16 Oct

Les entreprises de l’événementiel et du spectacle ont perdu 70% de leur chiffre d’affaires à Toulouse

« Events 31 » qui regroupe 200 entreprises de la filière événementielle toulousaine a fait une enquête sur l’impact de la Covid 19. En moyenne, ces structures ont perdu 70% de leur chiffre d’affaires. 3 entreprises sur 5 pourraient déposer le bilan dans les prochains mois. Le point avec Laurent Chabaud qui a coordonné l’Alerte Rouge à Toulouse.

Laurent Chabaud lors d’un enregistrement

Laurent Chabaud est à la tête de « Concept Group », une entreprise de prestation technique. Il emploie 42 personnes en CDI et tout autant d’intermittents en ETP (Equivalent Temps Plein). Ses 4 bâtiments de Toulouse, Bordeaux, Marseille et Brignoles sont remplis de matériel. 8 000 m2 de matériel son, lumières, structures, distribution électrique, réseau, qui attendent de partir sur un festival, un spectacle…Mais les événements s’annulent les uns après les autres. « Depuis le mois de mars 2020, nous assistions à une mise à mort de notre filière. Avec les annonces du Président de la République mercredi soir 14 octobre, c’est une décapitation. »

3 entreprises sur 5 pourraient déposer le bilan dans les prochains mois

Pendant le confinement, les 200 entreprises rassemblées sous la

bannière « Events 31 » n’ont pas travaillé et ont donc eu 100% de pertes. Depuis le déconfinement, l’activité a du mal à reprendre. Et c’est très long. Car un festival, un congrès, une manifestation événementielle, ne se lancent pas au dernier moment et mettent du temps à s’organiser. Alors les protagonistes hésitent. Encore plus maintenant ou un couvre-feu est instauré dans les 37 communes de Toulouse Métropole à partir de 21H.

Selon les prévisions de leur enquête publiée début octobre, le chiffre d’affaires de ces 200 entités est estimé à 150 M€ pour 2020 contre 500M€ pour l’exercice 2019. Elles perdraient en moyenne 70% de leur chiffre d’affaires sur 12 mois à partir de mars 2020. Un chiffre qui monte même à 90% pour les prestataires techniques comme Laurent Chabaud. Pour les Agences événementielles, c’est du 100%, sans compter les traiteurs, les prestataires divers et les hôtels spécialisés dans l’événementiel.

Non seulement l’activité ne reprend pas, mais tous les jours, leur « patrimoine technique » perd de la valeur. « Notre parc matériel doit être renouvelé à 80 % tous les 5 ans. Le son, la lumière, tout vieillit vite et devient obsolète. Si nous avions investi dans l’immobilier, notre inactivité aurait moins d’impact car le patrimoine garderait sa valeur. Si nous sommes en liquidation, notre matériel ne vaudra presque rien et ne permettra pas de rembourser les dettes. »

Laurent Chabaud au volant de son camion de matériel technique

D’habitude, nous mettons du matériel pour les artistes en résidence. Là, notre nouvelle résidence sera le tribunal de commerce!

Résultat : 3 entreprises sur 5 réalisant plus de 500K€ de chiffre d’affaires pourraient déposer le bilan dans les 6 prochains mois.

« Alerte Rouge », l’exemple de Toulouse

Le mercredi 16 septembre, la filière événementielle de la Haute-Garonne a lancé l’Alerte Rouge. Plusieurs façades ont été illuminées en rouge (Conseil Régional, Départemental…) et les acteurs de ce secteur se sont retrouvés au Bikini pour lancer l’alerte. « Notre collectif à Toulouse est assez unique. Il y en a seulement à la Réunion, et à Marseille. Depuis une dizaine d’années il existe un Bureau des Congrès sur Toulouse, avec des représentants de la mairie, mais tous les acteurs privés sont associés. On organise beaucoup de réunion pour promouvoir le tourisme d’affaires. On a appris à se fédérer, se rencontrer. Quand la crise du Covid est arrivée, le collectif est né de ça, d’où le succès rencontré. Les 30 prestataires techniques de Toulouse ont tous répondu présent. »

Alerte Rouge devant la salle du Bikini (Toulouse) Photo : Master Films

Des aides insuffisantes et trop conditionnées

Depuis mars 2020, des aides se sont mises en place progressivement. Il y a d’abord eu la prise en charge par l’Etat de l’activité partielle qui se poursuit jusqu’à la fin de l’année. D’autres sont venues compléter le dispositif, mais les bénéficiaires potentiels doivent avoir une perte de chiffre d’affaires supérieure à 70%.

Dans le collectif toulousain, 30% des adhérents ne les percevront pas à cause de ça. Idem pour la région Occitanie qui soutient également le secteur. Mais l’une des conditions de l’octroi des aides est que l’entreprise ait un chiffre d’affaires inférieur à 500K d’€. Résultat : 75% de ces entreprises toulousaines ne peuvent pas en bénéficier. « A l’heure des logiciels informatiques, nous ne comprenons pas que l’on ne mette pas en place une dégressivité du montant de ces aides. C’est ce que nous demandons. Car que l’on soit à 60% ou 70% de pertes, la situation est quasiment la même », regrette Laurent Chabaud. « Que les entreprises soient petites, moyennes ou grosses, les dégâts économiques et sociaux sont tout aussi graves, avec néanmoins des charges de structure qui montent en flèche selon l’importance de l’entreprise et qui réduisent notre durée de vie. »

Vendredi dernier, le gouvernement a assoupli les conditions et abaissé les seuils. La région n’a pas encore remodifié les conditions des aides.

Autre problème, ces entreprises toulousaines de l’événementiel dépendent beaucoup du secteur de l’aéronautique, d’Airbus et ses sous-traitants. Autant dire que c’est la double peine pour eux. « Nous avons eu AZF en 2001. On a mis 3 ans à s’en remettre. 2006 : Power 8 (plan social) chez Airbus; 2007 les subprimes… 2012-2015, les attentats en France et Mohammed Merah à Toulouse. Mais la crise du Covid est beaucoup plus puissante. Impossible pour nous de s’adapter!

Les adhérents d’Events 31 ont fait leur calcul : ils ont 135M€ de charges incompressibles par an, soit 11,25 par mois. Or pour l’instant, les différentes aides leur permettent de couvrir seulement 10% de ces charges. Et encore, certaines ne sont que reportées et devront être payées en mars 2021. Les loyers de leurs bâtiments par exemple doivent être payés à nouveau au premier octobre.

