30 Mar

Les Amazones d’Afrique, des luttes et du son

Ce blog a pour but de vous faire découvrir des artistes. Après JS Ondara, place aux Amazones d’Afrique, groupe exclusivement féminin qui vient de sortir un second album « Amazones power » sur le label Real World (Peter Gabriel).

De la World Music parfaitement maîtrisée, avec les fondamentaux traditionnels, des ajouts modernes pertinents et variés, sur fond de lutte : celle des violences faites aux femmes aux quatre coins du monde. 

Amazones d’Afrique « Amazones power » 2020

Des références

Mamani Keïta, Oumou Sangaré et Mariam Doumbia (Amadou et Mariam) ont fondé en 2014 les Amazones d’Afrique. Groupe pan-africain, une sorte d’All star au féminin singulier qui lutte et qui chante pour la bonne cause : défendre les droits des femmes. Au pluriel. En 2017, parait leur premier album « République Amazone ».

Amazones, comme un clin d’œil aux Amazones du Dahomey (actuel Bénin), un corps de régiment militaire entièrement féminin, fondé au XVIIIème siècle. C’est aussi une référence à un groupe précurseur : les Amazones de Guinée, un orchestre militaire de choc qui fait référence depuis 1961.

« Smile » est une invitation à parler, sans en avoir honte, des souffrances que l’on vit de l’intérieur, des traumatismes subis.

Les Amazones d’Afrique elles aussi partent en guerre : contre les violences faites aux femmes. 18 voix, 10 musiciens pour ce nouvel album « Amazones power ». Du pouvoir, musical et sociétal, elles en ont. Elles viennent de s’associer à la Fondation Panzi du Dr Mukwege, « l’homme qui répare les femmes » victimes de violences sexuelles.

Dans l’histoire contemporaine, il y a d’autres amazones : Simone Veil, Miriam Makeba, Celia Cruz, ou encore Angélique Kidjo qui a rejoint le groupe.

Richesse des voix

« Amazones Power » réunit des divas du Mali comme Mamani Keita, Rokia Koné, Ami Yerewolo ou encore Kandia Kouyaté dit « la dangereuse » tant sa voix avait de l’emprise. On y retrouve aussi Angélique Kidjo et Fafa Ruffino (Bénin), une Guinéenne (Niariu qui est sur la pochette du nouveau disque),  une Burkinabè (Kandy Guira) ou encore une Algérienne (Nacera Ouali Mesbah). De temps en temps, quelques voix d’hommes en contrepoint. Mais ce sont les femmes qui gardent le leadership. Des voix assez différentes et très riches en fonction aussi de la langue chantée : anglais, bambara, fon, français…

« Heavy », l’un des morceaux les plus obsédants

Sur cette autre vidéo, le titre « Queens » avec la « Rose de Bamako » la grande chanteuse malienne Rokia Koné en tournée. Une chanson en langue bambara qui en appelle à la solidarité pour résister à la cruauté des maris. 

Gros travail sur les sons et les rythmes

Il s’agit bien de World Music, mais dans ce qu’elle a de plus respectueux des diversités. Ne pas dénaturer, sans pour autant délaisser les audaces. On peut ainsi écouter des rythmiques hip-hop, afrobeat, dub ou électro vertigineux sur fond de percussions ancestrales, parfois synthétiques. Les claviers sont assez éthérés, ou alors vintage, où se glissent des guitares hypnotiques et des grosses basses efficaces. Difficile de ranger ces musiques dans une case. Et tant mieux! 


Pas un morceau qui soit négligé dans la production, dans l’équilibre des voix. Pas de tubes surproduits non plus qui masqueraient le manque d’inspiration des autres. Cet album est très dépaysant, souvent surprenant et très régénérant.

Des artistes et des féministes

Leur album est un manifeste contre toute forme de violences faites aux femmes : l’excision, la polygamie, les mariages forcés… Des violences évidemment infligées par des hommes. Mais la musique est aussi là pour casser la mécanique culturelle de violences faites par les femmes à d’autres jeunes femmes. Non pour infliger à leur tour des cruautés reçues mais pour perpétuer des codes sociaux dont elles n’arrivent pas à se défaire. C’est aussi pour ça que les Amazones d’Afrique font place à 3 générations de femmes.

