Plus de 6 semaines après le lancement du plan d’urgence exigé par la ville de Paris, jamais le nombre de vélib disponibles à la location n’a été aussi riquiqui : à peine 2.000 vélos sont actuellement présents en station. Et encore, les sites alternatifs, souvent plus fiables que le site vélib lui-même, estiment le nombre de vélib à seulement 1919 (velib.nocle.fr), un chiffre qui tombe même à 450 (velib.philibert.info) si l’on considère uniquement les vélibs empruntables : de ce point de vue, nous voilà revenu aux heures sombres d’avril quand l’ensemble du système était totalement en carafe. Il suffit d’ailleurs de se balader dans Paris pour constater l’absence flagrante de vélos en station. Mais où sont passés les vélibs ?
C’est très simple, ils sont en réparation ! Plus de 6.000 vélos sont dans ce cas. Et le service maintenance, pas du tout configuré à l’origine pour de tels flux, est totalement débordé. Comme prévu, au début du plan d’urgence, Smovengo a retiré en quelques jours la totalité des 3.000 vélibs alors présents en station mais in-empruntables, car déchargés. Rapidement, ils ont été remplacés par 3.000 vélos neufs : une bonne partie des problèmes informatiques et/ou techniques ayant conduit la précédente flotte à se décharger ayant été, soit disant, réglés, ces nouveaux vélos devaient pouvoir rouler un bon moment sans aucun problème. Que nenni. Ils ont dû être retirés à leur tour, comme on peut le constater sur cette photo (sans pour autant être volé, direction le Tiers Monde, hein…). Mais que se passe t-il donc ?
L’intox des Vélib’ volés « pour le tiers-monde » https://t.co/uIyN6GYFxQ pic.twitter.com/SEe60e6s50
— Les Décodeurs (@decodeurs) 18 juin 2018
En fait, les maux dont souffrent les vélibs version Smovengo sont profonds, et toujours pas réglés aujourd’hui, même si les équipes s’y attèlent, avec des recrues en nombre, notamment dans le département informatique. Et comme Smovengo n’a plus en stock de vélos neufs, ceux qui tombent en rade ne sont plus remplacés.
La plupart des problèmes sont liés, comme cause ou conséquence, au fameux bug du cadenas déjà identifié :
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- Les bornettes (ou diapason en langage Smovengo) vont devoir, pour la plupart, être remplacées. Les plus pessimistes parlent de la nécessité de changer l’ensemble des 24.000 bornettes. Officieusement, on se veut plus rassurant : seules quelques milliers le seront. Le chantier sera de toute façon colossal et prendra des semaines, voire plus, d’autant que Smovengo est fâché avec son prestataire de pose, Colas (voir plus bas). Mais pourquoi devoir remplacer les bornettes me direz-vous ?Disons que Smovengo peine à comprendre pourquoi la fourche cadenas, brevetée par les frères Mercat et qui a plutôt bien fonctionné ailleurs, ne marche pas à Paris. Il faut dire que l’ensemble du diapason a dû être modifié pour permettre la recharge du VAE (le vélo électrique, absent des précédents marchés décrochés par Smoove) et que, très clairement, suite à ces modifications, la fourche cadenas a perdu sa fiabilité.
Plus que l’électrification, le vrai prb du #velib c’est son cadenas, talon d’Achille du système #smovengo
► il combine les contraintes mécaniques, radio RFID & dynamiques d’insertion/sortie du #vélo
► sa version parisienne n’a pu être assez testée avant le 01/01/18 #velibgate https://t.co/Fl2rpxK7kd— Bertrand Lambert (@B_Lambert75) 11 mai 2018
Comme l’a bien relevé le blog Save ze Vélib’, Smovengo a fourni plusieurs explications, différentes d’une semaine à l’autre en fonction des interlocuteurs rencontrés. Et elles ne sont ni vraiment rassurantes, ni très cohérentes : au choix, un défaut de fabrication, un problème de vis mal positionnée, un écartement non conforme. Je rajouterai à cette liste une autre explication, liée directement à la pose effectuée par Colas (d’où le différent entre les deux entreprises).