Comment payer 150% de charges quand on perd 80% du chiffre d’affaires?

Oubliés pendant des mois de cette crise, la filière de l’événement a fini par être prise en compte dans les négociations à Paris. Ils sont désormais rattachés au secteur du tourisme. Mais quand Roselyne Bachelot débloque 2 milliards en septembre pour les producteurs et organisateurs du secteur culturel, ils n’en voient pas la couleur au prétexte qu’ils bénéficient du plan tourisme.

En 2019, le secteur de l’événementiel comptait 3000 CDI sur Toulouse. Ils ne seraient plus que 2100 aujourd’hui, soit une chute de 30%.

Alors l’Alerte Rouge est toujours allumée. « On sensibilise nos députés. On ne bloque pas le périph, on reste courtois. C’est le poids des mots et le choc des totaux que l’on a fait avec notre enquête. Mais on sent la pression pour descendre dans la rue car on ne peut plus vivre longtemps comme ça », prévient Laurent Chabaud.

La coupe du monde de rugby et les JO en ligne de mire

Pour 2021, les entreprises de l’événementiel et du spectacle ne se font pas d’illusion : la Covid sera toujours là. 2022, les élections présidentielles laissent peu de place à de grands événements car tout le monde attend de voir les intentions de l’hôte de l’Elysée. Mais en 2023, la France accueille la coupe du monde rugby. En 2024, les JO seront là aussi.

Des moments de fête, de partages et de joie où l’on comptera sur ces entreprises. Mais tiendront-elles jusque là? « Tout le monde aura besoin de ces manifestations pour oublier la crise et se retrouver. Si nous ne sommes plus là, il n’y aura pas ces événements. Nous aurons perdu notre savoir-faire au moment où l’on aurait le plus besoin de nous ». 

Enregistrement d’une émission à Sud Radio

Laurent Chabaud a horreur que l’on dise que nul n’est indispensable car selon lui, beaucoup de personnes le sont. La crise du Covid pourrait bien lui donner raison.

A LIRE AUSSI ; L’EXEMPLE DE SPEEDOS E D’UNE SOCIETE TOULOUSAINE

Benoît Roux

11 Oct

Le festival Jazz sur son 31 soutient les artistes de la région

C’est la 34ème édition du Festival Jazz sur son 31. Soutenue par le Conseil Départemental de la Haute-Garonne cette manifestation fait place aux artistes américains (James Carter), aux français (Thomas Dutronc) mais aussi aux artistes locaux. La plupart des concerts sont gratuits.

Commencé le 7 octobre, le festival Jazz sur son 31 est l’un des rares à être maintenu. Certes la programmation a été réduite de moitié (33 événements cette année contre 72 l’an dernier), mais les grandes affiches sont présentes : James Carter, Thomas Dutronc, Jacky Terrasson, Jeff Ballard. Comme d’habitude, une place importante est réservée aux artistes français avec Thomas Dutronc, la saxophoniste Sophie Alour et  les pianistes Jacky Terrasson, Andy Emler, Rémi Panossian, Laurent Coulondre ou encore Yaron Herman.

Des « concerts clubs » dans plusieurs villes du département

Mais l’originalité, ce sont aussi des artistes locaux qui se produisent dans différentes salles d’une dizaine de communes de Haute-Garonne. Pour le coup, les scènes deviennent une sorte de club de jazz avec des artistes de la région toulousaine. Jeudi 8 Octobre, Serge Lopez et Pascal Rollando (2 musiciens de Bernardo Sandoval) ont ouvert le bal à Fenouillet.

Jeudi prochain 15 octobre, place à la poésie et à l’émotion avec ce spectacle où l’on retrouvera 2 artistes hors-pairs : tout d’abord l’accordéoniste aveyronnais Lionel Suarez et le chanteur et guitariste JeHaN. Une soirée en hommage au chanteur Allain Leprest disparu sans avoir eu la reconnaissance qu’il méritait. C’était un ami des 2 artistes. Lionel Suarez qui a accompagné beaucoup d’artistes -notamment Claude Nougaro- va mettre sa virtuosité au service des mots de Leprest et de la voix touchante de JeHaN.

JeHaN & Suarez – Je ne te salue pas

Ils seront le 15 octobre à la salle Georges Brassens d’Aucamville.

Le lendemain, le « Mystère trio quartet » sur un registre plus festif sera au foyer de Larroque. Jazz, blues, soul, manouche, les voilà sur les traces de Django Reinhardt.

Mystère Trio quartet – Ondine

Toujours manouche et tout aussi jazz, mais en quartet, Benjamin Bobenrieth Travels. De la fougue, de l’audace, les influences de Mingus et Coltrane sont bien là. A voir samedi 17 octobre à Lasserre-Pradère.

Et pour clôturer le festivale le dimanche 18 octobre, place aux Filibusters. Les cuivres rutilent et la Nouvelle Orléans s’approche. 3 saxs de toutes tonalités, 4 cuivres en tout et un batteur. Embarquement à 17H dimanche à Gratentour.

Toutes ces manifestations sont gratuites comme la plupart de la programmation du festival où seulement 6 spectacles sur les 33 seront payants. Raison de plus pour aller redécouvrir ces artistes et soutenir le monde du spectacle et de l’événementiel qui en a bien besoin.

En savoir plus sur le festival 

Renseignements et réservations pour les concerts payants

Benoît Roux

 

09 Oct

Shaken Soda, le nouveau groupe pop rock de Toulouse qui bouge

C’est punchy, frais et bien fait. Les 3 gars de Shaken Soda sont un peu secoués mais le cocktail musical est éclectique. Du pop-rock un peu français et très british qui donne la pêche. Leur tout nouveau clip est en ligne. Le nouvel EP des toulousains sortira le 16 octobre avec un live-stream depuis Toulouse.

Shaken Soda © Katty Castellat

C’est l’histoire de 3 musiciens à l’énergie communicative. Ils se connaissaient mais devaient se trouver. Pierre Boulay était parti en Angleterre, d’où le côté très anglais dans l’approche et dans le son. C’est un chanteur à la voix de ténor très timbrée anglais et un bassiste rebondissant. Olivier Castellat a été bluffé par l’une de ses performances. Le hasard fait bien les choses : le violoncelliste de formation classique assure désormais les guitares et les chœurs de Shaken Soda. Mikaël Torren est un ami d’Olivier. C’est lui qui signes la batterie et les samples. 3 gars faits pour se rencontrer et qui seront réunis le 11 décembre 2018 pour jouer ensemble à Toulouse. Le groupe est monté.

crédit photo : Fabrice Morand

Sans prise de tête mais avec beaucoup d’à propos et de virtuosité, le cocktail de ces 3 shakers musicaux va devenir enivrant. Ce qui frappe à l’écoute de leurs morceaux, c’est la variété des compositions et l’énergie déployée. Tout ceci est assez jouissif et énervé. Le rock l’emporte mais les influences sont multiples. Ca respire la pop anglaise genre Artic Monkeys, un côté rock-punk revisité qui Clash, mais aussi des inspirations classiques. Une identité complexe à l’énergie libératrice.

