Il observe le quotidien pour en faire des spectacles et des chansons. Un mélange bien dosé de cynisme et de poésie. Alex Fredo vient de s’attaquer au sujet du moment : la vaccination. Tourné dans une pharmacie, cette parodie de Jean-Jacques Goldman risque de vous rester en tête un bon moment.
Alex Fredo Photo : Facebook de l’artiste
Alex Fredo est un compositeur interprète né à Paris parti vivre à Montréal à sa majorité. Après plusieurs expériences musicales, c’est plutôt vers l’humour qu’il s’est tourné. « Comme vous pouvez le constater, je suis le fils de Ramzy et Michel Berger ». L’art de la formule, mi provoc mi poète. Habitué des stands up, il s’est rodé lors de premières parties d’humoristes comme Patrick Timsit ou Michel Boujenah, puis une tournée des Zéniths français grâce à Kev Adams.
Dans un article publié sur « Maudits français », on apprend que c’est par Gad Elmaleh que tout a commencé : « J’étais venu à l’Olympia pour une interview et la personne qui devait faire sa première partie a annulé,” explique-t-il. Gad Elmaleh l’aurait “jeté sur scène”.“J’en ai profité pour faire quelques blagues et c’est parti comme ça…”.
Chansonnier des temps modernes, il aime la variété française. Et donc JJ Goldman, dont il reprend à sa façon le tube « Envole moi » qui devient la supplique « Vaccinez-moi ». Une parodie qui ne manque pas d’air pour retrouver la liberté.
Alex Fredo – Vaccinez-moi !
Il pousse la parodie jusqu’à reprendre le timbre de voix de Goldman, un synthé presque d’époque. Des paroles bien senties, entre humour et sérieux. Avec Jo Brami en pharmacien très drôle et des pseudo-clientes qui se lâchent dans la danse. Une chanson sous forme de piqure de rappel du Monsieur Tout le monde qui a sa dose. D’ailleurs, en attendant les siennes, il avait déjà sévit lors du premier confinement. Toujours dans la variété, avec Francis Cabrel dans son univers : « On va tous mourir ».
Crédible dans le chant, plutôt drôle et juste dans le texte, pas démago, une bonne dose de rire, un vaccin sans rappel pour l’instant, comme une antidote à la morosité du moment. « Envole-moi loin de cette fatalité qui colle à ma peau » chantait Goldman.
Le streaming, nouveau sésame pour venir à la rescousse d’un monde artistique en détresse. Plusieurs salles de spectacles organisent des concerts retransmis en streaming sur les réseaux. Le premier Netflix exclusivement musical français vient de voir le jour à Toulouse. Quels sont les artistes proposés ?
Les 4 fondateurs d’ALLIVE Photo : Allive
Depuis le 22 février, vous avez la possibilité de vous abonner à cette nouvelle plateforme exclusivement musicale et proposant du live lancée par une start-up toulousaine.
Une rémunération différente des artistes
Moyennant 4,99 € par mois ou 49,99 € par an, un panel d’artistes essentiellement émergeants vous est proposé. Des vidéos d’artistes dans tous les genres musicaux mais captées dans les conditions du live. Les vrais lives d’avant la pandémie ou ceux enregistrés sans public post covid. Dans un premier temps, ce sont les artistes, les maisons de disques ou les salles de concerts qui proposent à la plateforme ces contenus. Avec comme premier principe, de rémunérer différemment les artistes. Manuel Darrault l’un des 4 fondateurs: « Cette plateforme est un contre-pied au niveau de la technologie et de la rémunération. D’abord il n’y avait pas jusqu’à présent de plateformes vidéos dédiées à toutes les musiques. Sur 4,99€ que coûte l’abonnement, 1,09 € vont dans l’enveloppe artiste, soit 4 fois plus que sur un autre site. Ensuite, ces 1,09 € seront rétribués aux artistes en fonction du temps de visionnage et non au nombre de vues. Plus un artiste va fédérer, plus il sera rémunéré ».
C’est le principe de l’User Centric : l’abonné rétribue les artistes qu’il a réellement écoutés et non au prorata de l’utilisation de la plateforme selon le Data Centric, une méthode utilisée par la majorité des sites de streaming.
