Catherine Monnin est bisontine d’origine. Elle est chargée de cours à EPFL (Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne). Docteur en sciences du management, elle a regardé le débat d’hier soir entre Nicolas Sarkozy et François Hollande. Elle l’a regardé plus qu’écouté : elle décrypte le langage de leurs corps. Ce qu’ils ont dit avec leurs mains, leurs têtes, leurs bustes… A leur insu.
Selon Catherine Monnin, les deux débatteurs ont envie d’affronter l’autre. Aucun des deux n’est dans le refus du combat.
Le plan de profil n’avantage pas François Hollande : il est « avachi » sur son siège alors que Nicolas Sarkozy se tenait bien droit.
D’ailleurs, le président-candidat a des gestes rectilignes, tranchant avec les mains. Il a de nombreux mouvements des épaules vers le haut qui caractérisent sa volonté de « se monter, de s’élever ».
Il utilise son stylo en permanence. Il y cherche de la protection « il se raccroche à quelque chose », et, dans le même temps, il canalise ainsi sa nervosité.
Et il s’est retenu, Nicolas Sarkozy… Pendant presque 3 heures… « Il ne fallait pas que le débat dure encore une demi-heure » » Il aurait fini par craquer et s’énerver !
Le langage du corps
François Hollande, lui, a souvent le buste penché en avant matérialisant ainsi « sa volonté d’aller de l’avant ». Les deux mains font des moulinets ronds. Il a une gestuelle plus en rondeur. Mais, il est proche de la table et de ses notes, pour ne pas s’en éloigner. Comme s’il ne voulait pas oublier un chiffre, une donnée… comme pour se rassurer aussi…
Tous les deux utilisent beaucoup leur main droite, signe que c’est le cerveau gauche qui est sollicité, celui de la rationalité.
Nicolas Sarkozy, le buste en avant, montre sa volonté de convaincre et d’affronter son adversaire. La tête en avant, c’est là aussi la rationalité qui parle, il veut mettre ses idées en avant, il cherche un débat d’idées.
Le candidat socialiste lui aussi se tient buste en avant. Souvent, il se recule au fond de son siège quand il a fini son intervention. Pourquoi ? Parce qu’il souhaite passer à autre chose, à un autre thème… surtout s’il est en difficulté !
La main gauche : l’émotionnel
Rarement ils utilisent leurs mains gauches, celle de l’émotionnel. Nicolas Sarkozy la tient même une grande partie du débat sous la table. L’une des rares fois où il brandit sa main gauche c’est quand il parle de son quinquennat « sans violence ». Là, il laisse libre cours à l’émotionnel…
Physiquement, François Hollande va utiliser une « esquive corporelle » quand il est en difficulté : il regarde davantage les journalistes.
Catherine Monnin, qui avait analysé le débat Sarkozy-Royal, et a jugé celui d’hier soir beaucoup plus tendu que celui de 2007. Elle a noté énormément de tensions dans le menton et la bouche de Nicolas Sarkozy. A plusieurs reprises, sa lèvre se relève, signe de son mépris pour son adversaire.
Voilà quelques réflexions de Catherine Monnin, jointe par téléphone aujourd’hui…
Après ses remarques, on ne regarde plus jamais un débat de la même manière !