Shaken soda – Complex Identity

Un clip co-réalisé par Mikaël Torren et Charlie Couteau, filmé par Céline Kalidjian, qui montre bien l’inventivité du groupe. Des identités ambivalentes déclinées en plusieurs scènes assez délirantes, un hymne à la liberté, une invitation au lâcher-prise.

Le groupe sortira son premier EP le 16 octobre. Pour l’avoir déjà écouté la diversité sera de mise et la danse de rigueur. Pour l’occasion, Shaken Soda donnera un live-stream depuis le Connexion Live à Toulouse. Le public ne sera pas présent mais il pourra voir le concert et l’interview en direct sur Facebook et une retransmission dans plusieurs bars partout en France. On en reparlera. En attendant, écoutez Shaken Soda et… Shake it baby !

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Benoît Roux 

05 Oct

Des musiciens de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse reprennent les clefs de Saint-Pierre

Depuis 20 ans, des musiciens de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse proposent des concerts en formation réduite. Dans un cadre magnifique (Saint-Pierre des Cuisines à Toulouse), ils proposent 5 concerts pour écouter la musique de chambre avec plus de proximité. La nouvelle saison débute ce soir lundi 5 octobre avec un programme dédié aux quatuors : Mozart, Haydn, Beethoven.

Les 4 musiciens du concert du 5 octobre 2020 : Photo : Les Clés de Saint-Pierre

Faire entendre la musique dite classique d’une autre manière

Depuis l’an 2000, les associations « Internotes » et « Les clefs de Saint-Pierre » proposent des concerts de musique de chambre d’un autre genre. L’idée : prendre des musiciens de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse (ONCT) et leur demander d’établir un programme musical pour le jouer ensuite à l’auditorium de Saint-Pierre des Cuisines de Toulouse. « Ce sont des choses qu’on ne voit pas dans les autres saisons musicales. Nous sélectionnons 5 de ces programmes et les musiciens du Capitole viennent ensuite les jouer à Saint-Pierre. Ca crée une autre relation entre les musiciens et le public. » Henri Simonneau le président de ces associations est très satisfait du résultat. Toute la différence se fait par le choix des musiciens du Capitole qui permet des associations audacieuses et des découvertes fructueuses.

Outre les 5 concerts à Saint-Pierre, l’association « Internotes » se greffe aussi sur les « Concerts de marchés » qui se déroulent tous les dimanches à Tournefeuille non loin du marché. Ils proposent 4 concerts cette saison dans ce cadre là : « Ce sont des concerts plus courts (1H environ), qui s’adressent particulièrement aux enfants, et qui sont très accessibles : le prix est fixé à 2€ ».

La saison 2020/2021

La saison précédente s’est achevée le 11 septembre dernier en raison du concert annulé le 27 avril. Mais ce lundi 5 octobre, Les Clés de Saint-Pierre réinvestissent l’auditorium pour la nouvelle saison. Au programme, « Le quatuor en héritage » avec 3 compositeurs clés de ce genre musical : Haydn, Mozart et Beethoven. Ce lundi soir à 21H, vous pourrez le Quatuor N° 5 opus 33 de Haydn, le Quatuor N° 15 en ré mineur K. 421 de Mozart et le Quatuor N° 5 opus 18 en la majeur de Beethoven.

Sur scène,  Marianne Puzin et Jean-Baptiste Jourdin, violons, Claire Pélissier, alto et Marie Girbal, violoncelle. Tous les 4 sont des musiciens de l’ONCT. Ils ont réalisé un Teaser qui prouve bien l’esprit « décontracté » de ces concerts. 

Le prochain concert aura lieu le 30 novembre et fêtera le 250ème anniversaire de la naissance de Beethoven. Avec le Quatuor n°7 en fa majeur, les Plaisanteries musicales autour de Beethoven pour 2 cors et quatuor à cordes et un Sextuor en mi bémol majeur.

Chaque concert est au prix de 22€, 16€ pour les séniors, 11€ pour les étudiants. Pour ces derniers, si vous vous présentez le soir du concert, vous ne paierez que 5 € sur simple justificatif. L’idée étant de rajeunir le public, il est possible de s’abonner aux 5 concerts de Saint-Pierre pour 70€. Evidemment, l’accueil du public se fera dans le stricte respect des normes sanitaires. La jauge de la salle permet de recevoir 196 personnes.

Des partenariats à venir

L’association « Internotes » développe des partenariats depuis sa création. L’association « Aïda » qui est aussi mécène de l’ONCT l’est aussi pour ces concerts. Cette année, 3 des 5 concerts feront l’objet d’une organisation particulière. Des actions ciblées par rapport à un certain public qui fréquente peu ces manifestations (par exemple les jeunes, les Compagnons du Devoir…) pour venir présenter les musiciens dans leurs structures et qu’ensuite ces personnes viennent aux concerts. « Nous allons signer une convention ciblée avec certains publics le 17 octobre à la Halle Aux Grains, assure le président Henri Simonneau. Cette opération sera menée pour les 3 concerts qui auront lieu début 2021. Nous voulons montrer notre travail au quotidien pas seulement quand nous sommes en costume queue de pie! ».

Les « Clefs de Saint-Pierre » ou comment faire prendre la Clef des champs aux musiciens pour faire écouter et découvrir la musique sur des registres différents.


Les clefs de Saint-Pierre

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28 Sep

Alerte Rouge pour Speedos et les techniciens du spectacle toulousain

Il y a les artistes et ceux qui sont derrière. Jean-Luc Petit alias « Speedos » a fait le son pour Cats on Trees, Stan Getz, Fabulous Troubadors, Mano Negra, Massilia… On le retrouve souvent aux concerts du Bikini à Toulouse. Mais depuis le printemps, les consoles restent muettes. L’Alerte Rouge a été déclarée. Si on parle souvent des artistes, tous ceux qui leur permettent de se produire sont en galère. Exemple avec « Speedos » qui a choisi ce métier pour s’enrichir les oreilles.

