Élue le mois dernier députée de la première circonscription de Besançon, Barbara Romagnan ne perd pas de temps. La socialiste a été désignée rapporteur du projet de loi sur le harcèlement sexuel pour la commission des affaires sociales, l’un des textes phares de l’été parlementaire. Barbara Romagnan s’est également fait remarquer en cosignant une tribune « Pour une Gauche Durable » dans Libération, et une contribution « féministe » préalable au congrès du PS à l’automne. Preuve que la nouvelle députée entend peser de tout son poids sur les débats socialistes. Interview.
Comment vous êtes-vous retrouvée rapporteur de l’un des projets de loi les plus importants de cette session parlementaire?
« Ça se décide avant la réunion de la commission des affaires sociales, entre députés socialistes. Nous étions plusieurs à nous proposer. Nous avons discuté, puis on a fait un tirage au sort, et je l’ai emporté. Sur ce texte, trois commissions vont rapporter. La plus importante, c’est la commission des lois. Les deux autres – la commission des affaires sociales et la délégation aux droits des femmes, dont je fais aussi partie – n’ont qu’un avis consultatif. C’est néanmoins une charge importante, même si je suis très aidée et soutenue par les administrateurs de l’Assemblée. Je suis évidemment ravie d’être rapporteur de cette loi sur le harcèlement sexuel. Cela a un sens particulier pour moi qui suis une militante féministe. »
Certaines associations féministes justement ont critiqué ce projet de loi. Si le texte annulé par le conseil constitutionnel était trop imprécis, le texte en préparation serait selon elles trop restrictif. Quel est votre opinion?
« Je ne trouve pas que ce texte soit trop précis. Au contraire, on a élargi aux entretiens d’embauche, aux recrutements, à la demande des associations. Le harcèlement sexuel est étendu au cadre des relations de travail, mais pas limité au lieu de travail, ce que confirme la jurisprudence. Nous avons aussi ajouté comme circonstances aggravantes notamment la précarité économique, ce qui n’existait pas dans la loi précédente. Évidemment, on fait les choses dans l’urgence, pour combler le vide juridique. C’est la limite. Mais le gouvernement avait déjà déposé un projet de loi, le Sénat a déjà beaucoup travaillé, on a passé trois journées complètes d’auditions au cours desquelles on a vu beaucoup de monde, donc ce n’est pas comme si le débat était neuf. »
Vous avez cosigné le 8 juillet dans Libération une tribune intitulée « Pour une Gauche Durable ». Quelle est la genèse de ce texte?
« Un certain nombre de députés partagent les mêmes préoccupations sur les modes de développement, avec l’intuition que c’est structurant. L’idée n’est pas forcément de déposer une motion au Congrès, mais on a lancé un premier jet. Parmi les signataires, il n’y a pas beaucoup de stars, mais des gens impliqués aux sensibilités différentes. Le but n’est pas de constituer un courant. »
Certains observateurs ont décrit cette tribune comme un ballon d’essai pour préparer le terrain avant une éventuelle motion de Martine Aubry. Est-ce le cas?
« On voit bien que non, puisqu’elle a annoncé qu’elle en déposerait une commune avec Jean-Marc Ayrault, avec le souhait qu’il n’y en est qu’une. C’est vraiment un problème. La victoire de la gauche, c’est le débat. Il est important que les socialistes débattent entre eux. Mais rien n’est joué, puisque personne ne décide qui signe quoi. »
Cette tribune est-elle alors une critique de l’action du gouvernement?
« Pas du tout. Tout ce qui se passe au PS ne se fait pas en fonction de ce que fait le gouvernement.
Pour moi, il y a trois enjeux essentiels. D’abord la question du modèle de développement, dont on parle dans cette tribune. Il faut favoriser l’industrie durable et les emplois verts. Les emplois d’avenir, pour les jeunes, devront concerner ces secteurs d’activité.
Ensuite la question européenne: intégrer le pacte budgétaire dans la Constitution est inacceptable pour le PS. La Commission européenne ne peut pas décider si le Parlement est dans les clous ou pas. Ce serait antidémocratique. Je suis profondément européenne, mais on ne peut pas dessaisir le pouvoir national au profit d’une Commission qui n’est pas élue et n’a donc aucune légitimité démocratique.
La troisième question, c’est celle du rapport au pouvoir. François Hollande a aussi gagné parce qu’il a promis la transparence de la vie publique, la parité, le non cumul… La baisse des salaires des ministres était une chose essentielle. Notre engagement sur le non cumul, il faudra le respecter. Quand on est socialiste, on prétend partager les richesses. Le pouvoir aussi, ça se partage. Ça ne coûte rien, c’est simple et c’est populaire. »
Ces idées seront-elles portées par un candidat lors du congrès du PS à l’automne?
« Nous sommes dans une phase de réflexion, mais il ne devrait pas y avoir de texte plus long que cette tribune, ni de candidat. D’ailleurs ce que je vous dis peut très bien être porté par Martine Aubry. »
Quel est votre Premier secrétaire idéal?
Et cela tombe bien, puisque Barbara Romagnan sera l’invitée du journal de France 3 Franche-Comté vendredi midi.« Normalement, on doit en débattre. Je vous en dirai plus à la fin de la semaine. »