L’une des chanteuses Fafa Ruffino témoigne dans cette interview à RFI.

Pendant des siècles, nous avons subi un lavage de cerveau de nos grands-mères. On nous a fait croire pendant longtemps que nous étions faibles, fragiles… Ce combat est aussi une manière de protéger nos âmes. Quand on mutile une petite fille c’est son âme qui est violée, son corps est blessé et c’est irréparable ! 

Pour aller plus loin, l’interview réalisée par la plateforme de téléchargement musical Qobuz.

Le groupe aurait dû être en tournée cette fin de mois de mars en France. Faute de scène, retrouvez l’inventivité prégnante et flagrante dans ce nouveau disque. Les Amazones d’Afrique font déjà partie de la playlist de Barack Obama.

« Amazones power » par les Amazones d’Afrique

Label Real world

28 Mar

« Everyday life », le retour (enfin) d’un grand Coldplay

C’est la chronique d’un mec qui trouvait les premiers Coldplay très intéressants (Parachutes et A Rush Of Blood To The Head) et qui s’est lassé depuis. Chris Martin son leader ayant mené le groupe vers une musique surproduite, boursouflée, une usine à tubes automatiques dimensionnée grands stades.

Alors pourquoi aujourd’hui chroniquer ce 8ème opus Everyday life ? Tout simplement parce que ce double disque renferme d’excellentes surprises. Un retour à la sobriété et à l’essentiel.

Tout commence par un instrumental assez inhabituel Sunrise. Un son dur, cordes tendues, une atmosphère orientale plutôt prenante qui rappelle l’univers de Goran Bregovic. Ça donne envie de poursuivre. Vient ensuite Church, plus dans la lignée pop-rock planante dansante des précédents albums.

Caléidoscope musical plus épuré

Ce qui frappe dans cette production, c’est le côté éclectique des morceaux. On y retrouve bien sûr les ingrédients qui ont fait le succès du groupe, mais surtout des pièces plus intimistes et étonnantes. Comme le très gospel BrokEn où Chris Martin prend une voix de circonstance crédible qui marque une vraie rupture… Voici une version live.

ou encore Èkó aux sonorités africaines très intéressantes.

On pourrait aussi y ranger Old Friends. Surtout, il y a ce retour à une certaine épure, au dépouillement musical allant à l’essentiel après plusieurs années de grosses productions sonores qui tournaient un peu en rond. Et que dire de la petite ballade Daddy qui commence par des battements de cœur, un piano feutré, étouffé et une voix très intimiste ? Un piano-voix très réussi avec un final xylophone façon boite à musique.

Des tubes et une orientation musicale aléatoire

L’album a le défaut de ses qualités. Avec 16 morceaux hétérogènes, il n’y a pas de ligne musicale claire, on ne voit pas distinctement ce vers quoi le groupe souhaite aller. Surtout quand c’est plus concept que chanson avec les morceaux WOTW/POTP ou بنی آدم écrit en arabe.

Et les tubes alors ? Orphans premier single sorti par la maison de disques, sorte d’hymne grand public dans lequel le groupe anglais a beaucoup donné. Pas vraiment le plus intéressant et tellement déjà entendu. Plus complexe est le morceau Arabesque. Une rythmique surprenante, prenante et obsédante, une fanfare de cuivres rutilants d’où surgit….la voix de Stromae, en français ! Et ce n’est pas la seule star invitée : y figure aussi Femi Kuti dans un grand numéro de sax qui tourne à la transe dans un final qui emporte tout, même la voix de Chris Martin dans une basse assourdissante.
Version Live, avec Stromae. Live in Jordan (novembre 2019)

Vient alors la rédemption When I need a friend sous une pluie régénérante : 8 voix d’hommes magnifiquement enregistrées. Un moment humaniste des plus réussis. Pour moi, le moment le plus intéressant de l’album.

Un dernier tube ? Champion of the World lui aussi grand hymne qui pourrait soulever les stades comme We are the champions de Queen. Composition très efficace, voix de Chris Martin au sommet. Dans cette version live enregistrée en Jordanie, le final avec les violons est très beau.