Photo Audio-Lum

Jean-Luc Petit est un passionné du son et du spectacle en général. Si on l’appelle « Speedos », c’est parce qu’il voudrait toujours donner plus pour sa passion. Mais depuis 6 mois, c’est le calme plat. Il aurait dû être sur un festival, peut-être participer à un concert au Bikini (Toulouse). Mais il est chez lui, avec son entreprise Audio-Lum fondée en 1989.

Audio-Lum passe au rouge comme d’autres sociétés

Non loin de Toulouse, à Drémil-Lafage, Jean-Luc trouve le temps long. Cet éternel bon vivant optimiste commence à se faire du mouron pour ses 3 salariés permanents et la quinzaine d’intermittents qui travaillent régulièrement. « Aujourd’hui, nous en sommes à 190 jours de concerts annulés depuis le 16 mars. Depuis cette date, il ne s’est rien passé non plus à la salle du Bikini ». Jean-Luc est à la tête d’une petite structure indépendante (l’une des dernières) qui intervient sur de nombreux festivals, qui suit les artistes en tournée et qui fournit beaucoup de prestations pour des salles de spectacle; notamment le Bikini à Toulouse.

Cette année les « Arts scenics » de Lisle-sur-Tarn n’ont pas eu lieu, les « Siestes électroniques » à Toulouse se sont endormies pour un an. Idem le festival « Rock en Stock » dans le Gers, le « Tangopostale » à Toulouse. Quand le téléphone sonne chez Speedos, ce n’est plus pour une commande mais pour supprimer encore une date. Ses salariés sont en chômage partiel. Lui, il n’y a pas droit mais touche des aides de l’Etat. Certains mois 1500 €, d’autres un peu moins. La Région Occitanie a été solidaire : 2000 €. Heureusement, la comptabilité de sa boîte était saine. Il puise donc dans les réserves. « Nous avons fait quelques concerts en plein air devant la Halle de la Machine (Toulouse), quelques petites locations. Nous avons perdu 80 % de notre activité depuis mars. Pendant le confinement, nous n’avons rien fait. Habituellement, notre chiffre d’affaire annuel est de 650 000 €. Cette année, nous arriverions péniblement à 150 000 € si on arrive à travailler. » 

Alerte Rouge devant le Bikini (Toulouse). Photo : Benoît Roux FTV

Les métiers de l’ombre au bord du gouffre

En Midi-Pyrénées, l’ensemble de la filière concert-événement fait travailler 9000 personnes. Les 200 prestataires techniques de l’ancienne région ont déjà perdu 2,5 M d’€. Si l’on comptabilise toutes les retombées financière générées par un événement, ce serait 8 M d’€ de pertes de chiffre d’affaire par semaine !

Mercredi 16 septembre, les professionnels des métiers du spectacle et de l’événementiel ont lancé une Alerte Rouge. Une idée venue d’Allemagne pour alerter sur leur situation plus critique encore que celle des artistes. En France, le SYNPASE (Syndicat National des Prestataires de l’Audiovisuel Scénique et Évènementiel) a porté ce mouvement. Plusieurs collectivités locales (Département de la Haute-Garonne, Région Occitanie) mais aussi des salles de Spectacle (Bikini, Halle de la Machine…) ont mis du rouge sur leur façade.

Depuis, l’événement a trouvé un écho médiatique et les échanges avec Bercy ont été intenses. « On était dans le vide, nous n’étions absolument pas pris en compte. On voulait être au premier rang, ne pas solliciter les artistes, faire voir ce dont nous étions capables. La culture, ils connaissaient…le tourisme aussi. Mais nos dirigeants ignoraient que l’on était des indépendants et que nous n’étions pas payés par les artistes. » Finalement, les discussions avancent, des propositions pourraient être reprises. Et la nouvelle ministre ? « Bachelot a bien réagi. Dans ses interventions, elle a su expliquer que derrière un artiste, il y a un savoir-faire. On a un début de prise en compte. »

Jean-Luc Petit Photo : Audio-Lum

L’avenir

Pour l’heure c’est le calme plat jusqu’à l’été 2021. Le printemps risque d’être aussi confiné que celui de cette année. « On réfléchit a savoir comment trouver une activité annexe mais c’est compliqué car notre savoir-faire est particulier. Notre outil de travail est important et cher mais il ne sert qu’à ça. On a des camions, on pourrait s’en servir mais il faudrait une licence de transporteur. Alors on essaie de se mettre à la vente de matériel car des salles continuent à s’équiper. Il faut tenir. On va serrer tous les frais, bénéficier au max des aides, repousser des paiements et attendre que ça redémarre. » 

Le confinement a été propice à des expérimentations. Les artistes ont fait des « lives », confinés chez eux, sans avoir besoin de matériel. Il y a eu aussi les concerts « drive » sur des parkings, dans sa voiture comme à Albi ou Tarbes. Mais c’était pour maintenir du lien, car ces concerts ne peuvent pas être rentables. Ils nécessitent du matériel supplémentaire pour avoir du son dans les voitures et une jauge plus que réduite. Audio-Lum a d’ailleurs envoyé un technicien pour le dive d’Albi avec le groupe Boulevard des Airs.

Speedos dernier des Mohicans

Speedos devait d’ailleurs accompagner le groupe sur des festivals. Il venait aussi de signer un artiste français qui devait tourner après le confinement. C’était lui aussi qui fournissait du matériel pour la tournée de Christophe…« Ce qui fait mal aussi, c’est que nous perdons notre savoir-faire à force de rester chez soi ». Et Speedos n’en manque pas.

