie d’un cinéma.
La participation des cinémas est variable. Sur les 35 salles, il y en a quelques unes avec lesquelles on ne travaille jamais ou très peu ou quand les enjeux sont importants. Cela a été le cas dans les années 2010-2013, lors du passage au numérique. Là, toutes les salles se sont regroupées autour d’un enjeu financier important et d’un changement de compétence.
En fonction des propositions, on a en général une vingtaine de salles qui participe.
Quelles sont les actions à disposition des salles ?
SCALA propose différents outils pour accompagner les cinémas associatifs, notamment pour la programmation des films.
En terme de programmation, le fonctionnement en réseau permet de soutenir les films les plus fragiles et de les programmer sur tout le territoire de la Loire-Atlantique. Ce système de mutualisation à l’année permet aux salles de diversifier leurs séances.
Le prévisionnement est un temps fort. Ce sont des journées où l’on programme des films qui vont sortir dans les semaines ou les mois à venir. L’idée étant de les montrer aux équipes de programmation des cinémas pour qu’elles repèrent ces films, qu’elles puissent les défendre et les programmer dans leur salle.
En général, cela se déroule tous les 2 mois, sur une journée (de 9h00 à 23h00) dans une salle. Les cinémas participants vont pouvoir voir un certain nombre de films. C’est une manière pour eux de faire un peu leur marché. Mais c’est surtout une manière pour nous de présenter et promouvoir des films qui passeraient un peu à la trappe, qui n’ont pas beaucoup de sortie.
On propose aussi 2 programmations particulières :
L’une à destination des scolaires « plein les yeux scolaires ». C’est une sélection de 8 à 9 films pour les écoles maternelles et élémentaires. L’idée est de venir en soutien des salles qui peuvent être démunies ou qui n’ont pas l’habitude de faire une programmation pour ce public là.
Et l’autre « les grands classiques » est une sélection de 7 à 10 films-patrimoine pour toute l’année. On fournit un peu clé en main une programmation dans laquelle ils peuvent piocher. On met un livret à disposition des salles et des spectateurs pour comprendre le contexte et la particularité de chaque film.
Il y a aussi le festival PlayTime qui se déroule en avril. Il a été créé à l’occasion des 10 ans de la mission et se déroule sur 15 jours. C’est un festival qui s’accompagne de rencontres avec des intervenants, des réalisateurs. Le but est de rendre les cinémas associatifs un peu plus visibles, de montrer le dynamisme de ces salles.
Autre mission très importante : la formation
Tout au long de l’année, on propose des formations qui relèvent des différents aspects de la vie d’un cinéma : technique, administratif, communication,…
On sollicite un professionnel, mais ça peut être aussi un bénévole d’un cinéma que l’on a repéré pour ses compétences sur le sujet. Il participe alors à la mise en place et à l’animation de la formation.
Tous ces ateliers sont gratuits, il est parfois demandé une participation symbolique pour les frais des intervenants. C’est une manière de faire prendre conscience que faire venir un réalisateur ou un autre professionnel ça a un coût.
On a aussi un rôle de veille sur des questions techniques, sur la filière, de relais d’information notamment auprès des institutionnels, de tête de réseau. Parfois, c’est peu actif, mais avec la période de confinement ça a pris tout son sens. On n’a pas forcément réponse à tout, mais on peut mettre en relation, on a une vision globale.
L’accompagnement suite au confinement :
Plusieurs choses ont été annulées, comme le festival Playtime, des prévisionnements ou certaines formations, mais l’on est resté en contact. Pendant le confinement, j’ai passé des coups de fil aux cinémas pour prendre des nouvelles des bénévoles, des situations financières, pour commencer à les informer des dispositifs d’aides qui se mettaient en place.
Il y a eu 1 ou 2 questionnaires qui ont circulé auprès des salles, notamment un de La Plateforme (Pôle cinéma audiovisuel des Pays de la Loire) auquel on a rajouté des questions un peu plus spécifiques au cinéma.
Il y a eu un rapprochement avec Graines d’images qui est un réseau en Sarthe et Atmosphère 53 basé en Mayenne. L’idée a été de prendre un panel de cinémas (25 sur l’ensemble des 3 réseaux) pour récolter des chiffres de 2019, et les mettre ensuite en perspective. Le but est d’avoir des données économiques pour dresser un premier bilan en fin d’année sur la reprise.
SCALA sert aussi le relais avec les institutionnels.
Avec la crise du coronavirus, différentes aides se sont mises en place. Il y a le soutien du département, qui n’est pas spécifique aux cinémas associatifs, et qui donne la priorité aux salles qui ont des salariés. Il y a aussi la Région, la sécurité sociale, on attend du côté de la DRAC – Direction Régionale des Affaires Culturelles – et du CNC – Centre National du Cinéma et de l’image animée –.
