« One World, One Prayer », c’est le single qui réunit des membres de la famille Marley avec Shaggy le Jamaïcain et Farruko le Portoricain. « Un monde, une prière », le titre prend forcément une résonnance particulière post confinement. Il signe le retour du célèbre groupe avec la famille Marley. C’est la première sortie sous son nom depuis 27 ans ! Le titre est sans surprise mais plutôt pas mal. Il annonce un nouvel album.
Nouveau single. Site nation pop
Le 11 mai 1981, Bob Marley n’était plus de ce monde. 39 ans plus tard, c’est la date qu’a choisi son groupe mythique The Wailers pour sortir un nouveau morceau. Ce n’était pas arrivé depuis 27 ans!
« One world, One prayer » assure le coup
Le clip qui accompagne la chanson commence par la tour Paramount Worldcenter de Miami où s’illumine tout en haut des 60 étages le titre « One world, One prayer ». C’est sur cette tour que s’affiche aussi les messages de soutien aux soignants. Jusqu’à la fin du mois, du coucher du soleil jusqu’à minuit, les Wailers seront aussi à l’honneur.
Il y a presque 40 ans que Bob Marley a disparu mais le reggae lui a survécu. Les héritiers du chanteur Jamaïcain sont là : Cedella Marley sa fille de 52 ans, et son petit-fils de 23 ans Skip Marley. En écoutant le morceau, le clin d’œil au tube « One love » sorti en 1977 est flagrant. La base est reggae, il ne pouvait en être autrement. C’est Shaggy, un autre chanteur Jamaïcain tout auréolée de son succès avec Sting qui débute le morceau. Pour donner un petit côté latino et rap, Farruko a été invité à rejoindre le groupe et chanter. Le son Jamaïcain est présent, les chœurs célèbres de Marley aussi. A la basse, on retrouve le seul membre historique du groupe : Aston « Family Man » Barrett , 73 ans.
Pour leur retour discographique, les Wailers n’ont pas pris de risque. Ils ont confié les manettes de la production à Emilio Estefan, le mari de Gloria Estefan. C’est lui qui a écrit ce morceau consensuel et un brin œcuménique. Dans une interview relatée par le site News 24, il dit l’avoir écrit il y a 2 ans : « Nous devons apprécier les choses simples de la vie et en particulier l’amour qui commence avec nos familles et s’étend à notre communauté et au-delà, parce qu’en fin de compte, nous sommes tous » un monde, un cœur « . Ancien agent et producteur de Shakira et de Célia Cruz, Emilio Estefan signe une production fidèle au son jamaïcain et efficace.
Après Bob Marley, The Wailers ne se sont pas arrêtés.
Du groupe mythique fondé par Bob Marley et Peter Tosh en 1963, il ne reste évidemment pas grand chose. Outre Cedella et Skip Marley (la mère et le fils), on retrouve aussi Aston Barrett Jr à la batterie et Aston « Familyman » Barrett à la basse, le seul membre historique des Wailers. Voilà pour la caution. Le groupe continue de se produire en concert, une tournée devait avoir lieu au printemps et cet été. En revanche, le groupe n’avait pas sorti de disque depuis 27 ans. C’est donc un événement et le nouveau disque qui devrait paraître d’ici peu est très attendu.
The Wailers – Three Little Birds / One Love (Live at Boomtown Fair 2014)
Après Idir, Manu Dibango et Tony Allen, l’Afrique perd encore l’un de ses artistes qui a su dépasser les frontières du continent. Le Guinéen Mory Kanté est décédé ce vendredi matin à l’âge de 70 ans. A l’instar de ses confrères africains, son parcours musical alterne entre tradition et audaces occidentales, dont le fameux tube planétaire Yéké Yéké.
Pochette du 45T Yé Ké Yé Ké
Yéké Yéké à la conquête du monde en 1987
Les années 80, synonymes de l’apparition de la world music. Et comme dans toutes les vagues, il y a du bon et du moins bon, de l’opportunisme et de la singularité. Au tout début de ces années, Mory Kanté commence à lorgner sur d’autres musiques aux sonorités plus modernes. Il enregistre sur un label américain et songe à partir à la conquête de l’occident. Il a déjà enregistré Yéké Yéké une première fois. Pas vraiment satisfait du résultat, il songe à faire une version plus moderne.