L’un de ses premiers concerts, c’était Ella Fitzgerald. Il a fait aussi Stan Getz, Paco de Lucia, Stéphane Grappelli,  la scène alternative (Mano Negra, Garçons Bouchers, Béruriers Noirs). Il a suivi les Fabulous Troubadors en tournée aux States. « Mon meilleur souvenir. J’ai passé de très bons moments avec eux et on a fait le tour du monde. Ils aimaient avoir le temps. Pour 2 concerts, on restait une semaine sur place. On enrichissait notre culture en faisant de belles rencontres. »  Il suit aussi les Cats on Trees. En fait, il a le luxe de suivre les gens qu’il aime. « Je fais partie des derniers des Mohicans. Maintenant ils sont plus dans la finance que dans la technique. Ils n’ont pas l’amour que l’on a nous. On a vu l’évolution d’un métier : de quelque chose qui n’existait pas à un truc industriel. »

On est passé de la grotte à Versailles

Préoccupé par la situation mais heureux de faire ce métier, Speedos avance toujours sans faire de concessions. Il aurait pu aller à Paris, accompagner des artistes plus prestigieux mais c’est à la campagne (Drémil-Lafage) qu’il a monté sa boîte. « Je devrais être plus riche d’argent mais j’ai compensé avec d’autres richesses. Je changerais pour rien au monde. Les gens m’ont apporté beaucoup plus que l’argent. »

Les camions sont à quai, les flight-cases rangées, mais Speedos est prêt. Toujours speed pour son métier, toujours partant pour des échanges artistiques et humains. Toute cette richesse se cache derrière son sourire et sa voix si particulière. Le dernier des Mohicans est très attachant.

Audio-Lum

Benoît Roux

17 Sep

Le nouveau clip du Duo Anadjoh contre les violences familiales

Le duo Toulousain Anadjoh sort un deuxième clip. Après avoir posé son regard sur la situation des polyhandicapés, le nouveau single « From Hell » met les points (poings) sur les violences familiales. Un beau morceau, un clip sobre et soigné avec une prestation remarquée de Pierre Matras.

Après avoir donné dans les reprises, Johanna et Christophe ont profité du confinement pour croire en leurs créations.

Le premier titre « Why » est sorti à la fin du printemps. Comme une renaissance qui a permis aussi de parler de leur engagement au quotidien pour que leur fille polyhandicapée trouve la vie plus douce. Poser des mots pour traduire l’incompréhension face à certaines situations qu’ils traversent. D’où le titre.

Avec « From Hell », ils continuent d’interpeller sur certaines causes comme les violences familiales, notamment conjugales.

Un clip noir, éclairé par Pierre Matras

Christophe a toujours voulu faire des musiques de film. Alors pour chaque nouveau morceau, un clip l’accompagne. C’est Johanna qui trouve les idées de réalisations. Christophe s’occupe du rythme et affine le montage.

Pour ce titre, les violences sont filmées depuis le point de vue de la femme. L’homme visé, c’est Pierre Matras, excellent comédien du Grenier de Toulouse. Un clip sous tension, froid et stressant, en noir et blanc où Pierre Matras incarne un homme au train de vie plutôt aisé. Car la violence dégaine dans toutes les classes sociales.

Duo Anadjoh et Pierre Matras – From Hell

Des colères (noires elles aussi) à répétition, des incompréhensions, jusqu’au geste fatal. Des images, à la limite du supportable et une vrai force dans le texte, la musique. La présence de Pierre Matras donne une dimension encore plus profonde.

Quant au morceau, il a été remixé, travaillé, le master passé dans un simulateur de magnéto à bande, vous savez le son chaleureux des bon vieux Ampex ! Le mix est d’ailleurs plus équilibré, plus immédiat que l’initial posté sur Youtube il y a 2 mois.

Pierre Matras Clip « From Hell » Photo : Duo Anadjoh

D’autres morceaux, Halloween, Bourges…

Les projets prennent corps au fur et à mesure. Le Duo Anadjoh va s’agrandir pour la scène. Un set live qui devrait être encore plus rock. Les musiciens vont répéter à la MJC du Pont des Demoiselles de Toulouse. En ligne de mire, les sélections pour le Printemps de Bourges qui se feront en mars.

Un nouveau clip sera bientôt tourné sur le morceau « Dream or Nightmare ». Avec, comme pour les précédents, un artiste invité. Un court métrage qui s’annonce délirant, prévu pour Halloween, avec le danseur de hip-hop David Dee. Un parti pris du duo pour défendre sa musique. Un financement participatif leur permet de le financer en partie.

Christophe et Johanna ont aussi cherché un label, un producteur qui leur ferait confiance pour les aider tout en préservant leur identité artistique. Pas de réponses du côté Français mais les Anglo-Saxons ont frappé à la porte. Sans vraiment comprendre les attentes du duo. Même si parmi ces contacts, il y avait l’un des premiers producteurs de Bowie.

Le groupe continue de se battre, sans concessions pour garder leur côté électro-rock et ne pas céder aux sirènes du marché. Car dans le son comme dans la vie, le Duo Anadjoh est résolument engagé.

Facebook Johanna Dorso

Christophe Dorso

Benoît Roux

10 Sep

Öja, une nouvelle artiste qui bouge sur Toulouse

Même après le confinement, la scène toulousaine est toujours une pépinière d’artistes en devenir. C’est le cas d’Öja, 2 singles à la clé, d’autres sur le point de sortir, cette jeune artiste tente de se faire un nom et une place chez les jeunes en quête de sons et de découvertes. Dans sa musique, on sent beaucoup d’influences et le soucis de faire les choses de manière pro. Ça pourrait sonner années 80, mais c’est très actuel et bien produit. Une belle promesse.

Photo : Léa B-M

« T’es qui toi? »

C’est le titre de son premier single. Un titre qui fait référence à une expérience artistique qui a fait fausse route. Justine alias Öja a baigné dans un univers de musiques. Son père écoutait du hard-rock (ça s’entend dans la puissance de sa voix) et sa mère de la chanson française et du funk (là, c’est la rythmique qui parle). Auteur, compositeur, interprète, la musique a toujours été son univers. Elle a pris des cours de piano, de guitare acoustique. Côté études, fac d’Anglais au Mirail et école de journalisme. Mais c’est la musique qui l’attire. Elle rentre au conservatoire de Toulouse en musiques actuelles. De quoi lui donner un peu d’assurance pour revisiter ses compositions de jeunesse.

Öja : T’es qui toi ?

« Regarde »

Si aujourd’hui on commence un peu à l’entendre, c’est grâce à sa persévérance. Son premier titre « T’es qui toi? » a été écrit pendant le confinement. Elle a pris son single pour pousser les portes des radios, trouver un producteur arrangeur… Et très bonne pioche, il s’agit de l’artiste toulousain Tristan connu sous son nom d’artiste OZ« J’aime bien ce mélange de pop-electro comme d’autres artistes (Angèle ou Billie Eilish par exemple). Mais les chanteuses ont souvent une voix cristalline. Là, c’est une voix rock, puissante et c’est ça que j’aime. » Il l’a signe sur son label « Aureate records ».