Bien avant le confinement, on savait que le groupe ne voulait quasiment plus faire de concerts excepté celui-ci en Jordanie diffusé sur Youtube. Raison de plus pour écouter ce double album, même si vous étiez comme moi assez sceptique. Reste à souhaiter qu’il ne soit pas qu’une simple parenthèse avant un 9ème disque qui reprendrait les vieux travers.

Bonus track

Une petite vidéo intéressante et récente (mars 2020) avec des extraits de cet album, le retour de Viva la vida et… une petite surprise : une reprise de Prince plutôt réussie.

27 Mar

« No surprises » de Radiohead par James Blake

C’est le maître du lyrisme et un adepte de l’intimité. Le Britannique James Blake est aussi coutumier des covers. Lundi 23 mars, comme beaucoup d’artistes, il a donné un concert de plus d’une heure sur son compte Instagram. Seul au piano et assez enjoué. On y retrouve 7 reprises dont No Surprises de Radiohead, la reprise du moment.

Sans oublier When The Party’s Over de Billie Eilish déjà enregistrée un peu avant où la voix est magnifique et sobre. 

Tout le concert démontre les capacités vocales de James Blake, l’honnêteté artistique d’un interprète d’à peine 30 ans.

« Je n’avais jamais fait cela avant, j’étais très nerveux mais je devrais faire ça plus souvent, c’était fun« ,

dit-il à la fin. Il fait aussi un début de reprise d’Imagine de John Lennon qui laisse présager que lors du prochain exercice de ce style (dans une semaine?) la chanson pourrait être dans la setliste.

1.The Colour in Anything (à 3:53)
2. Love Me in Whatever Way (à 8:36)
3. I’ll Come Too (à 14:36)
4. When the party’s over (Billie Eilish) (à 22:35)
5. Limit to Your Love (Feist) (à 27:05)
6. Life Round Here (à 30:39)
7. Godspeed (Frank Ocean) (à 35:47)
8. Retrograde (à 40:40)
9. Hope She’ll Be Happier (Bill Withers) (à 49:36)
10. No Surprises (Radiohead) (à 53:16)
11. Vincent (Don McLean) (à 1:02:47)
12. A Case of You (Joni Mitchell) (à 1:09:37)

 

26 Mar

Des artistes confinés mais ensemble

Confinement ne rime pas toujours avec renoncement. Certainement pas artiste avec autiste. On connaît déjà ces musiciens qui jouent solo chez eux. Ceux qui proposent un concert aux fans… Les vendredis où les balcons sont en fête en Italie, en Espagne et désormais en France. Mais dans ce nouveau numéro de Musique In Fine, les artistes dépassent les bornes.

Tout d’abord L’Obs qui depuis vendredi dernier offre des télé-concerts à ses lecteurs et donc téléspectateurs. Le média demande aux artistes d’envoyer des vidéos où ils se filment avec leurs musiciens réunis grâce au numérique. On retrouve en « Cavale », Cali  avec Augustin Charnet (claviers) et Théo Antolinos (guitare) et Julien Aoufi. 

Encore plus innovant, la web radio Tsugi propose le Maison Tsugi Festival. Un festival qui propose chaque jour, un artiste qui fait un set en live streaming (vidéo ou audio) relayé en direct par la page Facebook de l’événement et par la web radio Tsugi. Le tout, depuis chez lui évidemment.

Et la pêche au streaming est bonne : Arnaud Rebotini (BO 120 battements par minutes), Cerrone qu’on ne présente plus sauf aux jeunes générations qui écoutent le Dj et producteur Boombass de Cassius, lui aussi présent comme tant d’autres. De l’éclectisme musical même si la couleur de la radio est plutôt électro.