Ces années 80, c’est aussi le moment où d’autres artistes africains commencent à se faire une place en France et ailleurs. Il y Salif Keita avec qui il a déjà joué, mais surtout Youssou N’Dour, Ismaël Lô ou encore Ray Lema. Avec des bases traditionnelles, ils ont fait l’apport d’autres instruments, d’autres sons pour conquérir l’Europe et les USA. 1984, il s’installe en France. Plusieurs producteurs montrent le bout de leurs oreilles, dont l’Anglais Nick Patrick. 1987, ils enregistrent l’album Akwaba Beach. 1988, ils partent à la conquête du Top 50 déjà squatté par les tubes world d’Ofra Haza et Johnny Clegg. Les cordes de la kora sur un rythme diabolique, une production efficace. Le chant des griots mandingues fait son entrée dans les boîtes de nuit.
Résultat : 5M d’exemplaires vendus dans le monde, disque d’or dans plusieurs pays dont la France et Victoire de la musique du meilleur album francophone en 1988. 2 ans plus tard, les mêmes -Mory Kanté, le producteur Nick Patrick et Philippe Constantin du label Barclay- tentent une récidive avec l’album « Touma ».
Un long parcours africain auparavant
Comme beaucoup d’artistes d’Afrique de l’ouest, Mory Kanté est issu d’une famille de griots. Une tradition orale qu’il perpétue en chantant, mais aussi en jouant de la guitare, du balafon puis de la kora que l’on entend sur Yéké Yéké. Il étudie les rites et les chants puis s’exile au Mali. Il est alors repéré par la célèbre formation du Rail Band de Bamako du saxophoniste Tidiani Koné. Dans ce même groupe se trouve un certain Salif Keita qui s’en va en 1973. C’est Mory Kanté qui le remplace comme chanteur, s’illustrant dans des morceaux de pur funk à la James Brown, comme « Moko Jolo » enregistré en 1974 avec le Rail Band ou sur un afrobeat façon Fela à la sauce mandingue.
Il fait ses armes et sa renommée s’amplifie en Afrique de l’ouest. Elle s’amplifie grâce à un ballet mandingue réunissant 75 artistes traditionnels et modernes qu’il dirige sur la scène du Centre culturel français d’Abidjan. C’est pour ce ballet que Jacques Higelin l’invité sur scène pour son spectacle à Bercy en 1985. A côté de lui, il y a aussi une autre étoile montante de la world invitée : Youssou N’Dour. Il fait aussi partie de la trentaine d’artistes africains qui participent à l’opération « Tam Tam pour l’Ethiopie » dirigée par Manu Dibango. C’est là que Philippe Constantin du label Barclay le repère. Plus tard, c’est le célèbre pianiste américain David Sancious (Bruce Springsteen, Eric Clapton, Peter Gabriel) qui le prend sous son aile et produira un album.
Après ces visées internationales, Mory Kanté revient en Afrique. Il avait pour projet de monter à Conakry (Guinée) un grand centre de promotion de la culture mandingue avec studios d’enregistrements et salle de spectacle. Mais hélas ce projet ne verra pas le jour au vu des difficultés économiques de son pays. En 2012, il sort son dernier album « La Guinéenne ». Le président Guinéen Alpha Condé lui rend hommage sur son compte twitter.
La culture africaine est en deuil. Mes condoléances les plus attristées. Merci l’artiste. Un parcours exceptionnel. Exemplaire. Une fierté.
« Resistiré », l’hymne officiel de l’Espagne qui résiste au coronavirus fait presque 33M de vues sur YouTube. Ce titre des années 80 qui ressemble au « I will survive » de Gloria Gaynor a conquis le monde entier. Avec des versions enregistrées dans un cinquantaine de langues et dans une centaine de pays. 40 après l’avoir écrit, le Dúo Dinámico signe un succès mondial.
A peine 4M de vues, l’hymne officiel des artistes français « Et demain? » contre le coronavirus ne pèse pas lourd face aux 33M de vues de « Resistiré ». Les Espagnols se sont emparés de cette chanson des années 80 et dans le monde entier, d’autres artistes l’ont reprise.
Lorsque des artistes espagnols et le media Cadena100 décident de la reprendre au début de la pandémie pour en faire un hymne à la resistance, le phénomène s’amplifie.
Partout, l’hymne se chante : sur les balcons, dans les files d’attentes, devant les hôpitaux, les commissariats… un véritable phénomène. Dans une vidéo presque surréaliste, on voit des religieuses de Valladolid faire une chorégraphie digne d’un grand show!
