16 Juin

Bernard Mougey/ Le « tour de France » à 60 ans

Il est rentré au port comme ces grands voiliers sont accompagnés par toute une foule d’embarcations joyeuses après leurs périples autour des océans. Une nuée de bicyclettes pour accompagner le navigateur solitaire dans son ultime effort à travers les Montagnes du Lomont dans le Doubs. le Blog cycliste de France 3 n’aurait raté ça pour rien au monde. Un peu plus de cent bornes à vélo aller retour depuis Besançon, pour retrouver notre Moby Dick du bitume et saisir sur le vif ses toutes premières impressions après son tour de France intégral en moins de 30 jours. Quelques heures d’effort sous la cagnard pour avoir l’immense privilège de rouler quelques kilomètres avec ce « géant » de la route et de cueillir le sourire d’un homme comblé d’avoir réussi un des plus grands paris de sa vie.

Bernard Mougey accompagné par l’école cycliste de Chazot pour terminer son tour de France
PHOTOS © JL Gantner

Des tas d’amis du pédaleur, la famille bien-sûr ! l’école de cyclisme de Chazot… personne n’aurait coupé à la tradition d’accueillir comme il se doit la performance, l’exploit d’un de ces « Ulysse » modernes ! La fin d’un périple encensé. 5000 bornes au total depuis le 17 mai. 150, 200 quelquefois près de 300 km par jour, comme lors de cette 14e étape entre Suzur dans le Morbihan et Marans en Charente-Maritime où après 282km, Nanard trouve encore le moyen de remettre le nez dans le guidon pour faire un peu de tourisme pour digérer les crêpes…

Bernard Mougey a quelques kilomètres du but/ PHOTOS © JL Gantner

Parti  sa bicyclette et un sac de 12 kg sur le dos, le maçon en retraite depuis quelques mois, l’ancien para… est arrivé chez lui ce dimanche 16 juin 2013 après avoir réalisé un rêve qui le tenaillait depuis longtemps : Effectuer un tour de France (intégral) comme avait déjà tenter de le faire son oncle il y a quelques années ratant l’exploit pour quelques heures seulement.  (30 jours maximum en longeant les frontières au plus près.) Un tour de l’hexagone dans l’esprit du tracé de la grande boucle de 1924. (Paris, le Havre, Cherboug, Brest… Bayonne, Luchon Perpignan, Nice… avant de voir Ottavio Bottecchia franchir les Alpes sans concéder une étape à la concurrence depuis le premier jour de l’épreuve. Un record inédit dans l’histoire de la course la plus populaire du monde. Briançon, Gex, Strasbourg… Un Tour du pays selon le dessin le plus esthétique et le plus rigoureux. Une moyenne de 24,250 KM/H à l’époque pour le vainqueur). Bernard a même réussi à faire un peu mieux !

PLUS DE 5000 KM ET 51 COLS. LE TOUT EN MOINS DE 30 JOURS !
Le règlement de cette bambée infernale est homologué par « l’US Métro Transport » qui encadre l’épreuve depuis la fin des années cinquante. 60 villes réparties sur le parcours au choix du cycliste sont obligatoires pour faire viser son carnet de route. Une folie où l’on répertorie 51 cols dont 7 de plus de 2000 m. 30 jours maximum pour les « randonneurs » et 60 pour les « cyclotouristes ». Avis aux amateurs !

Bernard Mougey sur les routes e son Tour de France/ PHOTO © Collection B. Mougey

« LE PLUS DIFFICILE : LA BRETAGNE ! »
Le 3 juin dernier, on pouvait encore voir ce fada du dérailleur s’élever dans l’Aubisque avant d’être obligé de « déchausser » dans les premiers mètres du col du Soulor recouvert de neige. Le Tourmalet le lendemain. Pas de quoi faire le malin avec déjà plus de 3000 km au compteur !… « J’ai vraiment souffert à ce moment là » avouait Bernard dimanche en descendant le col de Ferrière en tête du peloton venu lui faire une haie d’honneur. Une traversée des Pyrénées en mode hivernal, et sans les caméras de France Télévisions pour revoir les images le soir à l’hôtel. Bernard termine l’ascension les raquettes au pied et son clou… sur le dos. 1H30 de grimpée arnaché comme un alpiniste pour réussir à passer le machin. Vietto, Robic ou la Brambille flingués par le maçon de Chazot dans la grande bagarre des Pyrénées. Voilà pour l »histoire d’un Tour de 1947 (Que Jacques Godet me pardonne !) revu et corrigé par opiniâtreté et l’abnégation du secrétaire du club cycliste du village natal de Francis Mourey. Les crevaisons qu’il faut réparer soi-même, le vent, la pluie, ses grimpées à enchainer… Bernard a quitté les bords de la Méditerranée, Marseille, la Ciotat, la côte d’Azur… par le col de Vence. Le retour des températures polaires malgré la date sur le calendrier. Mais aussi, saucisses et merguez dans l’Izoard. Un barbecue surprise préparé par son ami Dominique et sa femme Nicole, venus le réconforter dans les Alpes. Le Glandon, la Madeleine… Rien que des monuments avant d’en voir enfin le bout après 30 jours d’une vie de forçat ! « Le plus difficile : La Bretagne… » me lâche Bernard en esquissant machinalement une expression douloureuse qui en dit long sur la difficulté de son aventure. « Le vent et la pluie glacée sans discontinuer. je me disais qu’il fallait s’accrocher juste en envisageant une difficulté après l’autre. Un virage après un autre, une pente après une autre. pas plus ! »

La dernière « blague » sur la route, à quelques kilomètres de l’arrivée/ PHOTOS © JL Gantner

Ce dimanche soir 16 juin 2013, C’est tout un pays qui attendait le valeureux navigateur. Bernard Mougey, qui annonce déjà vouloir bientôt reprendre sa bécane pour d’autres aventures… Une salle des fêtes pleine à craquer qui ressemblait à ses longues soirées dont Chazot a le secret lorsque le patron du cyclo-cross français, Francis Mourey revient chez lui pour partager ses maillots tricolores avec ses proches. Un pays pétri dans la culture vélocipédique depuis longtemps, et qui connait parfaitement la valeur et l’intransigeance d’une telle performance. Une grande boucle intégrale, Un tour de France en solitaire, conclu le jour de ses 60 ans. Chapeau bas Monsieur Mougey.
JL Gantner