30 nouveaux artistes régulièrement
La plateforme ALLIVE est opérationnelle depuis le 22 février. La première semaine, 30 artistes ont été sélectionnés. Ce sont tous des artistes émergents que la start-up veut aider à percer. A l’arrivée, cinquante heures de live accessibles. On y retrouve notamment le groupe nancéen OBLIQ. 4 musiciens et une chanteuse à la voix puissante sur une musique d’influences rock progressif.
Parmi les formations coups de cœur du site, les 3 frères qui constituent le groupe RUNNING TREE. Plus pop et folk, ce groupe vient de la région lyonnaise.
On y croise aussi des groupes électro comme ENTOARTIX ou encore DANIEL MIST aux atmosphères mélancoliques sous fond d’électro hip-hop.
Autant dire que tout le monde devrait y retrouver son bonheur musical. La plateforme réalise aussi des partenariats, notamment avec une autre plateforme musicale : Groover. Lancée en octobre 2018, Groover met en contact les artistes qui veulent promouvoir leur musique avec les médias, les labels en quête de talents émergents. Une sorte de laboratoire participatif (n’importe qui peut devenir un auditeur des morceaux envoyés par les artistes) pour faire émerger de la multitude les talents de demain. Alvin Chris est ainsi passé par là.
La plateforme fait le pari que le streaming musical peut intéresser durablement un public. Tout va dépendre de la qualité et de l’originalité des contenus proposés. A terme, Allive veut aussi réaliser ses propres vidéos en organisant des sessions dans toute la France, dans des salles de concerts. En ligne de mire, un festival qui permettrait de faire découvrir sur scène les artistes qu’elle défend. Si ce nouveau mode de diffusion vous intéresse, la plateforme Allive est toujours à la recherche de nouveaux artistes.
Poétique mais souvent caustique. Quand il égraine ses accords de guitare il pleut des cordes sur « Les Confinis ». Lors du premier confinement, Pierre Perret avait fait un tabac avec cette chanson, fumant au passage quelques protagonistes du moment. A 86 ans, le couvre feu continue de l’enflammer. Il sort un double CD avec 3 inédits.
Photo du double CD de Pierre Perret
« Mes adieux provisoires » c’est le titre de la dernière tournée et du double CD qui est sorti cette semaine. Un chant du cygne qui donne des signes de résistance. Si les 2 concerts prévus à Pleyel ont été reportés 3 fois, ils sont programmés les 30 et 31 octobre 2021. Cette prolongation subie donne des ailes à Pierre Perret, toujours aussi à l’aise pour mettre les doigts dans la confiture et tartiner sur la bêtise humaine.
Toujours le virus
Pour les vœux de 2021, le chanteur natif de Castelsarrasin (Tarn-et-Garonne) revisitait son tube « Vaisselle cassée » pour mettre la fessée à l’actualité pandémique et ses gestionnaires hasardeux. « Le virus à maman » où le nouveau vaccin contre la connerie.
Après l’confin’ment / S’y a moins d’macchabés / Après l’couvre feu / Y’a trois plus d’bébés !
Bientôt… Des bisous sur les paupières et des patins d’enfer
Encore plus poétique mais tout autant poil à gratter, le Pierrot lunaire est allé au « Grand Echiquier » de France 2 pour avancer ses pions. Avec un beau cadeau : cette magnifique chanson « Bientôt ». Sous le regard amusé et admiratif de Carla Bruni et Benjamin Biolay, la chanson se veut résolument optimiste. Il se dit prêt pour chanter « Lily » et « Les colos » bientôt. Emmené par l’accordéon de Gilou de plus de 10 ans son cadet, Il envoie valser les décideurs laissant fermés ces commerces non essentiels « dont ils auraient mieux fait de se nourrir, plutôt que de nous abêtir. » Avec une fin très assassine.
Pierre Perret – Bientôt (Le Grand Echiquier de France 2)
Des chansons virales
« Mes adieux provisoires », une nouvelle chanson arrangée et jouée avec ses amis des Ogres de Barback, c’est aussi le titre du double CD qui vient de sortir. 32 chansons dont 3 inédites (« Bientôt », « Les confinis », « Mes adieux provisoires ») pour se remémorer ce long parcours d’un artiste atypique, capable du plus joyeux comme du plus acrimonieux. Un art quasi inégalé de croquer les mots, de faire grincer, de faire sourire, avec générosité.
