Répétition générale à moins d’un mois du départ du tour de France, le critérium du dauphiné a offert un formidable spectacle. Cristopher FROOME, vainqueur du tour 2013 et tenant du titre était présenté comme le favori de cette 66e édition. On attendait alors le duel avec l’espagnol Alberto CONTADOR, auteur d’un début de saison canon, et annoncé comme le principal adversaire de FROOME en juillet. Ils avaient auparavant opté pour la même préparation, à savoir un stage en altitude sur le volcain Teide à plus de 2000m d’altitude sur l’île des canaries. Les deux hommes ont accumulé les heures d’entraînement et les ascensions de cols pour se présenter dans un état de forme avancé sur ce dauphiné qui constituait leur deuxième face à face de la saison (après le tour de Catalogne).
Et le duel a bien eu lieu avec, dès la première étape, disputée en contre la montre dans les rues de Lyon sous une chaleur accablante, une démonstration du kényan blanc surpuissant sur son 56×11 ! A l’arrivée, il remporte l’étape et repousse CONTADOR, 2e à 8 secondes ! La 2e étape avec l’arrivée inédite au sommet du col du Béal dans le Puy de Dôme va offrir un scénario magnifique puisque FROOME, bien que maillot jaune, passe à l’offensive après avoir profité du travail toujours impressionnant de ses coéquipiers. Une première attaque, assis sur sa selle dans son style caractéristique qui fait mal à ses adversaires mais pas à CONTADOR, son principal rival. Cependant, FROOME est bien décidé à faire exploser l’espagnol et remet çà : cette fois il fournit un effort énorme ! Pendant 35 secondes, il teste CONTADOR qui répond du tac au tac… A l’arrivée, FROOME s’impose devant l’espagnol mais il n’a pas réussi à le lâcher… Le duel se rééquilibre avant de s’inverser en fin de semaine. Visiblement très en jambe, CONTADOR passe à l’offensive jeudi dans la 5e étape et oblige Richie PORTE, lieutenant du maillot jaune à s’employer. Bien que repris à l’amorce de l’arrivée, il prouve qu’il est bien décidé à faire la guerre au maillot jaune. Vendredi, une chute de FROOME dans une descente anodine va (sans doute) changer la face de ce dauphiné. Râpé sur tout le côté gauche, le britannique doit se faire poser deux points de suture au coudes. Il affirme cependant que tout va bien, ce que l’on est en passe de croire le lendemain dans l’étape reine de ce critérium du dauphiné. Bien entouré par son équipe, le maillot jaune semble serein à l’entame de la dernière ascension du jour : l’arrivée à Finhaut Emosson. Elle présente des pourcentages intéressants (8% de moyenne) et susceptibles de faire des écarts… Alberto CONTADOR l’a bien compris et place une attaque tranchante à 2 kms de l’arrivée. FROOME est planté et accusera à l’arrivée 20 secondes de retard. Il perd son maillot jaune au profit de l’espagnol qui marque des points psychologiquement dans le duel à venir. Les Sky décident alors de tout faire exploser le lendemain dans une dernière étape courte et nerveuse, mais ils se font piéger par les outsiders du classement général tels que Talansky, Van Garderen, Van den Broeck ou le français Romain Bardet, remarquable ! De plus, FROOME est dans un mauvais jour et, même s’il tente d’harceler le nouveau maillot jaune de la course, ce n’est plus le coureur du début de semaine. Alberto CONTADOR est lui esseulé et part dans un contre la montre de 30 kilomètres pour tenter de sauver son maillot jaune qui est sérieusement menacé par le talentueux Andrew TALANSKY. Il dépose FROOME mais ne parvient pas à sauver sa tunique de leader à l’arrivée à Courchevel le Praz, qui voit donc un américain remporter, à la surprise générale, une édition du dauphiné qui restera dans les mémoires. Alors justement, que doit-on retenir de ce dauphiné ?
Tout d’abord, le duel tant annoncé entre CONTADOR et FROOME aura bien lieu en juillet car les deux coureurs ont semblé au même niveau en montagne avec peut être même un léger avantage pour l’espagnol. Cependant, la chute de FROOME a sûrement faussé la véritable valeur du britannique en fin de semaine, que l’on a quand même vu très fort sur le chrono (une jambe au dessus de CONTADOR). On ne pouvait donc pas rêver meilleur scénario pour le tour de France qui s’élance de Leeds le 5 juillet. De plus, même si Alberto CONTADOR était bien seul en montagne cette semaine, il pourra compter sur une équipe plus compétitive sur le tour (avec ROGERS, ROCHE et KREUZIGER notamment). L’équipe Sky de Cristopher FROOME était, elle, bien à la hauteur avec un impressionnant roule-toujours (Vasil Kiryienka), un grand grimpeur (Mikel Nieve, vainqueur de la dernière étape) et un lieutenant en pleine forme (Richie PORTE). Il faudra maintenant que les deux favoris évitent les pièges de la première semaine et surtout la fameuse étape des pavés pour que l’on vive un tour de France passionnant.
Il sera d’autant plus passionnant que la course peut basculer a tout moment comme on a pu s’en apercevoir dans la dernière étape… Des outsiders aux dents longues peuvent venir jouer les trouble fêtes. On pense bien sûr au vainqueur de ce dauphiné Andrew TALANSKY, l’américain avait terminé 10e du tour 2013 et semble avoir franchi un palier en 2014 (notamment en montagne). Le belge Jurgen VAN DEN BROECK, auteur d’une saison 2013 blanche, a bien réagi et paraît à son niveau d’antan qui lui avait permis de terminer 4e du tour de France 2012. L’américain Tejay VAN GARDEREN est inconstant et enchaîne les pépins physiques mais il a déjà montrer qu’il avait le talent et la légitimité pour viser un podium à Paris. On ne parlera pas de podium pour Romain BARDET mais ce qu’il a montré sur ce critérium du dauphiné est très intéressant. Deuxième de la dernière étape et surtout 5e au général, l’auvergnat est épatant et pourra se cacher derrière son leader JC Péraud (un peu en retrait sur ce dauphiné) sur le tour pour mieux se révéler. On en oublierait presque que Vincenzo NIBALI était le 3e homme annoncé derrière le duel FROOME-CONTADOR, car le »requin de Messine » a paru en retrait cette semaine. Incapable de suivre en montagne lorsque le rythme s’élevait, il ne paraît pas encore à 100% et, à l’image de son début de saison discret, il a du mal à peser sur la course.
Voilà pour ce qui est des favoris et outsiders pour le sacre en Juillet et qui était présents sur cette 66e édition du critérium du dauphiné. Cette semaine, l’autre partie des hommes forts du peloton se teste sur le tour de Suisse (on y reviendra dans un prochain article).
Auryan GR