On ne le dit pas assez mais la qualité de pose est essentielle au bon fonctionnement des bornettes : il y a un angle maximal vélo/bornette à respecter de façon impérative pour que le cadenas puisse se refermer correctement. Dans une pose en béton, comme c’est le cas à Paris, c’est assez compliqué à obtenir : il faut être très précis et prendre en compte la pente de la rue, son dénivelé, y compris au sein d’une même station. Ce qui, visiblement, n’a pas été fait correctement. D’où la nécessité, malgré les tentatives assez désespérées de limage des bornettes en mars-avril, de devoir re-poser une bonne partie des bornettes déjà bétonnées. Aïe aïe…
- Autre chantier d’ampleur à venir… et totalement passé sous silence jusqu’ici, le remplacement des batteries des V box, celles là même qui se déchargent à vitesse grand V lorsque la fourche cadenas ne parvient pas à se verrouiller. La recharge des micro batteries présentes dans la V-Box ne marche pas/plus. D’après mes informations, les vélibs connaissent en effet un gros problème de décharge profonde de leurs micro batteries lithium-ion. Au moins 9.000 V box seraient à réparer…
- Le système informatique est également en chantier, avec une nouvelle mouture testée normalement cette semaine, censée régler au moins deux problèmes majeurs :
1. l’horodatage. Quand les stations sur batterie tombent, faute d’énergie, le totem perd l’horloge et c’est tout le système de la station qui plante.2. la connexion 3G. C’est par ce biais que communiquent le totem et le data center, et donc que remontent les infos terrain. Une carte multi-opérateur fournit par Matooma, autre PME héraultaise, est installée dans chaque totem, mais il semblerait qu’elle ne commute jamais d’un opérateur à l’autre. Conséquence : des retards dans la mise à jour des départs/retours des vélos et donc des données affichées dans l’application vélib souvent sans aucun rapport avec la réalité.
- Les bornettes (ou diapason en langage Smovengo) vont devoir, pour la plupart, être remplacées. Les plus pessimistes parlent de la nécessité de changer l’ensemble des 24.000 bornettes. Officieusement, on se veut plus rassurant : seules quelques milliers le seront. Le chantier sera de toute façon colossal et prendra des semaines, voire plus, d’autant que Smovengo est fâché avec son prestataire de pose, Colas (voir plus bas). Mais pourquoi devoir remplacer les bornettes me direz-vous ?Disons que Smovengo peine à comprendre pourquoi la fourche cadenas, brevetée par les frères Mercat et qui a plutôt bien fonctionné ailleurs, ne marche pas à Paris. Il faut dire que l’ensemble du diapason a dû être modifié pour permettre la recharge du VAE (le vélo électrique, absent des précédents marchés décrochés par Smoove) et que, très clairement, suite à ces modifications, la fourche cadenas a perdu sa fiabilité.
@Velib Bonjour, est-ce normal que (au moins dans le 13e) votre app affiche toujours plus de velib en station qu’il y a en réalité ? pic.twitter.com/iS6GqjCVum
— Volker D. (@volkerddd) 12 juin 2018
Malgré un net changement de communication (désormais Smovengo reconnaît ses erreurs et les problèmes, ce qui totalement nouveau), et de braquet (ordre clair des priorités, recrutement…) suite à l’arrivée récente du spécialiste des entreprises en crise, Arnaud Marion, (tel le capitaine Flam, il est « celui qu’on appelle lorsqu’il n’y plus aucun espoir ») pour épauler le DG Jorge Azevedo, Smovengo est plus que jamais au pied du mur. Surtout que, selon mes informations, les actionnaires de Smovengo, et notamment Mobivia, font face à un réel problème de trésorerie et de cash qui pourrait rapidement avoir des répercussions sur les moyens alloués à Smovengo pour sortir de la crise.
Au pied du mur, Smovengo l’est plus que jamais. Le temps ne joue pas en sa faveur, même si, officieusement, le plan d’urgence est respecté à la lettre. Mais de tous les objectifs énoncés il y a six semaines, seul celui concernant le nombre de stations électrifiées semble pouvoir être tenu : il était, pour mémoire, de 800 stations en service dont 80 % électrifiées à la fin du mois de juin. A deux semaines du rendez-vous, nous en sommes, selon les sources, entre 748 et 751 stations, reliées entre 53% et 72% au réseau électrique.
Bertrand Lambert @B_Lambert75
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