Tout est dit dans cette chanson « Mes adieux provisoires ». Une élégie élégante toujours imaginative. Une dernière taffe de liberté avant l’épitaphe d’une longue carrière à la plume aiguisée, pour mieux voler dans les plumes des oiseaux pas drôles. Dans le livret qui accompagne le double CD, l’artiste nous demande d’affuter nos esgourdes. Oui Pierrot, nos oreilles sont -et seront toujours- tout ouïe !
« Sans jamais hésiter, Vous fidèles anonymes, Escaladiez mes rimes, Pour sortir des sentiers, Vous avez échappé, C’est pas toujours commode, aux diktats et aux modes, Loin du prêt à chanter… »
Pierre Perret – Mes adieux provisoires (6 à la maison France 2)
Deux ans avoir reçu une victoire comme « révélation », le guitariste classique Thibaut Garcia concourt ce soir encore pour les Victoires de la Musique Classique. Il n’a que 26 ans, mais déjà beaucoup de concerts dans le monde entier et des récompenses à la clé.
Thibaut Garcia 2019 Photo: Marco Borggreve
Ce n’est pas tous les jours que la guitare classique se fait une place dans la cour plutôt fermée de la musique classique.
Révélation Victoires de la Musique Classique 2019
Pourtant ce soir, l’auditorium de Lyon pourrait voir cet instrument royal triompher sous les doigts agiles de Thibaut Garcia. D’origine espagnole, ce jeune prodige de 26 ans a posé ses cordes dans les plus grandes salles : à Tokyo, Moscou, Paris Nashville… Il est nommé dans la catégorie « soliste instrumental », aux côtés de deux pianistes, Khatia Buniatishvili et Alexandre Tharaud. La guitare classique souvent oubliée viendrait donc se frotter aux cordes plus reconnues du piano.
Reportage France 3 Eric Coorevits/Patricia Chalumeau
Passé par le conservatoire de Toulouse puis celui de Paris, n’allez pas croire que Thibaut n’écoute que de la musique classique. Si de par ses origines il a beaucoup interprété la musique espagnole, il écoute aussi beaucoup d’électro, du rap, du rock…
En 2013, il obtient le premier prix du Concours international de Séville, 2 ans plus tard celui de la « Guitar Foundation of America Competition ». Il est aussi nommé filleul de l’Académie Charles Cros.
Portrait Thibaut Garcia France 3 Occitanie Eric Coorevits (2019)
Une nouvelle Victoire de la Musique lui donnerait encore un nouvel élan pour promouvoir son instrument et sa musique. Il est aussi le créateur de l’événement « Toulouse Guitare » où les jeunes futures pépites côtoient les maestros. Un nouveau rendez-vous est prévu en mars retransmis en streaming sur la page Facebook dédiée.
En anglais, en français, du rock enflammé, des chansons lentes, le caméléon Alain Bashung possède cet incroyable talent de se glisser dans les chansons et de les faire siennes. Un album vinyle vient de paraître avec des reprises connues ou plus rares.
Crédit photo : pochette de l’album
Comment l’interprète un peu léger et quelconque de « Gaby oh Gaby » est devenu celui qui vous met la chair de poule sur « Les mots bleus » de Christophe ou sur ses chansons sublimes comme « Happe » ? Le parcours musical d’Alain Bashung est riche, peu répétitif et varié. Cet album de reprises qui vient de paraître en vinyle est du même acabit.
Une interprétation personnelle
Alain Bashung n’a pas son pareil pour reprendre une chanson, la restructurer, modifier le phrasé, sans trahir l’esprit de la chanson. Il installe des atmosphères, adapte sa voix en conséquence, tantôt grave profond, tantôt un peu nasillard. Parfois puissant, parfois fragile à l’extrême. Il sait amener une chanson sur d’autres voies, révéler d’autres lectures possibles, c’est sa grande force.
Tout en sensibilité et intelligence, il est l’un des rares à chanter du rock en français tout en restant crédible, l’un de ceux qui rentre direct dans une chanson sans avoir besoin de 36 000 prises. Son dernier album posthume « En amont » en est l’excellente preuve. Des titres qu’il avait enregistré, souvent en une seule prise, pour des maquettes, tester des arrangements, et qui se retrouvent sur un disque après sa mort sans que l’interprétation soit défaillante. L’aisance suprême.
