30 Juin

A Toulouse, l’Orchestre de Poche emballe sur des rythmes d’Argentine

Ils sont 11 musiciens à rentrer dans l’Orchestre de Poche. Cette formation toulousaine regroupe tous les instruments d’un orchestre classique. Mais leur registre est tout aussi bien trad, world music, que musique de cinéma, répétitive… avec un esprit punk-rock. L’Orchestre de Poche vient de sortir un nouvel album « Paraná ». Son leader et créateur Bruno Coffineau était parti en Argentine pour voir des amis. Il est revenu de ce voyage avec… la dengue ! Mais surtout 13 morceaux soufflés par les rythmes argentins.  Rafraîchissant. 

Orchestre de Poche album « Paraná »

Les sons et les rythmes du nord-est de l’Argentine

Paraná c’est une seule inspiration, un voyage unique. Un album homogène.

Il y a 5 ans, Bruno Coffineau part de l’autre côté de l’Atlantique pour retrouver des amis Argentins. Direction le nord-est du pays, la Plata et l’envie forte d’aller se ressourcer aux chutes d’Iguazú, à la frontière entre l’Argentine et le Brésil. Pendant plusieurs jours, il installe sa cabane en pleine jungle et se laisse bercer par les sons des oiseaux, de la nature, les rythmes des courants.

Les chutes d’Iguazú Photo Bruno Coffineau

Musicalement, l’Argentine ce n’est pas que le tango à 4 temps de Buenos Aires. Il y a aussi le chamamé de la province de Corrientes (les courants). Un style influencé par les Indiens Guaranis (tambour, flûtes), les Polonais, Allemands et Italiens (accordéon) et l’Espagne (guitare). Une musique de Gaucho qui se danse en couple.

Là-bas, Bruno Coffineau se passionne pour ce style et découvre l’un de ses maîtres Chango Spasiuk, un virtuose de l’accordéon. « Il y a des rythmes différents que l’on connaît très peu en France. Sur Paraná par exemple, c’est du 5 temps. L’Argentine, c’est le pays de la danse. C’est la chose la plus importante. On part souvent danser en milonga, le lieu où l’on danse. Dès que les premières notes résonnent, des personnes âgées aux enfants, tout le monde s’y met ».

L’inspiration de l’album vient donc d’Amérique latine. Mais il n’a pas été composé là-bas. Quand Bruno Coffineau rentre en France, la dengue le rattrape. Cloué au lit, la fièvre du tango et du chamamé prennent le dessus. Les 13 thèmes de cet album lui viennent d’un coup.

L’esprit de l’Orchestre de Poche

Notre musique n’est pas une musique de virtuose. C’est une mosaïque, un vitrail, avec plein de petites pièces que nous assemblons.

Bruno Coffineau connaît bien et apprécie la musique classique, « Mais pas tout ce qui va autour ». Diplômé du Conservatoire de Poitiers, ce clarinettiste-chanteur a aussi appris la guitare et l’accordéon. Il veut rendre la musique plus accessible. Voyageur dans l’âme, il a plus d’un son dans son étui. « J’ai découvert les Sex Pistols, puis la chanson française à Paris. Quand je suis arrivé à Barcelone, c’était Manu Chao. De retour en France, les musiques tziganes et Goran Bregovic… » Installé dans la ville rose, il crée le Chœur gay de Toulouse, (composé exclusivement de voix d’hommes) et une autre chorale : le Cri du Chœur.

Voilà 6 ans, il décide de mettre un orchestre classique dans sa poche. Une formation avec les mêmes composantes qu’un orchestre classique (cuivres, cordes, percussions, vents) mais avec un seul musicien pour chaque instrument. « Dans la musique classique, les cordes sonnent comme des nappes. Il n’y a pas le son du violon. Moi je veux le grain, le timbre de chaque instrument et qu’il ne soit pas noyé dans l’ensemble. Je veux l’énergie du rock, des musiques du monde et autres traditionnelles. »

L’Orchestre de Poche au centre Culturel Alban Minville. Photo : Hubert Remaury

Pour retrouver cette énergie, il rajoute à sa formation guitare, batterie, accordéon et sax. Depuis le début, les instruments restent mais les instrumentistes changent en fonction des projets. Un peu de musique baroque pour le second album « Concerto ma non grosso » et les rythmes argentins pour « Paraná ». Il ne recherche pas la virtuosité du musicien mais la maîtrise de l’instrument doublée de qualités humaines.

De la pédagogie sur YouTube en attendant une tournée des kiosques

J’ai mis 3 ans à façonner le son que je voulais pour cet album

Depuis les confinement et déconfinement, Bruno Coffineau a déjà sorti 9 titres de sa poche. Des teasers avec une explication des morceaux mais aussi une contextualisation où notre pédagogue caméléon varie les styles de présentation en fonction du morceau. Toujours agréable d’écouter tout en apprenant des choses. Tout tourne autour du fleuve Paraná qui a donné son titre à l’album. Ici, « Atardecer en Corrientes », un coucher de soleil sur le fleuve !

L’Orchestre de Poche – Atardecer en corrientes

Pour chaque composition, on sent que tout par d’un thème qui est ensuite développé comme dans le jazz et repris comme dans les musiques répétitives. « Je change aussi de timbre, de hauteur. Je passe d’un mode majeur à un mode mineur. » A l’arrivée, une musique directe, humaine, assez expressive sur laquelle on se fait un film. « J’aime beaucoup René Aubry, Pascal Comelade, Michaël Nyman, Goran Bregovic, beaucoup d’artistes qui composent pour le cinéma ou la danse. Ca donne une musique très imagée. »

On sent aussi la patte de Yan Tiersen comme dans cette ballade « Esteros del Iberá ». « Oui, j’étais à Barcelone quand le film « Amélie Poulain » est sorti. »

Bruno Coffineau n’est pas peu fier de cet album. Avec L’Orchestre de Poche, il l’a enregistré chez chez Bruno Mylonas. Désormais installé dans les Pyrénées, cet ingénieur du son-réalisateur a entendu sur sa console beaucoup de vedettes de la variété française (Lavilliers, Vanessa Paradis, Jean-Michel Jarre, Michel Polnareff…) lorsqu’il était à Paris. Le mastering du son est signé par un autre grand nom : Michel Geiss.

Le studio de Bruno Mylonas dans les Pyrénées

L’album est riche, bien équilibré, avec de très belles sonorités. Il n’est pas encore sorti sur les plateformes de streaming mais peut se commander sur le site et s’écouter sur le soundcloud du groupe. « Paraná » va aussi partir en tournée, même si le contexte de pandémie et la grandeur de cette formation n’aident pas. « A 11 musiciens, c’est très compliqué. Mais nous sommes une formation acoustique. Donc nous pouvons jouer partout. D’où cette idée des kiosques à musique où l’on pourrait jouer et faire danser comme à la Belle Epoque. » Première date le 19 septembre au kiosque de Villemur-sur-Tarn pour les journées du patrimoine. L’Orchestre de Poche travaille aussi sur un projet sur toute l’Occitanie pour jouer dans des lieux liés au patrimoine de la région. En attendant de revenir sentir les effluves des chutes d’Iguazú pour danser en milonga sur l’autre rive de l’Atlantique.

J’aimerait amener le projet Paraná en Argentine. Soit avec des musiciens sur place, soit avec ceux de l’Orchestre de Poche. C’est la finalité.

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Benoît Roux