A l’écoute de ses 2 titres, il y a effectivement comme un écho des années 80, notamment le duo Chagrin d’Amour. Un petit côté aussi Muriel la chanteuse de Niagara. Dans le phrasé, il y a Hoshi. Côté musique, c’est effectivement dansant, des flots de funk, des pointes electro-pop-rock, quelques effluves de piano jazz salsa sur « T’es qui toi? ». Plutôt bien fait. Le projet n’est qu’à son début. Il y a des bases posées et affirmées.

Öja : Regarde


Le second titre « Regarde » est un peu de la même veine dansante. Avec un son plus actuel et un travail plus poussé sur les voix, les clavierset les nappes. Un troisième titre sortira d’ici 15 jours. « Bouge de là » est pour le coup complètement Chagrin d’Amour et disco-funk. Très bien produit aussi par Tristan et Aureate records. Viendra plus tard une ballade (Nightcall), des concerts si tout va bien. Petit à petit, Öja est en train de se bouger pour occuper la place. Comme un début de promesse.

PAGE FACEBOOK ÖJA 

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Benoît Roux

 

03 Août

Cette année encore, le Festival des Châteaux de Bruniquel est une réussite

Le « Festival des Châteaux » se déroule à Bruniquel (Tarn-et-Garonne). Dans un lieu magnifique, en plein air, la petite « Compagnie de la Tour Brunehault » monte chaque année un nouvel opéra de Jacques Offenbach. Petit mais très beau village, pas beaucoup de moyens mais de l’ingéniosité pour que le spectacle soit total.

Une fois encore, les représentations de « La Grande Duchesse de Gérolstein » sont d’un grand niveau. Les costumes sont somptueux, les artistes et les musiciens  à la hauteur. J’étais samedi soir dans la cour des châteaux et j’ai passé un excellent moment. Retour en photos.

Les artistes sur scène du Festival des Châteaux. © Benoît Roux

Un spectacle total

Une dizaine de musiciens, autant d’artistes lyriques, des danseurs, des figurants, cette production de l’opéra bouffe d’Offenbach a tout d’un grand spectacle. Comme évoqué dans un précédent article, les costumes arrangés par Guillaume Atwood sont tout simplement somptueux. Un travail de fourmis et de dentelle avec des couturières des alentours pour redesigner ces habits qui ont servis pour les plus grandsfilms. La reconstitution du second Empire avec des incartades plus contemporaines placent le spectacle dans le haut niveau. Il faut souligner aussi le travail de maquillage, les coiffures très réussies, les perruques embellies. Aucune faute, du grand art.

Les costumes © Benoît Roux

Mais s’il n’y avait que les costumes, la production ne serait pas aboutie. Les artistes qui les portent sont habités par une bonne humeur et un plaisir d’être sur scène très communicatif. Partout où l’on jette un œil, il se passe toujours quelque chose. Il y a certes l’intrigue principale, mais le metteur en scène Franck T’Hézan a fait en sorte que les scènes se multiplient, que chaque comédien ne soit pas passif.

© Benoît Roux

Grace aussi aux chorégraphies mises en place par Véronique Willig, la scène est parfaitement occupée, les tableaux où il y a beaucoup de comédiens sont de véritables ballets.

© Benoît Roux

La musique d’Offenbach est assez facile d’accès. En la théâtralisant, Franck T’Hézan la rend encore plus drôle et attachante. Beaucoup de passages sont à la limite d’une pièce de théâtre. La cour du château est utilisée avec une mise en scène qui ne se limite pas à la scène principale. Et comme l’œuvre est en 3 actes et plusieurs tableaux, tout le monde met la main à la pâte pour changer les décors, faire en sorte que le spectateur n’attende pas trop. Il y a même des petites scénettes pour le faire patienter.

Nuit de noce entre le soldat Fritz et Wanda © Benoît Roux

Des artistes à la hauteur

Encore une fois, ce n’est pas parce que la « Compagnie de la Tour Brunehault » est une petite troupe qu’elle lésine sur les moyens. Un mot sur l’orchestre dirigé par Jean-Christophe Keck. Cet éminent spécialiste d’Offenbach qui chante l’œuvre pendant qu’il la dirige, il réussit la prouesse de sélectionner une douzaine de musiciens de formations différentes (dont des Italiens), de n’avoir que quelques jours de répétitions, et que tout fonctionne au moment du spectacle.

Jean-Christophe Keck et son orchestre © Benoît Roux

Du côté des artistes lyriques, là-aussi le niveau est bon. La Grande Duchesse (Emmanuelle Zoldan) et sa rivale Wanda (Aurélie Fabre) ont toutes 2 de belles voix et des talents de comédiennes.

Une grande Duchesse canon © Benoît Roux

Xavier Mauconduit incarne un soldat Fritz parfaitement naïf, Michel Vaissières un grand Général Boum pour ne citer qu’eux. Quant à Thibaut T’Hézan à la crête punk et au kilt saillant, sa composition détonne et rythme le spectacle.

Thibaut T’Hézan © Benoît Roux

Un mot aussi sur son père Franck qui a mis en scène ce spectacle et qui joue également, il n’a rien perdu des ficelles du métier et de sa voix de ténor.

Finalement, le spectacle passe très vite. On se laisse prendre par le jeu et par la musique. Le rire est omniprésent et la bonne humeur contagieuse. A Bruniquel, on ne se prend pas la tête. Tout se passe à la bonne franquette, on se sent à l’aise. On a sous les yeux un spectacle digne des grandes scènes sans en avoir le côté guindé et convenu.

Un public nombreux dans les gradins © Benoît Roux

Allez à Bruniquel, vous passerez un excellent moment. Prochaines représentations mercredi 5 août, jeudi, vendredi, samedi et dimanche à 21H30.

RESERVATIONS 

Benoît Roux

 

29 Juil

Découverte : un artiste de Toulouse au talent multiple

Il n’y pas l’ombre d’un doute, ce jeune artiste a du talent. La vingtaine tout à peine, Lombre a tout pour réussir. Il a un style particulier très poétique entre « spoken word », rap, électro et quelques effluves de rock. Il a su s’entourer de personnes qui ont de l’exigence et qui ont  l’ont compris. En septembre, il sortira son deuxième EP « La lumière du noir ». Parmi les 6 titres, Lombre rend un hommage remarqué au maître du Noir : Pierre Soulage. Son flow est personnel et inspiré.