Des « covers » qui ne manquent pas de reprise
Cet album « Covers » ne va pas surprendre les fans : les titres sont relativement connus, ils figuraient dans l’intégrale Alain Bashung ou dans le best-of « Osez Bashung » sorti en 2010. On y retrouve des chansons en anglais car l’artiste a toujours été fan de la musique anglo-américaine. Ca va de Presley (That’s All Right Mama), au plus country Harry Nilsson (Everybody’s Talkin’) jusqu’au très rock « Hey Joe » d’Hendrix. Avec à chaque fois, une voix de circonstance.
Alain Bashung – That’s all right mama
Sur le magnifique album, « Osez Joséphine » enregistré en partie à Memphis, il y avait déjà 4 reprises dont « We all right » de Buddy Holly et « She belongs to me » de Dylan éclairé par les guitares magnifique de Sonny Landreth.
Alain Bashung – She belongs to me
Côté français, on y retrouve évidemment du Gainsbourg avec lequel il a fait 2 albums, mais aussi Gérard Manset (dernier album « Bleu pétrole »), du Christophe dont il était très proche. Du classique. Mais il y a des choses beaucoup plus surprenantes dont sa version de « Les amants d’un jour ». Une valse réaliste qu’il habille à sa façon de manière simple et efficace.
Belle version également soutenue par mandoles, cordes et piano de « Céline » d’Hugues Aufray, le « Tango funèbre » de Brel, « Avec le temps » de Ferré qu’il a complètement déstructurée et « bashunguisée ». Mention spéciale pour le très beau morceau de Dick Annegarn « Bruxelles » où il est plus dans son univers.
Alain Bashung – Bruxelles
« Covers », un disque à ré-écouter pour les fans , à découvrir pour ceux qui connaissent à peine ce magnifique artiste et merveilleux interprète. Un sens inné pour faire chanter et donner une autre résonnance aux mots comme sur les bleus à l’âme de Christophe.
Il suffit de quelques secondes pour voir à quel point Slim Paul respire la musique. Aux racines du blues, avec des ramifications rock-pop, gospel, l’artiste toulousain sort un second album « Good For You ». Résolument positif et riche, il vient confirmer toutes les bonnes sensations du premier opus.
C’est comme ça : certaines personnes ont un don. Et pour Paul, c’est la musique, comme une évidence. Un premier groupe « Scarecrow » métissé de hip-hop, les States pour le trip, de nombreuses tournées sur les plus grandes scènes (Woodstock). Le voilà prêt pour une carrière solo…en trio.
Ce n’est pas pour rien qu’il s’appelle « Slim », une référence au blues. Il a du sang blues dans les veines. Il suffit de le voir chanter et jouer du Robert Johnson pour comprendre. Tout y est : la voix, les tripes, les vibrations…
Slim Paul – cover « Crossroads » de Robert Johnson
« Good for you » nouvel album riche et positif
Des battements de cœur pour le premier morceau. « Good for you » démarre là où s’était arrêté « Dead already » le premier EP. « When you keep on grooving » donne le ton. Le rythme cardiaque, des bruits lointain, les cymbales de la batterie, des nappes de clavier et le morceau s’installe. Un petit prélude attrayant avant d’explorer les routes d’un blues plus musical que psychologique. Car après un premier album assez noir, « Good for you » porte bien son titre. « C’est plus positif dans l’ambiance sonore, moins dépressif; plus soul que blues triste ». Sur cet album, Slim a tout écrit et composé. Il a même créé son propre label pour sortir l’album.
Les morceaux sont assez différents, tantôt ballade acoustique, tantôt blues rock électrique, mais toujours habités par sa voix profonde faite pour chanter le blues comme sur « That line ».
Slim Paul – That line
« Le blues c’est le ciment, je m’en inspire beaucoup. Mais c’est plus une culture qu’une musique. J’aime aussi le hip hop. Je suis dans la culture afro-américaine : Ray Charles, James Brown, Hendrix, mais aussi les Pink Floyd. J’adore la culture de l’harmonie chez les Beatles. » Une diversité que l’on retrouve dans les 12 titres de l’album. Avec un art consommé des ruptures. Chaque morceau est construit minutieusement, allant vers plusieurs styles, où chaque instrument dessine une voie. L’harmonica qui s’envole sur « In the shadow », « Amazing You » qui commence comme « Amazing grace » pour se faire rhythm ‘n’ blues et presque rockabilly sur la fin.