Religiosas Misioneras de Santo Domingo_en Valladolid
Le succès ne s’arrête pas là. Partout dans le monde d’autres artistes décident de se l’approprier. Et pour commencer -communauté linguistique oblige- l’Amérique Latine. IL existe une version qui regroupe des artistes de toute l’Amérique. Mais musicalement, ce n’est pas indispensable. Il faut plutôt écouter la version mexicaine qui a du coffre et des cuivres qui sonnent. Plus de 8M d’internautes l’ont vue.
Plus original, on peut lui préférer la version « mariachi » tout autant « cuivrée » et en costume. Authentique!
Un peu d’exotisme aussi avec « Resistiré » version République Dominicaine, plus enlevée et assez réussie.
Equateur, Argentine, chaque pays d’Amlérique Latine a eu sa version confinée. Idem en Europe avec la Roumanie, l’Angleterre, l’Italie, la France aussi avec Dani Garcia-Nieto qui fait une version plus anecdotique et sans prétention qui permet d’écouter les paroles en français.
Enfin petit clin d’œil aux joueurs de cornemuse, une version plus reposante, sans les paroles, mais avec 2 bandas degaitas : « Avante Cuideiru » (Cudillero) et « El Carbayón » (Oviedo)
Pendant le confinement, ils ont composé une chanson sur le handicap et réalisé un clip. Ce couple d’artistes toulousains avait besoin de se libérer, de partager leur questionnement sur la maladie, tenter de savoir pourquoi c’est eux qu’elle touche. Johanna et Christophe ont enregistré « Why? » pour leur fille de 7 ans, Clélia, qui est polyhandicapée. Alors qu’ils avaient perdu leur créativité, le confinement forcé leur a donné un nouveau souffle.
Ce n’est pas 2 mois qu’à duré le confinement pour ce couple d’artistes toulousains mais presque 7 ans. Autant de temps à rester auprès de leur fille, nuit et jour. 7 ans à tenter de comprendre ce qu’elle avait, 7 ans à passer des tests, à soulever des questions plombées par les réponses. Très tôt diagnostiquée sourde, les handicaps se sont ensuite multipliés pour Clélia. Le temps a suspendu son vol pour ses parents. 7 ans à ne pas savoir, à ne pas comprendre. « En février, nous avons su exactement ce qu’elle a. Une maladie auto-immune diagnostiquée un peu plus tôt mais qui s’est précisée avec un nom barbare : 10P15.14 » confie la maman Johanna. Une maladie très rare, quasi unique sur ce registre précis. Une pathologie qui génère pas mal de troubles et qui s’attaque ensuite aux reins. Voilà pour le contexte. Mais ce n’est pas un blog médecine, donc parlons musique.
Les compositions confinées
Le couple s’est rencontré grâce à la musique il y a 20 ans. Christophe cherchait une chanteuse pour ses compos. Et Johanna a montré sa voix. Depuis, ils ont écrit et composé 2 albums. Mais les maisons de disques sont restées sourdes. Le duo Anadjoh a dû se résoudre à faire des reprises de musique noire américaine des années 50 à nos jours lors de soirées privées pour vivre de leur passion. Christophe et Johanna Dorso donnent aussi des cours de musique et de chants. Et puis, Clélia a occupé beaucoup de place et son grand frère avait besoin de faire la sienne aussi. Les compositions se sont endormies, confinées durablement par le manque de temps et une espèce de fatalité.
Au mois de mars, l’autre confinement est apparu brutalement par surprise. « Au début, on a changé les carreaux de la terrasse. Mais ça tient pas la semaine! Alors Christophe s’est mis a composer un morceau et moi à écrire. Le confinement nous a remis dans la création » avoue Johanna. Il faut dire que leur petite fille a réussi aussi à gagner un peu d’autonomie en leur laissant un peu de temps. Février, le diagnostic médical est tombé. Et pour se relever, Johanna a posé des mots sur la compo de Christophe.
Oui. Il fallait que ça sorte après toutes ces années où on nous a annoncé, un à un, les troubles innombrables dont elle souffrait. A l’annonce de sa surdité, on a eu un choc. Il a fallu encaisser puis on a fait face.
Et faire face quand on est musicien, le plus court chemin reste la musique. Tout le monde s’est mis au travail; même le grand frère. Johanna a écrit le texte en français. « Mais c’était trop compliqué pour moi émotionnellement de le chanter. Et puis ça sonnait pas super bien. On a donc fait traduire les paroles en anglais pour que je puisse me détacher un peu de ces émotions ».
Et pour les traduire en musique Christophe qui a d’abord appris la guitare est aussi capable de jouer de plusieurs instruments : basse, batterie, claviers.