Maud Geffray (Scratch Massive)pour l’ouverture du Maison Tsugi Festival

Augustin Charnet (toujours lui) est l’initiateur du Spring at Home Festival qui aura lieu le samedi 28 mars à partir de 20H30 en live sur le compte Instagram du festival. Faute de salle de spectacle, vous pourrez retrouver les artistes sur vos écrans, sans vous déplacer. En concert, les 2 d’After Marianne (Mathilda et Augustin Charnet), Ian Chang, Elias Dris, Morgane Imbeaud, James The Prophet, SEEZY, Waxx…

 

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Pour terminer, on dépasse le domaine musical mais on garde le confinement artistique. L’art de faire le CON finement ne s’invente pas. Mais on peut improviser. L’école d’improvisation de Montpellier, la Happy Factory a lancé le premier Festival des Artistes Confinés. Si le confinement réveille en vous un grain de folie, une envie irrésistible de faire le con, vous pouvez envoyer vos créations : contact@lahappyfactory.fr. Et retrouver des vidéos sur la chaîne youtube de l’Happy Factory.

Benoît Roux

25 Mar

Augustin Charnet, l’artiste qui mesure le temps

Quoi de mieux pour un musicien -et pour un mortel- que de maîtriser le temps? C’est exactement ce que fait Augustin Charnet, jeune artiste toulousain devenu par ailleurs maître des espaces sonores. Pianiste de formation, arrangeur par vocation, il s’est fait remarquer avec son groupe Kid Wise, puis récemment avec des arrangements et compos sur le dernier Cali. Il se dirige vers une carrière solo avec son tout nouveau clip « Vénus ». Augustin Charnet inaugure cette nouvelle rubrique consacrée à des artistes D’empr’aquí, de par ici.

24 ans et un parcours déjà riche

Il faut savoir saisir le temps. Telle pourrait être la devise d’Augustin Charnet. 24 ans et déjà un solide parcours musical : des groupes comme Kid Wise aujourd’hui en sommeil (2 albums), After Marianne désormais éteint (2 EPs). Des collaborations logiques de par ses univers sonores (Christophe voire julien Doré) ou plus surprenantes (Cali). Il a aussi travaillé pour les rappeurs Rilès et Disiz la Peste.

La voix au début dérange presque autant que l’univers du pianiste planant, répétitif et éthéré attire. Alors oui, il faut prendre le temps de s’en imprégner, de se laisser dérouter et re-router.

Maître du temps

Dans ses vidéos comme l’excellente reprise du tant entendu « Ne me quitte pas » on le voit s’installer et s’inspirer une vingtaine de secondes avant d’égrainer la première note de piano et y suspendre sa voix. Le silence après du Mozart est encore du Mozart; le silence avant du Charnet est déjà du Charnet.

D’une interprétation très extravertie de Brel, il fait quelque chose de plus intimiste, poétique et obsédant. Avec des déchirures vocales en points d’orgue célestes, un final somptueux et paradisiaque. Du Brel comme jamais entendu. 

« Vénus » onirique, planant et lunaire

Dans son nouveau clip format diapo, ça commence à bouillonner grave et sourd en suivant la chaîne sous-marine, avant des sons plus cristallins en surface. Une bonne minute avant la rythmique et encore plus tard, les premiers mots.

Le style s’affine et s’affirme mais les ingrédients restent les mêmes. Un gros travail sur les sons, un univers sonore tissé en différentes couches comme un peintre. Des claviers qui s’avancent et plantent le décor, des basses résonnantes qui le définissent, des notes de pianos qui l’élargissent.

« Vénus » auteur compositeur interprète Augustin Charnet réalisé par Johann Dorlipo

Et la voix toute en retenue et qui se fond dans les espaces de ce nouveau morceau où les émotions passent. Les paysages sonores sont, comme d’habitude, très travaillés et envoûtants. 

L’esthétisme est lui aussi la marque de fabrique de l’artiste. Des clips où l’image est travaillée, onirique, presque peinte, avec des lumières apprivoisées. Et une fin où, là-aussi, il faut laisser le temps filer jusqu’au dernier souffle.

Augustin Chanet ©Johann Dorlipo

Ce petit joyau n’annonce pas encore son premier album solo. Un deuxième titre est annoncé pour l’été, un autre à la rentrée. Pas question de brûler les étapes : l’album ne sortira qu’en 2021. Toujours dompter le temps.

