28 Déc

Alléluia les pruneaux !

Dulco 1

En cette joyeuse semaine où les instances religieuses nous suggèrent de fêter en famille la naissance de Jésus de Nazareth, me voilà pris d’une générosité soudaine envers l’humanité toute entière. En effet, j’aimerais contribuer à la liesse générale en me penchant sur le destin héroïque d’une personne dont le courage et l’opiniâtreté méritent d’être soulignés. En effet à chaque fois que le calendrier nous pousse aux agapes, la même jeune femme apparait sur les écrans de nos téléviseurs pour se pencher affectueusement sur le sort de nos tripes. Gloire à la belle inconnue qui rythme nos plaisirs cathodiques en assénant ce diktat salvateur: « Dulcolax, le matin relax ! »

Je ne peux empêcher d’avoir une pensée émue pour son mari, sommé d’arborer pour toujours sa fierté au bras de celle à laquelle il a juré fidélité, ignorant, le bougre, qu’il liait son destin à une guerrière de la constipation.

J’espère que la belle est entre les mains d’un agent efficace, lequel aura au moins veillé à ce que sa prestation soit récompensée par une rémunération systématique à chacune de ses apparitions. Vous rendez-vous bien compte des conséquences ? À l’entrée d’un magasin, traversant un restaurant bondé ou pénétrant dans un commissariat, elle doit affronter les regards d’abord dubitatifs (sur quelle chaîne présente-t-elle donc la météo celle-là ?) puis narquois dès que la mémoire revient, le tout accompagné du geste pavlovien de la main sur le ventre synonyme de troubles intestinaux.

Cette femme est une héroïne.

Pourtant il me semble me souvenir que dans ma tendre enfance, ma grand-mère, du haut de sa sagesse, me recommandait souvent les bienfaits du pruneau. Loin de moi l’intention de nuire à la carrière de la Sainte Thérèse de nos entrailles, mais enfin l’usage de ce petit fruit laxatif peut rendre des services appréciables. Finis les regards au plafond de la pharmacie une fois le médicament commandé, adieu l’ingérence de la pilule gâchant par la pensée un magnifique coucher de soleil Bahamien, vive le retour au paradis des sphincters apaisés.

En ces temps de liesse obligée, c’est donc un sain retour à la nature auquel je vous engage et par la même occasion, chers Aveyronnais, je vous souhaite un Noel d’autant plus joyeux qu’il sera, grâce à ces lignes, suivi d’un transit magistral. Alléluia les pruneaux !

Jean-Marie Périer

Dulco 2

Article publié dans « Le Villefranchois ».

07 Déc

Triste semaine.

Jean d'O

J’aimerais remercier le journal « Le Point » d’avoir utilisé pour leur couverture cette photo de Jean d’Ormesson que j’avais faite pour « ELLE » dans les années 90. Ça me touche beaucoup car l’élégance de l’homme comme la musique de ses mots m’ont toujours emballé.

Voyez-vous, c’est l’un des plus grand privilège de la photographie. Si vous avez la chance de travailler pour un journal, vous pouvez rencontrer pratiquement n’importe qui. Ensuite, pendant la séance vous êtes quand même en mesure de demander à votre modèle: « Tournez-donc un peu la tête ou redressez-vous s’il vous plaît ! » alors que vous ne le connaissiez pas une heure avant, et ce, qu’il soit boucher ou président de la république. Ce privilège n’est pas donné à tout le monde. À part dentiste ou gynécologue, je ne vois pas beaucoup de professions présentant cet avantage-là.

Cela dit j’avais déjà croisé Jean d’Ormesson quelques fois mais nous n’étions pas des proches. J’ai surtout passé avec lui trois jours mémorables à Venise à l’occasion d’un sujet pour le journal « ELLE » dans les années 90.

J’avais emmené mon amie Julie Andrieu et bien sûr, au moment même où je la lui ai présenté, la raison de ce voyage devint évidente. Ne pouvant respirer sans séduire, les photos que je devais réaliser passèrent aussitôt au second plan, et il entreprit de lui faire connaître son Venise à lui, autrement dit le vrai.

C’était un spectacle merveilleux de voir cet homme d’un âge certain marcher à vive allure, l’oeil vif et le doigt véloce nous indiquant des détails architecturaux que les touristes ne verront jamais.

À la suite de quoi il va poser pour moi, mais la séance est rapide. Et tandis qu’il me regarde de ses yeux bleus roi, je ne saurais dire s’il me sourit par politesse ou pour me remercier de lui avoir donné l’occasion de connaître une aussi belle personne.

Julie est restée son amie, hélas moi, je ne l’ai jamais revu.

Jean-Marie Périer