La consigne est plutôt d’attendre le mois de septembre pour avoir plus d’éléments pour remplir les dossiers.
La situation des salles :
Durant le confinement, les salles ont pour la plupart essayé de garder un contact avec leurs spectateurs.
Il y a un petit tiers qui n’a rien fait, mais souvent parce qu’elles n’avaient pas la ressource.
Quelques salles ont mis en place des systèmes de VOD, ça a permis de continuer à faire vivre un comité de programmation.
Il y en a qui ont communiqué, sous forme parfois un peu rigolote comme Le Beaulieu à Bouguenais qui a fait un truc très sympa : un appel à films réalisés en stop motion. Ils ont ainsi réuni 30 ou 40 films pour en faire une projection. Une autre manière d’entretenir du lien avec les spectateurs.
Globalement, le confinement a été plutôt bien vécu, mais la reprise était très attendue de la part des associations et des bénévoles,
Il y a quelques cinémas qui ont choisi de ne pas rouvrir comme le Saint-Paul à Rezé. Mais ils sont minoritaires et souvent, c’est une décision par manque de bénévoles ou parce qu’ils sont fermés habituellement en période estivale.
Nous, on les a plutôt encouragés à ouvrir, car dans certains endroits, à part le cinéma, il n’y a rien.
Pour certaines salles, il va falloir être vigilant, notamment pour l’Atlantique à Préfailles. Habituellement, ils font en 2 mois autant d’entrées que sur le reste de l’année, eux typiquement, il faudra faire un point en septembre.
D’autres ont fait des investissements ou des emprunts importants comme le cinéma de Pornic, qui a déménagé et qui devait rouvrir en avril. Son inauguration n’a pu se faire que le 1er juillet.
Le cinéma Le Gén’éric à Héric a également investi récemment dans 3 salles. Eux, ont dû faire un peu d’arbitrage financier. Ce sont les cas les plus immédiats.
Pour le reste, il y a plusieurs salles qui n’ont pas de salariés, voire pas de loyer ou des loyers symboliques. Du coup, elles n’avaient pas de rentrée d’argent, mais pas de sortie non plus, à part quelques frais de fonctionnement.
La difficulté de la programmation après confinement :
Sur la reprise de la programmation, on a des choses à redire en tant que tête de réseau.
Les salles n’ont eu que quelques semaines pour se projeter dans une réouverture concrète et elles l’ont fait avec leurs outils et leurs réflexes habituels.
Il y a eu la peur de ne pas avoir de gros films à se mettre sous la dent, et beaucoup ont programmé sur plusieurs séances des films comme « De Gaulle » ou « La bonne épouse ».
Mais, nous, on est plutôt à se questionner sur la place des petits films sur les écrans. On est dans une logique de filière, avec des petits distributeurs indépendants pour qui la période n’a pas été simple. Ces petits films vont donc être encore moins visibles. Pour nous, les salles ont une responsabilité à diffuser ces films là. On aurait dû plus les inciter à le faire.
On constate que suite à la crise, les distributeurs ouvrent les vannes, ils facilitent la programmation des gros films, ce qui n’est pas toujours le cas pour les petites salles. Mais, ça ne va pas dans le bon sens pour nous. Il va falloir avoir une vigilance sur les prochains mois sur la sortie des films plus petits, qui sont déjà malmenés habituellement.
La reprise des prévisionnement va sans doute permettre d’élargir la palette de la programmation.
En terme de fréquentation, ceux qui sont venus au cinéma, ce sont plutôt les spectateurs fidèles. On n’a pas encore d’éléments et de chiffres fiables, mais l’on observe beaucoup de disparité : pour certains comme Le Pax au Pouliguen la reprise est un peu morose, pour nous Le Cinématographe à Nantes, c’est mieux.
Les projets de la rentrée :
Il y en a un gros prévisionnement prévu à la rentrée à Nantes au Cinématographe, la particularité cette fois-ci c’est de le faire avec Cinéphare. C’est un réseau un peu analogue situé en Bretagne. Depuis 5-6 ans, on fait avec eux un pré-visionnement un peu plus important que ce que l’on fait habituellement, sur 3 jours. Il y a plus de films projetés, plus de rencontres avec des réalisateurs ou réalisatrices et il y a une table ronde souvent sur un enjeu professionnel.
Pour la suite, on prévoit d’en faire un peu plus souvent, mais des plus petits sur 3-4 films, en limitant un peu la jauge. Mais tout cela va dépendre du contexte sanitaire.
Reprise aussi des formations. Plusieurs sont déjà prévues autour du jeune public, technique autour du support des films (les DCP) et l’accueil du public en situation de handicap. C’est une thématique que l’on travaille depuis 3-4 ans, et qui est portée par les collectivités et la société en générale.