Augustin Charnet est l’organisateur du Spring at Home Festival qui aura lieu le samedi 28 mars à partir de 20H30 en live sur le compte Instagram du festival, créé spécialement pour l’occasion.

 

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Au programme entre autres Cali de chez lui à Perpignan, Mathilda (After Marianne) de Cannes, et d’autres artistes en live de France, d’Iran ou des US.

Benoît Roux

24 Mar

L’immense artiste Manu Dibango est mort

Emmanuel N’Djoké Dibango est mort. Comment résumer la vie et l’oeuvre de cet immense artiste, pluri-instrumentiste et grand humaniste? Impossible tellement sa longue carrière (plus de 70 ans) est riche, variée, généreuse et dépasse le cadre artistique. Retour sur quelques jalons qui font de lui un homme et un artiste à part.

3 août 2019. Manu Dibango  est sur la scène de Marciac avec sa formation favorite : le Soul Makossa Gang. Il a 85 ans. Et si on ne le sait pas, ça ne se voit pas. Ça ne s’entend pas tellement il est à l’aise. La joie partagée sur scène et sous le chapiteau.

Il viendra à quatre reprises dans le Gers. Jean-Louis Guilhaumon se souvient de l’artiste dans cet article de France 3 Occitanie.

Manu Dibango c’est d’abord Soul Makossa. Ce qui n’était au départ qu’une face B (et oui on parle des années 70 et des 45T) composée pour la coupe d’Afrique des Nations qui se déroule dans son pays (Cameroun), « Soul Makossa » va devenir le plus gros tube africain de tous les temps. Version 1972.

Soul Makossa tube planétaire plagié par Jackon et Rihanna

Le morceau et ses riffs de sax vont faire le tour du monde. A tel point que le King Michael Jackson lui même se laisse influencer avec son titre  « Wanna be startin’ something ». Ce qui lui vaudra un procès et une condamnation pour plagiat. Plus tard, c’est Rihanna qui utilise le thème dans son hit « Don’t stop the music ». 

Un camerounais très vite en France

Né au Cameroun le 12/12/1933, Manu Dibango arrive en France en 1949. Son père veut l’envoyer faire des études en Europe. Sa famille d’accueil se trouve dans la Sarthe. Il apprend plusieurs instruments et rencontre un compatriote camerounais fan de Jazz : Francis Bebey, l’interprète d’Agatha merveilleusement repris par Rachid Taha. C’est un peu son initiateur dans le domaine. Plus tard, il forge son expérience scénique dans plusieurs boîtes bruxelloises avec différents groupes.

Un artiste inclassable

Début 1962, il compose même un twist. S’en suit une aventure africaine.

De retour en France, il cotoie Dick Rivers et Nino Ferrer avec qui il joue de l’orgue Hammond. Mais pas que.

Il sera son chef d’orchestre pendant 4 ans, arrangeur de la chanson Mamadou Memé. Sa curiosité l’amènera à cotoyer aussi Claude Nougaro, Gainsbourg, mais aussi… Mike Brant ! Plus tard il jouera avec les Fania All Stars. Là ça respire latino. Ensuite Fela Kuti… Indomptable le lion du Cameroun. Inclassable surtout. 

Retour aux racines

1982 sort l’album « Waka Juju », mélange hétéroclite de différents styles  très avant-gardiste. Symbole d’un artiste qui n’aime pas se répéter. 2 ans plus tard, avec Martin Meissonnier aux manettes, le deuxième tube planétaire : Abela Dance.

Un disque qui lui ouvrira les portes de grands musiciens tels Bill Laswell et Herbie Hancock.

Mon coup de coeur : Wakafrika (1992)

Un tout jeune label (celui de la Fnac) vient de se monter. Son directeur (Yves Bigot) veut frapper un grand coup. Ce sera Wakafrika, avec une pléiade d’artistes qui revisitent des standards.