Un trio qui va chercher l’essentiel
Pas de fioriture, aucun effet de mode, pas de concession sur cet album. De « Scarecrow », Paul a gardé un musicien : le bassiste Jamo qu’il a mis… à la batterie! Il y a aussi Manu Panier à la basse et Paul qui joue plusieurs instruments sur le disque (guitares, basse, claviers, percussions…). Des musiciens qui ne sont pas en démonstration mais qui font juste monter la sauce, qui donnent du son. Intelligent et sensible.
Slim Paul – Good is gonna come
« Rarement, je suis sorti du studio d’enregistrement pleinement satisfait. Pour cet album j’ai halluciné. J’ai fait exactement ce que je voulais faire. Je suis très fier des arrangements, de la couleur du son. C’est de la musique ancienne sixities-seventies. Mais travaillée de manière moderne. »
Mention spéciale au morceau « Bury me deep » avec un gros son, des guitares déchirées, où l’on ressent les influences de Pink Floyd. Sur un autre registre, « Dear neighbor ». Un titre composé lors de la série passionnante de Jeremy Dunne « From play to rec » dans un esprit live pour le documentaire, plus légère, folk et acoustique dans l’album.
From Play To Rec – réalisation Jeremy Dunne
Un look Tom Novembre ou Fred Chichin des Rita, la puissance d’un Joey Star, Slim Paul est aussi une bête de scène. « Il n’y a pas mieux que la scène pour se sentir vivant. » Le magazine Rolling Stone vient de désigner « Good for you » comme « disque de la semaine ». On le retrouve en interview : « La scène manque à tous les zicos, j’ai moi aussi hâte de retrouver mon public. Mais pour l’instant, je travaille avec ce que je peux donc on va continuer à faire parler de cet album, faire des lives sur les réseaux, tourner des clips, et on va garder la foi en se serrant les coudes. Et quand le temps sera venu de monter sur scène, je serais prêt ».
Slim Paul – Welcome (Live @ OZ – Zénith de Toulouse)
« Good for you » est l’album de la maturité, de la sérénité, de la générosité et de la simplicité. Un LP un peu à contre-courant, sans fard ni artifices, mais bien éclairé.
C’est une première pour le photographe et elle est réussie. Franck Pourcel signe le tout nouveau clip de De la Crau « Shaman ». Des images noir et blanc granuleuses pour une chanson qui a la fièvre.
Photo : Franck Pourcel
Il y a la beauté du texte de Sam Karpiénia, celle de la musique de De La Crau et désormais, les images qui font corps de Franck Pourcel. C’est une première pour lui qui n’avait jamais réalisé de clip. Un parti pris esthétique noir & blanc granuleux qui donne un genre. Le feu qui habite les images et revient comme un gyrophare sur le refrain. Oui ce clip amène de la force à une chanson déjà puissante.
Encore plus puissant et hypnotique que Dupain pour lequel chanta jadis Sam Karpiénia, il faut aussi se pencher sur les paroles toujours poético-politiques de Sam qui chante et écrit en occitan. Un vrai choix politique et artistique.
Les cendres se dispersaient dans le ciel / Dans un dernier envol / Chauve souris, Tambour de sorcière / Danse des siècles / La fumée des bougies a donné du souffle / Les cheminées noircissent les visages / Les torchères à la nuit close / Visages noirs de l’histoire / Cachés, visages sans paroles / Un millénaire transperce la nuit / Tout se mélange, les contraires se rencontrent / Un millénaire transperce la nuit / Il danse le chaman, ouvre les portes / Regarde brûler la pierre / Loin d’ici la souffrance / Le fils du chaman se lève / Un Millénaire transperce la nuit / Tout se mélange, les contraires se rencontrent / Dans les méandres de la toile, loin du silence / Dans les méandres, loin des étoiles / Il a perdu le fil millénaire / Dissipés les enseignements séculaires / Embarqué dans le monde creux être dedans ou rester en dehors / Les pieds sur le goudron.