Dans leur home-studio, ils ont enregistré le soir, un exutoire aux nombreux troubles pendant que Clélia trouvait un peu de quiétude. Christophe voulait aller plus loin. « Ensuite c’est vrai que j’adore les images, les vidéos, les musiques de cinéma. Donc on s’est dit : pourquoi pas faire un clip ». Un clip familial où l’on retrouve les 2 enfants et les 2 parents artistes. Publié sur les réseaux sociaux, le clip a fait plus de 3200 vues et suscité pas mal de réactions.
Un album à paraître bientôt
En fait, d’autres compositions de Christophe, d’autres textes de Johanna étaient confinés et n’attendaient qu’un déclic pour surgir au grand jour. L’album moitié français, moitié anglais qui s’appellera aussi « Why » sortira prochainement sur les plateformes de téléchargement. On y retrouvera 2 versions de la chanson « Why? » : celle du clip et une inédite acoustique et voix. Avec l’aide du chef de chœur toulousain des « Petits ducs » et leur complice de toujours : Rachel Joseph.
Pour le reste, « Je n’ai pas envie d’écrire et de chanter n’importe quoi. Ce sont donc des sujets de société qui m’inspirent -les violences conjugales, la solitude, le dédoublement de personnalité- pour faire passer aussi des messages de tolérance. » Des mots signés Johanna souvent intimes, un peu sombres, qui effleurent la souffrance, les peurs, à la recherche d’un havre de paix.
Côté musique, le duo n’est pas facile à classer mais il se situe dans le pop-rock-fusion. Ca respire des influences assez variées: Prince, Pink Floyds, Craig Armstrong et Brel pour Christophe. Les voix du Jazz pour Johanna mais pas que : Sarah Vaughan, Ella Fitzgerald, Skunk Anansie…
L’album est en cours de mixage et les répétitions pour du live vont commencer. Le confinement aura eu du bon pour Johanna et Christophe Dorso. Après un souffle de désespérance, un vent de créativité a fini par l’emporter.
C’était une légende du blues. L’américain Lucky Peterson est décédé ce dimanche 17 mai à l’âge de 55 ans. Son instrument de prédilection, c’était la guitare. Mais avant de savoir parler, il avait appris l’orgue. Musicien multi-instrumentiste, chanteur à la voix rauque, showman incomparable, il avait un lien privilégié avec la France. C’est d’ailleurs sous le label français Jazz Village qu’est paru son ultime album.
Lucky Peterson – Photo site Jazz Radio
Il jouait de la guitare comme il respire : naturellement et sans se poser de questions. Mais c’était aussi un organiste hors pair qui faisait ce qu’il voulait sur ce bon vieux orgue Hammond. Tel Miles Davis à la trompette, il savait creuser le son, aller toujours en profondeur pour explorer toutes les sonorités. Il a été repéré dès l’âge de 5 ans par son grand maître Willie Dixon. C’est aussi à cet âge-là qu’il a enregistré… son premier disque!
Et comme tous les grands, il était resté simple, n’hésitant pas à venir jouer au milieu de la salle ou après un concert avec son public. J’ai eu le privilège de le voir au tout début de sa carrière en France. Pour tout grand amateur de blues, ce monsieur avait tout compris.
Every Day I Have The Blues, Jazz in Marciac 2016
Il respirait cette musique, savait précisément comment la jouer. Avec des sons extraordinaires sortis de sa guitare ou de son orgue Hammond. Un toucher fantastique quel que soit l’instrument et sa voix ardente pour l’accompagner.
Mais sa musique ne se limitait pas au blues : il y avait de la soul évidemment, une posture rock, du gospel (un disque hommage à Mahalia Jackson) et même des pointes de reggae come sur ce titre : « The blues is Driving me ».
Ce titre est un extrait de son ultime album 50 Just Warming Up!sorti sur le label français Jazz Village après avoir travaillé aussi avec le label de Francis Dreyfus. Un disque pour fêter ses 50 ans de carrière. Lucky Peterson avait parfaitement digéré l’héritage de ses aînés Robert Johnson, Buddy Guy, John Lee Hooker. Mais comme d’autres bluesman de sa génération (Robert Cray, Kevin Moore), il apportait une touche de modernité. Il laisse une trentaine de disques et des souvenirs inoubliables pour ceux qui l’ont vu en concert.
