Une émission de télévision traitant de l’automobile (Turbo) ayant souhaité m’interviewer avec Olivier Marchal. Plus emballé à l’idée de le rencontrer que de parler voitures, j’acceptai aussitôt. Acteur, scénariste ou réalisateur, ce type a tous les dons, il me fait presque regretter de ne pas avoir commencé ma vie dans la police. Derrière une apparence timide un peu bourrue, comme mon ami Dutronc c’est un vrai gentil. Mais un premier contact en présence d’une caméra freinant la simplicité des rapports, j’espère vivement le revoir un jour devant un pot au feu, attendu qu’en France toute chose sérieuse commence par un déjeuner.
Le plus étonnant fut que le réalisateur nous donna rendez-vous dans une galerie de Saint-Germain des Prés où étaient exposées les photos d’un photographe que je ne connaissais pas. Vous allez entendre parler de lui en 2014, il s’appelle Roger Kasparian et son histoire est incroyable. Fils d’un opérateur qui faisait des portraits pour le studio Harcourt, il travaillait seul en free-lance, vendant ses images à différents journaux. Ca ne lui était sûrement pas facile parce qu’il ne bénéficiait pas comme moi d’une situation aussi exceptionnelle que non méritée grâce à « Salut les copains ». Daniel Filipacchi, voulant que je symbolise le journal, parlait sans cesse de moi dans son émission et me mettait ainsi en lumière pendant que Kasparian, lui travaillait dans l’ombre. Or son travail est formidable, car pendant que je rêvais des images destinées à être épinglées sur les murs des chambres des adolescents, lui faisait des photos de reportage qui montraient la réalité des années 60. Au début des années 70, reprenant le magasin de photos de son père, il abandonna le monde du show-business pour immortaliser des naissances et des mariages.
Et c’est un ami rencontré par hasard dans une brocante qui va lui proposer de ressortir ses photos oubliées depuis quarante ans dans des cartons. Je l’ai rencontré, il est très sympathique et merveilleux de simplicité. Selon lui il m’avait rencontré une fois dans les bureaux du journal pour vendre ses photos. Je lui en avais fait acheter une me dit-il, mais je ne m’en souviens pas. En voyant ses images je me rends compte que j’aurais dû l’engager à l’époque, mais j’avais déjà cinq photographes en staff. Avec moi ça faisait six pour un mensuel, c’était déjà beaucoup. Je suis donc passé à côté de lui, tandis qu’il devait se débrouiller tout seul parce qu’il n’avait pas les avantages dont je bénéficiais. Bon que voulez-vous c’est comme ça, je ne vais quand même pas m’excuser d’avoir eu de la chance… En attendant qu’il se rassure, les choses vont s’arranger pour lui, Philippe Manoeuvre prépare un livre sur son travail, il va avoir beaucoup de succès et je m’en réjouis parce qu’il a du talent. D’ailleurs je lui ai acheté une photo de Françoise Hardy, c’est vous dire, parce que franchement je n’en manque pas, mais la sienne est plus vraie, moins posée, elle ressemble merveilleusement à la jeune femme que j’ai connu. Bravo Roger !
Jean Marie Périer