Une belle osmose texte-voix-images. La tempête et le feu n’ont pas fini de souffler.
Il a traversé le temps et les différents styles musicaux, l’immense pianiste Chick Corea s’est éteint à 79 ans. Légende américaine du jazz, avec une créativité et une virtuosité rarement égalées, sa musique symbolisait la joie et le renouvellement. Retour sur le parcours d’une étoile.
Chick Corea lors du 41ème festival de Jazz in Marciac (2017) SEBASTIEN LAPEYRERE via MAXPPP
Il savait tout faire et ne s’en contentait jamais. Toute sa vie, Armando Anthony Corea d’origine italienne a cherché à explorer la musique, découvrir, fusionner, en innovant sans cesse. Il était l’un des plus grands pianistes avec Herbie Hancock, Keith Jarrett. Sa musique jazz a toujours respiré d’autres influences.
Stan Getz & Chick Corea – Live at Montreux (1972)
Pianiste dès 4 ans, il envisage une carrière de batteur. C’est le saxophoniste Stan Getz qui le repère en premier. 1972, il l’accompagne sur scène avec Stanley Clarke (basse) et Tony Williams (batterie). Un solo vers 3’30 sur un piano électrique virevoltant.
Chick Corea & Miles Davis
1968, une autre légende le repère et l’intègre dans ses musiciens : Miles Davis. Il fera 3 albums avec le trompettiste (Filles de Kilimanjaro, In a Silent Way et Bitches Brew). Sur la même longueur d’ondes avec Miles Davis, il creuse encore plus ses expérimentations de sons et de rythmes. Une inventivité que l’on retrouve sur ce solo (vers 5’50) où son clavier sonne comme des notes de pluie. C’est la naissance du jazz fusion, qui fait exploser les codes, en y mêlant différentes influences comme le rock, la funk et le rythm and blues.
Live in Rome (1969)
Return to Forever Chick Corea
Début des années 70, c’est un nouveau virage. Corea s’émancipe et crée son propre groupe « Return to Forever ». Il signe chez Blue Note . Il ne lâchera jamais cette formation où se croiseront les plus grands musiciens du moment. Il abandonne un temps son jeu expérimental pour une fusion plus « latine ».
Live 1973
1974, un grand guitariste le rejoint : Al di Meola. D’autres sonorités encore, le Fender Rhodes toujours virevoltant et créatif, et toujours l’immense joie de jouer comme sur ce live à la BBC.
Return To Forever – Medieval Overture 1976
Rencontre avec Jean-Luc Ponty, la fusion, le flamenco
En 1976, Chick Corea s’adjoint les services de Jean-Luc Ponty, le virtuose violoniste français et Steve Gadd à la batterie. L’occasion d’aller explorer encore d’autres terres musicales sur l’album « My spanish Heart ».
En 2019, il avait rendu visite au festival Jazz in Marciac avec le « Spanish Heart Band » aux influences espagnole et latine.
La musique classique
Dans les années 90, Chick Corea crée son label de musique « Strectch Records ». C’est la période également où il s’intéresse à la musique classique. Il écrit même un concerto pour piano, inspiré de son célèbre morceau « Spain ». Il composera également un quatuor à cordes. Dans cette vidéo, il interprète le Concerto pour piano N°10 de Mozart avec… Keith Jarrett!
Son dernier concert s’est passé à la Halle aux grains de Toulouse le 26 février 2020, en trio pour la reprise du live de 2013 « Trilogy ».
Fin 2016, le musicien fête ses 75 ans avec 15 groupes différents, 60 musiciens et 80 concerts au Blue Note de New-York. L’hommage avant l’heure du monde de la musique pour un musicien de génie. Aucun artiste n’a exploré autant de style en si peu de temps et avec autant de pertinence.
Avant de mourir, il a laissé ce message :
Je veux remercier tous ceux qui, tout au long du voyage, ont aidé à faire briller les feux de la musique
C’est un pied de nez à une société qui livre des plats cuisinés à domicile. Un contre-pied aussi aux livestreams musicaux qui pointent leurs oreilles de partout. Une salle de spectacle va proposer de vous amener un artiste à la maison pour une chanson au minimum. Une originalité de plus alors que la culture musicale a toujours du mal à se faire entendre.