Ce blog ayant pour vocation de faire découvrir des artistes, voici l’américaine Kandace Springs. A peine la trentaine, une voix soul, sensuelle et sophistiquée, un tenu de note incomparable, c’est Prince le premier qui l’a remarquée. Son premier album magnifique a été publié d’entrée en 2017 par le prestigieux label Blue Note. Avec The Women Who Raised Me son troisième album de reprises, elle rentre dans le club très fermé des divas du jazz.
La fille de l’artiste de Nashville Scat Springs, a baigné dans la musique, trempé dans tous les styles de jazz et ça s’entend. Il faut du culot pour s’attaquer à 30 ans, aux grands standarts du jazz, faire oublier ses chanteuses mémorables, ses idoles Ella Fitzgerald et Billie Holiday.
L’album Soul Eyes, une pure merveille
Comme vous certainement, je ne connaissais pas cette artiste. C’était un matin, une oreille un peu endormie orientée vers France Inter et la chronique Manouk’ & co. On connaît la passion d’André Manoukian (lui-même pianiste), pour le jazz, les femmes et la voix. « C’est ma drogue, mon carburant, mon marqueur émotionnel… Et ce matin, c’est avec la sublime voix de Kandace Springs que j’ai choisi de réveiller nos auditeurs. » Une chronique élogieuse et très contagieuse qui vous fait attraper le virus… musical s’entend! Je découvre donc cette voix au vibrato subtil, capable de vous donner le frisson à la moindre poussée et à la moindre retenue. Une voix intelligente qui ne joue pas des émotions.
Fall Guy – Kandace Springs album Soul Eyes
Plus puissante que Diana Krall, aussi sensuelle que Sarah Vaughan, un soupçon de Norah Jones, c’est un peu tout ça Kandace Springs. Un mélange subtil de soul, jazz, pop, remarquablement produit par Larry Klein (Mélody Gardot, Joni Mitchell, Herbie Hancock…) et la fraîcheur d’une artiste pas encore dans le moule. Un premier album qu’avec des compositions et des petits joyaux comme Fall Guy, Soul Eyes, Place to Hide, avec des musiciens excellents dont le batteur Vinnie Colaiuta. Prince qui a enregistré son premier single et l’a encouragée pour ce premier album disait d’elle : « Sa voix peut faire fondre la neige ». Pas que la neige…!
Le nouvel album The Women Who Raised Me
Pour son troisième disque qui vient de sortir, on retrouve toujours Larry Klein aux manettes. Mais cette fois, la jeune artiste s’attaque aux standards où se sont essayées les divas de la voix. Ce disque est d’ailleurs un hommage à ces « Femmes qui m’ont élevée ». Ella Fitzgerald, Billie Holiday, Diana Krall (à laquelle on la compare souvent), Nina Simone, Dusty Springfield, Bonnie Raitt ou encore Sade et Norah Jones qu’elle invite pour le titre Angel Eyes.
Angel Eye – Kandace Springs nouvel album
Côté reprises, il y a aussi du lourd : I Put A Spell On You de Jay Hawkins, Strange Fruit immortalisé par Billie Holiday ,Devil May Care en hommage au compositeur et chanteur de la scène new-yorkaise Bob Dorough décédé en 2018. On y retrouve aussi Killing Me Softly With His Song et le beaucoup moins connu Pearls de Sade. L’une des réussites du disque au groove subtil, aux nappes feutrées du Fender Rhodes de l’artiste et Avishai Cohen à la trompette. Et la voix de Kandace Springs qui s’envole.
Pearls – Kandace Springs nouvel album
Ce disque confirme toute l’étendue vocale et tout le talent de l’artiste. Il est moins surprenant que le premier Soul Eyes, mais il est encore plus maîtrisé. Pas de fioritures, pas de solos interminables ni de démonstrations vocales qui ternissent parfois ce type de production. Tout y est subtil et équilibré, les cuivres de David Sanborn Chris Potter et Avishai Cohen sont sublimes, la rythmique de ce trio parfaite, avec ce son si typique du label Blue Note. Incontestablement, cette jeune chanteuse fait désormais partie de celles qui compte et qu’il faudra suivre.
I Put A Spell On You – Kandace Springs nouvel album
Si vous voulez passer un moment musical hors du temps, sensuel et varié, vous laisser porter par le groove et une voix incomparable, alors c’est Kandace Springs qu’il vous faut.
Il aura été l’un des rares artistes assez prolifique durant ce confinement. Bob Dylan vient de sortir sur les plateformes de téléchargements 3 nouvelles chansons. Ce qui n’était pas arrivé depuis 2012. Le nouveau double album « Rough And Rowdy Ways » est annoncé pour le 29 juin. Et en plus, ces 3 nouvelles chansons sont plutôt bonnes.
