En 1960, lorsque je suis parti faire mes vingt-huit mois de service militaire, la première chose que l’armée m’a appris, c’est à respecter la Marseillaise. Et ceux que j’ai vu se faire tuer en Algérie m’ont surement aidés à en comprendre le sens (comme vous pouvez le voir, moi j’avais la chance de tenir une caméra et non un fusil, donc n’allez pas penser que je me prends pour un héros.)
Aussi, de la part de Madame Taubira, désigner la Marseillaise comme un «Karaoké» n’est certes pas des plus fins, mais j’ai le sentiment qu’elle a surtout traduit un malaise commun à certains de nos politiciens.
Moi ce qui me choque beaucoup plus depuis toujours c’est de voir les partis politiques de tous bords chanter l’hymne national à la fin de leurs meetings. La Marseillaise appartient d’abord à tous les français et non à une tendance qu’elle soit de droite, de gauche ou de quelque extrême. De quel droit un parti transforme-t-il un chant pour lequel tant d’hommes sont morts en slogan publicitaire pour ses idées ? Sans compter le spectacle affligeant de ces gens au garde à vous, les bras raidis par la recherche d’une dignité illusoire, l’oeil rivé vers le ciel pour tenter de cacher qu’ils ne connaissent que la première phrase du texte (généralement ils se détendent à : « Abreuve nos sillons ») et dans l’espoir qu’arrive la fin de cette mascarade, tout en s’adonnant au hit parade de celui qui chantera le plus faux.
Je crois que ceux qui se taisent sont simplement conscients du ridicule de la situation et je suis convaincu que la plupart des politiciens seraient soulagés qu’on ne leur impose plus cette torture à la fin de leurs meetings.
Ainsi la Marseillaise retrouverait son rôle de lien de tous les Français, on la réserverait seulement aux vraies grandes occasions, rendant ainsi hommage à tous ceux qui ont donné leur vie en son nom. L’hymne national n’est pas un pensum, il est tout ce qui nous reste du temps où la France était dirigée par des gens qui la respectaient, quand elle était encore dans le peloton de tête des nations au lieu d’être en passe de devenir le jardin d’acclimatation du monde libre.
Jean-Marie Périer