Delivreznoo, chanson livrée à domicile. Photo : site Le Bijou
« Delivreznoo », ça sonne comme Délivrez-nous, « Deliveroo ». Un clin d’œil un brin provocateur de Pascal Chauvet qui a repris cette salle toulousaine. Une petite commande passée au Bijou et une chanson (avec un vrai artiste!) vous est livrée à domicile. Il en coûtera 5 € et vous aurez droit à une chanson. « C’est le fruit d’une réflexion pour savoir comment aider les artistes. L’idée ce n’est pas de rentabiliser quoi que ce soit mais de faire vivre la musique et les artistes. »
Cette première opération se passera le samedi 20 février en pleines vacances scolaires. 14 créneaux sont prévus de 11h à 18h avec des rendez-vous possibles dans Toulouse « intra-périphériques ». C’est l’artiste qui décidera du choix de la chanson de son répertoire.« C’est 5 euros la chanson et nous rétribuons les artistes bien sûr. Pour cette première, un seul artiste est programmé. C’est quelqu’un qui est proche de nous, que nous avons programmé au Bijou. Mais nous gardons son identité secrète pour l’instant. Pour la suite, nous allons prévoir 4 ou 5 artistes pour la prochaine. »
C’est l’une des plus petites salles de Toulouse mais jamais à court d’idées. Faute de pouvoir programmer des artistes, le Bijou met en place ce concept novateur. Si le public ne peut pas venir à l’artiste, l’artiste viendra au public. Une manière de délivrer -à tous les sens du terme- pour un instant les artistes. Sacré Covid !
Après Gacha Empega, Dupain et Forabandit, Sam Karpiénia poursuit ses chemins de traverse avec De la Crau. Résolument rock, post-punk, toujours radical, ce nouveau groupe va sortir son premier EP le 19 février. Un nouveau clip est en préparation.
De la Crau Photo : Franck Pourcel
Comme souvent avec Sam, tout est affaire de rencontre. Ce nouveau groupe s’est constitué au fil des envies, des routes bartassièiras avec des parallèles musicaux qui finissent par se rencontrer. Il y a SAM KARPIÉNIA porté par le flot, les cordes frottées de MANU REYMOND et les fûts bien trempés de THOMAS LIPPENS. Ils travaillent ensemble depuis 4 ans. Il y a tout juste un an, sortait le premier clip réalisé par Thomas Sanna sur le morceau « Temperi » qui sera sur leur premier EP.
De la Crau – Temperi
« Chaman » sera le deuxième morceau à sortir sous forme de clip. Là-aussi, une histoire de rencontre. Celle de Sam et du photographe Franck Pourcel. Il vit à Marseille comme auteur-photographe indépendant. Les photos de Franck ne sont pas forcément focalisées sur le domaine artistique mais sur la rencontre (encore) entre l’homme et son territoire. L’histoire aussi De la Crau. Apéros, discussions, Franck se retrouve à réaliser son tout premier clip. Un clip noir et blanc, tourné al pais, à Martigues, Fos, Port de Bouc et l’étang de Berre.
Sam Karpiénia – Chaman réalisation Franck Pourcel
« Chaman », la symbiose entre un homme, son esprit et son territoire. Mi païen mi sacré, poétique rocailleux et inspiré. Histoire de feu, d’usines évidemment. L’esprit chamane oui, mais il faut aussi turbiner quand le pratique prend le dessus. Pour que ce clip qui s’annonce atypique voit le jour, un financement participatif a été organisé sur le site Helloasso. Il ne reste plus que 2 jours pour porter sa pierre à De la Crau.
Le clip sortira le 12 février sur Youtube, l’album sur Bandcamp une semaine plus tard. En attendant, c’est Lucas Fox le batteur et fondateur de Motörhead qui va conclure : « Chez De la Crau, leurs ancêtres Celtes descendus d’Ecosse et d’Irlande s’entrechoquent le long de la route des épices avec les sonorités de l’Afrique de l’ouest jusqu’au Maghreb. Les paroles toujours aussi engagées sont transportées par la voix du Sud de Sam, bien mûrie, habitée par cet humanisme profond ».
Photo : Franck Pourcel
De la Crau, Motörhead, encore une rencontre. Sur les chemins de traverse de Sam, les planètes s’alignent pour De la Crau.