« Nous avons dû attendre le drame de Nice pour enfin pouvoir obtenir la saisie des matériels informatiques ». Ce 19 juillet, en commission des lois, le député LR de Haute-Saône Alain Chrétien fulmine. Le projet de loi sur la prolongation de l’état d’urgence prévoit enfin cette disposition, que le parlementaire franc-comtois avait demandé le 18 novembre dernier ! « Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres de la faiblesse et des limites de la réponse du gouvernement et de sa majorité », dénonce ce proche de Bruno Le Maire. Et pourtant, l’histoire est un peu plus complexe que cela…
Nos confrères de LCP l’ont remarqué: le député LR Alain Chrétien était bien énervé lors de l’examen du texte par la commission des lois le 19 juillet dernier.
–@alainchretien s’énerve au sujet de la saisie des matériels informatiques qu’il demande « depuis des mois » #DirectAN pic.twitter.com/nml8RsNSXR
— LCP (@LCP) 19 juillet 2016
Le 18 novembre 2015, il avait en effet proposé cette même disposition au sein de cette même commission. Voici son intervention à l’époque:
Le 26 janvier, il dépose une proposition de loi (à retrouver en détail ici), cosignée d’ailleurs par plusieurs députés LR de Franche-Comté (Annie Genevard, Marcel Bonnot, Jacques Pélissard, Jean-Marie Sermier, Damien Meslot).
PPL déposée il y a 6 mois … à l’époque c’était : circulez y a rien à voir … #EtatdUrgence #6moispourrien pic.twitter.com/NODg2MWk8m
— Alain Chrétien (@alainchretien) 19 juillet 2016
« Circulez, y a rien à voir », nous dit aujourd’hui le député de Haute-Saône…
Et pourtant, le 27 janvier, il envoyait un communiqué triomphal à la presse: « Manuel Valls a annoncé sa volonté de faire inscrire dans ce texte mon amendement sur les saisies informatiques, une idée que je défends depuis l’examen de la loi sur l’état d’urgence en novembre 2015 (…) Je suis heureux que le projet de réforme constitutionnelle fasse mention de ma proposition. Le but étant de rendre plus exhaustive l’accès et la recherche des données pouvant utilement servir dans la lutte anti-terroriste. »
Une censure du conseil constitutionnel
Alors que s’est-il passé?
Comme nous le rappelle le quotidien Le Monde, « le gouvernement réintroduit les perquisitions informatiques dans l’état d’urgence ». Comme Manuel Valls l’avait annoncé à Alain Chrétien, ces dernières avaient bien été prévues par le précédent texte sur l’état d’urgence, mais le Conseil constitutionnel, saisi par la Ligue des Droits de l’Homme, avait censuré ces dispositions mi-février (lire ici). « Le législateur n’a pas prévu de garanties légales propres à assurer une conciliation équilibrée entre l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public et le droit au respect de la vie privée », estimaient alors les juges constitutionnels.
La nouvelle loi sur l’état d’urgence (lire ici) précise en son article 5 que « si la perquisition révèle l’existence d’éléments, notamment informatiques, relatifs à la menace que constitue pour la sécurité et l’ordre publics le comportement de la personne concernée, les données contenues dans tout système informatique ou équipement terminal présent sur les lieux de la perquisition peuvent être saisies soit par leur copie, soit par la saisie de leur support lorsque la copie ne peut être réalisée ou achevée pendant le temps de la perquisition ».
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