Photo : Facebook de l’artiste

La recherche de l’exigence

Dès la première écoute, on saisit le potentiel : Lombre vous envahit et s’empare de vous. Tout d’abord le flow, prenant et poétique. Des textes délivrés sans pathos, sans le nombrilisme d’un artiste qui s’écouterais trop. Il sait écrire, il a fortement progressé en terme de chant posé et parlé, ses sons sont de plus en plus travaillés. Bref, le chemin est grand depuis son premier mini-album sorti en 2017. A l’époque, la sortie du disque s’est faite à la salle de spectacle « Le Club » à Rodez car il est né dans l’Aveyron. Pour le nouvel EP, ce sera au « PopUp du Label » à Paris, dans le 12ème. Aveyron oblige !

Pour mesurer son talent, il suffit d’écouter et de regarder son titre et son clip : « La lumière du noir ». Un concept artistique complet avec un texte magnifique, une musique au diapason et des extraits d’interview du plus célèbre des Ruthénois : Pierre Soulage. Un morceau vivant qui sait saisir les ruptures, profiter des silences, emporter, se calmer. Les sons sont très bons, magnifient les mots, servis par une mise en image puissante que l’on doit à l’agence artistique « We are Blow » et au réalisateur Benjamin Massé . Ils ont su saisir le projet et l’artiste pour le porter au plus haut. 2 artistes, LOMBRE et SOULAGE, avec le même objectif : faire briller les choses obscures.

LOMBRE – La lumière du noir

En pleine lumière le 10 septembre

L’album de 6 titres sortira le 10 septembre et l’artiste a déjà dévoilé 4 morceaux depuis le début d’année. Le 12 mars, « Quand la ville dort encore ». Des bruits de ville, un univers sonore, pour raconter une histoire de manière cinématographique. Les sons sont pointilleux et le rythme se fait dansant sur la fin. Un titre très bien produit.

LOMBRE – Quand la ville dort encore

« Espoir noir » (encore !) est le petit dernier. Chœurs éthérés, voix plus affirmée, le morceau est assez dance. Le texte est toujours beau; comme une tranche de vie recluse qui se retrouve en pleine lumière. Auparavant, un peu énervé, avec des ruptures de rythmes, le single « Lombre » servi par un très beau clip réalisé par Thibaut Lefèvre. 


Chaque morceau a sa patte et un univers affirmé. 3 ans de travail, de recherches pour arriver au joyau qu’il souhaitait polir. Pour le façonner, « We are Blow » signe aussi son nouveau site internet et la pochette du nouvel EP, soignée et plutôt classe.

Photo : site de pré-commande

L’album est en pré-commande et il sera expédié dans une belle enveloppe… Noire bien sûr ! Il reste 2 titres inédits à dévoiler (« La colombe » et « Crypté ») mais ce sont des morceaux qu’il joue sur scène.3 dates sont prévues en Occitanie : le 25/09 à Cahors, le 6/11 à Albi et il faudra attendre le 3 février 2021 pour le voir à Toulouse.

Sur les traces de Bigflo et Oli

Musicalement, ce n’est pas tout à fait le même univers. Mais Bigflo et Oli et Lombre se connaissent et se respectent. Dans leur playlist de découvertes intitulée « Tu connais non ? », les 2 frères ont mis le titre « Quand la ville dort encore ».

Le réalisateur du nouvel EP de Lombre n’est autre que Clément Libes qui a signé les 2 derniers albums de Bigflo et Oli mais aussi celui d’un autre groupe toulousain : KidWise. A 23 ans, Andréas Touzé alias Lombre ne devrait pas broyer du noir très longtemps. Prix d’écriture Claude Nougaro en 2016, compil grand Prix SACEM en 2018, Lombre commence son apprentissage de la lumière. Il rêve d’être programmé un jour aux « Vieilles Charrues ». Vu le chemin parcouru, le terrain est presque près.

LOMBRE

Ulysse Maison d’Artistes

Facebook We are Blow

Benoît Roux

25 Juil

L’un des plus beaux village de France organise tous les ans son festival autour d’Offenbach

Bruniquel, aux confins du Quercy, un petit village d’à peine 600 habitants. Sur les hauteurs qui surplombent la rivière Aveyron, 2 châteaux des XII et XVIIème siècles sont le théâtre d’un festival lyrique. Tous les ans, une joyeuse équipe composée de professionnels mais aussi de personnes des alentours monte un nouvel opéra tiré de l’œuvre de Jacques Offenbach. A partir du 30 juillet, 9 représentations de « La Grande Duchesse de Gerolstein » sont prévues. Un petit miracle qui mérite bien une rencontre avec ces artistes.

Répétitions Grande Duchesse de Gérolstein Photo : JP Duntze France 3

 

L’histoire d’une rencontre

« Le festival des châteaux » de Bruniquel (Tarn-et-Garonne) existe depuis 1997. On le doit à un artiste -le ténor Franck T’Hézan- qui a su convaincre Michel Montet le maire de l’époque. Une idée un peu folle qui consiste à monter chaque année des opéras d’Offenbach avec les moyens du bord. La volonté locale et les références nationales -voire mondiales- de Franck T’Hézan ont fait le reste. Le chanteur est né à Bordeaux, puis sa famille est venue s’installer dans les bois de Bruniquel, juste en face des châteaux. L’artiste a chanté dans les salles les plus prestigieuses (Shanghai, Paris, New-York…) participé aux plus grands spectacles lyriques, fait des « prime-time » pour la télé, mais c’est à Bruniquel qu’il a choisi d’installer cette manifestation.

Franck T’Hézan Photo : JP Duntze France 3

Et depuis 1997, ça fonctionne. « On a évolué mais l’esprit de troupe du début est restée. On a toujours cette ambiance familiale, artisanale… Le succès? C’est un tout. C’est Offenbach, la qualité de notre prestation artistique… Y aussi le château qui est formidable, le village qui est très beau, l’accueil de la population qui est assez exceptionnel et le plaisir de tous se retrouver ici. C’est une véritable famille. »

Tous les ans un nouvel opéra du plus allemand des compositeurs français. Pourquoi Offenbach? Parce que les meilleurs spécialistes du compositeur sont des amis. Ils se retrouvent avec grand plaisir chaque année pour monter une nouvelle pièce. Et comme Offenbach est un compositeur plutôt joyeux à la musique enjouée, la « Compagnie de la Tour Brunehault » (du nom de la plus ancienne partie du château) s’est sentie en osmose.