C’est un peu le « We are the world » version africaine. On y retrouve des Africains Youssou N’dour -qui a la lourde tâche de reprendre Soul Makossa- King Sunny Adé, Salif Keita, Papa Wemba, Touré Kunda, Angélique Kidjo, Geoffrey Oryema, Ladysmith Black Mambazo. Et des stars internationales : Peter Gabriel, Sinéad O’Connor, Dominic Miller (guitariste de Sting), Manu Katché… La world musique n’a pas produit que des chefs d’oeuvre mais celui-ci en est un. Grâce aux artistes et à une production intelligente. 
Ami Oh! Voix : Papa Wemba & Angélique Kidjo. Batterie : Manu Katché.

Chevalier des Arts et des Lettres en France, artiste de l’Unesco pour la paix, tout récemment (2017) honoré d’un Lifetime Award pour l’ensemble de sa carrière, l’oeuvre de l’artiste est à la hauteur de ses valeurs humaines : à multiples facettes et grandes. Ciao Manu. Je continuerai à t’écouter.


Merci à RFI où j’ai trouvé une biographie très complète. Pour aller plus loin et mesurer l’éclectisme et la générosité de l’artiste, interview en octobre dernier sur TV5 Monde. Elle revient sur plus de 60 ans de carrière.

Benoît Roux

Sergio, Daniele e gli altri. Musique in Fine

Le blog poursuit sa série sur les artistes confinés mais inspirés. Aujourd’hui un spécial Italie. Ma che bello!

Quand Leonard Cohen aurait pu écrire en italien. C’est beau, prenant, surtout en plein corona. Alea jacta est, c’est beau.

Italie toujours. Sergio Berardo (Lou Dalfin) des vallées occitanes d’Italie. La Bodega {Cornamusa occitana) contro il coronavirus.

Italia encara : Bella ciao emporté par le saxophone de Daniele Vitale.

Benoît Roux

23 Mar

Al di Meola, quand un grand artiste reprend les Beatles

Nouvelle rubrique de ce blog pour découvrir des reprises faites par des artistes et qui amènent une interprétation originale. Le cover du moment est signé Al di Meola.

Un des plus grands guitaristes au monde, connu pour sa technique, son éclectisme, sa capacité à jouer de tout. Il se colle à un répertoire des plus joué et entendu : The Beatles. Premier morceau sorti la semaine dernière. « Strawberry Fields Forever »

Ca sonne Beatles mais ce grand guitariste américain amène très vite le morceau vers d’autres influences. La critique de l’album complet  « Across The Universe » suivra dans les prochains jours.

Pour écouter l’album cliquez.

Benoît Roux

21 Mar

Musique in fine

Nouvelle petite rubrique. En ces temps confinés, la musique finira peut-être In Fine par l’emporter. Ce sont donc des musiciens, des artistes, connus ou pas tant que ça qui jouent confinés chez eux pour faire oublier la pandémie. La rubrique sera alimentée régulièrement. Vous pouvez faire part de vos vidéos, suggestions, idées via mon Facebook, Instagram, Twitter.

Dès le 17 mars, Bono de U2 a posté cette chanson écrite selon lui une heure plus tôt. Let Your Love Be Known est dédiée aux italiens.

Seul au piano et confiné, Calogéro vient de publier cet inédit.

« J’ai fait une chanson avec un auteur qui s’appelle Bruno Guglielmi. On aimerait que cette chanson serve à quelque chose, alors on a décidé de verser tous nos droits et toutes les recettes de cette chanson au personnel soignant ».

Et pourquoi pas un chant à danser? Guillaume Lopez reprend un chant collecté par Pèire Boissière et lance sa collection Canti Solet (je chante seul). Le titre du morceau : Passat deman (passé demain).

Avec un peu d’humour et le comédien Loïc Richard, vous n’échapperez pas aux conseils de la Fée Corona. Mi-humour, mi-réaliste!

Et pour compléter :

Francis Cabrel qui publie sur son site Facebook Baboo Music une nouvelle interprétation solo tous les jours avec sa guitare.

Le grand Bohaire (joueur de cornemuse gasconne) Joan-Miquèu Espinasse lui aussi présent tous les jours.


A SUIVRE.

19 Mar

J.S. Ondara « Tales of America » 

JS Ondara. Ne cherchez pas, le nom ne vous dit certainement pas grand-chose. Et pourtant, ce jeune artiste Kenyan (30 ans à peine) mérite d’être entendu. Son premier album « Tales of America » est un joyau brut dans un monde musical souvent trop taillé.