Pochette du nouvel album
Nous avions laissé le Zim avec des reprises de Sinatra. Comme un aveu d’un manque d’inspiration, l’envie de faire une pause dans sa longue carrière. Mais que sait-il faire de mieux que d’écrire des chansons profondes, poétiques et pleines de sens?
Un morceau digne d’un prix Nobel de littérature, où l’on retrouve aussi une voix plus affirmée, même si l’interprétation n’a jamais été son point fort. Nouveauté du moment, le 3ème titre False Prophet sorti le 7 mai.
Un bon vieux blues sorti de derrière les fagots, servi sur un tempo impeccable et une voix rocailleuse. Autant dire que les 3 titres sont tous très différents et laissent augurer un nouvel album de très bonne facture.
Des amateurs qui chantent et qui jouent avec des pros de l’orchestre ou des chœurs de Radio France, c’est l’expérience très intéressante que proposait le service public radiophonique. Le blog Ecoute Voir faisait part de cette initiative le 29 avril. Après la Valse N°2 de Chostakovitch partagée avec l’Orchestre National, voici donc La Javanaise que vous pouviez chanter avec les jeunes choristes (Maîtrise) de Radio France et Jane Birkin. Beaucoup d’internautes amateurs ont relevé le défi.
C’est encore une fois un succès. Plus de 3600 vidéos reçues par les équipes de Radio France pour chanter La Javanaise de Gainsbourg. Auparavant, 4000 internautes avaient interprété la célèbre Valse N°2 de Chostakovitch. Un succès tel que 2 autres vidéos seront publiées courant mai.
La Javanaise chantée par Vous et Jane Birkin
La voix de Jane en avant, celles des amateurs en réponse, c’est encore une fois une version très singulière qui résulte de cette expérience. Des voix solos, des chœurs, Jane en avant, Jane en retrait, 645 choristes qui poussent derrière, le résultat est assez agréable.
Le mixage des voix devait être encore plus périlleux que pour les instruments, il est vrai que l’on entend plus les voix soprano que les mezzos ou les basses… Reste à savoir si Radio France mettra en ligne les autres vidéos comme elle le fera pour la Valse de Chostakovitch afin que chacun y retrouve son compte. Histoire d’éviter de la frustration du « J’avoue j’en ai bavé pas vous? », pour rien!
Sur le site de France Musique, Radio France et le Théâtre du Châtelet remercient les nombreux participants au projet Le temps d’une chanson. Ils concluent : « La musique et la chanson nous offrent ce terrain de rencontre rêvé ».
Bonus track : Gainsbourg, un compositeur très CLASSIQUE
Cette initiative Le temps d’une chanson est somme toute logique pour un artiste qui s’est toujours inspiré du classique et qui en écoutait beaucoup Frédéric Chopin.
Le morceau le plus évident est sans doute B.B. Initials où les cordes et le rythme rappelle le 1er mouvement de la symphonie N°9 d’Anton Dvorak (vidéo vers 1’45). Une déclaration d’amour a Brigitte Bardot très romantique sur fond de musique tchèque.
Beaucoup de titres de Jane Birkin ont aussi été inspirés par les compositeurs classiques. Notamment la très belle Lost Song empruntée au Chant de Solveig d’Edvard Grieg.
Lost Song Jane Birkin
Dernier exemple, le sulfureux Lemon Incest chanté avec sa fille Charlotte qui avait fait scandale à l’époque. On y reconnait la mélodie de l’Etude N°3 op.10 dite « tristesse » de Frédéric Chopin.
Lemon Incest Charlotte et Serge Gainsbourg (1984)
Gainsbourg avait trouve là une vraie source d’inspiration et une belle manière de faire découvrir la musique classique au grand public.
Le mois dernier, Valentin Vander proposait à d’autres artistes de jouer et chanter « La Tendresse » de Bourvil. Une Symphonie Confinée qui a fait un tabac. Il vient de récidiver avec des artistes du monde entier. Une vraie réussite, artistique et humaine. Le morceau a déjà un air de déconfinement : « Blowin’ in the Wind » de Bob Dylan. Avec la Symphonie mais aussi son groupe « Les Goguettes », Valentin Vander est porté par le vent… du succès!
La première « Symphonie Confinée » a dépassé les 3,6 millions de vues. Pas mal pour un rassemblement d’artistes sans têtes d’affiches. Depuis un mois, le confinement nous a valu plusieurs vidéos confinées d’artistes solo ou pas, parfois des nouvelles chansons. Mais cette initiative de Valentin Vander apporte un vrai plus : une fraîcheur, une originalité, une authenticité qui font du bien. Cette nouvelle version est un hymne à la diversité, à l’écoute, au partage malgré une conjoncture pas très rassurante.