Répétition Photo JP Duntze France 3

Des équipes composées pour l’occasion

Ici, ce n’est pas l’Opéra de Bastille, ni celui de Paris ou de Lyon… pas plus celui du Capitole. Pourtant sur scène, c’est bien une prestation professionnelle que l’on voit. Franck T’Hézan a d’abord choisi un chef d’orchestre qui est une référence mondiale pour Offenbach. Jean-Christophe Keck est à la tête de plusieurs formations. Il prend chaque année plusieurs musiciens pour participer au festival. Il y a des Italiens haut-alpins qui viennent de Turin, des membres de l’Orchestre Pasdeloup et des musiciens locaux. En tout, une douzaine de musiciens, ce qui correspond presque à la formation initiale dont disposait Offenbach au moment de la création en 1867. « On reste proche de la partition originale. Il nous manque cordes et c’est tout. On arrange un peu la partition. Comme ce sont des très bons professionnels, en 3 jours nous montons la partition et nous sommes prêts pour accompagner les chanteurs ». 

 

La pianiste Yoshiko Moriai Photo : B. Roux France 3

Tout ceci compose l’Ensemble Instrumental de Bruniquel. On y retrouve une autre spécialiste d’Offenbach : la chef de chant et pianiste Yoshiko Moriai. Les chanteurs (es) sont eux aussi des artistes de renom : Emmanuelle Zoldan qui tiendra le rôle de la Grande Duchesse, Xavier Mauconduit (soldat Fritz) , Michel Vaissière (général Boum), et Aurélie Fabre (Wanda) pour ne citer qu’eux, sans oublier Franck T’Hézan évidemment.

Le fauteuil de la Grande Duchesse Photo : JP Duntze France 3

Et que serait Offenbach sans les parties dansées? Ici ce n’est pas « La Vie Parisienne » et son célèbre French Cancan, mais plusieurs danses viennent rythmer cet opéra-bouffe. La chorégraphe Véronique Willig a posé ses pointes pour l’occasion et fait répéter des jeunes danseuses. « Ici on s’éclate, on retrouve son âme d’enfant. Nous avons une liberté totale. On peut aller très loin dans le clownesque. C’est ma fontaine de jouvence le festival. C’est excellent ! Monter une telle pièce en deux semaines et demie. Pour les chanteurs, les danseurs, les techniciens, les costumiers, les couturières…C’est un énorme barnum en fait. » Les filles n’ont que quelques jours pour répéter. Mais sur scène, les tenues d’apparat seront magnifiques.

Des costumes prestigieux vus dans les plus grands films

Nous sommes au second empire, à l’époque de Napoléon III. La Grande Duchesse de Gerolstein (petite ville allemande dominée elle aussi par son château médiéval) possède sa propre armée. Les habits se réfèrent bien évidemment à cette époque mais beaucoup de libertés sont prises. On distingue 3 groupes de militaires, sachant que beaucoup de femmes sont habillées en homme :

  • Les révolutionnaires
  • les filles militaires (un côté Guignol)
  • militaires danseuses (habillées en pirates)

Si vous allez au « Festival des Châteaux », certains costumes vous seront sans doute familiers. Ils ont été loué chez l’un des spécialistes mondial du costume de cinéma : l’espagnol Cornejo. On les a vus dans certains films d’époque comme « La Révolution Française » de Robert Enrico qui a tourné aussi « Le vieux fusil » aux châteaux de Bruniquel.  D’autres ont servi pour incarner Napoléon, se sont fait remarquer pour « La Favorite » ou encore « Hook ou la revanche du capitaine Crochet  » pour les enfants. C’est Guillaume Attwood qui réadapte tous ces beaux vêtements avec l’aide de couturière bénévoles. « On choisit une époque avec le metteur en scène Franck T’Hézan, on se met d’accord sur un style et ensuite on ajuste les costumes. Cette année j’ai beaucoup travaillé sur les femmes qui sortent complètement de l’époque. On est partis sur du noir et blanc très graphique. » Rien n’est laissé au hasard et on s’amuse beaucoup. Même s’il n’y a que 2 semaines pour essayer, réajuster, rajouter des accessoires. Sans compter maquillage et coiffage et une photo pour immortaliser tout ça.

Essayage des costumes Photo : JP Duntze France 3

Le festival développe des partenariats avec des écoles comme l’Ecole Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre de Lyon. Plusieurs élèves sont là pour valider une formation. On retrouve aussi du personnel habitué des loges du Théâtre du Capitole. Un travail minutieux pour parfaire des perruques, réaliser des coiffures, des masques avec le maquillage. Du plus bel effet pour la soixantaine de participants.

Extrait du spectacle 2018 « Geneviève Brabant »

La convivialité en plus

9 représentations sont prévues les 30 et 31 juillet puis les 1, 2, 5, 6, 7, 8, et 9 août. Une véritable gageure pour cette troupe non permanente et pas entièrement professionnelle. Pour les répétitions, ça travaille dur et ça rigole tout autant. Une bonne humeur et une convivialité qui est le reflet de la personnalité de Franck T’Hézan, le metteur en scène et directeur artistique.

L’originalité de cette manifestation : les fameuses tables d’hôtes juste après les représentations où les artistes et le public partagent un repas mais aussi la scène. Un coup de fourchette à la bonne franquette qui donne le ton à ce festival atypique. « On dresse des tables dans le cour des châteaux juste après le spectacle. Le public se joint aux artistes. On fait un petit « vesprail » comme on dit en occitan. A la fin, les artistes montent sur une scène improvisée et on tape le bœuf comme disent les musiciens rock! ».  Et des moments inoubliables sur scène avec de belles découvertes. Faute de grands moyens, les organisateurs regorgent d’idées. Le festival propose également de devenir Mécène. Depuis le début de l’aventure, 1200 généreux donateurs ont permis à cette manifestation de se développer et au petit miracle artistique de se perpétuer.

Château de Bruniquel Photo : B. Roux France 3

Quant à l’histoire de « La Grande Duchesse de Gerolstein », sachez que la Dame est plus passionnée par le prestige des uniformes que celui de la politique. Elle tombe amoureuse d’un simple soldat (Fritz) qu’elle promeut au grade de général en chef de ses armées. Mais il s’avère être un peu idiot, ce qui sera propice à des épisodes rocambolesques. Si les murs des châteaux ont vécu des épisodes tragiques avec le film « Le vieux fusil », place au rire, la bonne humeur et la convivialité chères à ce festival.

Reportage France 3 : B. Roux JP Duntze S. Lebéon

Site du festival      festival@bruniqueloff.com     

L’œuvre d’Offenbach peut-elle encore être d’actualité ?

Benoît Roux