Premier album de JS Ondara

A l’écoute du premier titre, il y a déjà de belles sensations. « American dream » n’est pas le plus indispensable mais c’est une petite chanson tranquille où l’on remarque déjà la voix particulière de J.S. Ondara et un phrasé presque « dylanien ». Pour la suite, gardez vos écouteurs, vous allez devenir accro. Cet artiste est un OVNI, de par sa voix saisissante, puissante, limite androgyne. Et s’il faut un exemple, « Turkish Bandana », sera l’opus parfait.

L’artiste à la voix plaintive

Sa voix nue -enregistrée sans fioritures- respire, vibre, emporte, se fait grave, fluette, souvent à la limite de la rupture. Une voix dépouillée et brute, sans aucun accompagnement, qui met l’accent sur les mots et le message. La fragilité de l’artiste, sans rien pour le retenir, la voix tel un instrument. J.S. Ondara s’accompagne de la guitare sèche comme un folk singer. La voix s’enflamme à la fin de « Torch song ». No limits.

Sur les traces de Dylan et Springsteen

Et s’il fallait un titre pour le faire connaître, « Saying goodbye » est imparable, évident.

Une chanson pour dire adieu à ses origines, son pays, ce et ceux qu’il aime. La voix qui surfe sur des arrangements simples et efficaces et là aussi, l’envolée finale sous des chœurs légers. On pense à l’album « Nebraska » de Springsteen, aux premiers Dylan, son idole. Mais n’allez pas croire que J.S. Ondara est un clone, sa musique lui appartient et sa voix plaintive fait la différence. La même force, la fragilité authentique d’un artiste qui l’a décomplexé : Jeff Buckley

J.S. Ondara le « Self made man »

J.S. Ondara a grandi à Nairobi, une enfance sans moyens et sans histoire. S’il est aujourd’hui chanteur et musicien, il le doit à la radio qui a aiguisé son sens tranchant de la mélodie. Il passe alors ses journées à chanter et à écrire. Adolescent, il s’éprend du rock, se trouvant un Nirvana, un Oasis, Radiohead en tête. Plus tard le griot s’enrichit de la musique folk pour s’installer en 2013 à Minneapolis où il peut enfin s’acheter une guitare, sur les traces du Dieu local : Prince. A 20 ans, le hasard a voulu qu’il décroche sa Greencard pour devenir résident américain et vivre son rêve de kid à Minneapolis.

Du rock au folk… du folk au rock

«Ma découverte du folk a été accidentelle, tout comme mon arrivée aux États-Unis. Cette série d’événements me semble être une conspiration de l’univers pour me mener quelque part, je ne sais pas où encore!» C’est ainsi qu’il se confie au journal Metro.

Les morceaux parlent tous un peu de ce parcours de migrant parti de rien pour arriver dans la grande Amérique. Ils racontent tous une histoire de manière poétique comme ses ancêtres griots. Une osmose parfaite entre le propos et le style de musique. « J’adore les histoires et les poèmes. Je ne savais pas vraiment comment marier ça avec la musique jusqu’à ce que je découvre le folk ». C’est par hasard aussi qu’il découvre que « Knockin’ on Heaven’s Door » n’est pas un titre des Guns N’ Roses mais de Bob Dylan.

Aujourd’hui J.S. Ondara est dans ses cordes avec le folk mais il n’exclut pas de les rendre électriques pour revenir au rock. Quand on écoute « Smells Like Teen Spirit » de Nirvana, ça sonne comme une évidence. Une interprétation folk mais dans un esprit rock.


Il est temps de mettre dans le casque ce grand artiste aux multiples facettes qui fait penser à d’illustres prédécesseurs que sont Bob Dylan, Jeff Buckley, Nirvana, Springsteen…

J’écoute beaucoup de musique et ce n’est pas tous les jours que je suis surpris. J’espère que vous le serez tout autant.

Benoît Roux

https://www.jsondara.com/

https://www.instagram.com/spanishvillager/