On pourrait rêver meilleur lancement du futur pôle métropolitain dans le Nord Franche-Comté. Censées travailler et se développer de concert, les agglomérations de Belfort et de Montbéliard (toutes les deux gérées par la droite) sont en guerre ouverte pour accueillir la future clinique privée du groupe Dracy Santé. Promise à Montbéliard après la fermeture de la clinique des Portes du Jura, l’établissement pourrait finalement s’implanter à Trévenans, dans le Territoire de Belfort. Une offre de terrain a en tout cas été faite à Pierre Mercier, le PDG de Dracy.
Le futur hôpital médian du Nord Franche-Comté à Trévenans, dans le Territoire de Belfort, la future clinique à Montbéliard, dans le Doubs.
C’était jusqu’à présent la solution d’équilibre défendue par l’Agence régionale de Santé et les acteurs politiques locaux, en tout cas dans le Pays de Montbéliard. Car sous l’impulsion de Damien Meslot, l’agglomération de Belfort et le Département du Territoire ont proposé au groupe Dracy Santé un terrain, à proximité de l’hôpital médian, pour y implanter la future grande clinique du Nord Franche-Comté. La bataille entre les deux agglos est relancée.
Reportage de Jérémy Chevreuil et Frédéric Buridant
Quel est le projet de Dracy Santé ?
Implanté en Saône-et-Loire, le groupe Dracy Santé a repris la clinique de la Miotte, à Belfort, à l’été 2014. A l’époque, Pierre Mercier, le PDG, souhaite rénover les locaux. Aujourd’hui, ce projet est suspendu. Dracy Santé préfère s’implanter sur un 2e site, dans le Nord Franche-Comté, pour y développer notamment un plateau chirurgical nouvelle génération. Le site de la Miotte accueillerait alors les soins de suite. Candidat malheureux à la reprise de la clinique des Portes du Jura, le groupe Dracy veut maintenant construire une nouvelle clinique. Montbéliard lui a proposé deux terrains, à proximité de l’Axone. Belfort a également identifié un éventuel site d’implantation, à Trévenans, à côté de l’hôpital médian. « Un site en devenir », juge d’ailleurs Pierre Mercier. Le groupe Dracy, dont l’investissement pourrait avoisiner les 25 millions d’euros, a fait venir un architecte pour étudier les potentialités des terrains proposés, à Trévenans comme à Montbéliard.
Pourquoi les élus du Pays de Montbéliard sont-ils inquiets ?
Après la liquidation judiciaire de la clinique des Portes du Jura et dans la perspective du déménagement de l’hôpital à Trévenans, le Pays de Montbéliard se retrouvera très vite sans aucun établissement de soins, public ou privé. Il semblait donc acquis que si grande clinique il y avait, elle serait à Montbéliard. Mais c’était sans compter sur l’opportunisme des élus du Territoire de Belfort. Dans le projet de Dracy santé, le site de La Miotte serait relégué, en quelque sorte, au second plan. L’agglomération de Belfort et le Département ont donc eux aussi fait une proposition de terrain. « On ne pique rien au Pays de Montbéliard. Ce n’est pas de ma faute si leur clinique a fermé, nous affirme Damien Meslot, député LR, maire et président de l’agglo de Belfort. Montbéliard a un complexe d’infériorité par rapport à Belfort. C’est à chaque élu de défendre son territoire ».
L’initiative a en tout cas fait bondir les élus du Pays de Montbéliard, au premier rang desquels le sénateur PS et maire d’Audincourt Martial Bourquin, qui défend dans un courrier adressé à l’ARS « une répartition équitable de l’offre de santé dans le Nord Franche-Comté ». Avec ses collègues parlementaires, les députés Frédéric Barbier (PS) et Marcel Bonnot (LR), il a écrit à la ministre de la Santé Marisol Touraine pour la rencontrer et lui signifier que « le Pays de Montbéliard est l’agglomération la plus peuplée dans le Nord Franche-Comté et qu’il ne saurait être question que notre territoire soit laissé pour compte. » Quant au président de l’agglomération de Montbéliard, Charles Demouge, il rappelle que dans le cadre du pôle métropolitain, une « répartition équitable » entre Belfort et Montbéliard est indispensable. Or en matière de santé, « il y a ceux qui ont déjà, et ceux qui n’ont plus rien », déplore-t-il. Message transmis à son « ami » Damien Meslot. Et dire que les deux territoires doivent se développer bientôt main dans la main, au sein d’un pôle métropolitain…
Que dit l’Agence régionale de santé ?
L’ARS est chargé d’organiser l’offre de santé, au nom de l’Etat, sur le territoire. Jusqu’à présent, l’ARS défendait l’implantation d’une clinique privée à Montbéliard. Mais la proposition du Territoire de Belfort a semble-t-il rebattu les cartes. L’agence assure en tout cas qu’aucune décision n’est prise, mais que plusieurs hypothèses sont encore sur la table. Une réunion avec les élus locaux est programmée à la fin du mois de février.