Les débuts de la Symphonie Confinée
Je venais de sortir un disque quand mon quotidien artistique a été bouleversé. J’avais un rythme frénétique et j’ai eu peur du vide, de l’ennui… J’ai donc voulu proposer un challenge, un truc collectif et ambitieux. Vu qu’on ne peut plus rien faire, on va faire plus fort!
L‘occasion aussi de maintenir les liens avec les potes. Le parisien Valentin Vander se retrouve confiné en famille à Montclar (Gers). Très rapidement, il enregistre une base voix-guitare de « La Tendresse » de Bourvil et l’envoie aux artistes qu’il connaît. Pourquoi ce choix ?
Le travail est nécessaire mais s’il faut rester des semaines sans rien faire, eh bien… On s’y fait.
Comme une résonnance avec ce que l’on vit. Et pourquoi une « Symphonie Confinée »? « Je cherchais un titre punchy. On est bien des musiciens qui jouent ensemble donc le titre est approprié. Même si d’habitude c’est pour du Beethoven ou du Mozart! »
Le souffle de Blowin’ in the Wind et le soutien du manager de Bob Dylan
Valentin Vander ne pensait pas forcément à une deuxième symphonie. Mais il a eu des messages du monde entier après la publication de la vidéo de Bourvil. » S’il y avait un intérêt d’en faire une autre, c’était d’élargir à d’autres artistes du monde entier ». Oui mais sur quel titre? « C’est comme pour Bourvil. J’ai écouté Blowin’ in the Wind et tout colle parfaitement. Alors je me suis mis dans le contexte. J’ai lu des biographies de Dylan, écouté du folk américain. Il fallait que je m’imprègne. »
Il avait aussi ce rêve fou que Bob Dylan lui-même participe. Ca n’a pas été le cas mais son manager a donné son accord et encouragé l’initiative. Idem pour la maison de disques. Il ne restait plus qu’à envoyer un nouvel enregistrement guitare-voix de « Blowin’ in the Wind » à des relais dans le monde entier.
Une babel artistique
Pour ce nouvel opus, 70 artistes ont participé depuis les quatre coins du monde pour soutenir tous ceux qui se battent contre le coronavirus. « J’ai lancé un message comme une bouteille à la mer. C’est extraordinaire la générosité des gens alors que l’on ne se connaît pas. Ils vont prendre une demie journée pour participer au projet, sans savoir le résultat. On a eu des choses inattendues, des gens qui chantent en polonais, russe, italien, portugais… avec des musiciens du monde entier : Québec, Pologne, Rwanda, Australie, Espagne, Portugal, Brésil, Israël… »
Valentin Vander n’avait pas donné de consignes. Les artistes pouvaient jouer sur n’importe quel instrument et chanter dans n’importe quelle langue. Le résultat est vivifiant avec des instruments parfois surprenants, une multitude de langues et quelques interventions très rigolotes.
Des artistes français à découvrir
Aucun des 70 artistes de cette version 2 n’était intervenu sur la première vidéo. Mais on y retrouve quelques français, notamment d’Occitanie où Valentin Vander est confiné. « Ce sont 3 amis toulousains avec lesquels on joue souvent et on fait la fête. Il y a Aleth Chapoy-Favier qui est sophrologue et Rémi Laurent qui est un prof de piano. Puis j’ai demandé à Remy Gouffault qui est un très bon batteur de jazz. »
Dans la vidéo il y a beaucoup de clins d’œil. Comme ces 2 infirmiers de la région parisienne qui chantent sur leur lieu de travail… ou encore les artistes de la première vidéo qui reviennent juste le temps d’une phrase pour la version française.
Une vraie direction artistique
Si cette vidéo est autant plaisante, c’est parce-que les choix artistiques sont bons. « J’ai voulu changer le rythme de la chanson. Laisser la version originale à 2 temps pour faire quelque chose de plus oriental, qui se prête davantage à une symphonie. Recevoir des proposition d’Afrique, d’Amérique du Sud, d’Orient, c’est magique. C’est surtout réjouissant à l’oreille et un vrai plaisir! »
Si le projet était bien libre, le résultat est très cadré. Les timbres de voix sont typés, les percussions très riches, les guitares complémentaires et les cuivres très pertinents. « Je suis très sensible à la mélodie. Je cherchais la ligne mélodioque chants-contrechants la plus claire possible. C’est ce qui m’a guidé dans mon menage pour la vidéo finale. J’ai éliminé tout ce qui brouillait la mélodie. J’aime bien les trucs épurés. »
Une vraie direction artistique qui magnifie cette belle version et qui rend ce morceau maintes fois entendu, unique. Reste ensuite l’énorme travail de mixage que Valentin Vander a fait avec son père Paul Vanderhaegen. Le travail titanesque de montage vidéo réalisé par sa soeur Julia Vander et le mastering brillant de Nicolas Thevenin.
