Une vingtaine de mesures et 500 millions d’euros pour les zones rurales: à trois mois de régionales, François Hollande a envoyé ce lundi à Vesoul des signaux à ces territoires souvent en proie à un sentiment de relégation. Ce déplacement en grande pompe a pris des airs de campagne électorale avant l’heure, le chef de l’Etat et le Premier ministre se livrant ainsi à un bain de foule en arrivant à Vesoul, tandis que 11 ministres sillonnaient le département pour soutenir des projets de développement.
A l’issue d’un « comité interministériel aux ruralités », le deuxième après celui organisé à Laon (Aisne) il y a six mois, le chef de l’Etat a annoncé que la moitié du fond d’un milliard d’euros débloqué en faveur des collectivités locales serait attribuée aux zones rurales, et décliné 21 mesures amplifiant l’effort en faveur de ces territoires.
Ces 500 millions serviront notamment à « la revitalisation » des bourgs-centres et des villes de moins de 50.000 habitants. Ils seront gérés par les préfets au plus près des besoins, en liaison avec les associations d’élus afin que les investissements puissent être engagés dès le début de l’année 2016.
« Nous avons droit aux déambulations de François Hollande, il est en campagne électorale pour 2017 », a réagi le porte-parole des Républicains Sébastien Huyghe. « François
Hollande se balade mais oublie de gouverner », a renchéri Florian Philippot (FN) pour qui « la multiplication des déplacements ne masquera pas l’inaction du gouvernement
ni son mépris pour le monde rural ».
Santé, numérique, simplification
Parmi les 21 mesures en faveur de ces territoires (lire le détail ici), François Hollande a indiqué que 700 médecins généralistes seraient formés à l’aide médicale d’urgence pour permettre qu’aucun habitant ne soit à plus de 30 mn d’un service d’urgence d’ici 2017. L’installation des médecins en milieu rural sera aussi favorisé. De 350 contrats pour l’installation de jeunes médecins dans ces territoires en 2012, on passera à 1.700 d’ici 2017.
Concernant la couverture numérique, l’Etat a dégagé plus de 3 milliards pour le très haut débit et avant la fin de l’année, tous les départements auront été inclus dans ce plan et il y aura une obligation de très haut débit sur les 23.000 km de voies ferrées.
Pour favoriser la mobilité, des efforts budgétaires seront faits pour préserver les stations services indépendantes et des bornes de recharge électriques devront être installées tous les 50 km.
François Hollande a également annoncé « une nouvelle vague de simplification dans trois domaines » en zones rurales: « la gestion des bâtiments publics, l’organisation des
activités sportives, le fonctionnement des collectivités locales ». « Ces mesures, a-t-il dit, seront effectives dès le mois prochain. »
Une délégation d’agriculteurs reçue
Mais la crise agricole s’est elle aussi invitée dans ce déplacement. A leur arrivée, le président, le chef du gouvernement et le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll ont ainsi écouté les doléances des responsables des Jeunes Agriculteurs, de la Fédération départementale des producteurs de lait de Haute-Saône et de la FDSEA. « Nous lui avons notamment expliqué que les normes européennes et françaises étaient trop lourdes pour nos exploitations », a indiqué à l’AFP Sylvain Crucerey, président de la FDSEA.
Les représentants des trois syndicats ont demandé que le département reste classé « zone défavorisée simple » à l’issue des discussions européennes prévues en 2018,
ce qui permet aux agriculteurs de toucher des « indemnités compensatoires de handicaps naturels » à hauteur de quelque 6 millions d’euros pour la Haute-Saône.
A Vesoul, tenus à bonne distance du convoi présidentiel, quelque 150 militants de la Confédération paysanne et de la CGT ont pour leur part manifesté.
Après la rencontre, François Hollande et Manuel Valls ont visité le siège du groupe Parisot, numéro un français de fabrication de meubles en kit. La société, qui emploie aujourd’hui 1.800 salariés sur trois sites en France ainsi que deux en Roumanie, commercialise ses produits dans 70 pays. Elle est lancée dans un programme de 19 millions d’euros d’investissements. L’entreprise créée en 1936 par Jacques Parisot, grand-père de l’ex-présidente du Medef Laurence Parisot, a été reprise en 2014 par dix cadres historique et un actionnaire de référence, François-Denis Poitrinal.
« Je refuse les oppositions entre les villes et les campagnes »
François Hollande, qui a également rencontré des élus du département, a expliqué le but de sa visite: « Montrer notre attention aux territoire ruraux » et « répondre aux inquiétudes » en particulier sur la présence des services publics et l’emploi.
« Nous sommes pleinement dans un territoire qui doit être solidaire, je refuse les oppositions entre les villes et les campagnes, les métropoles et les territoires ruraux. C’est ensemble que nous devons engager l’avenir et c’est le sens de la réforme territoriale que nous avons engagée », a-t-il ajouté
« Réformer, innover, avancer partout en France »: François Hollande a voulu aussi se montrer à l’offensive, à quelques semaines d’élections régionales à haut risque pour la
majorité, avec le Front national en embuscade. Il a appelé à « faire France ensemble » estimant que « la menace ne vient pas de l’extérieur, elle est à l’intérieur de nous-mêmes ».
Le choix de la Haute-Saône, département de 280.000 habitants où l’industrie représente 26% de l’emploi, est un exemple de « territoire rural dynamique » souligne-t-on à Matignon. L’usine de pièces détachées de PSA à Vesoul emploie notamment 3.000 personnes. Politiquement, le département, dirigé depuis 2001 par le socialiste Yves Krattinger, a résisté à la Berezina de la majorité aux départementales de mars dernier. Il est le seul des quatre départements de l’ex-région Franche-Comté, à ne pas avoir basculé à droite. (AFP)
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