La montée de l’Alpe d’Huez en à peine moins d’une heure… au lieu d’un peu plus de 37 pour Marco Pantani en 1995 ou 38 minutes tout juste pour Lance Armtrong en 2001. (Pantani qui lors de ce tour de France 1995 avait littéralement déposé Virenque et Jalabert à une dizaines de kilomètres de l’arrivée, avant d’exploser le record de l’ascension à une moyenne inimaginable de 466 watts !…) Virenque, de retour en 1997 en 38 minutes et 11 secondes…
On pourrait ainsi continuer la liste des aberrations chronométriques enregistrées dans la plus célèbre des grimpées cyclistes sans pour autant réussir à flinguer le fabuleux monument. Un peu plus de 1000m de dénivelés qui ont tout supporté déjà de la vindicte des meilleures cours intellectuelles comme de toutes les formes de nausées populaires. Au final, de vaines tentatives pour abattre le titan médiatique. Voyez encore cette année, ce 18 juillet sur le Tour du centenaire : Du monde comme on en avait encore jamais vu pour assister au triomphe de Christophe Riblon à l’issue d’un match fabuleux contre l’américain Van Garderen. 21 virages mythiques qui font l’unanimité dans les rangs des millions de supporters de la Grande Boucle, et 14 km d’ascension depuis le Bourg d’Oisans comme moyen de se frayer soi-même un chemin, ou plutôt une modeste sente de chèvres dans la légende. L’Alpe, l’illustre grimpée qui fait aussi rêver des milliers d’amateurs. l’objectif ultime pour 6000 cyclistes passionnés embarqués dans la pente chaque année. La récompense d’un hiver entier d’une préparation rigoureuse, ou pas ! Car on trouve de tout dans l’Alpe !… Un « Mont Blanc » cycliste où toutes sortes d’objets vélocipédiques se suivent, se dépassent, trainent la jambe, moulinent, dansent où fument la pipe devant des pendus photographiant le paysage baigné de sueur, d’huile de camphre, de Gaultherie et d’arnica. La montée de l’Alpe… Un spectacle d’un genre… « anthropologique ». Pour ma part, la clé de voute d’une semaine de vacances à chasser les grands cols alpins.
Dans l’Alpe d’Huez/ PHOTO Lili & Elvis 2013
Une matinée idéale de la fin de ce mois de juillet 2013. La température parfaite après une nuit d’orage apocalyptique propre à la contrée. Les dernières heures de repos calfeutrées dans une belle chambre anglaise plantée au sommet de l’objectif. Le temps de récupérer d’un enchainement effectué la veille du col de la Colombière (1613 m) et du passage des Aravis (1486 m) avant de rejoindre les gorges de l’Arly. Une première ascension de 16 km depuis Cluses en arrivant de Genève, pour vérifier l’état de forme et la qualité du matériel embarqué. Une glissade ensuite vers le Grand-Bornand avant de remettre la gomme vers la Clusaz puis dans les ombres acérées et sous les abruptes du Mont Charvin. 6 épingles dans des pâturages sauvages avant une descente à tombeau ouvert vers Albertville. Une petite centaine de kilomètres en tout. Une séance d’affutage parfaite pour attaquer les virages de cette Alpe dont on fait si grand cas, avec la condition physique des grands jours.
La montée n’est pas la plus raide, ni la plus difficile du secteur à quelques distances du Lautaret et du Galibier. Plus loin l’Izoard… De quoi rapidement avoir des fourmis dans le jambes et tenter d’emmener « gros » dès les premiers lacets au risque d’exploser le joint de culasse avant le sommet. Tenter de jouer les stars du peloton, les « purito », les « Aigle de Tolède » ou les « Pistolero »… (Oui ! Et si ça me fait plaisir à moi… de pédaler le temps d’une montée, dans la peau d’un costaud des pentes raides ; un champion des ascensions mythiques ; un abonné au maillot à pois…) Mais l’âge venant est un bon conseil pour mener l’expédition à bon port sur le rythme qu’il convient. Une allure de « montagnard » plutôt qu’une succession de dépenses inutiles loin des caméras de télé pour enregistrer « le record du siècle »… Une montée, tout à « l’économie » (et j’y viens tout de suite justement !)…
Dans l’Alpe d’Huez/ PHOTO Lili & Elvis 2013
Voilà pour le côté tactique, avant de tout lâcher chez Rapha™ (la nouvelle boutique de la marque britannique sponsor de la Sky, installée depuis cette année juste au sommet de la rampe alpine réputée mondialement). la visée précise du jour pour tout avouer. Une bonne montée pour justifier l’achat de beaux maillots de corps et d’une paire de chaussettes également signées de la jeune maison anglaise pour transpirer des pieds avec classe ! Une montée sèche de 14 km pour se payer le luxe d’un passage à la caisse sans avoir à culpabiliser. « Et si vous pouviez me remettre aussi une petite veste imperméable qui va bien et un slip en laine mérino pour passer l’hiver au chaud avec la petite bande blanche sur le côté pour rester discret dans les grandes occasions !… »
Une montée de l’Alpe, pour passer le reste de ses vacances fauché après s’être laissé faire les poches par une bande de professionnels du marketing dont j’avoue avoir réussi à me laisser berner comme il m’arrivera certainement encore de le faire à l’avenir malgré toutes les précautions pour me prémunir définitivement de ces petites faiblesses humaines. La passion, comme l’amour, que voulez-vous ?!… Comme on ne compte pas sa propension au labeur pour vivre ses rêves quels qu’ils soient. « De la béatitude malgré soit ! » pensait Nietzsche à « l’heur » de son « grand midi ». Et j’eusse dû mieux me méfier de toute cette « beauté rusée » comme le fit avantageusement ce « surhomme » cher au philosophe de Leipzig, qui « comme l’amant à qui trop velouté sourire donne méfiance ». « Ainsi parlait Zarathoustra » alors que pour ma part je continuais ma route sans fin et ma « fol » échappée dans les rayons des grands magasins.
JL Gantner