Cet opus 2 de la symphonie confinée est une belle réussite… Qui appelle une version 3?
Je n’aime pas me répéter donc je le ferais seulement s’il me vient une autre idée.
Dès que le confinement sera terminé, j’ai envie d’aller voir tous ces artistes, de jouer avec eux. Je me dis que la Symphonie Confinée aura été un pont extraordinaire pour aller jouer de la musique partout dans le monde!
Sa famille a annoncé hier soir le décès du chanteur kabyle Idir à l’âge de 70 ans. Ce fils de berger qui avait fait des études de géologie est arrivé dans la chanson un peu par hasard, mais aussi par conviction et par amour. On retiendra son engagement pour la culture kabyle et contre les obscurantismes religieux. Sur fond de grande humanité.
Hamid Cheriet est un enfant modeste du petit village d’Aït Lahcène (kabylie, Algérie). Une enfance bercée par la poésie, l’atmosphère magique des veillées familiales empreintes de traditions orales. Un terrain propice à la modestie et à l’écoute de l’autre. Plus tard, sous son nom d’artiste, Idir sera aussi un homme discret.
De sa voix chaude et envoutante, il a réussi à conquérir un public au-delà de son pays. En 1976, avec « A Vava Inouva » chanté en berbère, il a connu le succès dans près de 80 pays, traduit dans une quinzaine de langues. Un morceau sous forme de berceuse, le premier tube d’Afrique du Nord magnifié par sa voix chaleureuse, qui a fait prendre à sa culture natale une autre dimension.
La fraternité en étendard
Le parcours artistique d’Idir n’est pas une longue ligne droite sans cassures. Notamment par le fait qu’il a dû quitter son pays pour s’établir à Paris. Mais aussi parce-qu’il était loin du show-biz et de toute préoccupation carriériste. Plusieurs fois il a mis en suspens la musique, arrêté la production discographique, la scène. Mais il n’a jamais rangé ses valeurs. Notamment avec l’album « Identités » sorti en 99 où il invite Manu Chao, les Bretons Gilles Servat et Dan ar Braz, Zebda ou encore le grand chanteur Ougandais Geoffrey Oryema. Toujours la fraternité des peuples. Surtout quand les cultures sont minorisées.
Idir interprétant le Se Canta (occitan) à l’Etivada de Rodez
En 2007, en plein débat sur l’identité nationale, il sort un disque républicain « La France des couleurs » où il défend la diversité. Sa voix, ses chansons respirent l’ouverture, le partage, l’humanité, le voyage aussi. Comme le rapelle Le Monde, Pierre Bourdieu disait de lui : « Ce n’est pas un chanteur comme les autres. C’est un membre de chaque famille. »
Hommage de France 24
Un poète engagé des temps modernes
L’humanisme profond de l’homme se retrouve dans sa voix. Idir est avant tout un interprète. D’ailleurs en 2017 sur l’album « Ici et ailleurs », il reprend Lavilliers, Aznavour, Cabrel, en langue berbère. C’est aussi un musicien qui a d’abord appris l’instrument des bergers : la flûte. Viendra ensuite la guitare, puis les instruments traditionnels : bendirs, darboukas. Comme bon nombre d’artistes issus de cultures minorisées, il a pris les bases traditionnelles kabyles et les a modernisés. Tel des Nadau, Marti pour l’occitan, Dan ar Braz ou Malicorne chez les bretons, I Muvrini pour la Corse il n’a pas hésité à mettre de l’électrique, du moderne, sans renier quoi que ce soit.
En langue berbère, Idir signifie « Il vivra ». Cet admirateur de Brassens disait qu’une chanson valait 1 000 discours. Son oeuvre musicale n’est pas très quantitative, mais il aura marqué le paysage musical.
#idir son nom d’artiste était le prénom donné en Kabylie à l’enfant qui survit . Hamid Cheriet est parti , Idir lui survivra . Écoutez le encore et toujours