« J’aurais pu parler le bulgare, le chinois, le finnois, l’ourdou… » Même depuis La Ciotat, la chanson de Moussu T prend aujourd’hui du crédit avec le site web Localingual. Plus large que la méthode Assimil, c’est une carte du monde sonore et participative qui apprend à prononcer toutes les langues. Par continents et par pays, on y retrouve les langues officielles et celles qui ne le sont pas. Le site a pour ambition de devenir le Wikipedia des langues étrangères. L’intention est louable mais sa réalisation pose quelques problèmes.
Localingua : près de 20 000 extraits audio
Lancé le 8 janvier 2017, le site a vu passer plus de 500 000 visiteurs curieux d’entendre ces langues ou bien d’y laisser leur voix. L’enregistrement vocal est ainsi possible depuis un ordinateur ou un smartphone Android, mais pas un I-Phone pour des raisons techniques liées au logiciel iOs d’Apple.
Cette carte a été élaborée par David Ding, un ancien ingénieur de Microsoft. Lorsque l’on clique sur un pays, apparaît sur le côté droit de l’écran une colonne contenant plusieurs extraits audio de voix de personnes du pays. On y retrouve la prononciation du pays et quelques mots ou expressions dits dans différentes langues. En cliquant 2 fois sur un pays, les régions ou département apparaissent.
Côté langues régionales -tout du moins en France- c’est encore un peu le désert. Pour l’occitan, on retrouve seulement 1 contribution en Gironde, 1 dans les Hautes-Pyrénées et c’est tout. C’est la dénomination « provençal » qui est utilisée pour l’occitan en Provence avec seulement 3 mots pour l’instant dans le Var : degun, kéké et farigoule… Autant dire que Moussu T a encore du boulot à faire ! Côté Espagne, pas d’occitan non plus (alors que cette langue est officielle en Val d’Aran et dans la Généralité de Catalogne). Aucune trace non plus à Cunéo pour les vallées occitanes d’Italie. Contributeurs occitans, réveillez-vous ! Mais ce n’est pas là le principal problème.
Localingua c’est aussi trolls, fouillis et insultes
Le site a des intentions louables mais des réalisations critiquables. Chacun peut poster -et pas que des choses intéressantes- et l’internaute peut voter avec les pouces en haut quand il aime et en bas quand ce n’est pas le cas. Et l’ordre d’affichage des phrases audio est conditionné par ces votes. Autant dire que sur le podium, on peut avoir des insultes, des attaques et autres vulgarités. Le participatif a ses limites et l’être humain pas toujours sa raison. On peut y trouver des références à Trump, des messages de Corée du Nord tendancieux ou par exemple, dans un post des Pyrénées-Orientales, un extrait de la chanson « Occexit » du groupe Al Chemist contre le nom de la région Occitanie. Là n’est pas le problème mais fallait-il intituler cette contribution « Occitarace » ?
Il faut donc faire le tri et ce qui est le plus écouté n’est pas toujours le meilleur. Le site n’a que quelques semaines d’existence mais il va falloir sans doute rectifier certaines choses pour que cette carte donnée aux langues ne soit pas une carte blanche.
Lingua libre : autre site, autre méthode
Lingua Libre est un projet collaboratif porté par l’association Wikimédia France. Le site veut favoriser la documentation et la conservation des langues minoritaires et régionales. Après avoir créé un compte utilisateur, le site permet d’enregistrer facilement les mots de sa langue à partir d’un navigateur internet. Ces enregistrements sont versés sur la médiathèque Wikimédia Commons. Ils serviront ensuite à compléter, documenter et illustrer les autres projets comme Wikipédia et le Wiktionnaire. Locuteurs, linguistes ou encore les étudiants pourront y trouver de la matière ré-exploitable librement. Côté occitan, lo Congrès permanent de la lenga occitana et l’In’òc sont partenaires et travaillent dessus. Les 9 et 10 décembre derniers, une première séance d’enregistrements a eu lieu à Pau.
Lo Benaset @Benoit1Roux