« Le scrutin de la peur » pour le Journal du Dimanche, « un scrutin chargé de symboles » pour Le Figaro, et même « un volcan électoral tout près d’entrer en éruption » pour L’Humanité. Les correspondants des médias nationaux aiment les superlatifs. Tous les journaux ou presque ont envoyé leurs reporters dans la 4e circonscription du Doubs, qui élira les 1er et 8 février prochains le successeur de Pierre Moscovici à l’Assemblée nationale. Pourquoi une telle attention? La réponse avec notre revue de presse.
Pas de doute.
Le tout Paris politique a les yeux rivés sur le département du Doubs.
Les ténors de plusieurs partis politiques (Manuel Valls, le Premier ministre socialiste; Laurent Wauquiez et Xavier Bertrand pour l’UMP; Marine Le Pen et Florian Philippot pour le Front national, Emmanuelle Cosse pour Europe Ecologie-Les Verts, Martine Billard pour le Front de Gauche…) vont venir ou sont venus soutenir leur candidat.
« Les habitants de la 4e circonscription du Doubs n’ont pas l’habitude de voir défiler autant de ténors sur leurs terres excentrées de l’est de la France », note FranceTVinfo. C’est « l’endroit où se montrer pour les responsables politiques de tous les partis. C’est même un bal des ténors », confirme Le Figaro.
Et avec les responsables politiques sont arrivés les journalistes des médias nationaux.
- Un héritage symbolique
C’est Le Monde qui l’écrit: « Sur cette terre marquée par la désindustrialisation et le sentiment de déclassement, (…) à la frontière de la Suisse, les partis s’apprêtent à se disputer un héritage ».
Cet héritage, c’est celui de Pierre Moscovici. L’ancien ministre de l’Economie et des Finances était le député socialiste de cette circonscription, une « terre ouvrière touchée de plein fouet par la crise économique » rappelle l’AFP dans une dépêche reprise par LCP, la Chaîne parlementaire. Désormais commissaire européen, Pierre Moscovici a démissionné de l’Assemblée. Ce qui a provoqué cette législative partielle.
« L’UMP veut solder les années Moscovici », prévient d’ailleurs Le Monde.
- Une majorité parlementaire en sursis
A l’Assemblée, la majorité socialiste ne tient qu’à un fil, ou plutôt à un siège. Là encore, on est dans le symbole, puisqu’il y a belle lurette que le gouvernement s’appuie sur les députés radicaux et verts pour faire passer ses textes les plus contestés, notamment par les frondeurs socialistes. Mais les symboles, en politique, c’est essentiel.
Le Monde précise: « Il y a encore quelques semaines, cette législative aurait pu faire tomber la majorité absolue socialiste à l’Assemblée. Le ralliement au PRG de Jean-Pierre Maggi, député des Bouches-du-Rhône et proche de Jean-Noël Guérini, a mis fin depuis à ladite majorité absolue. »
Mais alors que le Parti socialiste n’a gagné aucune des élections législatives partielles organisées depuis 2012, l’UMP et le FN comptent bien en profiter: « L’enjeu reste très important pour l’UMP : ce scrutin doit permettre de mesurer la démonétisation de la marque PS après deux ans et demi de pouvoir, et illustrer la capacité de l’UMP à contrer le FN. » (Le Monde)
« Les militants du Front national croient dur comme fer à leurs chances (…) Les candidats ont fait chauffer leurs calculettes : le FN est quasiment assuré d’arriver en tête au soir du premier tour. L’UMP est favorite au second. » (Le Journal du Dimanche)
- Le premier test électoral après les attentats
Cela semble une évidence pour bien des commentateurs: « les attentats rebattent les cartes ». (Le Journal du Dimanche)
Le FN, le PS et l’UMP sont « sur le pied de guerre », ose Le Figaro
« Le PS se pensait déjà éliminé, « l’esprit du 11 janvier » lui redonne quelque maigre espoir » écrit Mediapart, pour qui « les attentats de Paris ont révélé ces fractures culturelles profondes entre des mondes qui s’ignorent. Difficile de passer à côté pour les candidats à la législative. »
Le Journal du Dimanche explique: « À gauche, de Montbéliard à l’Élysée, on compte sur un sursaut des électeurs socialistes. « Notre candidat est de première force, populaire, énergique, ferme et réactif. Il peut créer la surprise. Il n’y a pas de fatalité d’un duel FN-UMP », se persuade Pierre Moscovici. »
« Le PS espère que l’aura nouvelle acquise par le premier ministre à la suite des attentats qui ont touché la France bénéficiera à Frédéric Barbier« , confirme Le Figaro.
Europe 1 a d’ailleurs rencontré « une ex-socialiste déçue par François Hollande qui avait prévu de voter FN pour la première fois de sa vie. La voilà à nouveau électrice socialiste ». Pour Edith, “ça demande réflexion vu ce qui se passe, on va peut-être garder notre François (…) Il nous a redonné confiance”.
Pour autant, « l’électrochoc » espéré par Vincent Adami, le communiste, dans Mediapart, est loin de se réaliser. « La campagne, pour les forces de gauche, est difficile. Au marché, beaucoup d’électeurs se disent « écœurés par la gauche et la droite ». « On paye pour le PS, c’est hallucinant », déplore Véronique Bourquin-Valzer« , la suppléante de Vincent Adami, dans L’Humanité.
- Le Front national devenu incontournable
Malgré cette « drôle de campagne », « le Front national est l’épouvantail de cette élection », selon France Info.
« Sophie Montel, la candidate du Front national, reprend évidemment la musique du « Je vous l’avais bien dit », claironnée depuis les attentats par le parti d’extrême droite », constate Mediapart, tandis que l’Agence France Presse cite les tracts frontistes sur le « péril islamiste ». Charles Demouge, le candidat UMP, pronostique: « l’abstention risque d’être forte » et « il y aura probablement un duel au second tour. Mais le FN, même bien ancré, ne fera pas 50% au deuxième tour ».
Europe 1 a demandé son avis à Jean-Daniel Lévy, directeur du département Opinion et Politique à l’Institut Harris Interactive. Il explique: “nous sommes dans un environnement où le FN arrive à mobiliser extrêmement bien quelles que soient les circonstances. »
A l’inverse, le Huffington Post juge que la séquence « attentats » « n’a guère profité au Front national, fragilisé par la polémique autour de la marche républicaine du 11 janvier et la mini-crise interne provoquée par l’eurodéputé Aymeric Chauprade. » Et de conclure: « les résultats dans la 4e circonscription du Doubs seront scrutés de près et feront office de crash-test pour le parti d’extrême droite qui espère bien renverser la table en envoyant un troisième élu à l’Assemblée nationale. »
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